Les troubles chez les tout-petits exposés aux écrans

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11 Jan 2021 21:55 - 12 Jan 2021 07:39 #23112 par Loys
14/01/20 : "L’exposition aux écrans chez les jeunes enfants est-elle à l’origine de l’apparition de troubles primaires du langage ? Une étude cas-témoins en Ille-et-Vilaine" par Manon Collet, Bertrand Gagnière, Chloé Rousseau, Anthony Chapron, Laure Fiquet, Chystèle Certain.

Résumé
Contexte –
Les enfants sont exposés précocement aux écrans, alors que cet usage peut influencer leur développement psychomoteur.
Objectif –
Évaluer le lien entre l’exposition des enfants aux écrans, tels que la télévision, l’ordinateur, la console de jeux, la tablette ou le smartphone, et les troubles primaires du langage.
Méthode –
Notre étude multicentrique cas-témoins a concerné 167 enfants âgés de 3,5 à 6,5 ans, nés entre 2010 et 2012 et diagnostiqués avec des troubles primaires du langage, et 109 témoins ne présentant pas de trouble du langage. Les questionnaires ont été complétés par leurs parents, recrutés via 16 cabinets de médecine générale et 27 cabinets d’orthophonistes en Ille-et-Vilaine. Les données ont été analysées à l’aide de modèles de régression logistique multivariée et présentées sous forme d’odds ratio ajustés (ORa) avec leurs intervalles de confiance à 95% (IC95%).
Résultats –
Nous avons constaté que les cas (44,3%) et les témoins (22,0%) qui étaient exposés aux écrans le matin avant l’école étaient trois fois plus à risque de développer des troubles primaires du langage (ORa=3,40, IC95% [1,60-7,23]). Et lorsque ce risque était associé au fait de discuter rarement, voire jamais, du contenu des écrans avec leurs parents (ORa=2,14 [1,01-4,54]), ils étaient six fois plus à risque de développer des troubles primaires du langage (ORa=5,86 [1,44 à 23,95]).
Conclusion –
Les enfants qui étaient exposés aux écrans le matin avant l’école et qui discutaient rarement, voire jamais, du contenu des écrans avec leurs parents multipliaient par six leur risque de développer des troubles primaires du langage.


Curieusement (ou non), Yann Leroux, s'appuyant sur cette conclusion, se réjouit donc :

Ce ne sont pas les écrans en soi qui sont des obstacles (ou des aides) au développement des enfants, mais l'écologie familiale dans laquelle ils sont pris.


Clé utilisateur/ secrète de la configuration non valide

Parce que l'introduction d'écrans dans les mains des enfants les plus jeunes ne relève pas de "l'écologie familiale" et que les écrans n'influent absolument pas sur la communication dans la famille. :santa:
Dernière édition: 12 Jan 2021 07:39 par Loys.

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24 Juil 2022 11:59 - 27 Oct 2022 15:18 #24004 par Loys
23/11/20 : "Screen time and autistic-like behaviors among preschool children in China" par Jing-Yi Chen, Esben Strodl, Chuan-an Wu, Li-Hua Huang, Xiao-Na Yin, Guo-Min Wen, Deng-Li Sun, Dan-Xia Xian, Ying-Jie Chen, Gui-You Yang & Wei-Qing Chen.

ABSTRACT

Screen time is becoming increasingly common in daily life. Early and excessive screen use has raised growing concerns for children’s neuropsychological development. The purpose of this study was to evaluate the association between exposure to screen time in early life and the presence of autistic-like behaviors among preschool children. 29,461 child-caregiver dyads at kindergartens in Longhua New District of Shenzhen, China, were enrolled in this cross-sectional study. Information concerning socio-demographic characteristics, frequency and duration of children’s electronic screen exposure for each year since birth, and autistic-like behaviors (measured by the Autism Behavior Checklist) were collected using a self-administered structured questionnaire completed by the primary caregivers. A series of logistic regression models assessed the association between screen time and autistic-like behaviors. Results indicated that younger initial age, longer daily screen time and longer cumulative years of screen exposure since birth were associated with the presence of autistic-like behaviors at preschool age. The risk was enhanced with the increase of both daily screen time and cumulative years of screen exposure during preschool period. Moreover, the cross-over analysis indicated that the first three years following birth might be a sensitive period for children when screen exposure increases the risk of experiencing autistic-like behaviors. In conclusion, our study implied that screen exposure in early life might increase the occurrence of autistic-like behaviors among preschoolers. These findings support the need for early interventions into preschoolers’ screen use, however longitudinal studies are necessary to further confirm the causal relationship between early screen time and the incidence of later autistic-like behaviors among preschool children.


