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"Les nouvelles technologies en guerre contre nos enfants" (Richard Freed)
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www.canardpc.com/396/les-oeilleres-de-lindustrie-du-jeu-video
Les œillères de l’industrie du jeu vidéo
Qu’il s’agisse du problème des loot boxes ou de celui de la classification médicale d’une pratique excessive du jeu vidéo, l’industrie risque gros à s’enfermer dans des prises de position corporatistes.
Par Ivan Le Fou (Ivvan Gaudé, rédacteur en chef de Canard PC) | le 25 juin 2019
La polémique concernant les loot boxes rebondit une nouvelle fois aux États-Unis. Un sénateur américain républicain, Josh Hawley, a proposé une loi anti-microtransactions dans les jeux vidéo (intitulée « Protecting Children from Abusive Games Act ») qui bannit à peu près tout ce qui ressemble à une loot box susceptible de viser les enfants. Et par « enfant » il entend tous ceux qui ont moins de dix-huit ans. L’initiative suscite l’intérêt puisqu’elle a obtenu le soutien de certains élus démocrates.
Réaction de l’Entertainment Software Association (ESA, le lobby du jeu vidéo aux États-Unis) : « L’impact de ce projet de loi serait considérable et aurait au final des conséquences néfastes sur l’expérience des joueurs, sans parler des plus de 220 000 Américains employés par l’industrie du jeu vidéo » (« The impact of this bill would be far-reaching and ultimately prove harmful to the player experience, not to mention the more than 220,000 Americans employed by the video game industry »). Voui, vous avez bien lu, les seuls arguments sont « cela va nuire à l’expérience de jeu et à l’emploi ». Un problème avec les loot boxes, quel problème ?
Un déni absurde mis en scène au Sénat à Paris le 23 novembre 2018, lors d’un séminaire.
Ceci n’est pas une (Kinder) surprise. Malgré les critiques de certains développeurs, de nombreux chercheurs et la révolte de leurs propres clients, l’industrie vidéoludique et ses représentants s’entêtent à nier absolument tout problème lié à l’introduction massive du mécanisme des loot boxes dans les jeux vidéo. Le même déni absurde était mis en scène au Sénat à Paris le 23 novembre 2018, lors d’un séminaire organisé sous le patronage de Jérôme Durain et consacré aux microtransactions dans les jeux vidéo.
Pratiquement à chaque mention des loot boxes, Lévan Sardjevéladzé (le président du Syndicat national du jeu vidéo, SNJV) brandissait en tribune tantôt un Kinder Surprise, tantôt un paquet de cartes Panini ; parfois en guise de réponse, parfois silencieusement pendant l’intervention d’un autre conférencier. Comprenez : « Ce n’est qu’une version moderne des pochettes-surprises de notre enfance. »
Sauf que non. Ni Kinder, ni Panini ne sont capables de collecter les données sur leurs acheteurs afin d’adapter le prix et le type de pochettes-surprises à proposer, ou à quelle fréquence et même à quel moment de la journée il est plus rentable de les proposer. Les opérateurs de jeux vidéo peuvent le faire, et ils n’ont pas de raisons de s’en priver.
Ni Kinder ni Panini ne sont capables d’altérer le contenu même de la pochette-surprise en fonction de l’acheteur et des données qu’ils possèdent sur lui. Les éditeurs de jeux le peuvent, et ils le font. Le contenu d’une loot box peut parfaitement être adapté en temps réel au joueur qui s’apprête à l’ouvrir, soit pour éviter qu’il ne soit déçu trop souvent (et faire en sorte qu’il continue à jouer, donc repasse à la caisse à une autre occasion), soit pour d’autres motifs plus ou moins avouables. Rien techniquement ne l’empêche, tout l’encourage financièrement et rien juridiquement n’oblige à indiquer quoi que ce soit au client qui a l’impression de participer à une loterie neutre. Combien de temps cela peut-il durer ? Combien de temps l’industrie du jeu vidéo peut-elle affirmer, contre toute évidence, que cela ne constitue pas, au minimum, un problème de sincérité ?
