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La réforme des concours de l'enseignement
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29/08/23 : www.aefinfo.fr/depeche/698212-le-menj-en...iale-des-enseignants
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La question de la formation initiale est fondamentale. Un enseignant sur cinq seulement se dit suffisamment préparé à enseigner dans sa classe. L’année de master 2 est épuisante pour beaucoup de candidats car elle est très dense, entre les cours, la préparation des examens et du concours, parfois l’alternance dans des classes, la rédaction d’un mémoire… Résultat : 10 % d’entre eux abandonnent ou ne sont pas titularisés après la première année. Nous voulons inventer les écoles normales du XXIᵉ siècle. Avec ma collègue Sylvie Retailleau [ministre de l’enseignement supérieur], nous étudierons toutes les hypothèses, parmi lesquelles la possibilité de se former dès la première année après le baccalauréat, de maintenir la mastérisation tout en passant le concours plus tôt pour une entrée progressive dans le métier d’enseignant.
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Publié par Sandra Ktourza | Mar 5, 2024 | Université/Recherche | 0
La crise du recrutement des enseignants se traduit par la baisse du nombre de candidats aux concours, mais également d’étudiants en master d’enseignement.
La crise du recrutement d’enseignants impacte les masters dédiés aux métiers de l’enseignement, les masters MEEF (masters enseignement, éducation et formation) préparés dans les INSPE. Dans une note parue en juin 2023, le ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche indiquait que les effectifs d’étudiants en INSPE avaient fortement diminué en un an. Pour l’année scolaire 2022-2023, 53 700 étudiants étaient en effet inscrits dans les Instituts nationaux supérieurs du professorat et de l’éducation, soit 13,3% de moins que pour l’année scolaire précédente, alors que pour l’année scolaire 2021-2022, 62 000 étudiants étaient inscrits en INSPE, un chiffre stable par rapport à la rentrée 2020-2021.
Il faut rappeler que depuis la rentrée 2021, l’année est très très chargée pour les étudiants en M2 à l’INSPE : depuis la réforme de 2021 en effet, ils cumulent stages, mémoire de fin d’année et concours à passer sur la même année scolaire (avant cette réforme, les étudiants passaient le concours en M1) . Résultat : d’après une enquête des INSPE portant sur l’année scolaire 2021-2022, 72% des étudiants trouvent la charge de travail trop lourde.
De 25 à 5 étudiants…
Conséquence : les jeunes sont de moins en moins nombreux à suivre un parcours de formation les destinant à ce métier, pour le premier degré comme pour le second degré.
La formation des enseignants devrait être réformée en 2025, avec entre autres, le projet de placer le concours en fin de licence. Mais sera-ce suffisant ?
A ce jour en tout cas, la situation est préoccupante : les masters MEEF sont désertés et ils offrent peu de débouchés :
Je suis passé d'environ 25/30 étudiantes et étudiants en M1 MEEF (chiffres constants depuis 2015) à 5/6 depuis l'an passé.
La réforme du CAPES et de la formation a fini d'enterrer le MEEF.
Par ailleurs, dans le 2nd degré, il ne permet pas une véritable spécialisation disciplinaire.Le Master MEEF n'a pas beaucoup d'autres débouchés que l'enseignement et on ne peut pas dire que le secteur soit attractif...
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Tribune inquiète dans "Mediapart" du 24/03/23 : "Formation des enseignants : un projet de réforme hors sol et inquiétant"
Ces derniers jours a circulé un document de travail du gouvernement, présentant dans les grandes lignes un projet de réforme de la formation des enseignants, du primaire et secondaire (collège et lycée). Souhaitée par G. Attal, construite à la va-vite et sans réel travail de consultation avec les acteurs de terrain ni les spécialistes, cette réforme devrait être mise en place à partir de la rentrée prochaine.
