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"un « choc des savoirs » pour répondre à l’angoisse de la baisse du niveau scolaire" (Le Monde)
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Il y a une forme d’urgence à élever le niveau sur les savoirs fondamentaux, les mathématiques et le français, qui conditionnent la réussite dans toutes les autres disciplines. Certaines données sont éloquentes. En 2018, un élève de 4e avait le niveau d’un élève de 5e de 1995. A l’entrée en 6e, un élève sur trois ne sait pas lire correctement, un sur deux ne sait pas dire combien il y a de quarts d’heure dans la fraction « trois quarts d’heure ». Enfin, en 3e, 25 % des candidats au brevet ont moins de 4/20 en mathématiques.Nous avons pris des mesures depuis 2017, comme le dédoublement des grandes sections, CP et CE1 en éducation prioritaire, qui ont déjà réduit les écarts en lecture et en calcul. Nous avons engagé un plan massif de formation continue de nos 370 000 professeurs des écoles en mathématiques et en français. Les premiers résultats sont là, mais nous devons encore accélérer et engager une bataille pour le niveau de notre école.
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Le 5 octobre dernier, je vous annonçais engager une mobilisation absolue pour l’élévation du niveau de nos élèves - un « choc des savoirs ».
Deux mois durant, une mission composée tout à la fois d’experts nationaux et de professeurs du terrain a auditionné près d’une centaine d’acteurs éducatifs, scientifiques, syndicaux. Vous avez été plus de 230 000 professeurs à répondre à sa consultation numérique. Je vous remercie pour vos contributions. Ces travaux, d’une très grande richesse, me conduisent aujourd’hui à prendre une série de décisions.Conformément à la méthode que j’applique depuis ma nomination, je choisis de partager avec vous mes décisions le plus directement possible, plutôt que par voie de presse.Comme toujours, je répondrai bien entendu aux questions des journalistes, essentielles au débat public. Mais c’est à vous que je m’adresse d’abord. À vous que je fais mes annonces. C’est pour moi tout à la fois une question de respect et l’expression d’une conviction forte : c’est avec les professeurs, par les professeurs, grâce aux professeurs, que nous relèverons le défi de l’élévation du niveau.Pour cela, je le sais, vous avez besoin d’être soutenus. Soutenus dans vos conditions quotidiennes d’exercice, vos évolutions de carrière, qui font l’objet de travaux spécifiques dans le chantier « attractivité » que j’ai ouvert avec les organisations syndicales et que je souhaite voir aboutir début 2024. Soutenus pour mieux accueillir nos élèves en situation de handicap dans le cadre de l’Ecole inclusive, pour laquelle nous travaillons à des évolutions avec mes collègues du Gouvernement.Le soutien du ministère, il vous est aussi dû s’agissant de notre organisation, de nos règles, pour mieux reconnaître la place centrale qui est la vôtre dans l’élévation du niveau de nos élèves.Or, d’année en année, de réforme en réforme, l’autorité de votre expertise pédagogique a pu être progressivement affaiblie. Personne ne connaît mieux que vous le niveau de vos élèves, et pourtant… Pourtant votre avis quant aux conditions de passage de vos élèves dans la classe supérieure a été rendu accessoire dans le texte-même du Code de l’éducation. Pourtant leur contrôle continu pour le diplôme national du brevet n’est plus l’émanation directe des notes que vous leur attribuez dans vos disciplines. Pourtant votre évaluation du niveau d’une copie du brevet ou du baccalauréat se trouve si souvent modifiée par un « correctif académique » qui en réévalue artificiellement la valeur.Notre École a besoin d’une revitalisation pédagogique à la main des enseignants. Dès le premier trimestre de l’année 2024, je publierai un décret qui rendra à l’équipe pédagogique - et non plus aux familles - le dernier mot s’agissant du redoublement de l’élève. Je prendrai également une circulaire qui supprimera le « correctif académique » dès la session 2024 du brevet et du baccalauréat. Ce sont désormais les notes que vous attribuez, et elles seules, qui détermineront leur obtention par nos élèves.École, collège, lycée : mon souhait est bien de remettre de l’exigence à tous les étages. Avec la science et le bon sens comme boussole.Tant se joue dès l’école primaire. Les études le montrent : la plupart des élèves décrocheurs étaient déjà en difficulté à la fin de leur CP. C’est pour cela que nous avons fait le choix, dès 2017, d’investir massivement pour l’école primaire. Nous commençons à en mesurer les résultats : en mai dernier, l’étude internationale PIRLS indiquait que nos élèves de CM1 étaient les seuls d’Europe à progresser, et les dernières évaluations nationales ont montré que la part des élèves en difficulté à l’entrée en 6ème a diminué. Il faut aller plus loin.De nouveaux programmes s’appliqueront à l’école primaire, à commencer, dès septembre prochain, par les classes de la maternelle au CE2.
