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La saga des "selfies"
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techcrunch.com/2014/06/01/nsa-facial-recognition/
www.lemonde.fr/pixels/article/2014/06/02...4429961_4408996.html
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C'est d'ailleurs comme ça qu'on a renommé "numérique" ce qu'on appelait "multimédia" ou "multimédia interactif" il y a 20 ans. A l'époque, on avait vu une floppée de magazines apparaître en kiosques, qui étaient uniquement dédié à ce concept (exemple : "LVI, La Vague Interactive") ou au CD-ROM, qui était juste en train de se banaliser.
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Ben non, précisément dans cette référence cinématographique, la photographie a une fonction narrative qui ne correspond en rien à un "usage" social. Au contraire, même...Le terme selfie définit une pratique a posteriori : elle existait déjà mais n’avait pas de nom. Preuve en est avec Thelma et Louise [héroïnes éponymes du film de Ridley Scott sorti en 1991, ndlr] se prenant allègrement en photo avant de partir en voyage. Cette scène est extraordinaire parce qu’on reconnaît dans leur geste un usage parfaitement installé, bien avant le numérique, et avec un Polaroid.
Il fallait oser le rapprochment avec la culture rock...Et comme vous le savez, les jeunes font toujours tout de travers ! Ils sabotent l’ordre social en ne respectant pas la norme bourgeoise. C’est ce que l’on disait du rock dans les années 60, alors que la musique représentait l’élément le plus fort de la culture jeune, forme d’outil politique d’identification. Aujourd’hui, le scandale, c’est de pouvoir faire des images, symptôme fascinant de l’expression d’une force sociale.
Quelle force dans le "scandale" ! Un objet de consommation de masse, qui n'est d'ailleurs pas spécifique des plus jeunes, pour "saboter l'ordre social" : il fallait y penser !
Suivons bien le raisonnement : il s'agit de "saboter l'ordre social"... en créant du lien social. Logique !Déjà depuis l’avènement d’Internet et des blogs, les médias adoraient pointer le narcissisme de la jeunesse. Les dénonciateurs de cette panique morale ne pratiquent pas les réseaux sociaux ni le selfie. Ils ne savent pas qu’une image envoyée à quelqu’un avec un visage dessus n’a rien de narcissique. Au contraire, c’est social, on ne se regarde pas dans le miroir puisqu’on fait un coucou, un geste de communication.
A noter que toute critique est disqualifiée : "Les dénonciateurs de cette panique morale ne pratiquent pas les réseaux sociaux ni le selfie". Pour le critiquer, il faut le pratiquer !
La nouveauté, c’est que les images ne sont plus toutes seules, accrochées au mur ou classées dans un album. On ne regarde plus dans le cadre, mais autour. Le sens se déplace dans l’usage. Ceux qui voient le selfie comme narcissique appliquent l’ancien usage de l’image, sans à-côté, sans extériorité.
"étouffer" ?Comment expliquer son succès malgré tout ?
Dans la deuxième moitié de l’année 2013, la critique grossit, les magazines féminins s’emparent du sujet et s’inquiètent pour la santé psychique des adolescentes ! Cela entraîne un «effet Streisand», phénomène médiatique qui se traduit par la valorisation d’une information qu’on essaie justement d’étouffer.
Bien sûr : le selfie est une vaste révolte contre la critique du selfie !
En achetant un smartphone...Le selfie devient tendance fin 2013, les gens s’y mettent pour manifester qu’ils sont contre la norme sociale.
A partir du moment où une mode culturelle est décrite comme un risque pour la société...
C'est vrai que c'est "complexe", tous ces "matériaux"......on s’y inscrit pour ressembler à un dangereux contestataire ! C’est très intéressant parce que c’est pensé avec beaucoup d’humour et d’autodérision, comme toutes les formes de la culture LOL auquel il appartient. Les bons selfies ne sont pas faits à 12 ans. Il s’agit d’une expressivité complexe, inscrite dans une histoire. On a besoin de matériaux : des plats, des lieux, de la famille, des amis…
Car le narcissisme à plusieurs, ce n'est plus du narcissime.Véritable démonstration de sociabilité, le selfie est très souvent collectif, ce qui fait automatiquement sauter l’idée d’autoportrait et de narcissisme !
Ce qui était militant dans ce geste unique de 1991 n'a pas grand chose à voir avec la pratique sociale constatée aujourd'hui. Mais pour André Gunthert, pas de doute : les auteurs de selfies sont des rebelles... qui font comme tout le monde.Le selfie comporterait un caractère militant ?
Bien sûr ! L’esprit du selfie, c’est l’autonomie. Thelma et Louise est assez emblématique : elles manifestent leur féminisme en faisant elles-mêmes leur photo, loin d’une autorité paternaliste.