16/02/21 : "Correlation Between Screen Time and Autistic Symptoms as Well as Development Quotients in Children With Autism Spectrum Disorder" par Han-Yu Dong†, Bing Wang†, Hong-Hua Li, Xiao-Jing Yue and Fei-Yong Jia*, Department of Developmental and Behavioral Pediatrics, The First Hospital of Jilin University, Changchun, China.

Conclusion: Compared with TD (typically developing) children, children with ASD (autism spectrum disorder) have a longer screen time. The screen time is related to autism-like symptoms and the DQs (development quotients) of children with ASD. The longer the screen time, the more severe the symptoms of ASD (especially sensory symptoms), and the more obvious the developmental delay, especially in ASD children with a longer screen time and younger age, particularly in the language domain.


14/10/21 : "The Association Between Screen Time Exposure and Autism Spectrum Disorder-Like Symptoms in Children "

Conclusion
Our study highlighted a significant association between the daily hours spent on devices and having an SCQ score above 15, which suggests a deficit in social skill development and having autism spectrum disorder-like symptoms.


11/21 : "Correlation between screen exposureand children autism spectrum disorder"

Conclusion ASD may be related to screen media exposure. Children should avoid exposure to screen media before 2 years old, or control children's exposure to music or appropriate animation media for less than 1 hour a day under the interaction of family members after 2 years old.


31/01/22 dans "JAMA" : "Association Between Screen Time Exposure in Children at 1 Year of Age and Autism Spectrum Disorder at 3 Years of Age" par Megumi Kushima, MA1; Reiji Kojima, MD, PhD2; Ryoji Shinohara, PhD1; et al.

Findings

A total of 84 030 mother-child dyads were analyzed using data derived from a large birth cohort study conducted in Japan. Among boys, but not girls, longer screen time at 1 year of age was significantly associated with autism spectrum disorder diagnosis at 3 years of age.

[...]

Conclusions and Relevance

Among boys, longer screen time at 1 year of age was significantly associated with autism spectrum disorder at 3 years of age. With the rapid increase in device usage, it is necessary to review the health effects of screen time on infants and to control excessive screen time.


Dernière édition: 27 Oct 2022 15:18 par Loys.

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12 Oct 2022 23:14 - 04 Jan 2024 15:52 #24134 par Loys
2022 : "Temps d’exposition aux écrans et grapho-motricité des enfants de 5 à 6 ans - Étude épidémiologique transversale, Auvergne-Rhône-Alpes, 2019-2020" par Alexandre André, Odile Cochetel.

Résultats : 127 enfants ont participé à l’étude. Celle-ci montre que les enfants passant plus de 10 heures en semaine d’école (plus de 20 heures en semaine de vacances scolaires) sur écran ont des habiletés grapho-motrices significativement plus faibles. Indépendamment du temps d’exposition aux écrans, un enfant vivant avec un parent seul, et/ou de faible niveau d’études, et/ou de profession/catégorie socio-professionnelle intermédiaire, a des scores d’habiletés grapho-motrices plus bas. Le milieu rural de l’école semble jouer un rôle positif sur le niveau des habiletés grapho-motrices, tandis que le profil socio-démographique de l’école et l’assiduité des enfants ne semblent pas influencer ces compétences. Conclusion : Notre étude montre une association significative entre augmentation du temps d’exposition hebdomadaire aux écrans et diminution des habiletés grapho-motrices chez les enfants de 5-6 ans. D’autres travaux seront nécessaires pour explorer cette association. Des programmes d’éducation en santé dans le milieu scolaire, sanitaire et auprès des parents, seraient utiles afin d’améliorer l’usage des écrans et prévenir les troubles d’apprentissage.



