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Bruno Devauchelle - "Comment j’ai pourri les livres ! et mes profs !" (28/03/12)
- Loys
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Détenteur d'un DEA de sciences de l'éducation et auteur d'une thèse en sciences de l'éducation sur le B2i, il est l'auteur de l'ouvrage Multimédiatiser l'école : "Depuis de nombreuses années je travaille à la question de l’intégration des TIC dans l’enseignement, la formation et l’éducation".Après avoir été surveillant en début de carrière et animateur et directeur de centres de vacances pour adolescents, Bruno Devauchelle est devenu enseignant en Lettres-Histoire, tout en exerçant une fonction de responsable informatique dans son établissement scolaire.
Les compétences qu’il a développées lui ont permis de devenir intervenant dans le domaine des TIC pour les enseignants de l’enseignement privé sous contrat, puis de créer et de piloter un centre de formation continue pour personne en difficulté d’emploi et pour les entreprises.
Formateur spécialisé en TICE, responsable de formation ISPEC, il réalise de nombreuses formations inter et intra établissements scolaires, souvent transversales. Chef de projet études et recherches (Interreg, conseils régionaux, etc) , Responsable d’un service de FOAD, Formateur-chercheur au CEPEC de Craponne-Lyon, il développe une intense activité dans le domaine des TICE, et est devenu l’un des spécialistes en France des Espaces Numériques de Travail (ENT).
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- Loys
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Attention, parodie inspirée !Comment j’ai pourri les livres ! et mes profs !
Cette histoire est presque totalement inventée. (J’aurais reçu ce texte sous forme de mail anonyme)
Surtout que nous n'avons rien à nous reprocher. Aucun de nous ne fraude plus que les autres.Avec plusieurs amis de la classe de seconde de mon lycée, nous en avons eu marre de cette suspicion permanente des profs, des adultes à notre égard.
Quel bel euphémisme que celui des "chemins détournés"...On ne serait que des copieurs, des plagieurs, des tricheurs. Certes, à plusieurs reprises, j’ai emprunté des chemins détournés...
La concession ("Certes à plusieurs reprises") a tendance à infirmer la protestation "On ne serait que des copieurs, des plagieurs, des tricheurs."
Le beurre et l'argent du beurre, en somme.... pour obtenir la reconnaissance scolaire sans pour autant faire les efforts demandés.
C'est donc la faute des professeurs si les élèves trichent. Il est pourtant facile de surveiller trente-cinq élèves qui travaillent chez eux.Mais il faut dire que la naïveté de nos profs et de l’encadrement nous ont bien aidés. Ils ne voient rien dans la classe, dans la cour, au self, et encore moins dans la rue.
Les professeurs-documentalistes sauront à quoi s'en tenir sur l'estime que leur porte Bruno Devauchelle...Et puis il y a cette sacralisation du livre qui devient insupportable. Manuel scolaire, dictionnaire, livre à lire, livre à ne pas toucher, livre à rendre dans les délais, livre à lire dans le silence absolu imposé par la mère supérieure du CDI…
C'est vrai que c'est insupportable, un "livre à lire". Sans bandeaux publicitaires, sans images animées et souvent de plus de 140 caractères.
Car c'est bien connu, les élèves ont des "collègues".Avec les collègues on s’est demandé comment faire pour piéger nos profs...
Surtout que la question n'est pas là : il ne s'agit pas de préférer un livre au web... Un commentaire de texte n'est pas une recherche documentaire, mais cela, M. Devauchelle, comme des dizaines d'autres, semble ne l'avoir pas compris. Ou préfère ne pas le comprendre car cela supposerait que la plus grande partie de l'apprentissage scolaire ne nécessite aucunement l'apport du numérique. Et ça, c'est "insupportable" !...les adultes et leur démontrer qu’ils font une confiance aveugle à des supports qui ne sont pas plus fiables que ceux, sur écran, que nous utilisons au quotidien.
Donc dix fois plus lourd et en permanence dans les cartables : quelle invention pratique et ingénieuse, propre à séduire un éditeur effectivement !Nous avons donc contacté un éditeur scolaire en nous faisant passer pour un collectif de profs qui voulaient inventer un nouveau genre de manuel scolaire. L’idée était de faire un manuel global qui rassemblerait tous les contenus n’ont pas d’une matière mais de toutes les matières d’une année.
C'est révolutionnaire : au lieu de choisir bêtement les manuels dont elles ont besoin, les équipes éducatives choisissent "en cochant des cases", ce qui change tout !L’idée est que chaque établissement achèterait un manuel scolaire par classe. Il serait « fabriqué à la demande » selon les options des élèves et leur niveau d’étude. Les responsables n’auraient qu’à « cocher des cases sur Internet, pour obtenir « Le Manuel » de l’année.
Et s'il y a un seul manuel par classe seulement, les éditeurs risquent d'être encore plus intéressés !
Qui ne le serait pas à l'idée de vendre des manuels en quantité trente fois inférieure ? Et qui n'existeraient chacun qu'en un seul exemplaire imprimé, impossible à amortir donc !L’éditeur emballé par le projet...
Résoudre le problème de poids en supprimant le manuel, il fallait y penser !...qui révolutionne les sacrosaints manuels disciplinaires (10 à 12 par année scolaire) et qui résout nombre de problèmes de poids et de diversité nous a dit d’accord, à titre expérimental.
Car tout le monde sait que pour donner un "air de livre scolaire", il suffit de recopier des pages trouvées sur internet. Quant aux cours des professeurs pris en notes par les élèves ou les étudiants et publiés sous le nom des élèves ou des étudiants, ça existe déjà : sur les sites de corrigés payants !Nous nous sommes donc mis au travail. D’une part nous avons pris en note tous les cours de nos profs (on en a enregistré certains), d’autre par nous sommes allé chercher sur Internet les éléments complémentaires pour donner un air de livre scolaire à nos documents.
