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"Des élèves vivent le discours républicain comme celui des oppresseurs" (Christophe Prochasson)
- Loys
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- Messages : 112
Il est pile dans la logique de la nouvelle Education Morale et Civique (EMC) qui privilégie le débat argumenté comme méthode "active" pour transmettre les valeurs républicaines. Quelle blague !
De deux choses l'une. Soit l'élève a déjà une opinion sur le sujet débattu, souvent émanant de celle de ses parents, de ses copains ou de bribes attrapées sur le net ou, rêvons, d'un livre, et il n'y a guère de chances que l'on puisse l'amener à changer d'avis (qui d'ailleurs change d'avis après un débat ?) . Soit l'élève n'a pas d'avis préconçu sur une question et il est prêt à accepter une parole "descendante" pour peu qu'elle soit nuancée, argumentée et habile.
Pour faire de l'Education civique depuis 25 ans, je vois que pour beaucoup d'élèves le débat en classe n'a pas d'intérêt car ils veulent que l'école leur transmette "verticalement" une parole, dont ils feront ensuite, en-dehors, ce qu'ils voudront : qu'ils l'acceptent telle quelle, qu'ils la soupèsent, en discutent, entre eux, avec leur famille, etc.; qu'ils la rejettent éventuellement..
La méthode vantée par Prochasson est d'ailleurs ambiguë. Car, après avoir vanté les vertus du dissensus, de l'affrontement verbal, il estime que, à la fin, le professeur "reprend la parole pour mettre en avant les vertus de nos valeurs communes". Autant dire qu'après avoir laissé tout le monde parler, on finit par dire ce qui est vrai, de façon "verticale". Mais alors, quid de ceux qui auront exprimé un avis divergent, incompatible avec les "valeurs communes" ? En quoi le débat argumenté les aura-t-il amené à changer d'avis ? Au contraire, il y a même risque qu'ils en déduisent que la démocratie n'est qu'apparence puisque, ad finem, leurs arguments seront déclarés sans valeur.
En réalité si la participation des élèves est la bienvenue, et qu'on peut partir de leurs opinions et/ou représentations, il est nécessaire que l'enseignant transmette (oh ! l'horrible mot !), par l'examen qu'il mènera des diverses positions possibles, une vérité qui, pour ne pas être absolue, devra être celle de la République. L'école ne doit pas avoir l'air d'hésiter sur ces fondements, elle doit affirmer ce qui est vrai (ici et maintenant). Les élèves devenus citoyens pourront ensuite librement faire ce qu'ils voudront de cette vérité, mais au moins l'auront-ils entendu affirmer avec force. Ce qu'il faut, ce n'est pas débattre avec les radicaux,au risque de les conforter dans leur sentiment d'être des rebelles face à une institution oppressive, c'est convaincre les indécis, qui ne doivent pas penser que l'école hésite et qu'une voie moyenne est possible entre elle et les radicaux.
En fait, la pédagogie du débat renvoie à l'illusion de l'école démocratique. Si l'école est un lieu de démocratie, c'est-à-dire un lieu de délibération entre citoyens égaux, alors le débat a toute sa place. Mais ce n'est pas le cas. L'élève n'est pas un citoyen de plein exercice, il est un futur citoyen. En démocratie, la délibération n'est pas un simple échange sympa d'idées, comme le croient les naïfs (?) du SGEN et de la FCPE. La délibération démocratique donne lieu à décision, après négociation et compromis. Or, qu'y a-t-il à négocier à l'école ? Si à l'issue du débat "pour ou contre la liberté d'expression" (je prends un exemple au hasard), les tenants du blasphème l'emportent car "capable(s) de défendre [leurs] idées et de résister", ou en tout cas ne changent pas d'avis, que fait-on ? On cherche un compromis ? Il est vrai qu'aujourd'hui, après les séances de négociation orthographique, d'aucuns sont prêts à négocier les valeurs fondamentales de la République...
Il faut dire que quand on lit ça :
On ne peut que penser qu'on ne fait pas le même métier que M. Prochasson.Le bon élève est encore trop souvent celui qui sait.
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- Loys
- Auteur du sujet
- Messages : 18213
Voilà qui n'est pas sans rappeler certaines consultations...La méthode vantée par Prochasson est d'ailleurs ambiguë. Car, après avoir vanté les vertus du dissensus, de l'affrontement verbal, il estime que, à la fin, le professeur "reprend la parole pour mettre en avant les vertus de nos valeurs communes". Autant dire qu'après avoir laissé tout le monde parler, on finit par dire ce qui est vrai
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Une note renvoie à : C. Prochasson, « Les mots pour le dire : Jean Norton Cru, du témoignage à l’histoire », Revue d’histoire moderne et contemporaine, vol. 48, n° 4, 2001, p. 175.Disons immédiatement que la discussion n’aurait ici guère d’intérêt si elle ne conduisait qu’à trancher en délégitimant l’un ou l’autre des points de vue, comme le fait très étrangement C. Prochasson lorsqu’il accuse Jean Norton Cru de « s’engager dans une œuvre de révision historique qui relativise l’usage de la baïonnette [...] ou qui dénie l’existence de “monceaux de cadavres” et des “flots de sang” [...] sur la base d’une logique comptable qui eut peut-être quelques échos dans les extravagants calculs de Paul Rassinier ».
www.jourdan.ens.fr/~mariot/hopfichiers/P...20Geneses%202003.pdf
fr.wikipedia.org/wiki/Jean_Norton_Cru
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- Messages : 100
J'ai été devancé, je pensais la même chose en lisant cette réaction. Puisque ça marche avec des enseignants, ça doit marcher avec des élèves qui ne peuvent pas être plus stupide que les enseignants qui ont eu la drôle d'idée de choisir ce métier de manchots du bulbe.Loys écrit:
Voilà qui n'est pas sans rappeler certaines consultations...La méthode vantée par Prochasson est d'ailleurs ambiguë. Car, après avoir vanté les vertus du dissensus, de l'affrontement verbal, il estime que, à la fin, le professeur "reprend la parole pour mettre en avant les vertus de nos valeurs communes". Autant dire qu'après avoir laissé tout le monde parler, on finit par dire ce qui est vrai
On est toujours le c** d'un autre, la vie est une chaîne de c**s.
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