Si on restait face à face sans un mot. L’énorme danger de cette attitude, c’est de convaincre peu à peu les différentes autorités qu’il est inutile d’essayer de dialoguer avec l’industrie du jeu vidéo, et que tout espoir d’autorégulation sans contrainte est vain. Cette dernière s’expose ainsi aux initiatives de législateurs ou de groupes de pression, potentiellement drastiques, populistes ou mal informés. Le cas de la Belgique, même s’il s’appuie sur une législation particulière, devrait faire réfléchir les Français : les loot boxes sont interdites en Belgique depuis octobre 2018, car assimilées à des jeux d’argent et de hasard. Valve, EA, Blizzard, 2K, Square… tous ont dû s’y plier, sous peine de poursuites pénales. Jusqu’à Nintendo qui retirera pour cette raison deux jeux mobiles de la commercialisation en Belgique le 27 août prochain : Fire Emblem Heroes et Animal Crossing Pocket Camp.
Les plateformes elles-mêmes – qui ne sont pas les mieux placées, puisque directement intéressées aux profits – ont réalisé qu’il était préférable de donner du mou à la corde : après Apple (qui l’a implémenté sur l’AppStore dès 2017), c’est au tour de Google d’exiger que soient publiées dans les apps Android les probabilités d’obtention des différents types de lots dans les loot boxes.
Quant à l’argument, développé ci ou là dans la presse, selon lequel la fin des loot boxes et autres Ultimate Team signerait la fin des jeux de sport modernes, car ceux-ci ne pourraient plus être financés, il est comique sinon risible. Il est certainement exact qu’elles sont indispensables au business model actuel, qui consiste à sortir un jeu par an (à prix fort et nouveauté faible), et à payer des licences officielles sportives à des prix exorbitants.
Est-ce la seule façon de créer des jeux de sport intéressants ? Probablement pas. Le prix des licences ne serait-il pas directement indexé aux profits estimés des jeux par des détenteurs des droits ? Bien sûr que si. Les fédérations seront-elles butées sur les prix au point de se passer totalement des revenus du jeu vidéo ? Sans doute pas. Le taux de profits d’Electronic Arts et Take Two peut-il baisser sans que la Terre arrête de tourner pour le reste de l’industrie du jeu vidéo ? Je parie que oui.
Ses positions laissent le secteur très vulnérable aux critiques.
Être la solution ou la cible. Peut-être que l’industrie du jeu vidéo a raison contre tous et que les loot boxes ne sont pas des mécaniques qui s’apparentent aux jeux de hasard et d’argent. Peut-être. Elles n’en sont pas moins des systèmes basés sur la manipulation, l’exploitation et l’encouragement de comportements compulsifs : ce point est parfaitement incontestable. Or, comment ne pas voir qu’il laisse le secteur très vulnérable aux critiques dans un contexte où les autorités sanitaires parlent d’addiction aux jeux vidéo ?
De la même façon, peut-être que l’industrie vidéoludique a raison contre l’OMS en défendant mordicus que la consommation excessive de jeux vidéo n’est que le symptôme d’autres problèmes psychologiques préexistants. Peut-être. Mais cette ligne de défense semble particulièrement curieuse, car dans ce cas, www.gamesindustry.biz/articles/2019-05-1...slation-opinioncomme le note Brendan Sinclair sur Gamesindustry.biz , que faudrait-il penser de ceux qui exploitent financièrement ces problèmes préexistants ?
Laissons de côté un instant les questions de jeux d’argent ou de diagnostics médicaux : ne serait-ce que pour la défense des consommateurs et de la transparence qui leur est due, les pratiques concernant la mécanique des loot boxes doivent être encadrées. Et elles le seront, c’est inévitable. Il reste aux acteurs du jeu vidéo deux solutions : faire partie de la solution, ou n’en être que les cibles.
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UX Research is not evil : a critique
Dear Mr Freed, as a parent and as a UX practitioner, I respectfully take issue with your redactive, and illogical evaluation of what UX research is and what user experience is as a discipline.
