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"Le catéchisme « antipédago », le « gender » et la nouvelle extrême droite soralo-dieudonniste" (Luc Cédelle)
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Par contre le réformisme pédagogique n'est pas du tout au sommet du Ministère de l’Éducation.Chacun connaît les fondamentaux de la rhétorique « antipédagogiste » installée depuis une quinzaine d’années au sommet des discours en vogue sur l’école et du prêt-à-penser pour politiques en panne de programme.
Pas d'effondrement donc pour Luc Cédelle : c'est curieux, même le ministre le reconnaît.L’école, en proie à un « effondrement »...
Un tableau qui serait assez juste si l'école n'avait pas cette chance d'être conservatrice....aurait renoncé à la transmission comme à l’autorité. Un « constructivisme » sans limites règnerait dans des classes qui ne sont plus des classes, mais des lieux de débats forcés où l’élève doit construire lui-même ses savoirs, etc.
Pour les pédagogistes, que l'anti-pédagogisme soit autant de gauche que de droite a toujours été problématique.Ce discours désormais éculé connaît une infinité de déclinaisons, de droite (beaucoup) à gauche (moins mais fréquent).
Et la pensée recyclée, elle est ridicule, aussi ?Du plus chic au plus vulgaire, depuis le mépris de nombreux universitaires envers toute démarche pédagogique, présentée comme antithèse du « savoir », jusqu’aux diatribes éruptives à la Brighelli, prince littéraire de l’exécration, ou aux ridicules recyclages de Rama Yade sur une Education nationale qui aurait été transformée en « Woodstock » permanent.
Comprendre : prise de position contraire à la pensée pédagogique unique défendue par Luc Cédelle, qui a d'ailleurs déjà eu l'occasion de qualifier mon propre discours de "réactionnaire". Mais c'était sans doute pour sortir de la "polémique"...Un nouvel avatar
Chaque fois que l’on croit pouvoir tourner la page, quitter le théâtre des polémiques délirantes pour de nécessaires confrontations argumentées (dont le dialogue Meirieu/ Kambouchner pourrait être un modèle), ce type d’atrocité intellectuelle...
Que le discours républicain soit ainsi récupéré (en partie seulement car une bonne partie de la droite ne souhaite pas pour l'école la même chose que les républicains : il n'y a qu'à voir les revendications de "SOS éducation") montre surtout la tentative d'occupation d'un vide politique, celui d'une réflexion sereine et lucide sur l'état de l'école....ressurgit, inépuisablement relancé par une quelconque entreprise éditoriale ou politique peu scrupuleuse. Un nouvel avatar en est apparu là où on ne l’attendait pas, preuve supplémentaire de l’extrême « portabilité » de ce discours.
Finalement Luc Cédelle voudrait faire passer les républicains, qu'il appelle ici anti-pédagogistes, pour des anti-républicains.[...] Qu’il s’agisse de la préservation d’un « arc républicain » maintenant les extrêmes aux marges, qu’il s’agisse de la qualité des débats sur l’école ou de la lutte contre les préjugés homophobes dans les établissements scolaires, cette convergence ne promet rien de bon.
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Au passage, on notera que le point Godwin se modernise : Le Pen père étant trop ringard, et Le Pen fille ne faisant pas assez peur, il reste Soral et Dieudonné.
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- Loys
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Puissant raisonnement, selon une implacable logique consumériste : quand un objet ne fonctionne plus, on ne le répare: on le jette !Si l’école « n’enseigne plus », alors pourquoi la conserver ?
Encore une fois, il s'agit pour Luc Cédelle, il s'agit de discréditer ceux qui critiquent les nouvelles pédagogies et dont le but serait bien sûr... la destruction de l'école républicaine.
Façon d'associer - par cette habile formule - les anti-pédagos aux intégristes religieux anti-genre.Dans un billet récent et à fort impact puisqu'il lançait le sujet des journées de retrait de l'école motivés par la contestation de la soi-disant « théorie du genre », j'ai employé les termes de pédagogues, de « pédagogisme » et d'« antipédagogisme ». J'ai même parlé d'un « catéchisme antipédago ».
