"Les confinements ont radicalisé les addictions aux écrans" (Richard Delorme)

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18 Jan 2016 17:24 - 18 Jan 2016 21:30 #15693 par Loys

Ce sont les trois piliers des peu curieux du jeu vidéo : le jeu vidéo rend violent, le jeu vidéo rend addict et le jeu vidéo c’est pour les bébés, ça n’a aucune valeur culturelle.

Une chose est sûre : les jeux vidéos sont souvent violents, ils peuvent être liés à une "pratique excessive" et leur intérêt culturel est souvent douteux.
Par exemple, selon cette étude , le temps moyen de jeu vidéo est de 0h35 par jour pour les 8-12 ans américains (0h37 pour les 13-18 ans), mais de 1h46 (2h13) pour ceux qui pratiquent les jeux vidéo.
Pour le reste nul doute que le jeu vidéo ne provoque pas l'addiction comme l'héroïne. Reste à savoir s'il s'agit d'une question de nature ou de degré. Le sucre est addictif sans provoquer d'addiction. Il est quand même regrettable que l'article ne mentionne pas les problèmes induits par une "pratique excessive" (terme de l'académie de médecine).

Alors à votre avis, de quel côté est le jeu vidéo ? Bravo, du côté des dépendances. C’est pas compliqué : si une immense majorité de gens pratiquent le jeu vidéo sans se trouver en état de manque dès qu’ils s’arrêtent, c’est que le souci se situe autre part. Pour résumer, il serait impossible de dire « la majorité des consommateurs réguliers d’héroïne ne sont pas des addicts » mais on peut dire « la quasi-totalité des gens qui jouent aux jeux vidéo ne sont pas des addicts ».

C'est tout de même maladroit de laisser penser que le problèmes de drogue ne viennent que des drogues...

Et si le jeu vidéo a des caractères qui prêtent tout à fait le flanc à ce que les anglais appellent l’escapism : l’envie de fuir la réalité (mot dont le premier usage attesté date de 1933, utilisé à l’époque pour parler du cinéma), il n’en est pas moins certain qu’il serait tout à fait déraisonnable de le craindre par défaut. Tout comme il existe des formes de dépendance aux séries télévisées, aux réseaux sociaux ou aux livres (si si) il en existe au jeu vidéo (le jeu de plateau et les jeux physiques comme le football sont généralement moins touchés car ils sont des pratiques sociales).

C'est malheureusement réduire - à dessein - à un seul élément (l'évasion) tout ce qui peut rendre le jeu vidéo addictif. L'évasion est curieusement rattachée à "l'instantiation", présentée de façon positive et négative. Paradoxalement, même sa dimension négative est niée ensuite :

C’est cette instantiation qui pose parfois souci. Car ces rares problèmes de dépendance problématiques apparaissent souvent chez des personnes abandonnées ou qui se sentent oubliées, peu considérées ou peu reconnues à leur juste valeur. Et quoi de mieux qu’un monde fictif pour s’échapper ? Et là où vous, moi et nos grand-mères nous lasserions d’un jeu au bout de quelques dizaines de parties, eux s’y noieront sans répit de façon à ne se laisser aucun moment pour reprendre souffle dans une réalité qu’ils trouvent sordide… Quand le monde ne vous aide plus, il est parfois plus simple de s’aller promener dans des contrées où tout le monde vous appelle « Héroïne » ou « Sauveur ».

Il n'y aurait donc rien dans les jeux qui expliquerait que les joueurs en général jouent longtemps (aux jeux en général, sur mobile, console ou ordinateur) : 20% des garçons de 8-12 ans entre 2h et 4h par jour et 10% plus de quatre heures par jour (13-18 ans 17% et 14%).

Bon, vous avez une ado à la maison qui joue trop ou vous connaissez un retraité qui passe sa vie sur « Candy Crush »… Que faire ? J’ai appelé au secours Vanessa Lalo, psychologue clinicienne plutôt spécialiste du sujet...

Spécialiste de la défense du jeu vidéo, surtout...

... pour lui demander quoi faire et elle a une réponse qui fonctionne bien : « Pourquoi ? »

Le jeu vidéo ne peut pas être un problème par lui-même.