There is no “psychological war on kids” as you put it. Let’s not be dramatic. It seems that you are saying “all UX and technology is bad, therefore children are being harmed.” Your argument is constructed the same as “all black cats are evil, and therefore all humans who cross their path will receive bad luck.” It’s an illogical syllogism to say the least, but maybe you do not know, because you studied dark psychology and not philosophy.
I feel truly sympathetic to the kids experiencing social media addiction, because it’s a real thing just like gambling addiction or alcoholism. You are a counselor, so write as a counselor. I am curious about how you would solve for addiction. I am a UX researcher, so I write you this.
The UX practitioners at Facebook aren’t evil warlords, and some of them also have children. And, not all of UX is evil. One of the first principles in our UX code of ethics is “Act in the Best Interest of Everyone.” Another is “Do No Harm.”
Maybe, you can say that Facebook is not very correct and is affecting a lot of people’s scrolling habits. It’s hard not to pay attention where there’s a new “Like”, just like the jingle of You Got Mail in your e-mail inbox. A lot of people would not disagree with you. You should preach self-regulation instead of pointing a finger.
The UX profession originated from ergonomics, human factors, psychology, anthropology etc. because a lot of people were frustrated with technology and how it was working for them. The early practitioners had an honest intent to make it better for others. (MS-DOS anyone?)
You should know if you have ever used an iPhone or a Mac. How difficult was it for you to search on Google to write this article? Maybe you followed a link trail of keyword: persuasive design to BJ Fogg to UX, and voila: Medium post? (I think you did not have to “think hard” to get to write this which in itself is an interesting dilemma.)
It’s my opinion that UX can be very positive by creating more efficiency in our world for difficult problems. This might include creating more engaging and effective educational products for children, whether in app form or toy form. Also, lots of B2B products need UX to manage some of the legacy inefficiencies in their systems.
I don’t deny that all of these easy to use gifts of technology may have a downside, as it is more than my parents had to regulate for me when I was a teen. Please spend more time in your article talking more about something you know: How should parents should deal with kids using technology? How do we navigate when there are so many kinds of technology out there to manage? How can we influence children’s reward centers in the brain more positively? We can encourage our children to have wonderful real world experiences, spend more time outside with real people, and then the products we use will be secondary — but still more useful with less effort.
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Sur le sujet, voir ces deux interventions récentes de Celia Hodent sur l'expérience utilisateur, et les problèmes éthiques dans l'industrie :
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Quand on pose la question qui fâche...
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"Plongée dans l’UX, l’art de manipuler les joueurs de jeu vidéo"
Entre psychologie cognitive et design informatique, l’« expérience utilisateur » est le dernier champ à la mode dans l’industrie de la manette. Une sorcellerie moderne, capable du plus cynique comme du meilleur.
Lirez-vous cet article en entier ? La taille de sa police vous incitera-t-elle à en partir ou y rester ? En retiendrez-vous les informations les plus pertinentes ? Envisagerez-vous, à son ouverture ou à sa lecture, de vous abonner ?
Toutes ces questions, ce sont celles de l’UX – l’expérience utilisateur, un champ de recherche très en vogue dans le monde du design, et notamment du design numérique. Ces dernières années, une industrie a décidé de miser dessus pour retenir ses clients : le jeu vidéo.
Du 2 au 4 octobre à la Plaine Images de Tourcoing (Nord), une centaine de professionnels venus de quatre des cinq continents se pressaient ainsi pour assister à la première édition sur le sol européen du Game UX Summit, un congrès professionnel créé en 2016 au sein d’Epic Games (Fortnite).
