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Cinq propositions pour une École plus juste et plus efficace (SGEN-CFDT/SE-UNSA)
- Loys
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Il y a des propositions pour une école injuste et inefficaces ? Je note - non sans une certaine malice - que le terme "efficace" remplace enfin - dans la rhétorique pédagogiste - le terme "innovant".Cinq propositions pour une École plus juste et plus efficace
Faut-il rappeler que M. Obin s'exprime ici à titre d'adhérent à l'un de ces syndicats, en non en tant que représentant de l’Éducation nationale ? Il y a des confusions qui font mauvais genre.Tribune co-signée par Thierry Cadart (Secrétaire Général du Sgen-CFDT), Laurent Escure (Secrétaire général de l’UNSA Éducation) et Jean-Pierre Obin (Inspecteur général de l’Éducation nationale honoraire).
L'"abondance" et la "variété des points de vue" n'a pas eu l'heur de plaire à nos deux syndicats frères.Le ministre a ouvert en juillet une large concertation afin de « refonder l’École de la République ». Un grand nombre de personnes et d’organisations y participe, et les idées et positions qui s’expriment sont nombreuses. Mais l’abondance ne fait pas la cohérence et la variété des points de vue, des objectifs et des intérêts ne peut garantir une école demain au service de l’intérêt général.
Pour la "cohérence", revenons au point de vue unique, le leur. En vertu duquel toute concertation deviendra automatiquement inutile, d'ailleurs.
Et pourtant les conseils de réformes des nos amis pédagogistes ont été appliqués depuis vingt ans...Car tel n’est pas le cas aujourd’hui. C’est pourquoi, avant d’avancer nos propositions, nous voudrions faire deux rappels pour en éclairer le sens.
Le premier concerne les performances des élèves français à 15 ans, en fin de collège ou de scolarité obligatoire. On a beaucoup écrit sur leur position médiocre dans le classement de l’OCDE, et sur la perte de quelques places de la France entre les études de 2003 et 2009. Mais ce qui a été tu représente pourtant l’essentiel : notre pays est devenu la lanterne rouge des nations développées pour ce qui est de l’influence de l’origine sociale sur les résultats des élèves !
Belle réussite que la massification.C’est désormais notre pays qui possède le « gradient socio-économique » des performances des élèves le plus élevé ; ce qui signifie que notre école est la plus injuste de toutes, ou encore qu’elle fait réussir les élèves qui ont le moins besoin d’elle pour réussir !
Nos dépenses d'éducation sont inférieures à celles de tous les grands pays de l'OCDE. Source : www.oecd.org/fr/sites/panoramade ... 749520.pdfUn tel constat alors que la dépense éducative de la nation atteint cette année 140 milliards d’euros mérite bien qu’on tente de « refonder » notre école !
En renonçant à leur donner un niveau scolaire.Mais, second point, comment en est-on arrivé là, à cet élitisme, et à abandonner les enfants des classes populaires à leur sort ?
Un élitisme sévère, puisque le taux de réussite au Bac d'une génération est de 72%.
Avec la bénédiction de la gauche !Un élément de réponse essentiel réside dans la manière dont la Droite a constitué le collège unique en 1975.
On a réussi à casser la machine...Deux systèmes coexistaient alors, le Secondaire et le Primaire, qui se concurrençaient de la maternelle à la Troisième et même au-delà. Le premier au recrutement social étroit et de tradition élitiste et malthusienne, le second scolarisant la masse des enfants et assurant la promotion des meilleurs. C’était celle-ci l’école républicaine, et non pas l’autre !
Par "pratiques pédagogiques adaptées à une élite", comprendre : savoir lire et écrire. Ce genre de relecture est assez drôle quand on considère la multiplication des matières, la recherche du décloisonnement et la complexification des programmes engendrés par vingt ans de pédagogisme. Curieux de reprocher à l'école un élitisme qu'on a soi-même promu.Les pratiques pédagogiques adaptées à une élite ont donc été généralisées à tous les élèves.
En quoi la massification est-elle un succès si elle n'est pas accompagnée d'une démocratisation ?Grâce à un important effort budgétaire, la massification du second degré a été un succès, mais pas sa démocratisation qui, par certains aspects, a même reculé.
Préoccupation qui serait louable si ces deux syndicats n'étaient pas les principaux responsables de ce désastre scolaire.« Refonder l’École de la République » signifie donc pour nous lui donner pour ambition la réussite des enfants qui n’y réussissent pas aujourd’hui : les enfants des classes populaires.
"inclusive" ? "inscrite dans son territoire" ?Les cinq propositions que nous formulons ne prennent sens et cohérence que par rapport à cet objectif : construire une école fondamentale, de la maternelle au collège, démocratique, inclusive et inscrite dans son territoire.