Nous, enseignants et enseignants-chercheurs intervenant dans la formation des futurs enseignants, ressentons aujourd’hui malaise et inquiétude. Alors que le nombre de candidats aux concours de l’enseignement ne cesse de diminuer, cette réforme fragilise un système déjà mal en point. En effet, ce qui nous en est parvenu apparait extrêmement problématique, sur le fond et sur la forme.
Sur le fond, le projet annoncé conduirait à diminuer à nouveau l’apport de connaissances fondamentales, au profit d’enseignement dits « didactique et de pédagogie », déjà largement présents dans les formations. S’il est primordial de maîtriser des techniques d’enseignement et de gestion de classe, il est aussi nécessaire de maîtriser les savoirs à transmettre aux élèves.
On ne peut que rapprocher cet affaiblissement programmé du niveau des enseignants d’autres réformes mises en œuvre (manuel labellisé, etc.), visant à appauvrir la capacité de réflexion et la liberté pédagogique des enseignants, pour en faire de simples exécutants.
Sur la forme, la réforme témoigne une fois de plus du mépris et de la violence de ce gouvernement vis-à-vis du personnel de la fonction publique en général, et de l’enseignement en particulier.
Les informations circulent au compte-goutte, par des canaux plus ou moins officiels, provoquant une difficile incertitude. Selon le calendrier proposé, la réforme devrait être mise en place à partir de septembre 2024, soit dans moins de 6 mois. Pourtant, à l’heure actuelle seules les grandes lignes en ont été esquissées et les détails - dont le budget - ne sont pas stabilisés. Ceci signifie que sur le terrain les formateurs seront sommés d’agir dans l’urgence, avec le stress que cela implique.
Plus généralement, pour qui connaît un tant soit peu le système actuel de formation, le projet comporte une multitude de zone d’ombres et soulève autant de questions.
Un simple exemple suffit à l’illustrer : aujourd’hui, les étudiants rentrent à l’INSPE en M1, et passent à la fin du M2 le concours leur permettant de devenir enseignant et d’accéder à la fonction publique. Le projet prévoit de situer ce concours à la fin de la licence. Se pose d’abord la question de savoir qui assumera la préparation à ce nouveau concours : les INSPE ? Les universités ? Avec quels moyens financiers et humains ? Alors que le budget consacré à l'enseignement supérieur et à la recherche vient d'être gravement amputé, la question est loin d'être triviale.
Par ailleurs, alors que les inscriptions en M1 pour l’année prochaine sur la plateforme MonMaster se terminent ce 24 mars, nul ne sait vraiment quel concours sera proposé à ces nouveaux étudiants.
Face au déclin du nombre de candidats aux concours d’enseignement, les gouvernements successifs n’ont proposé depuis une dizaine d’année qu’une série de réformes, toutes plus rapides et inabouties les unes que les autres. En l’espace de 10 ans, les IUFM sont devenus ESPE puis INSPE et seront désormais les ENSP ; le concours a été placé pour partie en M1 et M2, puis uniquement en M1, puis uniquement en M2, et sera désormais en L3. Systématiquement, et notamment lors de la dernière réforme, les formateurs ont alerté le ministère sur les incohérences des dispositions mises en œuvre. Ils n'ont pas été écoutés. Ces réformes successives ont à chaque fois nécessité des moyens financiers et surtout un important investissement important des équipes de formateurs, psychologiquement coûteux. Avec quels résultats ?
Les causes de la désaffection du métier d’enseignant sont connues : conditions de travail dégradées, établissements vétustes, classes surchargées, successions de réformes délétères imposées sans aucun dialogue, mépris répétés des ministres, gestion problématique des mobilités géographiques et enfin perte régulière du pouvoir d’achat. En dépit des annonces gouvernementales, les enseignants français restent parmi les moins bien payés des pays de l’OCDE, et particulièrement en milieu de carrière.
