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La réforme de l'école en Italie
- Beniamino Massimo
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Le gouvernement Renzi s'est lancé il y a plusieurs mois dans une entreprise de refondation du système scolaire. La loi 107, dite « buona scuola », s'attaque à de nombreux domaines, dont celui de la « valorisation du mérite » des enseignants. Il s'agit de débloquer plusieurs centaines de millions d'euros à répartir sous forme de primes aux enseignants méritants. L'attribution de ces primes revient en dernier recours aux chefs d'établissement, sur la base de critères retenus par un comité d'évaluation composé du CdE, de trois professeurs, d'un délégué des parents et d'un délégué élève (dans le second degré).
Une circulaire sur ces primes au mérite a été publiée il y a dix jours ( lien ) : elle rappelle qu'il faut laisser une grande autonomie aux établissements dans les critères d'attribution, mais qu'il ne faudra pas distribuer les primes à tout le monde ni à un nombre trop limité d'enseignants.
Jusqu'ici, j'ai déjà quelques difficultés à comprendre comment ce système sera mis en place. Une initiative locale me laisse encore plus perplexe : on apprend ici qu'un établissement de la région de Naples invite les familles à voter, lors de réunions parents-professeurs, pour trois enseignants de l'école qui se seraient particulièrement distingués d'une manière ou d'une autre. L'auteur de l'article dit avoir contacté l'établissement pour tenter d'en savoir plus, mais il n'avait pas reçu de réponse quand le texte a été rédigé il y a une dizaine de jours. Il avance l'idée que ce vote des parents pourrait précisément être utilisé comme critère lors de l'attribution des primes au mérite, bien que la note interne publiée sur le site de l'établissement n'en fasse pas mention.
Il ne s'agit pas de faire d'un cas particulier une généralité, mais il est naturel de se demander, comme le fait l'article, si des établissements songent à faire intervenir les parents pour aider à l'attribution des primes au mérite. L'initiative me paraît avoir quelque chose de contestable (euphémisme).
Malgré les clarifications apportées par la récente circulaire, beaucoup de points restent très flous quant au fonctionnement du comité d'évaluation des enseignants.
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- Beniamino Massimo
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En attendant, voici ce que j'ai écrit hier sur l'autre forum à propos de l'évaluation. Pour replacer les choses dans leur contexte, je précise tout de même que jusqu'ici, l'Italie faisait partie des quelques pays européens où l'évaluation individuelle des enseignants est à peu près inexistante après la titularisation, comme la Norvège et la partie écossaise du Royaume-Uni notamment.
Quelques nouvelles des primes au mérite et des comités d'évaluation des enseignants. Les choses se précisent dans beaucoup d'établissements, de la maternelle au lycée. Un article de La Repubblica d'il y a quelques jours et des témoignages lus en vitesse dans la presse locale montrent que les textes sont interprétés de nombreuses manières différentes.
Certaines écoles semblent se diriger vers des primes à l'ancienneté, distribuées en priorité aux enseignants tout proches de la retraite. D'autres voudraient consacrer au moins une partie de ces primes aux tuteurs des professeurs débutants.
D'autres encore ont déjà créé des grilles alignant jusqu'à 30 critères très précis pour donner une impression de transparence (c'est du moins ce qu'affirme la plateforme it.blastingnews.com, dont j'avoue ne pas connaître la fiabilité, à propos d'un établissement de Turin) : les enseignants cumuleraient ainsi des points tout au long de l'année, et les mieux classés remporteraient les primes en jeu (la dotation est de l'ordre de 24 000 € par établissement et par an).
La Repubblica donne comme exemple un établissement de Florence où des points seront attribués, entre autres, à ceux qui accompagnent des élèves à une exposition le week-end, qui se chargent du compte-rendu des réunions ou qui s'investissent dans le domaine du numérique. Ailleurs, on trouve cités, pêle-mêle, des critères du type « participation à des projets internationaux », « prix remportés par les élèves dans les projets inter-établissements », « utilisation du TNI », « sortie théâtre le dimanche », etc.
Dans un lycée hôtelier de Naples, on a pensé à donner des points aux professeurs qui se montrent « enthousiastes » dans leurs cours — et à en retirer à ceux qui sont trop souvent absents, naturellement.
À Bari, un établissement fait feu de tout bois et veut faire pleuvoir les points pour l'animation du club échecs, le rangement des salles ou la bonne tenue des espaces verts.