C'est vrai que défendre l'école publique ou promouvoir l'école libre et le chèque-éducation, c'est bien la même chose.De quoi énerver beaucoup de monde. Mais qu'y puis-je si des groupes obscurantistes s'emparent, sur l'école, d'un discours rudimentaire qui certes préexistait à leur action mais où ils voient chaussure à leur pied ?
Non, un amalgame, qui plus est grossier.C'est un constat.
Que Luc Cédelle se rassure : cet amalgame a déjà trouvé d'autres "messagers".Attention à ne pas accabler le messager lorsque le message est gênant.
Eclaircissons, éclaircissons.D'autant plus gênant que cette contestation de l'école, sur ces thèmes-là et avec ces outils polémiques-là, est destinée à durer. La vulgate « antipédago », ainsi raccrochée aux controverses sur le genre, a trouvé de nouveaux et enthousiastes propagateurs, à destination de nouveaux publics. Eclaircissons cependant certains points de vocabulaire.
Tous les professeurs par définition des pédagogues, contrairement à ce que prétend Luc Cédelle. Les pédagogistes sont des pédagogues particuliers, tenants des nouvelles pédagogies .Le « pédagogisme », terme péjoratif, est un néologisme inventé par ceux qui voulaient disposer d'une étiquette dévalorisante à l'encontre de leurs adversaires pédagogues dans le débat sur l'éducation.
Tout pédagogue a à cœur de "mieux enseigner", mais pas nécessairement conformément aux nouvelles pédagogies.Certains penseurs ainsi que de nombreux enseignants se situent dans le sillon historique de la pédagogie et des pédagogues, centrés sur la recherche du mieux-enseigner.
On voit ici que "la recherche du mieux-enseigner" (cette manie moderne de substantiver tout et n'importe quoi) n'est l'apanage que de quelques-uns seulement, des élus de la pédagogies en quelque sorte, ayant raison contre tous et la réalité : ce que nous appelons des "pédagogistes".
Ce qu'elle est.Mais personne ne se réclame du « pédagogisme », censé être une perversion de la pédagogie.
Considérer les pédagogistes comme seuls "pédagogues" revient à entrer dans la logique de Luc Cédelle.Par conséquent, employer ce substantif (ou le qualificatif « pédagogiste » qui va avec) revient à entrer dans la logique de ses inventeurs.
Sauf que les anti-pédagogistes ne cherchent pas à discréditer la pédagogie, mais le pédagogisme seulement.Un coup fumant
C'est un peu comme parler de la « théorie du gender »... Ou encore, selon une formule très utilisée à l'extrême droite (mais aussi, dans une acception différente, par le très estimable Rony Brauman), parler de « droit-de-l'hommisme » lorsque l'on veut discréditer la référence aux droits de l'homme.
Il n'y a "d'ambiguïté" que dans l'esprit de Luc Cédelle. Quel enseignant pourrait "refuser en bloc" l'idée d'être pédagogue ?Cette ambiguïté – entre condamner un possible excès et signifier un refus en bloc – est constante dans les usages de la notion de « pédagogisme ».
Chose qui paraît inconcevable à Luc Cédelle, puisque certains seulement ont accès à la pédagogie (voir plus haut).Elle complique les débats, dans la mesure où les tenants du refus global, même et surtout lorsqu'ils accumulent les outrances, ont toujours beau jeu de déclarer leur amour de la « vraie » pédagogie.
Pour le coup, Luc Cédelle a raison. De même que tous les professeurs sont pédagogues, tous sont républicains, du moins peut-on l'espérer. Disons que ce terme s'explique par l'attachement à la tradition scolaire républicaine et à ses ambitions.Longtemps, les antipédagogistes ont profité d'un coup fumant qu'ils avaient réalisé auprès des médias et dans le monde intellectuel, mais dont l'efficacité s'est émoussée avec le temps : ils se faisaient appeler « républicains », annexant ainsi un champ lexical, comme disent les profs de français, avantageux.
Encore une fois, les pédagogistes seraient les seuls pédagogues.Et installant ainsi une confortable opposition entre deux camps supposés : les pédagogues (gentils et bien intentionnés mais un peu bêtas) et les républicains (dignes et fermes héritiers d'une histoire glorieuse).
