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"Harry Potter et les zombies à la fac, ou l'overdose «des cours à la con» façon générateur" (Slate)
- Loys
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Cela dit, si on se destine à être historien ou analyste critique de tel ou tel pan de la culture populaire, on peut se demander s'il est utile ou pas d'avoir une discipline universitaire ad hoc. En ce qui concerne la bande dessinée, l'auteur Harry Morgan a répondu comme suit :
Harry Morgan écrit: Il n'y a pas de discipline académique consacrée à la bande dessinée. La recherche sur la bande dessinée ne se fait pas à l'université, mais dans quelques rares revues d'études (souvent faites bénévolement) et dans d'aussi rares institutions savantes du type musée de la BD. Le fait de consacrer sa vie à l'histoire, à l'esthétique ou à la théorie de la BD n'amène aucune reconnaissance d'aucun ordre : même si vous brandissez vos livres ou vos articles, on vous regardera, dans le meilleur des cas, comme un cas intéressant, au pire comme un arriéré. Les livres en question se vendent mal en règle générale. Annoncer dans un dîner en ville qu'on est un spécialiste de Charles Dickens vous vaut une certaine considération ; annoncer qu'on est un spécialiste de Bécassine déclenche l'hilarité. C'est vexant, mais c'est comme cela. Quand on aura fini de se moquer de vous, on vous trouvera « sympa », parce que - voyez comme cela tombe bien - la BD c'est sympa, tout le monde adore cela.
Dans ces conditions, on se demande pourquoi certaines personnes tiennent tant au titre - par la force des choses auto-attribué - de « spécialiste de la bande dessinée ». On a l'impression qu'il y a des gens dont la vie entière ne tient qu'à leur qualité de « spécialiste de la BD » ; si on leur ôte ou si on la met en doute, ils s'étiolent ou font une dépression nerveuse.
(...)
L'article est certainement impeccable en ce qui concerne la sociologie, le déconstructivisme et le reste ; mais vous n'avez aucune garantie en ce qui concerne la BD, parce que même si les articles sont évalués (peer reviewed) avant publication, les gens qui font cet examen ne sont pas compétents en matière de BD. Il y a des travaux de sémiotique dont les auteurs démontrent qu'ils n'ont JAMAIS VU les bandes dont ils prétendent faire la théorie. Ils ne savent littéralement pas A QUOI CELA RESSEMBLE. Ca nes les empêche pas de faire accepter des études de 40 pages dans des « revues d'orientation sémiotique ». Lisez l'article et décidez si l'auteur est compétent en matière de BD. Si ce n'est pas le cas, les fameuses théories ne servent pas à grand chose (on ne peut pas appliquer une théorie à ce qu'on ne connaît pas).
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- Loys
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C'est le problème de ce genre d'études : par essence elles vieillissent très vite...Shane_Fenton écrit: Au temps lointain d'avant la démocratisation d'Internet, on appelait ça les "Madonna Studies". On en a même fait des livres, dont The Madonna Connection de Cathy Schwichtenberg. Mais même ce terme a fini par devenir vieux...
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- Loys
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Parce qu'en revanche considérer que tous les sujets se valent dans le domaine culturel, c'est une preuve de progressisme courageux : c'est vouloir conduire ceux qui n'ont pas accès à la culture vers une culture qu'ils connaissent déjà.Enlevez-le, retirez ce contexte où certaines pratiques sont attribuées aux classes populaires et considérées comme de faible valeur, et il n'y a tout simplement plus lieu de rire. Si vous acceptez l'idée que Games Of Throne fait jeu égal avec Proust ou Zola, alors le titre suivant n'est plus drôle. [...] Le problème est que, quand on fait de l'humour qui s'appuie sur un mépris culturel ou un mépris de classe, on peut se rendre compte qu'on ne fait pas rire les bonnes personnes : par exemple, on peut faire rire les conservateurs qui pensent que seule la culture classique a droit de cité dans l'université, tandis que l'on énervera ceux qui essayent de promouvoir les Cultural Studies en France.
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Denis Colombi n'a pas tort de faire remarquer que pas mal de ces intitulés pourraient être ceux de cours sérieux et intéressants.
Pour le reste, bien sûr, sa vision de l'humour, comme d'habitude chez lui, est tout à fait lamentable.
Visiblement, trouver que les intitulés en question prêtent à rire, c'est obligatoirement signe de "mépris culturel".
On ne peut pas trouver ça drôle simplement à cause de leur conformation syntaxique si typique (Je n'ai pas vu de chiasme, c'est dommage. Les chiasmes dans les titres, ça fait toujours bien, disait un de mes professeurs d'histoire), il faut que ce soit du mépris de classe de la part du lecteur.
Mais c'est vrai, l'article d'Anaïs Bordages, qui accompagne le générateur, au lieu du ton décalé, détendu de celui qui fait une aimable farce, exsude plutôt ce que j'appellerais la "condescendance Sciences-Po" (dont elle sort apparemment).