Deux principes clairs guideront les travaux : la simplification - avec des programmes moins volumineux - la clarification - avec l’intégration d’objectifs annuels figurant aujourd’hui dans divers guides épars et le choix clair de la pédagogie explicite.Pour mieux aider nos professeurs et les collectivités locales dans leurs choix, les manuels scolaires du premier degré dont l’efficacité des contenus a été prouvée par la science et par la pratique bénéficieront désormais d’une labellisation. Je souhaite, à l’instar des modèles appliqués au Japon ou au Portugal, que les modalités de labellisation intègrent la participation de professeurs du terrain. Tant d’études le disent : les manuels jouent un rôle clé. Or, 60 % des élèves n’en bénéficient pas en CP. Pour renforcer les chances de réussite sur tout le territoire, et même s’il s’agit d’une compétence des collectivités locales, l’État financera désormais des manuels scolaires en lecture et mathématiques des élèves de CP et de CE1. Je lancerai les achats pour la rentrée 2024. Pour donner toutes les chances à nos élèves de réussir, les professeurs auront désormais le dernier mot s’agissant du redoublement. Ils pourront par ailleurs désormais recommander, voire prescrire, à leurs élèves des stages de réussite durant les vacances scolaires conditionnant leur passage dans la classe supérieure. Ces stages constituent une réelle plus-value pour les élèves en difficulté. L’an passé, 40 000 professeurs volontaires les ont animés. Leur rémunération sera désormais doublée dans le cadre du pacte enseignant, à 156 € pour 3 h.L’organisation de notre collège fragilise aujourd’hui nombre de nos élèves. Beaucoup me le disent sur le terrain et 80 % de ceux d’entre vous qui ont répondu à la consultation en ligne l’ont indiqué : une trop forte hétérogénéité de niveau freine la capacité à faire progresser tout le monde. D’autres pays, comme la Suisse, la Suède et le Danemark, ont su s’adapter et prendre des mesures pour répondre à cette réalité. À compter de la rentrée prochaine, les élèves de 6ème et de 5ème seront donc désormais répartis en 3 groupes de niveaux pour leurs enseignements de français et de mathématiques. Ces groupes seront flexibles et leur dimension adaptée : des créations de postes permettront de limiter le groupe des élèves les plus en difficulté à une quinzaine d’élèves. La même organisation s’appliquera pour les classes de 4ème et de 3ème à compter de la rentrée de septembre 2025.Par ailleurs, les collégiens connaissant les plus grandes difficultés s’agissant du français et des mathématiques pourront désormais bénéficier d'une scolarité aménagée : le volume horaire de ces disciplines pourra être sensiblement augmenté, avec une réduction temporaire des cours dans d’autres disciplines.Je souhaite par ailleurs donner une véritable exigence au diplôme national du brevet. Au-delà de la suppression des consignes de correction académiques que j’appliquerai dès la session 2024, celui-ci évoluera plus profondément à partir de la session 2025. D’abord, la note du contrôle continu sera calculée à partir de la moyenne des notes disciplinaires que vous attribuez aux élèves, et non plus par les « compétences » converties en points. Ensuite, les épreuves terminales représenteront 60 % de la note finale, au lieu de 50 % aujourd’hui. Enfin, le diplôme du brevet conditionnera l’accès direct au lycée. Les élèves en difficulté et qui n'obtiendront pas leur brevet ne feront pas leur entrée en 2nde l’année suivante, mais rejoindront une classe « prépa-lycée » pour consolider leur niveau, rattraper leur retard et être mieux armés pour la suite.