On aimerait bien que certains de nos dirigeants des beaux quartiers s'appliquent à eux-mêmes ces conclusions.1-Développer la mixité sociale dans les classes, les écoles et les établissements.
L’ensemble des études le prouve ; qu’elles se donnent pour objet les classes, les établissements, les territoires ou l’ensemble des pays développés, on retrouve toujours la même équation : la mixité sociale améliore les résultats des élèves les plus faibles, ce qui entraîne de meilleures performances d’ensemble.
C'est gagnant-gagnant !La justice et la performance vont donc de pair, la première est même l’une des conditions de la seconde.
On ne régule pas en incitant.Le développement de la mixité sociale ne relève certes pas principalement de l’école, il nécessite une politique gouvernementale d’ensemble, ainsi que la mobilisation des collectivités territoriales. Mais l’éducation nationale peut y contribuer en confiant de plus grandes responsabilités aux établissements, notamment dans la régulation sur un territoire des demandes des familles et en les incitant à la mixité par le mode de dotation des moyens.
Quand à retirer des moyens aux établissements les plus favorisés, si c'est louable, le résultat est joué d'avance : le développement du privé, déjà bien ragaillardi par la défaillance du système scolaire public. Pas sûr
Beaucoup de mots compliqués pour une phrase vide de sens.Développer une mixité sociale satisfaisante dans le cadre des objectifs nationaux de réussite implique de donner aux établissements plus d'autonomie afin de développer des pratiques adaptées et plus coopératives et pour établir des relations pertinentes avec l'environnement institutionnel culturel et socio-économique.
Et si l'éducation revenait aux familles et qu'on en déchargeait l'école, dont la mission est l'instruction publique ?2. Concevoir l'éducation des enfants sur le principe d’une coéducation impliquant l'ensemble des acteurs et les familles.
Sauf que les parents ont à exercer leur autorité sur leurs seuls enfants, les enseignants sur des classes entières. Ce ninisme est désespérant pour des syndicats enseignants.La situation actuelle est désolante, où parents et enseignants se rejettent la responsabilité des comportements des enfants et demandent aux autres d’assumer la nécessaire autorité, l’apprentissage des règles et l’éducation morale.
Primariser l'enseignement, quel progrès en ce XXIe siècle ! L'école "du socle" risque bien d'être entraîné vers le bas par celui-ci...Il y a bien sûr des causes culturelles et sociologiques à ce différend, mais l’école porte sa part de responsabilité. Avant 1975, les professeurs du Primaire supérieur enseignaient et éduquaient, tandis que ceux du Secondaire avaient à leurs côtés des personnels spécialisés pour assurer la discipline. C’est ce second modèle, séparant l’instruction de l’éducation qui a été généralisé. Il faut élargir la mission éducative aux enseignants de l’école du socle...
C'est donc les professeurs qu'il faut former à l'éducation, pas les parents. La responsabilité n'était-elle pas supposée partagée ?... et les y former dans un esprit d’étroite collaboration avec les familles, les mouvements d’éducation populaire et les autres associations complémentaires de l’école;
Qui peuvent remercier l'activisme de ces dernières années du Sgen et du SE-Unsa.c’est là aussi un enjeu important pour l’école publique laïque dans sa concurrence avec les établissements privés.
Il n'y a pratiquement plus d'orientation avant la fin de la troisième.3-Reporter à la fin de la Troisième tout processus d’orientation
Des exemples précis ?Un autre résultat des comparaisons internationales est que les pays les plus performants sont non seulement les plus justes mais aussi ceux où le tronc commun des études obligatoires est le plus long.
C'est vrai que les options latin et grec ou les langues sélectives ne sont proposées sous le manteau qu'aux parents de la bourgeoisie.En effet, à chaque fois qu’un choix scolaire est offert (carte scolaire, orientation, options, etc.) ce sont toujours les mêmes qui en profitent, ceux qui possèdent l’information, les réseaux et l’ambition.
Tiens, un gimmick du dernier communiqué de la FCPE : www.laviemoderne.net/veille/viewtopic.php?f=44&t=372Notre école ne doit donc pas offrir de processus d’orientation ou de présélection avant la fin de la Troisième et l’orientation subie doit cesser.
Primariser le collège, ce n'est pas politiquement correct : mieux vaut parler de "rapprochement".4-Rapprocher l’école primaire et le collège dans une « École du socle commun »
Quelle sélection scolaire au collège ?Un troisième facteur de réussite des enfants des classes populaires est la continuité éducative. Ce sont eux qui pâtissent le plus aujourd’hui des discontinuités entre l’école et le collège, de la confrontation de plus en plus brutale, avec la sélection scolaire, de contenus instrumentaux à des contenus culturels, d’un maître unique à dix professeurs.