Dans "Le Monde" (abonnés) du 12/10/22 : "Les tout-petits qui bougent sont plus performants"


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Dernière édition: 04 Jan 2024 15:52 par Loys.

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14 Sep 2023 21:10 - 02 Oct 2023 13:56 #24685 par Loys
Dans le Journal of psychiatric research de mai 2023 : "Association between screen time and developmental and behavioral problems among children in the United States: evidence from 2018 to 2020 NSCH"

Abstract

Excessive digital media use has become the common phenomenon among children's lifestyle, and its influences on the plausible accompanying psychological and behavioral problems are gradually investigated. This study aimed to examine the association between screen time and developmental and behavioral problems of children in the United States (US). A secondary analysis based on the data from the 2018 to 2020 National Survey of Children's Health (NSCH) was conducted. Seven types of developmental and behavioral problems and screen time on weekdays of children were collected through parents/caregivers' recall. Logistic regression models were constructed to determine the associations. Overall, 101,350 children aged between 0 and 17 years old were included in this study and 70.3% of preschoolers aged 0–5 years old and 80.2% of children and adolescents aged 6–17 years old had excessive screen time. Excessive screen time was positively associated with behavioral and conduct problem, developmental delay, speech disorder , learning disability , autism spectrum disorders (ASD), and attention deficit hyperactivity disorder (ADHD) and there were significant dose-response relationships. The association between excessive screen time and developmental and behavioral problems was stronger among preschoolers than among children and adolescents. Boys with excessive screen time showed high odds of most types of developmental and behavioral problems. It can be concluded that children with excessive screen time are at high odds of developmental and behavioral problems, especially for preschoolers and boys. Early intervention of digital media use is urgent and essential for children in the US.

Dernière édition: 02 Oct 2023 13:56 par Loys.

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25 Sep 2023 23:43 - 08 Jan 2024 13:21 #24706 par Loys
Le 29/08/23 dans "The Journal of child psychology and psychiatry" : "Associations of screen use with cognitive development in early childhood: the ELFE birth cohort" par Shuai Yang, Mélèa Saïd, Hugo Peyre, Franck Ramus, Marion Taine, Evelyn C. Law, Marie-Noëlle Dufourg, Barbara Heude, Marie-Aline Charles, Jonathan Y. Bernard.

ConclusionsOur study found weak associations of screen use with cognition after controlling for sociodemographic and children's birth factors and lifestyle confounders, and suggests that the context of screen use matters, not solely screen time, in children's cognitive development.



Dans "Le Monde" du 14/09/23 : "L’impact des écrans sur le développement de l’enfant dépend de l’environnement familial et du mode de vie, selon une étude"


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Étonnante Séverine Erhel ("Queen des #IHM #Gaming #Flow #UX") qui déplore :"Il serait judicieux qu'on arrête de donner des tribunes à des personnes qui  ne sont pas chercheurs sur cette question mais à des personnes sérieuses".

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"Très clairement, AUCUN chercheur sérieux ne recommande 4H ou JNSP" : on se demande ce que vient faire ici cette affirmation inutile, en effet, sauf à construire un argumentaire imaginaire facile à réfuter. En revanche, on peut se souvenir que Séverine Erhel a longtemps insisté sur le fait que la durée d'exposition était sans importance (en 2019 : "Le problème, ce n’est pas les écrans, ni le temps écrans" )

Pour le reste, Séverine Erhel renvoie donc à un simple fil Twitter qui conteste le bien-fondé... d'une étude scientifique publiée dans une revue scientifique (que nous avions référencée plus haut). Voilà qui est très "sérieux" en effet.
Dernière édition: 08 Jan 2024 13:21 par Loys.