Un art du détail
Qu’est-ce que l’UX ? Bon courage pour le définir. Une discipline scientifique ? Une branche de la création ? Un art du tâtonnement ? Un peu de tout cela à la fois. « L’UX, c’est un état d’esprit », poétise Celia Hodent, qui l’a démocratisé d’abord chez Ubisoft (Assassin’s Creed, Just Dance) puis chez Epic Games (Fortnite). L’idée de fond, détaille-t-elle, c’est de penser la création du point de vue du joueur :
« Au lieu de rester dans son point de vue de créatif, on se met dans la position de l’utilisateur, en prenant en compte les limitations cognitives qu’il peut avoir en termes de perception, d’attention, de mémoire. »
Dans les faits, l’issue d’une réflexion sur l’UX peut prendre mille et une formes. Ici, un bouton à l’écran recentré pour être immédiatement visible ; là, un son qui, déclenché au bon moment, fera comprendre au joueur qu’il a agi comme le jeu l’attendait ; un libellé de menu plus explicite ; une courbe de difficulté subtilement travaillée ; ou des options d’accessibilité pour n’exclure personne…
{le reste est caché}
Edit : Le mot "manipulation" utilisé dans l'article fait jaser et râler. Réponses de l'auteur de l'article :
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Beaucoup de réactions de twittos ulcérés par le mot « manipulation ». Ne voyez pas le mal partout. Un roman policier manipule son lecteur. Un magicien manipule son audience. Un jeu manipule son joueur. C’est le propre d’un média dans lequel le récepteur est actif.
(Unpopular opinion : oui les livres sont interactifs à leur manière - dans un policier, le lecteur se projette, il est l’enquêteur, il se balade dans son palais mental à la recherche de la solution).
Le terme est ambivalent et l’article montre deux faces opposées de l’UX, donc ça me semble plutôt pertinent justement.
[A un twitto (Oscal Lemaire) qui dit : "Je souligne juste qu'il est logique, à notre époque, de voir le mal quand on parle de manipulation dans le jeu vidéo."] J’entends bien. Rajoute à ça vingt ans de mauvais traitements médiatiques ayant abouti à un complexe de persécution, et zou.
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Rémi Mathis: Dernière mode (ds la lignée des questions médicales/écologiques) : essayer de faire peur avec tout et n'importe quoi (peur=> scandale=> diffusion + petit côté "lanceur d'alerte") Donc, ici, "comprendre le fonctionnement des gens pour proposer des outils adaptés" = manipulation ?
Vivement la prochaine étape : "je préfère les apprentissages compliqués, les interfaces pourries, les procédures absurdes... car ça prouve qu'on ne cherche pas à manipuler mon cerveau en cherchant à le comprendre et s'adaptant à lui". Rivasi n'est pas encore sur le coup ?
Erreur pénible : C'est fou cette manie de surestimer la puissance des deux trois petits ressorts qui sont utilisés dans ces techniques ; on a parfois l'impression en lisant certains que c'est la publicité qui façonne l'ensemble du monde
Rémi Mathis : Ca rassure sans doute de penser que des gens précis sont responsables de faits trop complexes. Bcp sont persuadés que les politiques sont responsables de faits sociaux, qui impliquent pourtant des millions de personnes non coordonnées dans tous les pays... Ou, pour la langue, des universitaires passent sans rire ds ts les médias pr expliquer que l'Académie française contrôlait/contrôle la langue : ça démontre une complète incompétence sur la diffusion de l'information et le contrôle de la population en 1700/aujourd'hui... mais c'est simple et ça plaît.
Erreur pénible : J'aime bien l'expression "ça rassure des gens de penser + [fait terrifiant de contrôle massif d'un pouvoir colossal]". 100% d'accord avec la vision en question ; il suffit de voir la facilité à organiser un groupe de plus d'un personne pour s'en rendre compte
Ainsi qu'une tentative de dialogue avec l'auteur :
Willvs : Manipuler, ce n’est pas forcément négatif.
Rémi Mathis : "manipuler le comportement de qq'un" ? Euh, si. Lancez un sondage, si vs voulez : "des multinationales emploient des neuroscientifiques pour manipuler votre comportement à votre insu : est-ce une bonne chose ?" J'ai peu de doutes sur le résultat
Willvs : Sauf que ce n’est pas ce que dit l’article. Vous l’avez lu ?
Rémi Mathis : Il est sous paywall. J'ai lu ce que vous diffusez Qui explique entre autres que l'UX est "l’art de manipuler les joueurs", une "sorcellerie", "capable du plus cynique ". Comme le dit @alienspoon, diriez-vs la même chose de l'UX d'un micro-onde (ou d'un catalogue de bibli) ?
Willvs : Un micro-onde encourage rarement les micros-transactions, donc non. Mais pour le reste, oui. Bien sûr que le design industriel est affaire de manipulation. Comme la littérature, la prestidigitation, le cinéma, etc.