Les élèves en primaire sont fréquemment confrontés à plusieurs enseignants (langue, musique, sport).
On peut donc donner dix professeurs à chaque classe de primaire ?Il n’y a plus de nos jours de justification à cette séparation arbitraire des cinq premières années de l’école obligatoire des quatre suivantes.
Il faut donc construire progressivement l’école du socle commun en commençant par la mise en place d'un réseau, cohérent, associant chaque collège avec les écoles de son secteur.
Et pourquoi les élèves ne continueraient-ils pas leurs années de collège dans leur école primaire, par souci de "continuité éducative" ?
La compétence disciplinaire n'est donc officiellement plus une compétence professionnelle.5-Recruter et former les enseignants sur des compétences professionnelles
Il faut aussi une "continuité éducative" ?La formation actuelle des enseignants est essentiellement académique.
La haine polpotiste de l'agrégation semble animer nos syndicats réformistes, qui oublient qu'il n'y a pas de leçon pour recruter des professeurs certifiés ou des professeurs des écoles. Non contents d'avoir progressivement dépouillé l'école primaire et secondaire de ses contenus culturels, ils voudraient à présent en dépouiller les enseignants. Il y a là une vraie cohérence qu'il convient de souligner : il faut donner à ces élèves que nous avons rendu médiocres des enseignants médiocres.Elle est évidemment très cohérente avec le constat de l’élitisme des résultats qu’ils produisent. Aujourd’hui, formatés pour faire devant un jury d’universitaires la leçon la plus brillante qui soit, ils ne voient leurs premiers élèves qu’après avoir été recrutés (et alors souvent quel choc !).
Oublions au passage que les reçus au concours ne deviennent pas titulaires, mais stagiaires, et qu'ils doivent valider leur stage face à des élèves pendant un an.
Pourtant, des études le montrent, il ne manque pas d’étudiants à l’éthique sociale affirmée et qui ne demanderaient pas mieux que d’enseigner ;
Il suffit donc d'un peu d'"éthique sociale affirmée" pour devenir professeur ? Faut-il l'affirmer par la parole, ou en y joignant le geste ? Et pour ce qui est de l'éthique, elle sera mesurée par éthicomètre ?
On ne peut donc - en toute logique - recruter "les plus brillants" pour ensuite les former au contact des élèves ?
Si ce n'est pas honteux ! Abandonnons l'élitisme, promouvons le nullisme !...mais les épreuves actuelles des concours les défavorisent au profit des plus brillants dans leur discipline...
C'est vrai : d'anciens bons élèves qui voudraient faire des bons élèves, c'est un système idiot. Recrutons plutôt des petits caïds qui sauront affirmer leur éthique sociale....qui, une fois reçus, n’auront de cesse de retrouver des élèves à leur image.
Il faudra bien affirmer son éthique devant certains élèves.La formation initiale, en alternance, doit donc précéder le concours, dans lequel il faut introduire une épreuve devant de vrais élèves.
Des pédagogies réformistes, bien sûr. Celles qui ont fait leurs preuves depuis vingt ans.Il faut prendre le temps, au cours des deux années de master, de former puis d’évaluer des compétences professionnelles : les enseignants doivent devenir des experts de la pédagogie et des apprentissages et non seulement des contenus à enseigner.
Si la réussite est liée à la capacité à lire un texte ou s'exprimer à l'écrit, effectivement la réussite de tous reste "en voie d'acquisition", pour reprendre le novlangue du LPC. C'est curieux, car de ce point de vue l'école primaire a connu une belle régression.Une formation continue de proximité et diversifiée doit aussi être offerte afin de réorienter les compétences vers la réussite des élèves qui aujourd’hui ne réussissent pas.
La flexibilité professionnelle : le Ministère en a rêvé, le Sgen l'a fait !Une part de formation commune à tous les enseignants –et même à l’ensemble des éducateurs- faciliterait un métier plus ouvert permettant d'exercer sur les différents niveaux d'enseignement au cours d'une carrière.
"Parmi ses revendications caractéristiques : l'alourdissement général des services ; la suppression du temps autonome et l'obligation de présence constante des enseignants dans les établissements ; l'alignement du professeur au Collège de France sur l'instituteur de maternelle ; l'abolition de toute différenciation due au savoir ou à la recherche. En bref, le SGEN est cette rareté : un syndicat d'enseignants qui réclame systématiquement l'abaissement matériel et moral de tous les enseignants."
Jean-Claude Milner, De l'École (1984)
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