Alors qu’une vrai addiction se soignera plutôt avec des cliniques de réhabilitation et des traitements d’éloignement, selon Vanessa, la première chose à faire quand quelqu’un joue trop c’est de se demander « C’est quoi “trop”...

Histoire de relativiser. 10% de 8-12 ou 14% des 13-18 ans qui jouent plus de 4h par jour, ce n'est sans doute pas "trop".

et pourquoi ? ». Puisque toutes les dépendances sont connectées à des problèmes personnels, il faut les trouver et les explorer.

La console dans la chambre pourrait être un début de réponse... :santa:

Vous avez peut-être déjà vu cette phrase dans des pubs qu’on m’a déjà citées comme démonstration… Mais si les marketeux ont bien compris que beaucoup de gens désiraient cet état un peu suspendu dans le temps dans lequel on ne réfléchit pas (état que nous avions décrit dans cet article) et qu’ils essaient de vendre de l’addiction comme si c’était une bonne chose (hint, ça n’en est pas une), il est fortement déconseillé de se tourner vers un département marketing pour comprendre les complexités de la psyché humaine.

C'est pourtant une piste intéressante...

Donc voici la conclusion : l’addiction au jeu vidéo n’existe pas, les gens qui parlent d’addiction au jeu ne savent en général pas de quoi ils parlent mais le jeu excessif existe (quoiqu’il soit vraiment rare)

Ah quand même, le "jeu excessif". "Rare" 10 et 14% ? (On n'inclut pas ceux qui jouent entre deux et quatre heures par jour).

Pas d’écran du tout avant 3 ans.
Pas de jeu connecté au Net avant 6 ans ça inclut les pubs et les achats.
Pas de jeu multi-joueur avant 7 ans sans accompagnement.
Jusqu’à 18 ans : soyez curieux de ce à quoi jouent vos enfants. Parlez-en avez eux, comprenez ce qu’ils aiment et n’aiment pas dans les jeux derrière l’apparence qui sans aucun doute vous rebutera parfois… Et jouez vous-même, jouez un peu, au moins pour comprendre, car le jeu est un qualia, c’est-à-dire qu’il ne se comprend pas sans le pratiquer (et ça vous facilitera la tâche pour la sélection des cadeaux).

A part la première recommandation, aucune recommandation donc sur le temps d'écran.
Dernière édition: 18 Jan 2016 21:30 par Loys.

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27 Oct 2016 19:57 #17533 par Loys

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01 Sep 2017 19:18 - 01 Sep 2017 19:35 #19529 par Loys
Dans "The World - weekly" (en anglais) du 31/08/17 ( "Digital addiction" ), un professeur de sociologie à l'université de Kent, Franck Furedi, relativise la pratique des écrans avec cet argument :

“Reading addiction in the 18th century was a veritable moral panic. Today, concern with people spending too much time on the net is also medicalised,” he says. “That individuals may have problems with digital technology is not in doubt - but the diagnosis of 'digital addiction' is a simplistic formula for condemning behaviours that we don’t like."

L'argument est développé par le même auteur dans un article de "History today" (en anglais) du 11/11/15 : "The Media’s First Moral Panic"

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Dernière édition: 01 Sep 2017 19:35 par Loys.

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01 Sep 2017 20:10 - 01 Sep 2017 20:34 #19530 par Loys
Il est grave de constater à quel point M. Furedi compare ce qui n’est pas comparable : une prétendue « addiction à la lecture » (« une dangereuse maladie ») aurait été unanimement condamnée au XVIIIe siècle sans que M. Furedi donne la moindre citation précise à l’appui d’une telle affirmation. La simple consultation des sources imprimées n'en montre aucune trace...