Rémi Mathis : YouTube ou Netflix non plus, et pourtant l'utilisation des principes de l'UX pour maximiser le temps passé sur ces plateformes (ou à jouer à Fortnite) soulève d'importantes questions et pose de vrais problèmes. C'est bien plus large que la question des micro transactions.
Celia Hodent : C’est là que je ne vous rejoins pas. Les “principes” UX ne sont justement pas de mettre les profits avant l’humain. C’est tout le contraire. Les leçons de l’économie béhavioriste étaient déjà utilisées avant, et bien avant les microtransactions dans les jeux vidéo. Le UX c’est de comprendre les limitations du cerveau et les biais inconscients afin d’offrir la meilleure expérience possible pour les utilisateurs. Ce n’est pas d’exploiter ces biais pour un but mercantile. L’inclusion et l’éthique sont des sujets importants, mis en avant en UX. Après, bien sûr que l’on navigue dans une grosse zone de gris car souvent un produit/service ne peut pas aboutir s’il n’est pas un minimum rentable dans notre société. C’est bien pourquoi il faut absolument parler d’éthique, surtout en tech et donc les jeux vidéo y compris.
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Critiquer ces mécanismes serait "manichéen". Dans ces conditions, pourquoi les "comprendre" (et seulement les comprendre) est-il nécessaire ?Sans tomber dans un manichéisme facile, il est nécessaire de comprendre les mécanismes qui permettent de capter l'attention.
Les critiques des écrans occulteraient la réflexion sur les technologies séductives ? Il faut se pincer pour lire une chose aussi idiote !Applications sur smartphone, jeux vidéo, séries à la demande... Depuis des années, les écrans et leurs usages sont accusés de tous les maux. L'Homme moderne, ultra-connecté, serait-il entré dans l'ère de la "décérébration à grande échelle", comme l'écrit le neuroscientifique Michel Desmurget dans son dernier ouvrage, La Fabrique du crétin digital, les dangers des écrans pour nos enfants (Seuil) ? Pas si sûr, à en croire les critiques qui, à la sortie du livre, ont jugé ces propos "trop peu nuancé", à l'image de Séverine Erhel, maître de conférences en psychologie cognitive et ergonomie à l'Université Rennes 2, interrogée par L'Express.
Surtout, ils occultent une problématique sans doute plus importante : la volonté des géants d'Internet de tout faire pour attirer notre attention et la monétiser, ce qu'on appelle l'économie de l'attention et sa "science", la captologie.
www.laviemoderne.net/mirabilia/175-les-n...e-contre-nos-enfants
Pas seulement obtenir des données, loin de là : inciter à des abonnements ou à des achats ponctuels (dans les jeux vidéo par exemple) et/ou maximiser l'exposition publicitaire."Cette dernière repose sur les sciences comportementales transposées au monde numérique pour créer un modèle économique lucratif, résume Jean Pouly, qui enseigne la transformation numérique à l'université de Lyon. La majorité des services des plateformes sont supposés être gratuits alors qu'en réalité ils s'échangent contre vos informations personnelles." Les Facebook, Google et même les start-up ont besoin de données les plus précises possible afin de proposer à des entreprises des publicités extrêmement ciblées et donc efficaces. Pour obtenir ces informations, elles font en sorte que leurs utilisateurs se connectent le plus souvent et le plus longtemps possible.
Le modèle publicitaire de Snapchat repose essentiellement sur la publicité ("snap ads", "Snapchat discover ads", "sponsored lenses") avec utilisation des données géolocalisées éventuellement.Les dark pattern, ces interfaces conçues pour vous tromper
Dans cet environnement ultra-concurrentiel - le nombre de jeux, d'applications et de services explosent -, la bataille pour l'attention et ses techniques pour "verrouiller" l'utilisateur prennent des formes agressives, sombrant parfois dans un manque de subtilité flagrant. À l'instar de la "flamme" Snapchat, qu'il faut entretenir en interagissant au maximum avec ses contacts, ou encore des dark patterns, ces interfaces conçues pour tromper les esprits.