Afin de rendre la profession plus attractive, la solution la plus évidente est d'en revaloriser les conditions de travail et d'emploi, en particulier le salaire. Au lieu de cela, Attal choisit de baisser les exigences de formation disciplinaire, et de mettre devant les élèves des enseignants moins compétents sur les contenus à transmettre, donc plus susceptibles de se retrouver en grande difficulté dans leurs classes et d'éprouver du mal-être au travail.
Les signataires
Marianne Blanchard, MCF en sociologie, INSPE Toulouse Occitanie Pyrénées
Philippe Germain, MCF en sciences physiques, formateur à l'INSPE de l'académie de Créteil
Cécile de Hosson, PU en didactique de la physique, UPCité
Hugo Harari-Kermadec, PU INSPE Orléans-Tours
Nicolas Hervé, professeur en sciences de l'éducation et de la formation, ENSFEA
Micheline Marie-Sainte, MCF en économie de l'éducation, ENSFEA
Valentin Maron, MCF en didactique de la physique, INSPE Toulouse Occitanie Pyrénées
Christian Martinez Perez, MCF en sociologie, URCA
Sylvie Maurel, MCF en études anglophones, Université Jean Jaurès
Nelly Navarro, PRAG physique chimie, INSPE Toulouse Occitanie Pyrénées
Pierre Verschueren, MCF en histoire, Université de Franche-Comté
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www.lemonde.fr/societe/article/2024/04/0...le_6225493_3224.html
www.lemonde.fr/societe/article/2024/04/0...al_6225522_3224.html
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Dans "Le Monde" du 5/04/24 : "Formation des enseignants : Emmanuel Macron annonce un concours à bac + 3 plutôt qu’à la fin du master"
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Et : "Emmanuel Macron valide le big bang de la formation des enseignants"
Et : "Réforme de la formation des enseignants : des conséquences en cascade pour les universités, à moyens constants"
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Recruter plus d'enseignants en les obligeant à choisir dès la Terminale la voie de l'enseignement et en les obligeant à "devoir des années d'exercice à l’État" ?
Au demeurant, Pap Ndiaye n'avait-il pas vanté la mobilité professionnelle ?
"On entre plus dans le métier enseignant pour que ça se termine par un pot de retraite 40 ans plus tard. Mais on veut pouvoir être enseignant 10 ans, et puis faire autre chose." ( source )
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Philippe Watrelot Ancien enseignant, auteur de "Je suis un pédagogiste" (ESF-Sciences Humaines, 2021).
Emmanuel Macron s’est de nouveau exprimé sur l’éducation lors d’une visite d’école, le 5 avril 2024. On en a surtout retenu l’annonce de la création d’écoles normales du XXIe siècle. Ce projet était déjà dans les tuyaux puisque lors d’un déplacement à Orange le 5 septembre 2023, il disait vouloir « revenir à un système qu’on connaissait par le passé, qui fonctionnait, qui est un peu celui des écoles normales ». Pour les détails, un diaporama intitulé « les écoles normales du XXIe siècle » avait opportunément fuité il y a quelques jours…
Le projet présenté sommairement le 5 avril par le président de la République ressemble beaucoup (avec quelques différences cependant) à ce diaporama élaboré sans concertation. L’annonce principale concerne le placement des concours à un niveau bac +3 en fin de licence (L3) au lieu du master 2 (M2) actuellement. Pour les futurs professeurs des écoles, il pourra être préparé dans des classes préparatoires intégrées et multidisciplinaires.
Les nouvelles licences de préparation au professorat des écoles (LPPE) ne seront pas forcément dispensées à l’université, mais aussi dans des établissements secondaires. Les étudiants qui auront suivi cette licence bénéficieront d’un concours allégé.
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Pour les professeurs de collège et de lycée, les licences exigées seront des licences disciplinaires (lettres, histoire, mathématiques), avec des modules additionnels consacrés à la pédagogie. Ces concours en fin de L3 permettront de suivre un master professionnalisant jusqu’au niveau M2, tout en travaillant.
Pour quelle attractivité ?