Et puis le Messaggero Veneto m'apprend qu'à Pordenone, on a demandé leur avis à des lycéens membres d'un comité d'évaluation. Leur verdict est formel : le bon prof, c'est celui qui est à l'écoute et qui réexplique ; on en a donc fait un critère d'évaluation. Oui, il fallait y penser.
Rassurons-nous, dans trois ans, le ministère fait le bilan des meilleures trouvailles du nord au sud de l'Italie et impose sa liste nationale de critères.
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- Beniamino Massimo
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a1. l'enseignant donne les résultats des évaluations orales le jour même
a2. l'enseignant évalue les épreuves écrites dans un délai de trois semaines
a3. l'enseignant met moins de trois semaines à corriger les épreuves écrites
a4. l'enseignant fait appel à toute la palette des notes de 1 à 10
a5. l'enseignant évalue rapidement, avant le délai de trois semaines, les épreuves écrites de fin de semestre
etc.
(Le délai de trois semaines s'explique, je suppose, par la longueur et la densité des copies à ce niveau de la scolarité, en lycée scientifique).
On demande aux lycéens de remplir un questionnaire et d'indiquer les délais de correction de leurs professeurs. Oui, oui.
La deuxième partie de la grille est consacrée aux choix didactiques de l'enseignant : c'est une fiche d'auto-évaluation dont le proviseur peut vérifier l'honnêteté.
Je m'arrête là pour l'instant. J'aimerais me pencher sur d'autres cas comme celui-ci dans les semaines à venir.
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- Beniamino Massimo
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- la qualité de l'enseignement et la participation au fonctionnement toujours plus efficace de l'établissement ;
- les résultats obtenus par un enseignant ou un groupe d'enseignants dans le développement des compétences des élèves et de l'innovation didactique et méthodologique ; la contribution à la recherche dans le domaine de la didactique, à la constitution de banques de documents et à la diffusion des bonnes pratiques didactiques ;
- l'investissement dans la coordination organisationnelle et didactique et dans la formation du personnel.
Dans l'ensemble, les syndicats n'ont pas réellement protesté contre le principe de la « valorisation du mérite » en lui-même. Par exemple, la Cgil, le plus vieux syndicat d'Italie, s'en prend avant tout à la figure du chef d'établissement, qui se voit investi d'un pouvoir dans le domaine salarial et dans le domaine didactique, lui qui est censé s'occuper avant tout de gestion administrative. La Cgil et d'autres disent encore que la prime au mérite introduit de graves éléments de division au sein du corps enseignant et contourne les négociations habituelles entre les différents partenaires (entre représentants syndicaux et direction, par exemple).
À suivre.
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Notez que c'est ce qui commence à se passer avec les IMP dans nos lycées français.
J'ai hâte de savoir comment s'évalue l'enthousiasme. Il faudra aussi évaluer celui des élèves.Dans un lycée hôtelier de Naples, on a pensé à donner des points aux professeurs qui se montrent « enthousiastes » dans leurs cours — et à en retirer à ceux qui sont trop souvent absents, naturellement.
Un doute me saisit néanmoins : ne peut-on être enthousiaste et parfaitement incompétent ?
L'idée de "mérite" enseignant s'écroule ici...La Repubblica donne comme exemple un établissement de Florence où des points seront attribués, entre autres, à ceux qui accompagnent des élèves à une exposition le week-end, qui se chargent du compte-rendu des réunions ou qui s'investissent dans le domaine du numérique. Ailleurs, on trouve cités, pêle-mêle, des critères du type « participation à des projets internationaux », « prix remportés par les élèves dans les projets inter-établissements », « utilisation du TNI », « sortie théâtre le dimanche », etc.
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- Beniamino Massimo
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Je ne résiste pas à l'envie de citer le président de l'INDIRE, un institut de recherche et d'innovation dans le domaine éducatif. Dans l'article de La Repubblica susmentionné, Giovanni Biondi affirme qu'il faut absolument « valoriser le travail des professeurs qui réussissent à enseigner de manière innovante, en transmettant le virus à leurs collègues et en éveillant l'intérêt des élèves ». Et il ajoute : « c'est quelque chose de nouveau pour nous, mais en France et au Royaume-Uni le système est déjà bien rodé. À la différence près que dans ces pays, on envoie un inspecteur extérieur à l'école pour assister à un cours et évaluer l'enseignant. Alors que chez nous, de façon beaucoup plus transparente, on a confié l'évaluation à l'ensemble de la communauté éducative ». Je sens qu'il y aurait des choses à dire sur ce point.
