"Enfance tactile : les tablettes pour les plus jeunes" (Le Monde)

C'est bientôt Noël ! Pensez à acheter à vos enfants des tablettes tactiles !

Heureusement qu'un grand quotidien est là pour remettre les choses en perspectives : "Enfance tactile : les tablettes pour les plus jeunes" (19/11/12)


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Dans l'ensemble, je trouve l'article relativement inoffensif, se contentant de nous déverser une revue d'objets dont on peut penser ce que l'on veut. Dans mon cas, j'avoue ne pas trop comprendre l'intérêt de la tablette tactile pour un enfant de 4 ans, mais comme l'objectif de toutes ces firmes est certainement davantage situé au niveau du résultat annuel comptable qu'au niveau de la teneur éducative de leur production, il n'y a peut-être pas lieu de s'intéresser à ce décalage d'intention.

En revanche, je n'irai pas jusqu'à l'audace du "journaliste" qui écrit que l'enfant pourrait devenir un "petit génie" au contact de ces choses... ou comment faire perdurer l'idée selon laquelle la réussite s'obtient relax dans son fauteuil en triturant une tablette.

Inoffensif, oui, dans la mesure où l'idée de mettre un écran devant un très jeune enfant s'est banalisée. On est loin du regard critique qu'on pourrait attendre d'un grand quotidien national, qui s'inscrit dans la fascination généralisée pour le numérique à consommer dès le plus jeune âge.

Enfance tactile : les tablettes pour les plus jeunes

"Enfance tactile"... Quelle perspective joyeuse quand on a quatre ans et le monde à découvrir d'être réduit à ses yeux et à un doigt sur un écran de quelques pouces.

Cette année, le père Noël aura la hotte garnie de tablettes tactiles pour les enfants.

Grâce au "Monde" entre autres.

Avec l'aide de Marion, 4 ans au compteur, nous avons comparé 4 modèles spécialement pensés pour les 4-7 ans. Les deux premiers s'apparentent à des consoles de jeu tactiles, les deux derniers à de véritables jouets pour adultes.

Un enfant de quatre ans qui donne son avis sur le choix d'une tablette, c'est mieux qu'un adulte qui donne son avis sur la pertinence d'un tel choix. On est bien dans une perspective prolongée de l'enfant-roi.

LEAPPAD (LEAPFROG)

A première vue, la tête blonde est séduite : l'objet est beau, doté d'un stylet et très résistant aux chocs. L'écran de 5 pouces du LeapPad est plus grand que celui des consoles pour enfants. Mais aux yeux de Marion, cela reste une "console de jeu", qui "est très bien" certes, mais qui "ne ressemble pas à l'iPad de Maman".

S'il ne ressemble pas à l'iPad, que dire de plus...

Le contenu de base est réduit : un appareil photo qui ne prend des photos que par la face arrière - mais qui compense grâce au labo de trucages (gros succès)... Et le jeu "L'abri des amis", avec lequel une Marion fascinée savonne un petit animal virtuel des heures durant.

C'est vrai que c'est un contenu réduit : un seul appareil photo au lieu de deux ? Comment voulez-vous qu'un enfant soit heureux avec ça ?

Un code d'accès permet d'obtenir d'autres jeux une fois l'appareil connecté en USB à son ordinateur et après installation d'un logiciel. Pas de chance pour les possesseurs de Mac, cela ne fonctionne pour le moment qu'avec un PC.

Reste un système d'achat de jeux surprenant à l'heure d'Internet : il faut acheter en magasin ou en ligne des cartouches de jeu ou des cartes prépayées... Impossible de les télécharger directement depuis son canapé.

C'est vraiment bête mais en même temps quand on voit que certains enfants achètent eux-mêmes sur l'Appstore des applications avec la carte enregistrée par leurs parents...

STORIO 2 (VTECH)

Ecran 5 pouces, stylet, support rétractable... la Storio 2 est bien conçue, mais ressemble toujours à une "console de jeu", dixit la même Marion. Et ce même si cette tablette dispose d'un chronomètre, d'une calculatrice, d'un calendrier...

Un cadeau sans valeur, quoi.

Les jeux fournis sont originaux, et vite adoptés par Marion, avec un penchant pour celui où elle doit capturer des personnages flottant dans l'air grâce à la réalité augmentée. La première connexion au centre de téléchargement (l'Explor@Park) grâce au câble USB et au DVD fournis permet de récupérer des applications (jeux ou livres...) et des comptines gratuites.

D'autres contenus, payants, peuvent s'acheter facilement d'un clic de Carte bleue - pour moins de 10 euros l'unité.

Une paille quand on peut s'acheter un iPad.

Il existe également des cartouches - à 25 euros -, pour les jeux sous licence comme Cars ou Dora.

Ah...

La même interface, sur l'ordinateur, permet de récupérer les photos de la tablette (possible aussi à la manière d'une clé USB), ou à l'inverse de transférer des photos et de la musique vers la Storio 2. L'appareil photo à objectif rotatif et surtout son logiciel qui offre des "déguisements" font un carton. Le doudou de Marion s'est vite transformé en princesse. Pour son plus grand plaisir.

Extraordinairement intéressant, ce qu'on peut faire avec une tablette comme celle-ci...

TABLET JUNIOR (LEXIBOOK)

Très proche d'une tablette adulte avec le système d'exploitation Android - celui de Google -, son accès à Internet (avec paramétrage parental) et son compte e-mail, le Tablet reste adapté aux enfants grâce à sa coque intégrée résistant aux manipulations des petits.

L'engin attire beaucoup Marion, qui commence à toucher à toutes les icônes... mêmes celles dont elle n'a pas besoin ! Devant nos yeux affolés, la voilà qui traficote l'application Deezer, le spécialiste de la musique en ligne.