En première année de master, les étudiants seront à la fois élèves et fonctionnaires, payés 900 euros nets par mois, sans qu’on ne connaisse encore le nombre d’heures de cours qu’ils auront à dispenser en échange. En deuxième année, ils auront des heures d’enseignement à assurer. Mais ils acquerront le statut de fonctionnaire stagiaire et seront rémunérés 1 800 euros nets par mois. Ils devront des années d’exercice à l’Etat.
Une fois acquis le diplôme de M2, les enseignants deviendront titulaires. Cela correspond plus ou moins à ce que je proposais avec de nombreux autres collectifs depuis 2012. Je ne vais donc pas critiquer ce parcours professionnalisant qui représente un progrès dans la formation des enseignants.
C’est la fin des masters Métiers de l’enseignement de l’éducation et de la formation, dits MEEF, mis en place par Jean-Michel Blanquer en 2017 et réformés avec un concours placé en fin de M2, il y a… deux ans. Cette évolution menée à marche forcée a épuisé les étudiants candidats (et les personnels des instituts nationaux supérieurs du professorat et de l’éducation – Inspé). Or, ces réformes incessantes brouillent la visibilité nécessaire aux éventuels candidats sur leur formation et nuisent à l’attractivité du métier.
Le recrutement au niveau master a asséché le « vivier » des candidats potentiels et limité l’accès au métier des catégories populaires. Le retour du concours d’entrée au niveau de la licence nous ramène à la situation prévalant de 1990 à 2009. Mais notons qu’à la fin de cette période, il y avait déjà une baisse des inscriptions aux concours. De même, les niveaux de rémunération envisagés correspondent à ce qui était proposé en M1 et M2 avant la dernière réforme. Ce fut sans effet sur l’attractivité.
Car celle-ci ne tient pas qu’à la rémunération, qui ne fait pas l’objet d’une revalorisation réelle. Avec ce schéma de recrutement, on reste dans le mythe d’une « vocation » apparue très tôt. De plus, les diplômes obtenus (licence et master spécifiques) auront-ils une valeur sur le marché du travail en cas de changement de métier ? On peut en douter.
L’attractivité dépend aussi du système de mutation. Apprendre qu’on est bloqué dans son département (pour les professeurs des écoles) ou envoyé à l’autre bout de la France pour une durée indéterminée (pour les professeurs des lycées et collèges) est de moins en moins bien accepté.
L’attractivité tient aussi aux conditions et à la qualité du travail. Or, le projet vise à préparer les futurs enseignants à un métier d’exécution de « bonnes pratiques », comme le révélait une autre fuite du Conseil scientifique de l’éducation nationale (CSEN).
Jules Ferry nostalgie
Sur le plan institutionnel, les universités sont sommées de créer (à moyens constants) les licences prévues sans aucun respect pour leur autonomie. C’est une remise en cause du long mouvement d’« universitarisation » de la formation des enseignants, rappelle Claude Lelièvre. La gouvernance et les contenus seraient en effet contrôlés directement par le ministère, les rectorats et l’inspection.
Ce sont donc aussi les Inspé et leurs formateurs actuels qui sont balayés par une « reprise en main » évidente. Celle-ci semble être la vraie raison de cette réforme.
Sur le plan pédagogique, « les actuelles propositions françaises de réforme des contenus de formation des enseignants empruntent une voie opposée à l’idée d’une autonomie professionnelle des praticiens dans leur activité d’enseignement », nous alertent les professeurs en sciences de l’éducation Patrick Rayou et André Robert.
Est aussi présente l’idée de se recentrer sur les « fondamentaux » et d’abandonner toutes les « lubies pédagogistes ». Le fait d’appeler écoles normales ces futurs lieux de formation relève d’une nostalgie de l’époque de Jules Ferry, mais aussi d’un fantasme de contrôle des enseignants.