P.S. : merci d'avoir ouvert vous-même ce fil.
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- Beniamino Massimo
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Les enseignants débutants seront affectés dans un premier temps non plus à un poste en établissement mais à une zone géographique (en théorie de taille inférieure à une province). Au sein de cette zone géographique, ils postulent dans les établissements qu'ils souhaitent ; les CdE reçoivent les CV et sélectionnent les profils « en adéquation » avec le « plan triennal d'offre de formation » (POTF) de l'établissement ; des entretiens avec les candidats peuvent être menés. Ceux qui sont recrutés le sont donc pour trois ans, renouvelables tant que le profil de l'enseignant est compatible avec le POTF. À charge pour l'équivalent des rectorats d'affecter les candidats qui n'ont pas trouvé de plan triennal à la mesure de leurs compétences.
On pourrait déjà discuter de cette révolution sur des pages et des pages. Je me contente pour l'instant de livrer les faits sans trop les commenter. Un point toutefois me paraît mériter sans détour une réaction, quels que soient les éventuels bienfaits de la réforme Buona Scuola. Au nom de la transparence, on demande aux établissements, de la maternelle au lycée, de publier en ligne les CV des enseignants nouvellement recrutés. Les critères de sélection, les responsabilités confiées, le profil des enseignants : tout doit être public pour éviter les abus. Le format sera probablement celui du CV européen : expériences, « compétences » (professionnelles, communicationnelles, informatiques...), diplômes, éventuelles publications et participations à des colloques, etc. Cela ressemble tout de même furieusement au défunt projet de la berlusconienne Mariastella Gelmini, inoubliable ministre de l'Instruction de 2008 à 2011, de créer un registre en ligne où auraient figuré en outre la date et le lieu de naissance de tous les enseignants. La réponse fut un boycott massif.
Invoquer l'innovation et la transparence, voilà qui permet de faire avaler bien des couleuvres, tout de même.
Lire notamment :
www.orizzontescuola.it/news/chiamata-doc...resentare-ai-presidi
www.rainews.it/dl/rainews/articoli/Ddl-L...408a.html?refresh_ce
www.leparoleelecose.it/?p=19112
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- Beniamino Massimo
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L'opposition semble nettement moins radicale qu'il y a quelques mois, quand des représentants syndicaux et le Mouvement 5 étoiles de l'ex-comique Beppe Grillo promettaient d'engager un « Vietnam judiciaire » contre la réforme de l'école. C'est que les syndicats, aujourd'hui, ne sont pas d'accord sur la méthode à adopter. La Cgil demande un référendum pour abroger les mesures les plus contestées de la réforme, la Cisl préfèrerait que la majorité revienne d'elle-même sur certaines décisions, la Uil est entre les deux.
www.tecnicadellascuola.it/item/20468-sin...tti-piu-dannosi.html
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- Beniamino Massimo
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En quelques mots, car le temps manque, comme toujours, voici les critères les plus ahurissants. Des points sont attribués ou retirés en fonction :
- du nombre de jours d'absence, y compris pour raisons de santé
- du nombre d'heures de formation ou de mise à niveau effectuées (25 points pour plus de 50 heures dans l'année, -5 points pour 0 heure !)
- de la clarté des explications données aux élèves
- de l'utilisation de schémas et/ou de cartes
- de l'utilisation du multimédia
[Ces 3 critères sont évalués grâce à un questionnaire rempli par les élèves et les parents, et par l'observation directe du cours par le CdE]
- de la progression des résultats des élèves
Et la cerise sur le gâteau :
- d'éventuels rapports conflictuels avec le CdE (-5), d'autres enseignants (-5), des élèves (-5), des parents (-5), d'autres acteurs locaux (-5)
- du refus d'assumer des responsabilités à la demande du CdE (référent sécurité, tuteur stagiaire, référent numérique, etc.).
On ne sait pas par où commencer tellement cette grille accumule les aberrations. Elle n'est heureusement pas passée inaperçue, et le parti M5S de Beppe Grillo a déjà interpellé la ministre Giannini à ce sujet. On attend la réponse au parlement.
On en parle ici :
www.tecnicadellascuola.it/item/20547-sei...re-niente-bonus.html
www.tecnicadellascuola.it/item/20605-fin...ne-di-polistena.html
www.repubblica.it/scuola/2016/05/11/news..._calabria-139579497/
L'objet de la discorde dans le texte : www.icfjerace.it/media/uploads/attachments/14611575353836.pdf
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