Tous les élèves entrant au lycée seront désormais accompagnés, à la maison, d’un outil d'IA de remédiation ou d’approfondissement en français et en mathématiques. Ce logiciel souverain, construit avec des chercheurs et des enseignants, propriété du ministère de l’Éducation nationale et de la Jeunesse, sera mis gratuitement à disposition de 200 000 élèves de 2nde dès les prochains mois, avant d’être généralisé à l’ensemble des élèves de 2nde à partir de septembre prochain. La France sera ainsi le premier pays au monde à généraliser à l’ensemble d’une classe d’âge un outil d’élévation du niveau fondé sur l’intelligence artificielle.Enfin, vous le savez, la réforme du lycée professionnel que nous portons avec Carole Grandjean vise tout à la fois à renforcer le lien de nos élèves avec le milieu professionnel et à élever leur niveau dans les enseignements généraux.Ainsi, à compter de la rentrée prochaine, nous avons décidé de renforcer sensiblement le volume horaire des enseignements généraux en terminale professionnelle. Par ailleurs, les cours de mathématiques et de français en 2nde et en 1ère professionnelles se dérouleront désormais en petits groupes.Pour terminer, je veux avoir un propos spécifique pour les mathématiques. Depuis trop longtemps, nous déplorons une chute du niveau de nos élèves, une perte du goût pour cette matière. Or, elle est absolument fondamentale. Pour la structuration de la pensée de chacun comme pour la souveraineté technologique de notre Nation à l’avenir. Le retour d’une heure et demi de mathématiques dans le tronc commun de l’ensemble des élèves de 1ère cette année est une étape importante, mais il faut aller plus loin. Je veux engager, avec vous, un grand sursaut mathématique pour notre Ecole.Dès la rentrée prochaine, la révision des programmes de l’école primaire nous permettra d’adopter progressivement la méthode de Singapour pour les mathématiques, anticipant par exemple l’apprentissage des fractions et des nombres décimaux dès la classe de CE1. Cette méthode, désormais appliquée par 70 pays, a fait ses preuves. Je rappelle qu’elle a été construite à partir des meilleures inspirations internationales, et notamment de Ferdinand Buisson, qui lui-même plaidait pour le concret, avant l’imagé, puis l’abstrait.Le déploiement du CNR-NEFLE a déjà permis le financement de plus de 5 000 projets pédagogiques portés par les enseignants. Une grande partie d’entre eux concerne les mathématiques, avec par exemple le déploiement de « labos de maths ». Il nous faut poursuivre et amplifier cette mobilisation !Je suis convaincu que les groupes de niveau en mathématiques au collège nous aideront eux aussi à redresser la barre. Ils donneront aux élèves les plus en difficulté la possibilité, en petits groupes, de combler les lacunes et de progresser. Quant à nos élèves ayant le meilleur niveau et la plus grande appétence, ils y verront l’opportunité de s’envoler, en allant plus loin encore que le programme.Le baccalauréat général et technologique prévoit aujourd’hui une épreuve anticipée de français en fin de 1ère, car cette matière est à juste titre considérée comme au fondement de notre culture commune. Je crois profondément que notre culture commune est également scientifique. Aussi, j’ai décidé qu’à compter de l’année scolaire 2025-2026, une nouvelle épreuve anticipée du baccalauréat en fin de 1ère générale et technologique sera dédiée aux mathématiques et à la culture scientifique, pour l’ensemble de nos élèves.Mesdames, messieurs les professeurs,
Mesdames, messieurs les membres de la communauté éducative,Vous accomplissez, dans des conditions souvent difficiles, la mission la plus noble qui soit : celle d'instruire, de démocratiser le savoir et de former des républicains. Cette vocation, c’est le ciment de la Nation, l’assurance-vie de la République.Chaque jour, vous accomplissez des miracles, déjouez des pronostics, permettez à des élèves d’écrire leur propre destin, prouvez que la pédagogie peut renverser la sociologie.Mon souhait, mon unique souhait, c’est que vous trouviez dans cette mobilisation pour l’exigence les moyens d’amplifier encore votre action au service de nos élèves.Vous me trouverez, pour cela comme pour tout le reste, toujours à vos côtés, avec un respect total et une admiration infinie.Fidèlement,
=14pxGABRIEL ATTAL
Ministre de l’Éducation nationale et de la Jeunesse
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