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07 Nov 2023 21:30 - 08 Jan 2024 13:48 #24793 par Loys
09/2023 sur "Science Direct" : "The association between screen time and genetic risks for neurodevelopmental disorders in children" par Nagahide Takahashi et alii.

Highlights
Longer screen time in infancy has been proposed as a risk for neurodevelopmental disorders .
Using ongoing longitudinal cohort data, the genetic risk of ASD is associated with the length of screen time.
Prolonged screen time may not be a cause of ASD, but may be an early sign of the developing disorder.

Abstract
Whether longer screen time in infancy increases risk of neurodevelopmental disorders (NDDs) such as autism spectrum disorder (ASD) and ADHD has long been debated, but no causal relationship between the two remains has been established. Using ongoing longitudinal cohort data, we found that in children 24 to 40 months of age, the genetic risk of ASD was associated with longer screen time and that of ADHD with an increase in screen time over time. These data suggest that prolonged screen time may not be a cause of the genetic risk for NDD, but an early sign of NDDs.

Franck Ramus le 7/11/2023 : ramus-meninges.fr/2023/11/07/les-ecrans-...ositions-genetiques/

Depuis 2017, le Dr Anne-Lise Ducanda propage un discours catastrophiste sur l’exposition des enfants aux écrans, arguant du fait qu’une telle exposition pourrait rendre des enfants autistes.

Cirons la décision rendue par la Chambre disciplinaire de première instance d’Île de France de l’Ordre des Médecins à l'égard d'Anne-Lise Ducanda à la suite d'une plainte de parents :

«  Il ne ressort d’aucun document… que le Dr Ducanda ait jamais dit ou écrit que l’autisme pourrait être provoquée par la surexposition aux écrans, ni promis la guérison de l’autisme par l’éloignement des écrans. Le Dr Ducanda, fait valoir qu’elle a constaté au cours de ces consultations de médecin de PMI de l’Essonne, que de plus en plus d’enfants âgés de 0 à 4 ans présentaient des troubles identiques aux Troubles du Spectre Autistique, qu’elle a fait le lien entre ces troubles et la surexposition aux écrans à laquelle ces enfants étaient confrontés et a décidé, soutenue par de nombreuses institutions dédiées à la formation et à l’information du public, ainsi que par le ministère de la santé et par le CSA, de mener une action d’information sur ce point… qu’elle produit de nombreuses études effectuées par des professionnels tels que pédopsychiatres, neuropédiatres, psychologues, personnels de crèche, etc… faisant état des mêmes constatations; que le devoir du médecin étant de prévenir de la survenue d’un risque lié à un comportement, même si ce risque n’a pas encore été du point de vue scientifique clairement établi. Il ne saurait être reproché au Dr Ducanda d’avoir tenté d’alerter la communauté médicale afin que des études et recherches scientifiques soient entreprises concernant ces constatations, et d’enrichir le débat; qu’il résulte par ailleurs de l’instruction que, dans ses interventions, le Dr Ducanda s’est toujours exprimée en son propre nom, avec modération et retenue, et non au nom de la science; qu’elle s’est bornée à faire état de ses constatations et à prescrire l’éloignement des enfants âgés de moins de 6 ans des écrans et qu’elle n’a jamais parlé de l’autisme, mais de symptômes ressemblant aux troubles autistiques; qu’elle a ainsi fait un usage prudent de sa liberté d’expression…Les fautes déontologiques reprochées au Dr Ducanda ne sont nullement établies. Il s’ensuit… que les plaintes à l’encontre du Dr Anne-lise Ducanda doivent être rejetées. La Chambre disciplinaire de l’Ordre des Médecins condamne l’un des parents à verser la somme de 3500 € au Dr Ducanda ».


14/12/23 dans "The Journal of child psychology and psychiatry" : Not screens but their context of use impact cognitive development: a commentary on Yang et al. (2023)" par Benoit Bediou, Sezen Cekic, Daphné Bavelier.

