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"Entretien avec Anne Cordier" (27/05/13)
- Loys
- Auteur du sujet
C'est une réflexion sur la nécessaire évolution du métier de professeur documentaliste
Extrait :
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- Loys
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L'acquisition d'une culture, d'une capacité de raisonnement, d'un esprit critique et d'une autonomie de pensée, voilà ce que ne remplacera jamais une naïve "éducation aux médias".Je pense qu’aborder la question de la fiabilité de l’information est naturellement nécessaire. Toutefois, je déplore que certaines formations soient intégralement centrées sur cette question, avec pour objectif sous-jacent de démontrer aux élèves qu’ils ne sont pas armés pour évaluer la fiabilité de l’information.
Bien sûr car les enseignants sont des agents de la reproduction. Chaque matin ils se demandent comment faire échouer leurs élèves.Ce positionnement dominant-dominé, pour reprendre des termes bourdieusiens, est à mes yeux infécond dans l’acte d’enseignement-apprentissage.
Et rendre sensible aux élèves leur servitude à Internet, c'est bien sûr faire acte de domination.
Anne Cordier n'a visiblement pas lu le compte-rendu mon expérience puisque je n'ai mis au point aucune séance piégée. Pour ce travail de commentaire à la maison, en aucune manière je n'ai invité mes élèves à se rendre sur Internet. Ils s'y sont rendus d'eux-mêmes, sur les sites qui leur proposaient des réponses, et ce dépit de mes mises en garde.Mais surtout, là encore, souvent les pratiques se rigidifient. Je voudrais parler de toutes ces séances orchestrées littéralement par les professeurs documentalistes durant lesquelles les élèves sont confrontés, par le professeur documentaliste lui-même, à un site véhiculant des informations erronées. Un enseignant de Lettres avait d’ailleurs fait le buzz l’an dernier en faisant état d’une séance où il avait, selon ses mots, « piégé ses élèves sur Internet »(7).
Je n'ai pas scénarisé ce que les élèves ont fait librement et sans demande de ma part : si les élèves n'avaient pas utilisé Internet, tout se serait bien passé.Je ne suis pas du tout favorable à ce type de scénarisation.
C'est oublier un peu vite que la confiance est précisément brisée par internet et tous ces sites parascolaires qui empêchent les élèves de fournir un travail de compréhension et d'interprétation personnel d'un texte. Mon expérience n'a jamais été qu'une réaction ponctuelle à ce pourrissage permanent du travail scolaire.Et j’emploie le terme de scénarisation, de mise en scène, à dessein : j’ai toujours un sentiment de malaise face aux messages postés par les collègues sur les listes de diffusion où ils demandent aux autres de leur fournir des « sites » permettant de soutenir que l’on peut trouver des informations non fiables sur le net. Je suis mal à l’aise car cette démarche va à l’encontre, à mon sens, du contrat didactique, lequel repose sur la confiance.
Et si j'ai créé un faux commentaire de texte, c'était pour une raison bien pratique : observer l'ensemble du processus de recherche de mes élèves sur les différents sites autour d'un texte qui n'était jusqu'ici pas référencé.
Pour les sites fiables, j'invite Mme Cordier à visiter les sites de corrigés dont les comités de lecture ont dûment validé mon commentaire "pourri".
Ils croient un corrigé qui affirme le contraire du texte qu'ils ont à lire...En outre, il y a mauvaise interprétation : cet enseignant, visiblement fier d’avoir « piégé » ses élèves, souhaitait démontrer que les jeunes croyaient tout ce qui se trouve sur Internet ;
Sauf que je ne leur ai rien montré du tout. Pour critiquer mon expérience Anne Cordier serait avisée d'en prendre un minimum connaissance.or, pour moi, ce que montre ce « piège » refermé sur les élèves, c’est que ceux-ci ont foi dans la parole enseignante : si mon prof me montre un site, c’est que je peux lui faire confiance.
Il y a surtout une confusion de Mme Cordier entre recherche documentaire et commentaire de texte personnel.Il y a donc confusion, lors de ce type de séances, entre autorité de l’outil de recherche et autorité de la parole enseignante.