Oboulo et Oodoc se dispensent de ce genre de formalités inutiles.Evidemment chaque source était référencée, mais toujours de manière approximative voire fausse et cela volontairement. A la fin de l’année de seconde nous avons livré à notre éditeur le livre prêt à publier. Il a fallu ruser avec l’éditeur car il a essayé de nous identifier et de vérifier notre travail.
Restons vagues pour être plus crédibles... Sur Oboulo et Oodoc, pas besoin de ces subterfuges.Mais nous avons trouvé quelques complices qui nous ont permis de franchir les différentes étapes.
Un éditeur scolaire est au contraire "regardant", car un ouvrage de mauvaise qualité n'est ni choisi ni acheté par les équipes éducatives : la rentabilité, dans ce cas précis, passe par la qualité.Et puis il faut bien dire que l’éditeur de manuel scolaire est peu regardant quand il s’agit de rentabilité : produit radicalement nouveau, produit sur mesure, révolution pédagogique etc…
Oboulo l'explique : il n'y a même pas de vérification des contenus !Quand aux contenus, ils n’ont pas été vérifiés réellement sur le fond. D’ailleurs on avait glissé quelques erreurs suffisamment visibles pour analyser le mode de correction de l’éditeur. Outre les fautes d’orthographe, ce sont surtout les erreurs de contenus qui ont été le plus faciles à faire passer. Un texte a changé d’auteur, un autre texte, totalement inventé a été attribué à un auteur totalement inexistant.
(bâille)L’année suivante nous avons essayé de repérer si l’ouvrage avait été distribué et de trouver d’autres élèves pour nous dire ce qui en était fait en classe. Nous n’avons pas été longs à trouver. La presse nous y a aidé, elle qui a été prompte à faire un article sur cet établissement innovant qui avait adopté ce nouveau manuel. Il a suffit de quelques messages numériques à des élèves des classes concernées pour mettre en place un « observatoire »…
Eh oui, car c'est bien connu, les professeurs n'ont pas passé un concours de fin d'études qui leur donne des compétences leur permettant d'apprécier ce qu'ils lisent dans leur propre discipline !Les résultats sont édifiants ! Nombre d’enseignants n’ont pas vu la moindre erreur dans ce manuel. Certains ont même affirmé en cours des « vérités » scientifiques qui ne l’étaient que dans le manuel.
La seule vérité dans cette parodie souffreteuse : le numérique est un bon argument de vente en 2012.L’éditeur tout à la joie de son coup médiatique a pu faire parler de lui.
Trop fort !Dans les classes, nous avons demandé à des élèves de corriger certaines erreurs que les enseignants n’auraient pas relevées. Ainsi sur une carte l’emplacement et le nom des fleuves avait été volontairement modifiés, lorsque les élèves ont signalé l’erreur, ils ont argué que sur wikipédia la carte était différente. Ils se sont entendus répondre que si on regardait tout ce qu’il y avait sur Internet on ne trouverait que des choses fausses, en particulier sur ce site.
Sur Wikipédia, qui sont ces dizaines d'auteurs anonymes ? pourquoi ne signent-ils pas avec leur vrai nom ? quelles sont leurs compétences ? qui vérifie ?Une autre fois, une référence d’une photo ainsi que la légende ont été contestées par les élèves. La réponse de l’enseignant n’a pas tardée : si c’est dans un livre c’est que l’éditeur (et les auteurs) l’a vérifié.
Sur Oodoc et Oboulo, c'est plus simple : personne n'est chargé officiellement de vérifier les contenus.
M. Devauchelle a poussé la parodie jusqu'à reproduire les fautes d'orthographe des élèves !A force de nous considérés comme des nuls, nous avons pris nos propres profs en défaut.
Quel est le sens de cette phrase ?Ce qui est le plus drôle c’est qu’en même temps il y en a qui a tenté de nous piéger et que, se croyant malin, il l’avait publié sur le web.
C'est trop injuste. Et tout à fait crédible.Il a fait un buzz remarquable, bravo. Probable que notre expérience sera moins médiatisée.
On l'avait un peu deviné... Les "cobayes idiots" se sont exprimés dans les médias nationaux pour confirmer que mon expérience les avait bien amusés et marqués : mais ça, ça ne correspond pas à ce que veut dire M. Devauchelle, qui sait mieux que les élèves ce qu'ils pensent.Contrairement à cet enseignant qui nous a pris pour des cobayes idiots, nous avons pris soin de ne pas faire réellement cette expérience mais de l’inventer.
Et rien sur Oboulo et Oodoc qui prennent les élèves pour des pigeons ?Sauf que ce texte est inspiré d’un nombre important d’observations que nous avons faites dans nos classes. Il est temps qu’on arrête de nous prendre pour des quiches !!!
Pour en revenir au commentaire de textes, dont il est ici question, aucun manuel scolaire ne propose de corrigés. Et pour cause, c'est un exercice personnel.
Bref, pour résumer cet article, un beau contresens qui ignore la nature du commentaire de texte et suppose que mon expérience se résume à opposer le livre imprimé et internet. Et un mépris certain pour les enseignants.
Mais si l'on creuse un peu, on entrevoit ici une philosophie libérale de l'école : les professeurs sont moins compétents et les manuels scolaires finalement aussi fiables que Wikipédia ou les sites de corrigés : qu'attendons-nous pour nous passer des manuels et des professeurs ?
Depuis M. Devauchelle a publié cet article : Et si l’on arrêtait d’utiliser des manuels scolaires ?
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