Tant qu'elle ne télécharge pas Mega Sex Porn Sounds 2...

Mieux vaut donc prendre un peu de temps au préalable pour sélectionner ce qui apparaîtra sur l'écran d'accueil et ainsi éviter de voir l'enfant supprimer des applications essentielles. Il n'y a en effet qu'un seul profil, et Marion a accès à tout.

Voilà ce qu'on appelle du contrôle parental...

Beaucoup d'applications éducatives sont pré-installées, comme "J'apprends" (reconnaissance des couleurs, formes, lettres...) et "Power académie". Des fiches thématiques faites pour réviser des pans entiers de programmes scolaires.

Quel programme scolaire révise-t-on à quatre ans ?

Intéressant, mais manifestement pensé pour les plus grands. Le romantisme au XIXe siècle ou les zones industrialo-portuaires à 4 ans ?

Effectivement...

On se dit que l'enfant pourra la conserver longtemps, voire la prêter à ses grands frères ou soeurs.

Car une tablette, c'est fait pour durer, bien sûr.

Ou devenir un petit génie.

On ne sait jamais.

D'autres applications sont heureusement téléchargeables, notamment sur le "Lexibook market".

L'appareil photo ne permet de prendre des clichés que par la face avant de l'appareil.

C'est trop nul !

Les fichiers s'échangent avec l'ordinateur comme s'il s'agissait d'une clé USB. Au final, c'est un bel objet technique, qu'on hésitera néanmoins à laisser sans surveillance dans la chambre d'un enfant peu soigneux.

C'est que c'est fragile et que ça coûte plus cher qu'un doudou, ces petites choses.

LA TABLETTE TACTILE BY GULLI (GULLI)

Incontestablement la plus proche d'une tablette pour les grands. Elle comporte d'ailleurs un profil parents, qui permet de nous en servir comme d'une vraie tablette sous Androïd. Appréciable.

Mais pourquoi, dans ce cas, acheter une tablette dédiée à l'enfant, qui devra permettre un contrôle parental ? C'est bien là que commence une certaine forme de renoncement.

L'utilisateur est tout de suite pris en main pour effectuer les premiers réglages. Programmation du temps d'utilisation autorisé, puis définition du profil qui adapte automatiquement les applications installées en fonction de l'âge de l'utilisateur. Les "app" incluses sont nombreuses, dont les jeux à succès "Angry Birds", "Fruit Ninja", "Cut the Rope"... Et surtout une application éducative très bien faite, "L'Ecole à la maison", immédiatement adoptée par Marion car collant à son programme de maternelle. Les boutiques de téléchargement sont nombreuses mais un peu fouillies.

Pourquoi cette "application éducative" est-elle "très bien faite" ? On ne le saura pas...

Photos et musiques s'échangent aisément, comme avec un disque dur externe. On apprécie enfin la coque en silicone fournie, même si nous aurons d'instinct tendance à éviter de laisser ce bel objet à portée de main de l'enfant. Et le ranger dans le bureau des parents.

Comme quoi c'est moins le désir des enfants que celui des parents qu'on réalise avec l'achat de "ce bel objet". L'enfant est considéré comme un adulte en miniature, comme le montre le regard jaloux de Marion sur l'iPad de sa maman.

LeapPad (Leapfrog)

(4-9 ans) ; 89,99 euros ; écran 5 pouces ; stockage 2 Go de mémoire ; qualité de l'appareil photo 0,3 mega pixel (Mpx).

Storio 2 (Vtech)

(3-9 ans) ; 89 euros ; écran 5 pouces ; stockage 2 Go extensible avec une carte micro SD ; qualité de l'appareil photo 1,3 Mpx .

Tablet junior (Lexibook)

(2-5 ans) ; 159,99 euros ; écran 7 pouces ; stockage 4 Go extensible avec une carte micro SD ; qualité de l'appareil photo 0,3 Mpx.

La tablette tactile by Gulli (Gulli)

(4 ans et +) ; 199 euros ; écran 7 pouces ; stockage 4 Go (+4 Go de carte SD) extensible avec une carte micro SD ; qualité de l'appareil photo Avant 0.3 Mpx / Arrière 2.1 Mpx.

De 89 à 199€ pour... un jouet ?

Exactement, on parle bien de banalisation et d'absence de recul journalistique. Mais, qu'attendre du Monde, ce journal à intérêts privés, qui surfe notamment sur l'élargissement de son offre aux moyens modernes de communication, dont les tablettes tactiles ? On a aujourd'hui un énorme problème d'indépendance de la presse qui ne se résoudra sans doute pas de sitôt si la tendance actuelle perdure.
Quant au caractère inoffensif, il est bien sûr tout relatif et superficiel car dans le fond, je vous rejoins : l'article participe au flot général de cet enthousiasme béat devant les nouvelles technologies.
Simplement, j'ai lu pire en termes de "journalisme" sur les TICE - notamment via votre site, ce qui me donne l'occasion de vous remercier grandement pour cette louable initiative.

Loys écrit: De 89 à 199€ pour... un jouet ?

J'ai bien vu des chevaux à bascule à 500€...
Mais vous ne comprenez pas : les tablettes c'est le bien ! Pour ces petits chéris, c'est merveilleux ! Les images bougent, ils ont un petit animal virtuel (le retour des tamagochis) et surtout, surtout, ils peuvent faire comme papa et maman ! Les enfants ont toujours voulu imiter les parents non ? Alors quand les parents passent plusieurs heures par jour devant une tablette, comment s'étonner que l'enfant veuille s'y mettre ? Après tout ces commerciaux innocents ne sont là que pour répondre aux attentes des enfants.

PS: ce message est partiellement ironique. Saurez vous classer chaque phrase ?