Les écoles normales auraient « formaté » (normalisé) les instituteurs selon les caprices des hommes au pouvoir – ce qui n’était absolument pas la réalité, ni dans les écoles normales elles-mêmes ni, moins encore, dans les esprits de ceux qui en sortaient. Mais c’est un impensé obsessionnel chez Emmanuel Macron.
Côté calendrier, l’installation des écoles normales du XXIe siècle s’étend de 2024 à 2027 (tiens ? c’est l’année des présidentielles…) avec une mise en place des nouvelles licences et des nouvelles écoles normales supérieures de professorat (ENSP) dès la rentrée 2025.
Mais d’ici là, qui seront les premiers étudiants à suivre ce parcours qu’Emmanuel Macron qualifie de « prépa intégrée » ? Sur Parcoursup, la période des vœux est close depuis le 4 avril et les actuels parcours préparatoires au professorat des écoles (PPPE) ne pourront pas suffire à former les effectifs nécessaires.
Quant aux Inspé et à leurs personnels, ils risquent d’être confrontés à un véritable plan social. J’ai écrit que les formateurs devraient faire un aggiornamento en réfléchissant à leur pédagogie, mais certainement pas comme ça et dans ces conditions ! Pour leur défense, les Inspé n’ont cessé de s’adapter aux injonctions de l’Etat qui leur demandait de travailler dans des conditions infaisables.
L’intendance suivra ?
Dans un contexte d’austérité budgétaire, on voit bien que cette réforme va se faire à moyens constants alors que la formation et la fidélisation des enseignants devraient être considérées comme un investissement.
La montée du niveau de recrutement ou de formation a été une revendication syndicale pour signifier à la fois l’exigence et la technicité du métier en ancrant sa revalorisation au niveau master.
Le retour à un recrutement en L3 peut donc être mal compris. C’est ce qui explique l’opposition du principal syndicat du secondaire (le Snes-FSU), qui y voit le risque d’une baisse des rémunérations et des exigences académiques.
La distinction entre « diplôme d’entrée » (au concours en L3) et « diplômation de sortie » (à l’issue de la formation en M2) peut ne pas être bien comprise, alors que c’est pourtant la règle pour des formations d’ingénieurs, par exemple. Cette architecture a été l’une des revendications de plusieurs collectifs créés dès 2012 (dont je faisais partie). Elle est une réalité dans de nombreux pays et y fonctionne assez bien !
Le principe d’une formation « professionnalisante » ne semble en effet pas complètement acquis pour certains enseignants, qui voient leur métier uniquement au travers du prisme des savoirs académiques. On peut aussi s’inquiéter de la distinction des formations entre professeurs des écoles et professeurs des lycées et collèges, alors qu’il s’agit du même métier.
Cette énième réforme à marche forcée est donc encore une fois représentative de l’instrumentalisation des questions éducatives par le gouvernement et de son mépris à l’égard des personnels éducatifs. L’intendance suivra ? Pas sûr… Attention à l’accident industriel derrière le volontarisme : on ne gère pas l’éducation comme les chantiers des Jeux olympiques !
M. Watrelot défendant depuis longtemps une formation moins universitaire (et ayant applaudi l'évolution récente de concours plus "professionnalisants" comme nous l'avons étudié ici ), étudions son curieux pas de deux consistant à critiquer la réforme tout en l'applaudissant !
M. Watrelot proteste contre les changements incessants dans les réformes mais son opposition semble de pure forme.Pour les professeurs de collège et de lycée, les licences exigées seront des licences disciplinaires (lettres, histoire, mathématiques), avec des modules additionnels consacrés à la pédagogie. Ces concours en fin de L3 permettront de suivre un master professionnalisant jusqu’au niveau M2, tout en travaillant. [...] Une fois acquis le diplôme de M2, les enseignants deviendront titulaires. Cela correspond plus ou moins à ce que je proposais avec de nombreux autres collectifs depuis 2012. Je ne vais donc pas critiquer ce parcours professionnalisant qui représente un progrès dans la formation des enseignants.