M. Furedi se contredit d’ailleurs immédiatement puisqu’il affirme ensuite que ce sont « les conséquences de la lecture » d’une part de romans d’autre part qui posaient problème (l’effet du roman sur les comportements individuels et sur l’ordre moral de la société). Enfin, très précisément d’un certain roman particulier (Les Souffrances du jeune Werther) qui aurait été accusé de susciter un certain engouement pour une forme de suicide romantique.
La condamnation de ce roman est interprétée par M. Furedi comme une condamnation de la lecture:roll:
La confusion est savamment entretenue dans tout l’article, à rebours de toute rigueur scientifique. De la même façon que la « panique morale » (expression psychologisante visant à discréditer toute critique) est un anachronisme bien mal défini, tout comme ce que M. Furedi appelle « les médias » : « les autorités », des écrivains et des poètes, l’université théologique de Leipzig, le conseil de la ville de Leipzig, un pasteur protestant, un évêque de Milan, un magazine anglais.
Le glissement continue avec les jeux vidéos en ligne chez d'autres commentateurs. :shock:
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Dernière édition: 01 Sep 2017 20:34 par Loys.

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03 Sep 2017 16:08 - 03 Sep 2017 17:58 #19540 par Loys
On peut même aller plus loin :
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Source : "Rapport préparatoire à la Conférence de la famille 2004 - Adolescence, familles et loisirs" (2004)
La conclusion victorieuse mise en exergue par M. Leroux est tirée de l'enquête "Les jeunes et la culture de l'écran. Enquête nationale auprès des 6-17 ans" (1999) de Dominique Pasquier.
C'est une enquête très ancienne (menée il y a vingt ans, en 1997) et qui semble dépassée aujourd'hui pour ce qui concerne les pratiques actuelles. La télévision était le média dominant, Internet n'était pas recensé dans les activités pratiquées, on y parlait encore de Walkman et le Minitel y était encore considéré comme un "média nouveau". Seuls 8% des jeunes disposaient d'une connexion à Internet : un tiers des jeunes n'ont même pas entendu parler d'Internet et seuls 17% l'ont déjà utilisé. A noter que l'équipement d'ordinateur ou de téléviseur dans la chambre était déjà largement supérieur chez les jeunes les plus défavorisés.
Mais peu importe cette obsolescence : la lecture attentive de cette étude nous apprend certains faits et précisions que M. Leroux oublie de signaler : "L'analyse des relations entre les perceptions de l'environnement et les pratiques des médias montre que les utilisateurs très intensifs en termes de durée de télévision, d'ordinateur ou de consoles de jeux vidéo sont proportionnellement plus nombreux à déclarer s'ennuyer à l'école, à s'entendre moins bien avec leurs parents et à trouver qu'il n'y a pas assez de choses à faire là où ils vivent. Les lecteurs de livres développent le profil inverse. En revanche, les utilisateurs intensifs des médias d'écran ont des pratiques de sociabilité amicale plus actives que celles des lecteurs de livre, et ils développent de meilleures perceptions d'eux-mêmes." (p. 70)
"les jeunes qui jouent longtemps sont davantage en opposition avec le monde scolaire" (pp. 72-73) : "une petite partie d'utilisateurs très intensifs vivent les écrans et leur environnement comme deux univers opposés. Le phénomène est net à propos de l'école qu'ils n'aiment pas et où ils disent s'ennuyer. Ce rejet du monde scolaire, lui-même dominé par la culture du livre, est -il une cause ou une conséquence de la plus forte attraction des écrans ? C'est évidemment impossible à trancher [...] Il en est de même avec les relations avec les parents et les perceptions du quartier : elles sont indéniablement dégradées chez ceux qui pratiquent intensivement les écrans [...] les médias servent de support à la sociabilité : on notera que les gros consommateurs de télévision en semaine, de jeux vidéo et/ou dans une moindre mesure d'ordinateur ont une sociabilité de groupe plus importante que la moyenne des enfants interrogés et surtout que celle des gros lecteurs de livres. En revanche ils passent moins de temps libre en famille ou seuls."
Il ne s'agit donc que d'une sociabilité amicale, et à une époque où Internet n'existait pas. Et elle se fonde sur la fréquence, pas sur la durée... Par ailleurs, en effet, la lecture est une activité plutôt solitaire...
En 1997, 30% des garçons de 6-17 ans jouaient aux jeux vidéo plus de deux heures par jour : en 2008, le nombre d'heures quotidiennes de jeux vidéos des garçons au collège est de - en moyenne - entre 2,5 et 2,8 ans. Bref on peut se demander si les "utilisateurs intensifs" ne sont pas devenus la norme.
Dernière édition: 03 Sep 2017 17:58 par Loys.