Ceux qui ne voient pas de quoi je parle liront utilement les billets de Maadiar sur la question (attention, c'est quelque peu NSFW) :
maadiarcochon.blogspot.fr/2009/07/je-chi...-les-elites-moi.html
maadiarcochon.blogspot.fr/2009/07/rezou.html
maadiarcochon.blogspot.fr/2009/07/je-cra...ans-la-soupe-iv.html
maadiarcochon.blogspot.fr/2009/07/fin-scp-v.html
Sinon, pour critiquer un cours, je pense qu'il faut voir à qui il s'adresse, qui y assiste et dans quel but.
Vraiment, les étudiants de Sciences-Po n'ont pas accès à la culture ? Ou d'une manière générale, les gens qui font des études supérieures n'ont pas accès à la culture ?Loys écrit: c'est vouloir conduire ceux qui n'ont pas accès à la culture vers une culture qu'ils connaissent déjà.
Typhon
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Source : www.laviemoderne.net/veille/les-bourdieu...n-des-profs-25-03-12L’école soumet les élèves à des injonctions contradictoires : pensez par vous-même, répétez ce qu’on dit. Prenez des risques, ne vous trompez pas. Apprenez par cœur, ne plagiez jamais. Ces contradictions sont structurelles, inscrites dans les fonctions ambivalentes de l’institution. D’un côté, on impose aux élèves une culture dominante de pure autorité. De l’autre, on leur demande d’entretenir la fiction selon laquelle cette culture est librement choisie, aimée, appréciée comme supérieure par tous. La bonne élève, c’est celle qui a le bon goût de sincèrement aimer Flaubert.
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A propos des «études à la con»
(par Anaïs Bordages)
Certains d’entre vous ont eu de très vives réactions lors de la publication de ce générateur de «cours à la con». Plus particulièrement, beaucoup ont été vraisemblablement choqués par les expressions de «cours à la con» et «doctorat en bullshit», reprochant un travail journalistique bâclé. Au mieux. (Je passe sur les insultes de certains se disant professeurs).
Ceci n’était pas une enquête. Ni un reportage, ni une tribune, ni une thèse de doctorant. Ceci était un générateur: comme son nom l’indique, c’est un outil rigolo qui permet de générer de faux intitulés de cours à chaque fois que l’on clique dessus.
De nombreux médias ont parlé de l’arrivée d’un cours sur Harry Potter à Sciences Po. Ayant moi-même suivi certains cours dont le nom provoque inéluctablement un fou rire à chaque fois que j’en parle —notamment «Théorie du jeu vidéo»—, j’ai voulu imaginer à quoi pourraient ressembler d’autres intitulés du même genre.
Le générateur créé par Slate propose donc des titres de cours volontairement exagérés. Certains pourraient facilement être pris au sérieux («Sociologie de la masculinité dans les médias populaires»), d’autres sont un peu capillo-tractés («Géographie de la pensée platonicienne dans Top Chef»).
Dans tous les cas, il ne s’agissait pas de mépriser le contenu de ces cours ou de dénigrer les Cultural Studies, juste de s’amuser avec les intitulés, et rêver à de nouvelles matières. Personnellement, «Rhétorique de la pornographie dans Game of Thrones» me tente bien.
Par ailleurs, les expressions «cours à la con» et «bullshit studies», en plus de renvoyer à un précédent article de Slate, sont volontairement humoristiques et provocatrices. Si elles ne vous plaisent pas, ou si vous cherchez un traitement plus sérieux du sujet, vous pouvez aller voir ici ou là.
Permettez-moi également de préciser que Slate et moi n’avons rien contre Beyoncé, les blockbusters, les BD, les séries américaines ou les zombies. Au contraire, Slate et moi, on les adore. J'arbore avec fierté un pull Ryan Gosling au travail, la seule poupée que je possède est un Gollum en plastique, et Joss Whedon est une de mes idoles. Buffy contre les vampires, c'est un peu mon point Godwin à moi, si vous voulez tout savoir.
Enfin, je n’ai jamais établi aucune hiérarchie entre les cultures, et j’accorde autant d’importance à Buffy et Alien qu’à Beauvoir et Coltrane, n’en déplaise à La Marquise.
Quant au texte qui accompagne le générateur, il ne fait qu’apporter un peu de contexte, en citant quelques exemples de cours qui abordent des thèmes de la culture populaire. A aucun moment, il ne «crache sur les US» (où j’ai eu la chance de vivre et d’étudier pendant près de deux ans), pas plus qu’il ne «nie l’impact de l’image du zombie dans les séries et le cinéma».
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- Loys
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Le politiquement correct a changé de camp !Enfin, je n’ai jamais établi aucune hiérarchie entre les cultures, et j’accorde autant d’importance à Buffy et Alien qu’à Beauvoir et Coltrane, n’en déplaise à La Marquise.
PS :
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