A noter que M. Watrelot n'a visiblement pas compris qu'il n'y a pas de "retour du concours d’entrée au niveau de la licence" puisque le nouveau concours se situerait EN FIN de licence, et non APRES la licence (ce qui n'est pas sans poser la question de la préparation au concours concomitante à l'achèvement d'une licence).
Pour M. Watrelot, la crise de l'attractivité "ne tient pas qu’à la rémunération" : il incrimine également le système de mutation (inchangé dans le primaire) ou les "conditions" et la "qualité du travail" d'enseignants qui seraient tenus d'appliquer à l'avenir les "bonnes pratiques" (comme si ce n'était pas le cas dans les formations qu'il a lui-même défendues depuis des décennies).
Car M. Watrelot s'oppose à la réforme pour d'autres raisons :
Et de défendre - curieusement - l'"autonomie professionnelle des praticiens dans leur activité d’enseignement" contre "un fantasme de contrôle des enseignants" comme si les IUFM, Éspés et Inspés n'avaient pas exercé ce contrôle tyranniquement depuis plusieurs décennies. Nous en avions donné un exemple frappant ici . D'ailleurs, en 2015, quand il s'agissait de priver les enseignants de leur liberté pédagogique pour mettre en œuvre les absurdes enseignements pratiques interdisciplinaires de la réforme du collège, M. Watrelot était moins concerné par "l'autonomie professionnelle des praticiens". A moins qu'il pense à d'autres praticiens, ce que confirme la suite du billet.Une remise en cause du long mouvement d’« universitarisation » de la formation des enseignants [...] La gouvernance et les contenus seraient en effet contrôlés directement par le ministère, les rectorats et l’inspection. Ce sont donc aussi les Inspé et leurs formateurs actuels qui sont balayés par une « reprise en main » évidente. Celle-ci semble être la vraie raison de cette réforme.
M. Watrelot fustige la "nostalgie" du retour aux écoles normales mais ne fait en réalité aucun bilan de ces dernières décennies : la formation, devenue scientifique et universitaire des enseignants s'est accompagnée d'une chute sans précédent des compétences des élèves. Mais la principale inquiétude de M. Watrelot ne va pas aux élèves mais aux pédagogues sans élèves qui "risquent d’être confrontés à un véritable plan social", à vrai dire difficile à concevoir puisque les étudiants devront bien être encadrés pendant deux ans après le concours. L'inquiétude de M. Watrelot va plutôt à la forme que prendra cet encadrement.
Pour le reste, la réforme mérite d'être expliquée et appliquée !
Et M. Watrelot, qui fustige le "mépris à l’égard des personnels éducatifs", de conclure en beauté sur l'insuffisance des enseignants :Le retour à un recrutement en L3 peut donc être mal compris. C’est ce qui explique l’opposition du principal syndicat du secondaire (le Snes-FSU), qui y voit le risque d’une baisse des rémunérations et des exigences académiques. La distinction entre « diplôme d’entrée » (au concours en L3) et « diplômation de sortie » (à l’issue de la formation en M2) peut ne pas être bien comprise, alors que c’est pourtant la règle pour des formations d’ingénieurs, par exemple. Cette architecture a été l’une des revendications de plusieurs collectifs créés dès 2012 (dont je faisais partie). Elle est une réalité dans de nombreux pays et y fonctionne assez bien !
Le principe d’une formation « professionnalisante » ne semble en effet pas complètement acquis pour certains enseignants, qui voient leur métier uniquement au travers du prisme des savoirs académiques.
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Et : "La réforme de la formation des enseignants suscite une grande perplexité dans les universités"
Et cette tribune collective le 7/05/24 : "« L’instabilité de la formation des enseignants nuit à l’efficacité du système éducatif »"
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Paris, le 9 mai 2024
La SoPHAU, la SHMESP, l’AHMUF, l’H2C, le CNFG et l’APHG ont pris connaissance, via le réseau des INSPE et des VP CFVU, de documents relatifs aux épreuves et au programme du nouveau CAPES d’histoire-géographie projeté par le gouvernement pour une application dès 2025.