Le titre de l'article est intéressant puisqu'il suppose que le contexte d'utilisation ne peut être induit pour partie par les écrans eux-mêmes...
Dernière édition: 08 Jan 2024 13:48 par Loys.

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04 Jan 2024 11:11 - 10 Jan 2024 21:22 #24900 par Loys
3 janvier 2024 dans "Nature" : "Associations between screen viewing at 2 and 3.5 years and drawing ability at 3.5 years among children from the French nationwide Elfe birth cohort" par Lorraine Poncet, Mélèa Saïd, Shuai Yang, Falk Müller-Riemenschneider, Claire Berticat, Michel Raymond, Mélissa Barkat-Defradas, Marie-Aline Charles & Jonathan Y. Bernard.



L'étude est commentée sur Twitter par un de ses auteurs, Jonathan Bernard.

Il s'agit de critiquer une célèbre étude allemande sur 1900 enfants de 5-6 ans (Wintersteiet Jungwirth 2006) et une étude française sur 127 enfants ( André and Cochetel 2022 ) aux conclusions inquiétantes sur les écrans. Jonathan Bernard, Franck Ramus et Magali Lavielle Guida avaient "réalisé une analyse critique de [la première] étude et montré que sa méthodologie était médiocre et sa conclusion trompeuse". Il leur est principalement reproché de ne pas prendre en compte le milieu socioculturel.

Dans l'étude 2024 qui nous occupe ici, il s'agit donc d'"étudier les associations statistiques entre le temps d'écran à 2 et 3,5 ans et les compétences en dessin" : "Résultats : s'il existe bien des différences (minimes) de scores en dessin selon le temps d'écran, ces différences disparaissent entièrement lorsqu'on corrige pour les facteurs socioculturels."

Les limites des chiffres de l'étude

M. Bernard conclut à des "différences minimes" dans les résultats bruts selon l'exposition aux écrans mais deux éléments laissent penser que les chiffres sont sous-estimés (et même un troisième - très important - comme on le verra plus loin) :
- le temps d'écran relevant de la déclaration des parents. On peut imaginer que ce temps est sous-estimé en cas de surexposition (une étude 2022 citée étudie d'ailleurs, dans la cohorte Elfe, le suivi des recommandations sur les écrans avant trois ans (nous traduisons) : "les recommandations internationales appellent à éviter tout temps d'écran avant deux ans, alors qu'en France les recommandations les plus importantes sont d'éviter tout écran avant trois ans"). L'étude 2024 elle-même évoque selon le capital culturel, "la connaissance qu'ont les parents des risques associés à l'exposition aux écrans dans l'enfance" (nous traduisons).
- la non prise en compte des enfants n'ayant pas réalisé de dessin (sur 9293 visites, 7736 enfants ont fait le dessin, ce qui signifie que plus de 16%, pour des raisons qui n'ont peut-être aucun rapport avec les écrans mais qui peuvent aussi bien avoir un rapport avec eux !).

Le milieu, seule causalité ?

Pour M. Bernard, il ne fait pas de doute que l'habileté grapho-motrice est liée au milieu socio-culturel, et non aux écrans : "C'est le principe du biais de confusion. Le niveau socioculturel détermine à la fois le niveau d'exposition aux écrans et la pratique et les compétences en dessin" . Le milieu social est donc identifié comme facteur de confusion et le lien entre expositions aux écrans et faible habileté grapho-motrice relèverait de la corrélation mais pas de la causalité. Pour le dire autrement, les écrans n'auraient pas d'effet par eux-mêmes.

Problème : la lecture des deux hypothèses de l'étude (1. L'association entre exposition aux écrans et faible habileté grapho-motrice s'expliquerait pour tout ou partie par le milieu socioculturel 2. En remplaçant d'autres activités, l'exposition aux écrans expliquerait la faible habileté grapho-motrice) laisse perplexe puisque, dans le détail, la première hypothèse implique les écrans aussi bien que la seconde (comme en atteste la première étude 2021 citée à l'appui de la première hypothèse...).