Quel rapport entre les ZEP et le pédagogisme ?Cette opposition s'est fixée dès 1984, lorsque Jean-Pierre Chevènement avait remplacé Alain Savary, le créateur des Zep, au ministère de l'éducation pour « siffler la fin de la récréation » et que d'anciens maoïstes recyclaient leur agilité dialectique dans la restauration d'une autorité traditionnelle qu'ils avaient eux-mêmes spectaculairement contribué à déboulonner.
Et pour les républicains, l'auteur du "Plan informatique pour tous" ou de "80% d'une génération au Bac" ?
Après l'exécration de Brighelli, la bile de Milner... Un tel usage de l'invective pourrait ranger Luc Cédelle dans ces deux catégories.De cette année date De l'école, de Jean-Claude Milner, ouvrage pionnier et référence de l'antipédagogisme. Un petit bijou de grand style, tout de bile jubilatoire et dont je recommande la lecture (stoïque) à qui souhaite assimiler l'esprit de ce courant de pensée.
Voici le portrait en creux d'un anti-pédagogiste : brutal, doloriste, malthusien. Toute autorité scolaire ne peut être que brutale et arbitraire, toute exigence ou demande d'effort ne peut être que doloriste et toute recherche d'orientation, malthusienne et sélective.Méthodes actives
A noter que l'hostilité aux démarches pédagogiques, considérées comme relevant d'une débilitante compassion envers des élèves dont on attend avant tout qu'ils supportent, obéissent ou soient éliminés de la course, plonge ses racines bien plus loin dans l'histoire.
Ou même du XIXe siècle...Elle a accompagné dès la fin du 19ème siècle...
Eh oui : les nouvelles pédagogies actuelles étaient déjà présentes dans l'école républicaines des années 20 !...la montée de la démocratisation de l'école et l'émergence conjointe des penseurs modernes de la pédagogie, de la sociologie et de la psychologie.
Amusant comme Luc Cédelle tente de donner aux nouvelles pédagogies une patine républicaine. Car bien sûr les opposant aux nouvelles pédagogies ne peuvent pas se réclamer des grands penseurs de l'école républicaine.
Il faudrait nuancer cette prétendue continuité...Jules Ferry, bien que politiquement adepte d'un discours colonisateur raciste comme la plupart des républicains de l'époque (mais pas tous...), se situait sur les questions scolaires dans le camp des défenseurs résolus de la pédagogie et de ce que l'on appelait alors les « méthodes actives ».
Jolie tentative de récupération historique de l'école républicaine.
Pour le coup, cette opposition est bien réelle.Lorsqu'on évoque aujourd'hui, dans sa version actuelle, ce couple pédagogie/antipédagogisme et dès que l'on emploie ce vocabulaire, une critique convenue fuse de toutes parts : on réveillerait une querelle « stérile » et « dépassée » qui, de surcroît, n'aurait aucun écho dans les salles des maîtres ou des professeurs. Une pure création médiatique, en somme, qui n'aurait d'autre but que son auto-prolongation.
Mais jamais dans "Le Monde", dont le parti-pris pédagogiste est sidérant, ou sur un blog du "Monde" comme celui de Luc Cédelle.Cette critique fait bon marché de la façon dont le sujet est sempiternellement relancé : toujours du côté « anti », par un pamphlet saignant, une polémique bien mijotée ou une exploitation politique.
J'observe au contraire que les nouvelles pédagogies entrent chaque jour un peu plus dans l'école : la fréquentation de ce forum suffit pour en attester.Que la querelle soit stérile est difficilement récusable : elle paralyse l'élaboration de solutions nouvelles et tend à bloquer les décisions, toujours ensevelies sous des montagnes de plaidoiries contraires.
On peut l'analyser comme un découragement face à l'impuissance de toute résistance, les nouvelles pédagogies étant toujours imposées d'en haut.Que cette querelle à rallonge n'ait auprès de la base des enseignants qu'un écho assourdi est indéniable mais ne s'explique pas forcément par de « bonnes » raisons : c'est aussi le reflet d'un désintérêt pour l'histoire, les débats et la mythologie du métier, donc aussi pour sa capacité à mobiliser des énergies.
Voire du vœu pieux.Mais proclamer cette querelle « dépassée » relève du vœu pieu...
