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"Pierre Merle : Démocratiser l'enseignement ?" (Café pédagogique)
- Loys
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Avec une nuance d'importance : le "trompe-l'œil" était délibéré...Dans cette nouvelle édition de "La démocratisation de l'enseignement" vous parlez pour les 20 dernières années de "démocratisation en trompe l'oeil". Pourquoi ?
L’expression correspond à une lecture sociologique du développement du système éducatif. On peut avoir l'impression d'une démocratisation du système éducatif car l'accès au bac s'est accru et il y a de plus en plus d'étudiants. Mais il y a en fait davantage massification que démocratisation. Les inégalités entre les filières du lycée se sont maintenues, voire ont augmenté. Et elles sont liées aux inégalités sociales. Par exemple la filière S connaît une surreprésentation croissante des catégories favorisées. A l'inverse les filières professionnelles se sont prolétarisées.
De quelles options M. Merle parle-t-il ? Car s'il s'agit des langues anciennes, elles étaient présentent dans 93% des collèges. Les supprimer dans l'enseignement public ne fait que renforcer l'attrait de l'enseignement privé, et donc la discrimination. L'enfer est pavé de bonnes intentions...En France pour lutter contre les inégalités on a une politique d'éducation prioritaire. Si la promesse n'est pas tenue, il faut supprimer les zep ?
Il faut maintenir une politique de discrimination positive et donner plus à ceux qui ont moins. Actuellement, le principe n'est pas appliqué. Si on calculait le coût total d'un collège de centre ville et d'un établissement zep, on verrait que le premier bénéficie de dépenses éducatives supérieures, notamment en raison d’options linguistiques coûteuses.
La différence de coût tient principalement à la masse salariale : les établissements privilégiés sont des établissements de fin de carrière. Bref, aucune politique de discrimination ici...
Il faudrait au moins réduire de 5 élèves par classe le nombre de jeunes des établissements prioritaires (et non de 2 comme aujourd'hui) pour réaliser une discrimination positive efficace. Il faut aussi assurer de meilleures conditions de travail dans ces établissements.
Parce que les acteurs peuvent s'appuyer sur ce label pour exiger des moyens afférents : la suppression du label, sous des dehors bien intentionnés, serait commode pour diminuer ces moyens.Comment expliquer les résistances à la délabellisation ?
Il y a je crois, chez certains acteurs, une nostalgie des années 1980 comme si le label "éducation prioritaire" était essentiel à la politique elle-même. Or le label n'est pas nécessaire.
Non, c'est la mixité scolaire qui est importante : la mixité sociale n'en est qu'une conséquence. On peut observer des établissements mixtes socialement, mais pas scolairement, comme dans le privé. Dommage que M. merle ne fasse pas la distinction.Une bonne partie du livre évoque la mixité sociale dans les établissements. Ce n'est pas une revendication populaire. Pourquoi est-ce important ?
Les recherches montrent que la mixité sociale est un facteur d'équité. Quand elle augmente la corrélation entre l'origine sociale et le destin scolaire est moins forte.
Donner en exemple de mixité l'Allemagne, qui ne pratique pas le collège unique, a quelque chose de sidérant...Les pays qui se sont engagés vers davantage de mixité, comme l'Allemagne ou la Pologne ont vu le résultat moyen de leurs élèves progresser.
Mais le privé est déjà "associé" : le terme n'engage pas à grand chose...L'expérience a montré que l'assouplissement de la carte a échoué. D'un autre coté , la carte scolaire favorise la ségrégation urbaine. Il faut donc une nouvelle politique : celle de secteurs multi collèges qui est réalisée aujourd'hui de façon homéopathique. La dotation aux établissements doit aussi être mise en oeuvre de façon différenciée selon le recrutement social comme cela se fait en Angleterre ou aux Pays Bas. Il faut enfin associer le privé à cette politique.
On note encore une fois dans les propos de M. Merle la confusion dotation/coût.
C'est un progrès : le constructivisme envisagé comme une cause des inégalités...Il y a t-il des pédagogies qui favorisent la démocratisation de l'Ecole ?
C'est un point neuf de cette édition. Dans les théories explicatives des inégalités, j’ai introduit le rôle des pédagogies. On a une culture pédagogique limitée en France, souvent limitée à l’opposition entre l’approche magistrale (du maître vers l’élève) et le constructivisme (« l’élève au centre »). Je mets en avant l'importance d'une enseignement explicite comme celle des pratiques d'évaluation. Il y a eu des progrès, mais il faudrait avancer davantage sur cette question.
Mais que faut-il faire, s'agissant de l'enseignement privé ?Au regard des programmes des candidats à l'élection présidentielle, êtes vous inquiet pour l'Ecole ?
Les programmes du Front national et de F. Fillon sont des sources d'inquiétude car le principe de mixité sociale y est absente. Il y a aussi l'idée d'en finir avec le collège unique qui existe déjà si peu. Désinvestir dans l'éducation, comme le veut F. Fillon, est aussi inquiétant. Réduire le nombre des enseignants aura des effets négatifs sur tous les jeunes. Mais ces effets négatifs seront plus forts pour les moins favorisés. La fracture scolaire augmenterait. Enfin l'idée d'autoriser l'enseignement catholique à scolariser davantage d'élèves conduirait à une dualisation encore plus forte du système éducatif. L'enseignement catholique scolarise essentiellement des jeunes de familles aisées et la ségrégation sociale augmenterait. Aller en ce sens serait le contraire de ce qu'il faut faire.
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