Même problème logique quand l'étude entend "corriger pour les facteurs socioculturels" : elle prend en compte, selon le capital culturel, "la connaissance qu'ont les parents des risques associés à l'exposition aux écrans dans l'enfance" : pour le dire autrement, les écrans sont mis hors de cause puisque certains parents de milieu favorisé se méfient de leurs effets, en contradiction donc avec la conclusion de l'étude (nous traduisons) :

Nos résultats soulignent l'importance de tenir compte de la position sociale des parents pour mesurer l'effet potentiel de l'exposition aux écrans sur le développement de l'enfant. Il est peu probable que l'exposition aux écrans en elle-même soit responsable d'une mauvaise capacité de dessin à 3,5 ans.


Le problème des âges retenus : 2 et 3,5 ans

Jonathan Bernard revendique une "étude la plus grande jamais réalisée" avec plus de 7.500 enfants (quatre fois plus que dans l'étude allemande de 2006) mais l'âge d'étude choisi ne ruine-t-il pas cette avancée ?

Pour comparer avec les deux études précédentes (5-6 ans), les temps d'exposition (et surtout de surexposition) d'une part et l'habileté grapho-motrice d'autre part ne sont pas les mêmes à 3,5 ans.

A 2 ans, selon l'étude Elfe , seuls 31,4% des enfants sont exposés 1h par jour ou plus (8,5% 2h-4h ou plus). A 3 ans, 50,4% des enfants sont exposés 1h par jour ou plus (18,9% 2-4h ou plus). A 5,5 ans, 60,9% des enfants sont exposés 1h par jour ou plus (26% 2-4h par jour ou plus, plus de trois fois plus qu'à 2 ans).

Il semble évidemment beaucoup plus pertinent de mesurer les effets des écrans quand les écarts d'exposition deviennent significatifs : 4,7% des enfants de 5,5 ans (356 enfants dans l'étude) sont exposés 4h ou plus par jour.

Attention : Spoiler !


En d'autres termes, l'étude a retenu un âge (2 ans) pour lequel les expositions sont beaucoup plus modérées et écarté un âge (5,5 ans) où les écarts d'exposition sont beaucoup plus importants : c'est comme si on étudiait les effets de la tabagie en prenant des populations qui fument peu ou pas encore. Choix d'autant plus incompréhensible que l'étude Elfe, comme nous l'avons vu, suit trois paliers... dont les enfants de 5,5 ans (2017) !

Il est, de plus, bien peu pertinent d'évaluer les compétences de dessin à 3,5 ans. Comme l'indique l'étude : "Le test McCarthy Dessine-un-bonhomme a été validé dans une population d'enfants de 6 à 8,5 ans". De fait, les enfants commencent seulement à dessiner des bonshommes têtards à 3,5 ans, ce qui explique les nombreux résultats nuls (un garçon sur quatre) et peut-être une partie des dessins qui n'ont pas été faits. Les études mentionnées plus haut à 5-6 ans sont beaucoup plus pertinentes puisqu'elles comparent des dessins d'enfants dont certains ne sont capables que de bonshommes têtards à 5-6 ans, avec 1,5 à 2,5 ans de retard donc.

Conclusion

En résumé, l'exclusion des non réponses, la confiance dans les déclarations des parents, l'âge retenu ou la logique même de l'étude : tout est fait pour minorer les effets des écrans (et notamment au delà d'une utilisation significative) : il est vrai que l'auteur avait déjà tiré cette conclusion des années avant l'étude, affirmant en 2018 que l'écran ne remplace pas forcément l'activité physique car "on peut par exemple regarder son smartphone en marchant" ou qu'"une exposition modérée, elle, pourrait avoir des effets bénéfiques pour certains enfants", ce que cette étude 2024 ne confirme pas.

Bref, une étude qui se veut rassurante sur l'exposition des enfants aux écrans, mais qui ne l'est pas du tout.
Dernière édition: 10 Jan 2024 21:22 par Loys.

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