Les associations signataires déplorent le maintien à l’oral d’admission d’un « entretien d’embauche » privé de toutes références disciplinaires, de toute grille d’évaluation précise et dont le contenu oscille entre l’incantation creuse et le flou absolu. Si elles se réjouissent que les trois autres épreuves intègrent l’évaluation de contenus disciplinaires, elles s’interrogent sur ce que les futurs jurys du concours pourront demander aux candidats.
Les programmes proposés réussissent en effet le tour de force de ne pas couvrir l’ensemble des programmes du Secondaire tout en étant tellement vastes qu’il sera impossible aux universités de proposer une préparation sérieuse en dehors d’un simple survol et aux candidats d’avoir la maîtrise fine des questions imposées au programme. Le gouvernement considèrerait-il que le concours doive se borner à un contrôle de connaissances génériques sur quelques points saillants de l’histoire et de la géographie du monde qu’il aura estimés suffisants pour la formation minimale des collégiens et des lycéens ?
Relevant avec inquiétude à la fois l’étendue et l’indigence des programmes d’histoire-géographie dans le projet de réforme du CAPES, la SoPHAU, la SHMESP, l’AHMUF, l’H2C, le CNFG et l’APHG considèrent que l’exigence disciplinaire - fondée sur de vraies questions de concours, dérivées de celles des agrégations - ne peut être atteinte dans ces conditions. Un pareil saupoudrage - à la seule hauteur minimale des manuels du Secondaire - ne peut permettre ni le recul ni la mise en perspective des notions essentielles vite évoquées, qui supposeraient plus de deux ans et demi d’apprentissage en Licence si on envisage un concours à Bac + 3.
Plus fondamentalement, de tels intitulés remettent en question le rôle même du professeur. Dans cette configuration, celui-ci se limiterait à l’accompagnement ne varietur, si ce n’est à l’explicitation formelle, des contenus des manuels sans capacité d’apports critiques qu’une formation certes plus limitée sur un sujet donné permettrait d’évaluer dans toutes ses dimensions (techniques, historiques/géographiques, historiographiques), seules garanties d’une compétence adaptée et adaptable. Si l’histoire et la géographie sont bien des sciences cumulatives, le CAPES d’histoire-géographie n’a jamais consisté à vérifier que les candidats possédaient la seule maîtrise superficielle des programmes du Secondaire. Le concours sanctionne une formation complète et poussée, qui dote les candidats des méthodes et de la curiosité intellectuelle pour pouvoir enseigner aussi des thèmes peu abordés dans leur cursus universitaire.
En un moment où les récits historiques sont l’objet de fortes manipulations et où les publics scolaires attendent de leurs professeurs des réponses scientifiquement argumentées à des questions sensibles, faire des futurs titulaires du CAPES de simples commentateurs du Bulletin officiel et des fiches Eduscol annonce une régression politique et sociale dangereuse.
La SoPHAU, la SHMESP, l’AHMUF, l’H2C, le CNFG et l’APHG réitèrent donc leur opposition unanime à la réforme en cours de la formation des enseignants, tant sur le fond que sur la forme, et demandent le rétablissement d’un CAPES à Bac + 4 dont le programme serait articulé au programme des agrégations externes.
Société des professeurs d’histoire ancienne de l’Université (SoPHAU)
Société des historiens médiévistes de l’enseignement supérieur public (SHMESP)
Association des historiens modernistes des universités françaises (AHMUF)
Historiennes et historiens du contemporain (H2C)
Comité national français de géographie (CNFG)
Association des professeurs d’histoire et géographie (APHG)
Voir aussi : www.lemonde.fr/education/article/2024/05...6233112_1473685.html
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