"Est-ce bien moral ?" (Educavox)

A lire cet article si bienveillant envers les enseignants de Pierre Frackowiak dans "EducaVox" du 26/04/13 : "Est-ce bien moral ?"


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Est-ce bien moral ?
Grain de sel

Il n’y a rien à faire. L’annonce de Vincent Peillon d’imposer de la morale à l’école pour 2015 appelle inévitablement, comme mécaniquement, les notions de « retour », de « cours », de « discipline scolaire », de « notation ». On ajoute une discipline aux disciplines sans en enlever et sans refonder les finalités.

C'est vrai qu'il manquait encore une des vraies-fausses disciplines qui jalonnent désormais la scolarité des élèves français, des "enseignements d'exploration" (sic) à l'accompagnement personnalisé, en passant par les TPE, le B2i, la note de vie scolaire, les défunts itinéraires de découverte ou l'histoire des arts.

On affirme qu’il ne s’agira pas de cours mais on ne parle que de cours et de programmes. On affirme qu’il n’y aura pas de prof de morale et que tous les profs seront concernés. Et déjà, on entend qu’il n’est pas possible d’enseigner la morale si l’on n’a pas été formé. On tirera peut-être à la courte paille celui qui fera cette discipline en plus de la sienne. On répète qu’il n’y aura pas de note de morale mais une évaluation, ce qui revient au même pour beaucoup de gens. On retrouve dans la plupart des commentaires le mot « enseigner » : enseigner la morale et les valeurs, on oublie comme toujours l’éducation au profit de l’enseignement. Et tout le monde est d’accord. Il faut de la morale à l’école !

La morale ne s'enseigne pas. Sinon les choses seraient bien simples en ce monde.

Tout va bien.

Reste que, une fois de plus, la réflexion du sommet de la pyramide semble vraiment hors sol.

Une couche de morale sur les sédiments des savoirs disciplinaires accumulés résoudra-t-elle les problèmes de fond qui se posent à la société et qui inquiètent les citoyens ? Développement de la violence, agressivité, individualisme, oubli ou mépris pour les valeurs historiques, dégradation du vivre ensemble, abstention, chute de l’adhésion dans les partis et les syndicats, chute de la participation aux réunions…

M. Frackowiak ferait-il désormais partie de la horde des odieux déclinistes ?

Oui, il faut de la morale. Oui, il faut de la morale par l’exemple. Qui donne l’exemple ? Les profs ! Alors, il faudrait que dans un volet du projet d’établissement, ils se mettent d’accord sur quelques règles à respecter dans les rapports avec les élèves : politesse, respect, excuses pour les retards et les absences, accords sur les devoirs, les sanctions, les appréciations, engagements, place dans la vie de l’établissement en dehors des cours. Que vaut le projet d’établissement si des règles du vivre ensemble ne sont pas édictées et respectées dans les deux sens ?

Où l'on retrouve toute la bienveillance de M. Frackowiak à l'égard du corps enseignant : impoli, irrespectueux, en retard ou absent. L'enseignant moderne doit négocier avec ses élèves des "accords" sur le travail, les sanctions et les appréciations. L'inégalité de statut entre l'élève et le professeur est donc une marque d'irrespect et même un exemple d'immoralité. Merci M. Frackowiak pour ces raccourcis saisissants.

Oui, il faut un apprentissage des valeurs. L’égalité, par exemple. Mais que vaut un cours sur l’égalité quand l’école exclut, aggrave les inégalités, stigmatise, évalue toujours négativement, relègue les élèves qui ne maîtrisent pas ses codes ?

L'école aggrave les inégalités depuis que les sciences de l'éducation et le pédagogisme, incarné courageusement par M. Frackowiak, règnent dans et sur l'école. De ce point de vue, la tribune de M. Frackowiak a bien quelque chose d'immoral.

Oui, il faut du débat dans les classes. Mais que vaut un débat en cours de morale quand ailleurs la pédagogie frontale domine, quand le prof ayant posé une question, il ne prend en considération que les réponses qu’il attend, que les échanges élève/élèves n’existent pas ?

Comment apprendre la démocratie quant on a été toute sa vie d’élève un sujet, un récepteur passif et résigné ?

Car bien sûr la démocratie, c'est agir comme bon vous semble.

Oui, il faut de la morale à l’école à condition que ce ne soit pas une petite couche de peinture sur un édifice où rien n’a changé, surtout pas les fondations.

Si tel était le cas in fine, ce sont les élèves qui vont rigoler, même pendant les cours de morale ! Ils auront compris que l’heure de morale n’est finalement pas très morale.

Comprendre donc que dans toute son histoire l'école de la République a été immorale.

Une couche de morale sur les sédiments des savoirs disciplinaires accumulés résoudra-t-elle les problèmes de fond qui se posent à la société et qui inquiètent les citoyens ? Développement de la violence, agressivité, individualisme, oubli ou mépris pour les valeurs historiques, dégradation du vivre ensemble, abstention, chute de l’adhésion dans les partis et les syndicats, chute de la participation aux réunions…

L'hygiène, il a oublié l'hygiène !

Heureusement que nos experts sur la morale laïques ne l'ont pas oubliée, eux !


D'un autre côté, j’apprends que la participation aux réunions fait partie de la morale, comme le fait d'aller adhérer à un parti politique

Car bien sûr la démocratie, c'est agir comme bon vous semble.

Mais bien sûr ! Où êtes-vous donc Loys ? Apparemment pas en France

www.humanite.fr/sites/default/fi ... nistie.pdf

Certes, ce n'est pas passé, mais l'esprit est là.