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29 Déc 2017 15:02 - 13 Jan 2018 14:55 #20284 par Loys
www.francetvinfo.fr/culture/jeux/l-addic...r-l-oms_2533717.html
www.franceinter.fr/societe/l-addiction-a...t-reconnue-par-l-oms

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Réaction de Serge Tisseron dans "The Huffington Post" du 11/01/18 : "4 problèmes que pose la reconnaissance de l'addiction aux jeux vidéo comme maladie"

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Dernière édition: 13 Jan 2018 14:55 par Loys.

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13 Jan 2018 14:42 #20357 par Loys
Réaction de la Higher Education Video Game Alliance (HAGVA) : hevga.org/article_writeups/higher-educat...ons-gaming-disorder/
Traduite et publiée sur son site par Yann Leroux (13/01/18) : www.psyetgeek.com/lalliance-jeux-video-d...du-jeu-video-de-loms

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15 Fév 2018 14:28 - 15 Fév 2018 20:49 #20547 par Loys
Tribune de Bruno Rocher et Jean-Pierre Couteron, addictologues, dans "Le Monde" du 15/02/17 : "Il n’est pas question de diaboliser le jeu vidéo »"


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Voir aussi :

www.letemps.ch/societe/smartphone-une-dr...uche-surtout-enfants
www.franceculture.fr/emissions/la-method...tous-accros-a-lecran
Dernière édition: 15 Fév 2018 20:49 par Loys.

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21 Fév 2018 10:52 - 21 Fév 2018 11:26 #20566 par Loys
Le 19/02/18 dans "Sciences et avenir" : ""Le bon usage des écrans" : une campagne d'info contre les usages trop intensifs"


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Le but de cette tribune est bien de relativiser le communiqué de l'OMS sur le "trouble du jeu vidéo" :

Doit-on pour autant parler d'une "addiction" aux écrans? Non! "Pour tous les psychiatres et neuroscientifiques, l'usage des écrans ne saurait être considéré comme un comportement addictif, juge Pierre-Marie Lledo, directeur du département des neurosciences à l'Institut Pasteur, membre de l'Observatoire du bon usage des écrans de l'IEMP."


Et donc de désamorcer tout discours critique pouvant mettre en cause une industrie, celle du jeux vidéo. Rappelons que l'industrie du jeu est partie prenante du collectif "PédaGoJeux" : "L'idée de toute cette réflexion collective n'étant pas d'interdire les écrans mais d'apprendre à vivre (bien) avec !"

Dans cette logique, les écrans (le design des jeux, le marketing) n'ont aucune responsabilité dans les "usages trop intensifs" : le problème est le manque d'éducation aux bons usages des écrans. On ne s'étonnera pas d'une Daphné Bavelier, chercheuse mais également lobbyiste du jeu vidéo en France, se félicitant d'une telle campagne. Ou du relativisme d'un Stanislas Dehaene : "[les écrans] n’ont pas des effets généraux, ils peuvent être positifs ou négatifs selon les contenus". Certes : mais dans la réalité des usages, avec ou sans "éducation" ? Grand Theft Auto est déconseillé aux moins de 18 ans mais des enfants de moins de dix ans y jouent régulièrement.

Quelles statistiques d'ailleurs sur l'évolution des usages des écrans (durée, précocité), et sur celle - plus inquiétante - des usages considérés comme "trop intensifs" ? Le collectif ne communique pas à ce sujet.

A noter qu'un usage "intensif" ne semble pas poser de problème par lui-même. On retrouve une formulation analogue dans l'Avis de l'Académie des sciences de 2013 évoquant un "usage trop exclusif" (sic).

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Dernière édition: 21 Fév 2018 11:26 par Loys.

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02 Mar 2018 11:36 - 02 Mar 2018 22:11 #20607 par Loys
Tir de barrage des éditeurs : www.lesechos.fr/tech-medias/hightech/030...ddiction-2157678.php


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Voir aussi : www.lequotidiendumedecin.fr/actualites/a...-etude-lappui_855649

Clé utilisateur/ secrète de la configuration non valide

www.lesnumeriques.com/loisirs/jeux-video...-sociales-a3587.html
Dernière édition: 02 Mar 2018 22:11 par Loys.

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