Très partiellement, même....et finit par être aussi répétitif que la querelle elle-même. Tout indique que ce type de clivage, exactement comme le clivage droite-gauche qu'il ne recoupe que partiellement...
En tout le cas "Le Monde" peut s'exonérer de toute responsabilité dans la permanence de cette querelle....fait partie de ceux qui se renouvellent constamment, une période de creux n'étant que le prélude à son prochain rebond. Même si certains médias se plaisent de temps à autre à lui redonner à eux seuls un éclat neuf, mettre sa permanence entièrement sur le compte des médias relève de l'illusion.
Encore une fois, c'est vouloir simplifier à l'extrême : cette querelle opposait déjà les gaullistes entre eux, avant même mai 68.Les pires absurdités
Au départ à contre-courant dans les années 1980, l'antipédagogisme, dont le poids actuel dans le débat public reste une spécificité française, a lentement mais sûrement fait son chemin dans l'opinion à travers les décennies 1990 et 2000. S'appuyant à la fois sur l'inévitable reflux de l'esprit « permissif » hérité de 1968...
Sauf que ce "durcissement" ne s'est observé sur le plan économique qu'en France dans la dernière décennie....sur le durcissement continu des conditions d'enseignement du fait du chômage de masse...
Il faudrait que Luc Cédelle lise plus attentivement le "fabuleux rapport de la Cour des comptes" pour mesurer le caractère irrationnel de ces "angoisses"....et sur les angoisses diverses liées à la mondialisation libérale...
Curieuse "domination" qui ne s'observe ni au ministère, ni dans les fédérations de parents d'élèves, ni dans la presse de référence,dont "Le Monde"....il s'est imposé comme un discours montant, puis dominant dans les milieux intellectuels et dans une partie grandissante des médias.
Luc Cédelle peut-il donner un seul exemple de média institutionnel qui serait aux mains de l'antipédagogisme dominant ? La résistance aux pédagogies nocives est un exercice solitaire.
Pas grand chose à voir avec le pédagogisme: simple mépris àl'égard des enseignants.Un formidable élan politique lui a, par contrecoup, été donné de 1997 à 2000 du fait des attitudes méprisantes et de la démagogie erratique pratiquée par Claude Allègre lors de son passage au ministère de l'éducation.
Par exemple La Princesse de Clèves...Et une immense chambre d'écho auprès du grand public lui a été offerte plus récemment dans la campagne en 2006-2007, du candidat Sarkozy, qui a repris à son compte dans ses meetings les pires absurdités des polémistes sur l'abolition de l'autorité ou les œuvres du patrimoine littéraire remplacées par du rap.
Il est vrai que Nicolas Sarkozy a souvent tenté de récupérer le mécontentement des enseignements. Mais, dans son discours de Montpellier du 28 février 2012, Nicolas Sarkozy a aussi affirmé que l'école appartenait d'abord aux familles, qu'il fallait supprimer la rupture entre le primaire et le secondaire, réunir les enseignements littéraires d'une part et scientifiques d'autre part avec des professeurs polyvalents, personnaliser l'enseignement (en imposant un temps de présence supplémentaire), constituer des équipes éducatives (avec autonomie des établissements et recrutement par le CDE), la réduction des options, etc.
Le socle commun, la réforme du lycée professionnel, du lycée général, des procédures disciplinaires, la mise en place du conseil pédagogique, etc. : d'autres grandes réformes antipédagogistes de ce quinquennat.
Après l'exécration, la bile : les "petits maîtres"...Mais l'antipédagogisme s'était déjà installé dans la période antérieure comme « le » langage à la mode sur l'éducation, jusqu'à devenir une sorte de passage obligé pour tout petit maître désireux de se faire un nom.
Luc Cédelle reconnaît ici que le pédagogisme est au pouvoir.Plus qu'un langage, une posture intellectuelle et morale : celle du rebelle « à qui on ne la fait pas », rétif aux conceptions reconnues et au langage du pouvoir.
Si elle est dominante, elle n'a guère de pouvoir.Toute l'histoire de l'antipédagogisme ces vingt dernières années est celle d'une protestation devenant progressivement elle-même l'idéologie dominante.