Ces éléments sont désolants mais relèvent moins de la captation de l'attention à proprement parler que de pratiques monopolistiques pour capter des marchés.Ici, en inversant des codes couleurs ; là, en proposant des options peu claires ou en cachant le processus de désinscription. Et elles ne sont pas seulement l'apanage d'obscurs sites : Amazon, Facebook, Google, y ont recourt. Lors de sa dernière mise à jour d'iOS, Apple laisse par exemple croire que l'installation ne sera pas terminée tant que l'Apple Pay - le système de paiement de l'entreprise - n'est pas configuré... Ce dark pattern grossier a d'ailleurs retenu l'attention de... Margrethe Vestager, commissaire européenne à la Concurrence, qui a décidé de lancer une enquête contre a marque à la pomme.
Ce qui n'empêche pas de lire les articles rassurants en lien dans le présent article...Dans son ouvrage Le Cerveau Attentif (Odile Jacob) Jean-Philippe Lachaux, du centre de recherche en neurosciences de Lyon, explique comment notre cerveau se fait piéger. Au coeur de sa réflexion, le concept de saillance, soit la capacité d'un objet ou phénomène à provoquer "l'attention automatique". Les zones animales du cerveau réagissent en effet au stimuli de l'environnement - auditif, visuel, olfactif, etc. - pour détecter d'éventuels dangers. L'attention volontaire, au contraire, réside dans la volonté de se plonger dans un livre ou une activité précise. Entre les deux, des mécanismes subtils s'insèrent, surtout lorsque l'affect entre en jeu. Les publicités mettant l'image de femmes dénudées provoquent par exemple des temps de "captivations" plus important, avance le neuroscientifique. "Si le plan moyen dans les séries ou les films est passé de 7 à 3 secondes, par exemple, ce n'est pas pour rien, explique Yves Citton, professeur de littérature et spécialiste des médias à l'université Paris 8, auteur notamment de Pour une écologie de l'attention (Seuil). Il y a toute une série de recherches sur ce sujet qui remontent à plus d'un siècle, elles ont inspiré la publicité, mais aussi, bien sûr, les designers des dark patterns."
Capter et adapter le contenu en temps réel
Les algorithmes organisant les fils d'informations sur Twitter, Facebook, LinkedIn, Netflix, etc. sont probablement plus pernicieux encore. "En likant, en partageant, en commentant, en s'abonnant, nous leur fournissons des informations essentielles qui leur permettent de nous proposer des contenus qui nous intéressent et donc, nous captivent", rappelle Jean Pouly. "Il s'agit bien de la véritable nouveauté des exploitations attentionnelles, abonde Yves Citton. L'enregistrement sous forme de données numériques de nos comportement attentionnels et leur traitement algorithmique déterminent ce qui va alimenter nos écrans en temps réel : c'est une forme de monitoring permanent."
Alors, les géants d'Internet jouent-ils avec nos cerveaux, comme le dénoncent d'anciens pontes du milieu, tel Sean Parker, ex-président de Facebook, ou Tristan Harris, ex-"philosophe produit" chez Google, selon qui la plupart des interfaces seraient conçues pour "voler notre temps" grâce à des expériences agréables, persuasives et addictives. Des spécialistes du cerveau ont dernièrement mis en évidence divers mécanismes neuronaux lors de l'usage des réseaux sociaux : notre corps sécrète ainsi de la dopamine - "l'hormone du plaisir immédiat" - après un "pouce bleu", un like ou le partage d'une de nos publications. "Il ne faut pas être naïf, ceux qu'on appelle les captologues ne sont pas payés pour rien", glisse Jean Pouly.
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D'ailleurs, l'apologie des écrans revient vite, de façon incohérente
On peut faire un usage positif d'une application conçue pour être addictive !Pour autant, il ne faudrait pas non plus tomber dans un manichéisme trop facile, ajoute Yves Citton : "ce n'est pas tant l'écran, ou l'application, qui est addictive, mais l'usage qu'on en fait".