Nulle part, effectivement.Qui plus est, dites-moi où est l’autonomie lorsque l’enseignant dirige l’élève vers un site préalablement sélectionné !
Non, c'est pour marquer avec exactitude le parcours des élèves sur Internet avec des marqueurs faciles à repérer.Enfin, je voudrais alerter sur l’effet pervers de ce type de séances : après tout, se disent les élèves, si l’enseignant a cherché ainsi un site pour leur faire cette démonstration, voire a dû « pourrir » lui-même le contenu du site, c’est que sur Internet, on ne « tombe » pas si facilement que cela sur des sites non fiables…
Le danger, c'est surtout l'abdication de la pensée personnelle...Ce qu’il faut bien comprendre, c’est que les discours et les pratiques pédagogiques sont soumis à l’interprétation des élèves, qui les confrontent à leurs imaginaires. Je prendrais pour exemple la centration extrêmement répandue sur les « risques » d’Internet dans les séances info-documentaires. Tout un champ lexical autour de ces « risques » est développé, et ce en premier lieu par l’institution : il s’agit d’aborder « Internet sans crainte », de faire face aux « dangers du net », ou encore de « se protéger ».
Car un bon commentaire personnel, c'est avant tout une bonne recherche documentaire...Bref, à grands renforts de démonstrations de situations à risques sur le net, l’on explique aux élèves qu’ils doivent craindre cet espace informationnel et communicationnel. Lors de mes investigations, j’ai vu deux types de réactions chez les élèves : le premier groupe, minoritaire et souvent constitué d’élèves se déclarant peu experts en matière de recherche sur Internet, en concluait qu’il valait mieux ne pas fréquenter davantage les réseaux, et finalement du coup renonçait à se perfectionner ; le second groupe, très majoritaire, rejetait en bloc ces discours, parfois avec moquerie, concluant que le professeur avait « peur » des réseaux, ce qui expliquait de tels propos de sa part.
C'est surtout qu'il existe une école sans internet, notamment au moment des examens... Impensable !Le fossé entre « Internet de l’école » et « Internet à la maison », des loisirs, se fait alors encore plus grand.
Mme Cordier ne connaît pas grand chose à l'école pour ne pas le savoir.
Vive le copier-coller : www.laviemoderne.net/advocatus-diaboli/3...ier-coller-a-l-ecoleToujours est-il qu’il faut mener des séances où la fiabilité de l’information est questionnée, mais pas de cette manière à mon sens, et puis pas seulement surtout. Prenons l’exemple de l’utilisation pédagogique du document de collecte : voilà, il me semble, un travail pédagogique intéressant à mener, avec une gradation dans l’appréhension de la notion de fiabilité, et avec aussi un appui fort sur une pratique sociale, le copié-collé, qui ici est exploité à des fins d’enseignement-apprentissage(.
Et la meilleure façon de les questionner, c'est d'y inviter les élèves...Et puis, il convient de questionner les discours, les logiques marchandes et sociales de la production documentaire, comprendre ce qu’il y a derrière ces outils qu’on utilise spontanément…
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La bonne innovation à l’école est-elle numérique ?
A la Gaîté Lyrique, le 25 avril 2017 à 19h00.
MOOC, tablettes et tableaux interactifs… Il semblerait que l’innovation dans l’Éducation ait beaucoup à voir avec le numérique. En tout cas en apparence. Comment savoir si les promesses d’ascension sociale de l’école de la République seront (mieux) tenues grâce à ces appareillages diverses ?
Au centre du système éducatif, reste le professeur, seul devant ses élèves dans une société qui demande plus que jamais de l’adaptation, mais aussi et surtout de former des citoyens curieux, avertis et critiques dans un monde instable.
Ici comme toujours, le numérique n’est qu’un prisme, une porte d’entrée vers les vrais enjeux du système éducatif. Les innovations doivent-elles toujours rimer avec technologie, au moment où la “crise” de l’école, dont les caractéristiques ne font pas consensus, demande notre attention pour le futur ?
Entrée à prix libre*, dans la limite des places disponibles. Ouverture des réservations le 1er avril.
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