«Les MOOCs portent l'espoir d'un rebrassage des inégalités » (Michel Serres)

A lire dans "Challenges" du 20/02/14 : «Les MOOCs portent l'espoir d'un rebrassage des inégalités », interview de Michel Serres.

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Du même sur "France Info" du 16/03/14 : www.franceinfo.fr/economie/le-sens-de-l-...s-1350609-2014-03-16

Michel Serres écrit: Une université, c'est comme un grand magasin

Quel formidable aveu sur la "marchandisation" de l'Université.

Michel Serres écrit: Je ne considère pas le diplôme comme très important. D'ailleurs, depuis cinq à dix ans, beaucoup d'étudiants à Stanford me disent qu'ils se demandent pourquoi ils paient si cher pour apprendre des choses auxquelles ils ont accès de chez eux.

Allez dire ça aux entreprises qui exigent, y compris pour leurs offres de stage, un certain niveau (bac+3 minimum, bac+5 généralement), assorti d'une expérience professionnelle.

Michel Serres écrit: Je vais vous raconter une histoire. A la Révolution française, un certain Monge, avec un certain Laplace, avaient eu l'idée de fonder l'Ecole polytechnique. Pour recruter leurs élèves, ils partaient à cheval voir par-ci par-là s'il y avait des jeunes gens de valeur. Un jour, ils sont arrivés dans les Pyrénées et on leur a signalé un berger de 14 ans qui savait de l'algèbre. Ils sont allés le voir. Il est encore possible de lire le rapport : « M. Arago, berger à tel endroit, sait de l'algèbre. Il nous a promis d'apprendre la géométrie et donc nous le recevons à l'Ecole polytechnique. » Il avait tout fait tout seul, M. Arago. Le jeune berger a été reçu à Polytechnique à l'âge de 15 ans et à l'Académie des sciences à 21.

Je vais vous raconter une histoire. Dans l'Antiquité, un certain Samuel, prophète de son état, avait eu l'idée de mettre un Roi à la tête d'Israël, afin de remplacer le précédent. Pour le recruter, Dieu lui a dit de partir (à cheval, à pied, à dos d'âne, je ne sais plus trop) à la recherche d'un jeune homme de valeur. Un jour, il est arrivé à la maison de Jessé et on lui a signalé son fils, un jeune berger du nom de David. Il est allé le voir. Il est encore possible de le lire dans la Bible : David, fils de Jessé, a été choisi par Dieu pour être le nouveau Roi d'Israël. Il avait tout fait tout seul, David (avec l'aide de Dieu tout de même). Le jeune berger a commencé par terrasser Goliath, et il est rapidement devenu Roi d'Israël.
Il y a une chose que je dois reconnaître à Michel Serres : c'est un excellent conteur, même s'il emploie souvent de vieilles recettes (mais bon, comme elles ont fait leurs preuves, on ne sera pas trop regardant là-dessus).

Michel Serres écrit: Il y a plus de deux cents ans, cela a été un miracle que M. Monge aille voir Arago. Là, avec les nouvelles technologies,

Qu'il se rassure : avec les nouvelles technologies, cette situation relèvera encore plus du miracle ! D'une part, parce que des Arago, il n'y en aura plus beaucoup (combien de bergers en France aujourd'hui ?). D'autre part, parce que les Monge vont se raréfier eux aussi : ça m'étonnerait qu'aujourd'hui en France on trouve beaucoup de gens avec assez de flair, et à l'esprit assez ouvert (sans parler des choses qui fâchent comme la culture ou les connaissances), pour aller crapahuter aux quatre coins de France, dénicher les pépites rares, et leur faire confiance sans qu'ils aient les diplômes ni le parcours professionnel adéquats.
Cela dit, le jour où un comité de sélection, formé à l'occasion d'un concours de recrutement des maîtres de conférences, acceptera d'embaucher un parfait quidam sans diplômes au détriment de leurs candidats locaux, j'accepterai de reconsidérer mes préjugés.

Shane_Fenton écrit: Il y a une chose que je dois reconnaître à Michel Serres : c'est un excellent conteur, même s'il emploie souvent de vieilles recettes (mais bon, comme elles ont fait leurs preuves, on ne sera pas trop regardant là-dessus).

Sur le sens du récit de Michel Serres, s'agissant d'Arago, vous devriez lire cette petite analyse que je fais sur un autre fil.

Ah ouais, c'est encore plus bidon que ce que je pensais !

En fait la fable surtout montre à quel point le milieu sociologique, la qualité de l'enseignement reçu, l'examen individuel et la détermination personnelle importent. Bref ce serait presque à l'opposé exact des moocs...

"Rebrassage des inégalités ?"

La révolution ne se fera pas par les moocs
Les participants sont diplômés, ont un emploi et sont blancs.

A lire (en anglais) sur "Slate" du 16/03/14 : "The Revolution Is Not Being MOOC-ized"

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