Apologie totalement absurde des applications, après avoir démontré la réalité de ces mécanismes : il suffit donc d'affirmer qu'on n'est pas sûr de leur existence et de leur objectif ! Et tant pis si des chercheurs ont "mis en évidence divers mécanismes neuronaux" ou si des responsables importants de ces entreprises (Tristan Harris, Sean Parker mais aussi Tim Cook, Chamath Palihapitiya, Tony Fadell, Justin Rosenstein, Chris Anderson, Marc Benioff etc...) ont alerté publiquement sur leurs objectifs inavoués...Sans compter que, comme l'écrit Raphaël Suire, professeur de management de l'innovation à l'université de Nantes, sur le site The Conversation, "la réalité d'un design ou d'une conception nativement addictive est peu connue et, par nature, seuls ceux qui les créent savent avec quels objectifs ils le font". En d'autres termes, il reste difficile d'affirmer qu'une application ou un jeu addictif a conçu avec ce but.
Démontrer donc ce qu'on sait déjà : difficile d'aller plus loin dans l'absurde pour semer le doute.A moins de lancer de nouvelles recherches. "Il serait intéressant d'effectuer de la rétro-ingénierie, c'est-à-dire d'étudier une application pour comprendre son fonctionnement interne, note Séverine Erhel, maître de conférences en psychologie cognitive et ergonomie à l'université Rennes II. Pour mieux décrypter comment les géants du Net nous poussent à aller regarder un contenu plutôt qu'un autre."
A vrai dire, pourquoi lancer des recherches quand le problème, ce n'est pas l'application, c'est "l'usage qu'on en fait" ?
L'expression "outils numériques" postule d'emblée l'utilité de ces objets : le terme est-il vraiment adéquat quand on parle de vidéos, de jeux, de réseaux sociaux ?Il faut changer le modèle économique avant de croire les promesses
Interrogé par L'Express, Google indique "ne pas avoir de porte-parole disponible sur ce sujet". Le géant Américain estime néanmoins être "conscient que les nouvelles technologies posent de nouveaux défis [et que] nous sommes nombreux à nous sentir esclaves de nos smartphones et à avoir peur de passer à côté de quelque chose en n'étant pas connectés". Une référence à des pathologies telles que le burnout numérique ou le "Fear of missing out", une peur constante de manquer une nouvelle importante, un événement donnant l'occasion d'interagir socialement ou une proposition commerciale [entretenu par des formules marketing telles que "29 personnes consultent cette offre en ce moment" lorsque vous consultez un site de vente en ligne, NDLR].
La défense de l'entreprise américaine consiste à rappeler qu'elle a lancé des fonctionnalités permettant de mieux comprendre nos habitudes et de nous aider à déconnecter. Il est vrai que l'entreprise américaine a récemment mis en place, notamment sur ses téléphones Pixel, des options de "bien-être numérique" censées faciliter les temps de déconnexion grâce à des minuteurs, des routines ou des changements de couleurs. Mais cette stratégie relève-t-elle de la bonne foi ou du pompier pyromane ? "Tant que le modèle économique consistera à collecter un maximum de données des utilisateurs, je ne vois pas comment les choses pourraient changer", tranche Jean Pouly. À moins que les utilisateurs prennent conscience de la nécessité d'adapter leurs usages vers une consommation raisonnée des différents outils numériques. Une question de bon sens, finalement.
En conclusion de l'article, et de façon totalement illogique, après avoir démontré les problèmes posées par le "dark design" des nouvelles technologies, la responsabilité est renvoyée par l'auteur de l'article aux seuls utilisateurs. Face à des objets addictifs, il suffit d'avoir une "consommation raisonnée".
En cas de scandale alimentaire, on ne met pas en doute la parole des lanceurs d'alerte et on n'appelle pas à une "consommation raisonnée" des utilisateurs...
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Loys écrit: En cas de scandale alimentaire, on ne met pas en doute la parole des lanceurs d'alerte et on n'appelle pas à une "consommation raisonnée" des utilisateurs...
Je n'en suis malheureusement pas si sûr. Rien que sur le sujet des OGM, j'ai vu des choses assez sales depuis des années (cf. Jean-Claude Jaillette vs. Gilles-Eric Séralini).
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