Car les universitaires ne peuvent pas tenir un discours critique à propos des nouvelles pédagogies, bien sûr !Passage obligé
Malgré sa position en haut du podium, l'antipédagogisme n'a pas éliminé les autres discours sur l'éducation, qui continuent d'exister en dehors de lui : discours (variés) des universitaires des sciences humaines ou des sciences dures...
Confirmation : il n'y a pas de pédagogistes mais en revanche il y a les pédagogues et les non-pédagogues.... discours des pédagogues (des vrais, ceux des mouvements ou associations pédagogiques)...
L'opposition est nette entre les deux syndicats autoproclamés "progressistes" et les autres....discours des gestionnaires de l'Education nationale, discours des syndicats, etc.
Tiens, tiens...Mais les travaux des chercheurs en éducation, d'ailleurs séparés entre eux par de profonds désaccords...
Allez savoir pourquoi ! Sans doute parce les enseignants ne sont pas très intelligents....ne parlent pas à l'opinion publique et peu à celle des enseignants. Les mouvements pédagogiques restent influents, mais leurs idées mais ne font pas l'objet d'une appropriation par les enseignants au-delà d'une frange militante.
Il y a aussi un discours offensif (au sens destructeur du terme) et prévisible.Le discours des syndicats est majoritairement défensif et prévisible.
Un pédagogisme descendant, notamment, allié utile du libéralisme à l'école.Quant à celui de l'institution, il est marqué par les défauts, notamment l'inflation réglementaire et le style « descendant », inhérents à une immense machine bureaucratique, lorsqu'il n'est pas biaisé par la communication politique des ministres successifs.
C'est d'ailleurs pour cela que des professeurs qui n'y comprennent rien à l'école se retrouvent dans ce discours.Contrastant par sa simplicité, par la radicalité de ses affirmations, par sa facilité d'assimilation, l'antipédagogisme se détache de ce magma dissuasif. Il est une perche dont chacun peut se saisir aisément.
Le pédagogisme est une doctrine, en ce qu'il fait fi de la réalité : son déni de l'état de l'école en est un bel exemple. Autre exemple avec le manque de bien-être à l'école , ou avec le numérique à l'école, les rythmes scolaires etc.L'antipédagogisme est-il un pur discours, un vêtement idéologique seyant, ou bien une doctrine en action ?
Un exemple,un seul exemple ?La réponse est contradictoire et paradoxale. D'un côté, il relève bien du discours puisqu'il peut être tenu par certains enseignants ou responsables éducatifs sans la moindre conséquence concrète, y compris dans leur pratique personnelle parfois tout à fait ouverte.
Ces grands anti-pédagogistes ont tout fait pour réduire le redoublement, accroître le passage au lycée, allonger la scolarité, réduire les exigences au Bac, développer l'anglais en primaire, ont mis en place les TPE et l'accompagnement personnalisé etc...D'un autre côté, son succès a été tel que de nombreux politiques, à des degrés divers, l'ont repris à leur compte, dont pas moins de quatre ministres de l'éducation successifs : Luc Ferry (2002-2004, François Fillon (2004-2005), Gilles de Robien (2005-2007) et Xavier Darcos (2007-2009.
La semaine de quatre jours a été votée grâce au soutien du Sgen-CFDT et l'abstention du SE-Unsa.
Nihil novi sub sole avec l'alliance des pédagogistes et des libéraux.Luc Chatel est un cas particulier, son passage rue de Grenelle ayant plutôt amorcé une changement de ton, cherchant à concilier l'énergie des pédagogues passionnés et la volonté d'« optimiser » la gestion du système.
Mais ça ne peut pas être parce qu'il n'est pas si "dominant" que cela...Tentative qui, sur fond de réduction continue des postes et de droitisation de la ligne gouvernementale, ne pouvait aboutir.
L'antipédagogisme est aussi énergique dans l'ordre du discours qu'il se fait le plus souvent modeste dans l'ordre des décisions et dans sa prise sur le réel.
Façon de reconnaître que le pédagogisme s'est bien imposé, à droite comme à gauche.Luc Ferry a mis en application les programmes du primaire préparés sous son prédécesseur Jack Lang, un des diables préférés des antipédagogistes. François Fillon s'est fait « refiler » par la commission Thélot le socle commun des connaissances et des compétences, que les antipédagogistes abhorrent. Gilles de Robien a finalement conclu par une circulaire raisonnable sa tapageuse campagne sur l'apprentissage de la lecture.