C'est vrai que c'est important !Avec l’apparition de la perche à selfie, il y a aussi un réel plaisir à contrôler son image. Si certains trouvent ça ridicule, ils oublient à quel point il est important de se prendre en photo quand on veut, comme on veut, où on veut.
"en réaction"... ou plutôt en imitation.En 1859, critiquant le daguerréotype, Baudelaire lançait : «La société immonde se rua comme un seul Narcisse pour contempler sa triviale image sur le métal.» Les gens importants, les vedettes, les hommes politiques, les aristocrates… ceux-là avaient le droit à l’image. La blanchisseuse, le petit peuple, circulez, vous n’avez pas le droit ! En réaction, les gens ont fabriqué leur propre image.
Pour M. Gunthert, à partir du moment où une pratique est démocratique, elle devient légitime. Quel réactionnaire, ce Baudelaire !
C'est vrai que les photos de soi-même étaient impossibles à réaliser dans les décennies précédentes. Quelle "conquête politique" !Puisque le daguerréotype n’était pas fait pour l’ouvrier de Peugeot, on a fabriqué des appareils moins chers, comme le Kodak. Aujourd’hui, la même histoire se poursuit. Le selfie, c’est aussi une conquête politique : Baudelaire avait tort, et ceux qui critiquent la canne à selfie ont tort également.
Tant qu'on gère, hein...Sur Instagram, on voit des photos de plus en plus belles. Certains critiquent cette idéalisation du monde…
Mais la fiction envahit l’ensemble de notre univers culturel ! Tout embellit la vie, et ça fait deux siècles que c’est comme ça. Les acteurs d’Hollywood, comme la publicité, sont plus beaux que nous : ça ne nous a jamais rendus malheureux, on sait qu’il s’agit d’une vision idéalisée. Nous sommes en train d’apprendre à gérer nous-mêmes nos images et nos représentations, y compris à travers l’idéalisation.
Donc, suivons toujours la logique : "répondre à des normes collectives", c'est "saboter l'ordre social".On est face à une mutation culturelle de grande ampleur.
Dans les années 60, le sociologue américain Erving Goffman racontait déjà cette histoire. Son ouvrage The Presentation of Self in Everyday Life (1959) - c’est le même «self» que notre selfie d’aujourd’hui - décortiquait la représentation de soi pour les autres. Dans la rue, on s’habille pour les autres, on répond à des normes collectives. Le selfie représente alors un outil de gestion de l’individualité dans le social, une interaction entre moi et le monde.
C'est non seulement faux mais inepte... Le goût de la provocation conduit M. Gunthert à affirmer n'importe quoi, finalement.Peut-on regretter le fait que le selfie ressemble souvent à une photo ratée ?
Les critères esthétiques ne s’appliquent pas aux selfies. Ils doivent être moches parce qu’ils sont des «embrayeurs» de conversation : une image qui comporte une forme d’autodérision aura plus de succès qu’une image toute belle toute propre à la Harcourt.
C'est parce que c'est raté que c'est de l'art !L’intérêt passe aussi par des erreurs techniques, ma photo est mal cadrée ou mal éclairée justement parce que je ne suis pas photographe. Avec un dosage subtil, il existe une certaine esthétique du raté, soulignant la dimension personnelle et authentique. Depuis Marcel Duchamp, l’histoire de l’art nous a appris une vision plus ouverte et le selfie décrit une expressivité nouvelle. Tout ne se réduit pas à un formalisme académique, et heureusement !
C'est vrai que du jour au lendemain l'écriture est devenue une pratique populaire au XVe siècle !Finalement, vous dénoncez une culture élitiste condamnant une culture populaire ?
C’était déjà le cas au moment de l’imprimerie. Les moines copistes avaient un monopole génial de diffusion du savoir, et du jour au lendemain tout le monde s’en est emparé !
Quant au rapport entre le "selfie" et la question du monopole, on le cherche toujours. Il s'agit toujours de plaquer la même rhétorique creuse.
Effectivement, les gens se servent des outils et ça leur donne du pouvoir.
Quel rapport entre ces "genres" ?Les mèmes [détournements humoristiques sur Internet dont chacun crée sa version], les photos de pieds ou encore les chatons sont devenus des genres à part entière.
Rien à voir avec "l'effet d’imitation de quelques stars comme Kim Kardashian ou Justin Bieber"...On ne trouve pas d’équivalent dans le XXe siècle : d’habitude, toutes les modes viennent top down - des médias, des journaux, des livres…
Car la morale, c'est pas bien. Enfin, celle d'un gentille sociabilité consommatrice, oui.Cette explosion des usages visuels n’a jamais posé problème dans l’histoire de l’humanité : aujourd’hui, elle dérange, et j’en suis ravi.
Bizarrement, aucune évocation du Pop art dont le selfie, avec son caractère populaire de produit de consommation, décliné et reproductible à l'infini par le tout venant par la vertu du numérique est une sorte d'illustration non ironique.
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