Il faut croire que les IUFM idéologiquement pédagogistes avaient si peu donné satisfaction que les enseignants préféraient renoncer à leur formation initiale.Seul Xavier Darcos, il est vrai poussé par d'autres raisons qu'idéologiques (réduire les effectifs) s'est appuyé sur cette idéologie pour une mesure à forte portée : la suppression de l'année de formation en alternance des enseignants à l'IUFM.
La lutte contre les nouvelles pédagogisme est une digne volonté de préservation, de conservation d'un système scolaire efficace.A toutes les sauces
Pour le reste, l'antipédagogisme, jusqu'à présent, a plutôt eu un rôle d'empêchement que de réalisation.
Le pédagogisme s'est accommodé de toutes les alternances politiques : la réforme du lycée en est un bon exemple.Comme le populisme en politique, il s'adapte à toutes les situations, s'arrange à toutes les sauces, se marie avec tous les parcours, dépasse toutes les contradictions mais n'est d'aucune utilité pratique.
Le pédagogisme s'arrange aussi à la sauce libérale. Un exemple avec la Cour des comptes : www.laviemoderne.net/grandes-autopsies/5...cour-des-comptes#VII
Il manquait l'aigreur. Les professeurs effrayés par cette école qui fait naufrage ne peuvent bien sûr être que des aigris.Il reste un produit idéologique, déclinable du haut de gamme jusqu'au discount, sur le marché de l'aigreur.
Luc Cédelle ne saurait plus se tromper. C'est le pédagogisme, par son déni du réel, qui constitue à proprement parler une "idéologie". L'école numérique en est l'exemple le plus saisissant actuellement.
Le projet d'une école efficace se suffit à lui-même. A quel autre projet peut bien songer Luc Cédelle ?Il est avant tout un discours de dénonciation, dont la cible est tellement floue et les accusations tellement outrancières qu'il ne peut dessiner aucun contre-projet à ce qu'il déteste.
Luc Cédelle est d'ailleurs en train d'en administrer brillamment la preuve.La querelle pédagogie/antipédagogisme est certes binaire, mais il y a un côté qui est plus binaire que l'autre...
Non : voir plus haut.Le « catéchisme » que j'évoquais en introduction tient en quelques phrases. Voire en une seule. Il soutient que les pédagogues-pédagogistes issus de mai 1968...
Luc Cédelle en revient à ce déni de réalité :pourtant même le ministre actuel, peu suspect d'antipédagogisme, parle de "décrochage" et même, pour certaines compétences, de résultats "dramatiques". De même Antoine Prost alerte sur un niveau qui "baisse pour de bon"....se sont emparés depuis quarante ans de tous les leviers de commande du système éducatif qu'ils ont utilisés pour démolir l'autorité, anéantir la culture et détruire la transmission des savoirs jusqu'au point où – c'est le leitmotiv lancinant de ce discours – l'école « n'enseigne plus », voire « apprend l'ignorance ».
Voilà une argumentation qui saura convaincre.Tel est le cœur du message, le reste n'étant que déclinaisons, illustrations ponctuelles et fanfreluches rhétoriques.
Eh bien si.Entendons-nous (avant que la troupe des polémistes qui répondent à ce qui n'a pas été dit nous submerge) : le propos des antipédagogistes n'est pas « l'école enseigne moins bien qu'elle le devrait ».
Elle enseigne encore. Voyons pour quel "pseudo-constat":Il ne consiste pas à critiquer telles ou telles modalités réelles de l'enseignement pour en suggérer de meilleures mais à s'emparer de modalités imaginaires (la littérature remplacée par le rap, Louis XIV retiré des programmes d'histoire, le non-apprentissage des correspondances entre phonèmes et graphèmes à l'école primaire, etc.) pour nourrir le pseudo-constat martelé jusqu'à la nausée que l'école « n'enseigne plus ».
Pour le rap remplaçant la littérature, je ne sais pas mais on peut citer les cours de twittérature ou bien les sujets de Bac de français avec des chansons de variété.
C'est donc le but ? Que "tout se passe bien" ?Discours de l'exécration
En 2008, j'ai publié un livre (Un Plaisir de collège, Seuil), fruit d'une longue enquête dans un collège public expérimental où tout est organisé selon les principes que les polémistes prêtent aux « pédagogistes ». Tout s'y passait très bien.
Nous aurons l'occasion de revenir sur cette expérimentation, comme sur le lycée expérimental de Gabriel Cohn-Bendit.Six ans plus tard, tout continue de bien s'y passer. Le collège Clisthène fonctionne à guichets fermés.
Au contraire : il a été adoubé par le ministre de l’Éducation nationale en 2012 et n'est pas un lycée privé sous-contrat.Et s'il est expérimental, c'est bien parce que les pédagogues auxquels se réfère son équipe n'ont jamais eu ce pouvoir que les polémistes leur attribuent.
Le pédagogisme ne se résume malheureusement pas à Philippe Meirieu.Dire que les idées de « Meirieu » gouvernent l'Education nationale est aussi loufoque que mettre sur le compte de Nicolas Hulot la politique énergétique de la France sous prétexte que tout le monde le connaît et qu'il a été reçu et consulté par plusieurs présidents de la République.
Malheureusement il n'y a guère besoin de fonder quoi que ce soit : la plupart des établissements privés sous contrat fonctionnent très bien avec une pédagogie traditionnelle. Ce que les antipédagistes dénoncent, c'est l'abandon au privé des méthodes qui fonctionnent.A la fin du livre je suggérais que ces polémistes mettent à leur tour les mains dans le cambouis et créent des établissements fondés sur leur propres conceptions de l'éducation.
Un exemple avec la réforme du lycée : "Ipesup populaire" .
Les élèves de Clisthène sont affectés par carte scolaire ?Pour voir... A public égal, bien sûr car si l'on sélectionne à l'entrée les élèves à qui l'on daigne enseigner, tout est réussite.
"Reconstruire l'école" ? Et "Sauver les lettres" ? Et le GRIP ? Et les efforts que font tous les professeurs au jour le jour, luttant contre la doxa pédagogiste imposée, pour mettre en place dans leur classe une pédagogie efficace à défaut d'être nouvelle ? Quel mépris de la part de Luc Cédelle !Evidemment, rien n'est venu. Le discours de l'exécration est tellement plus confortable !
C'est certain mais ces erreurs ont sans doute aussi une grande part de responsabilité puisque l'effondrement en lecture/écriture suit l'application des nouvelles pédagogies depuis vingt-cinq ans.Sur les difficultés réelles, défauts, insuffisances ou dérives de notre système scolaire, qui ont bien d'autres causes entremêlées que la seule éventualité d'erreurs pédagogiques...
A noter que Luc Cédelle reconnaît "l'éventualité d'erreurs pédagogiques".
Après avoir invectivé copieusement ses adversaires, ça va être difficile....toutes les confrontations sont possibles et nécessaires entre observateurs ou acteurs de bonne foi.
Le "pédagogisme" existerait donc ?On peut même pousser le raffinement jusqu'à admettre que le « pédagogisme » est une ombre, un double furtif qui accompagne les pédagogues dans chacun de leurs pas et dont ils doivent se garder.
Si Luc Cédelle était confronté à des élèves illettrés au sortir de la scolarité obligatoire, il trouverait peut-être cela un peu plus sérieux.Mais sur « l'école n'enseigne plus », aucun débat sérieux n'est possible.
Il y a d'autres postures plus avantageuses : la posture progressiste, moderniste, généreuse etc.Rabâché depuis des décennies, ce type de paradoxe chic qui vous pose son essayiste accablé ou son journaliste à la tronçonneuse a atteint un point de basculement où il n'est plus tempéré par la distanciation théâtrale propre à la scène intellectuelle ou universitaire.
La cause de cette récupération, ce n'est pas qu'on puisse le dire, c'est que cela devienne de plus en plus vrai. Pour paraphraser Luc Cédelle, ne pas accabler le messager lorsque le message est gênant.Il est repris « cash », au premier degré, par des gens, des mouvements, des coalitions d'intérêts dont le message distillé dans l'opinion est d'une rude simplicité : si l'école publique « n'enseigne plus », pourquoi la conserver ?
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