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David Monniaux (3) - Le libre arbitre (26/03/12)
- Loys
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Bien sûr que le résultat était prévisible, sinon je n'aurais pas perdu mon temps à préparer cette expérience qui, rappelons-le, ne visait à prouver au reste du monde que les élèves d'aujourd'hui copient-collent ce qu'ils trouvent sur internet, mais à leur faire prendre conscience par l'absurde de ce renoncement à penser par eux-mêmes.Le libre-arbitre
J'ai un peu parcouru ce week-end divers sites et forums commentant le fameux « piégeage » de lycéens par leur professeur. Je m'abstiendrai, pour ma part, de rentrer dans le débat de ce que l'école devrait ou ne devrait pas faire, ne serait-ce que parce que j'ai été lycéen il y a trop longtemps pour que mon expérience soit pertinente par rapport aux générations actuelles, et que, bien qu'agrégé, je n'ai jamais exercé en lycée, me contentant de remarquer que le résultat de son expérience était prévisible.
Je salue David Monniaux pour son honnêteté intellectuelle dans le débat sur l'école : on devrait toujours réagir avec un peu de recul, au lieu de se précipiter tête baissée. C'est un autre travers du numérique...
M. Monniaux, vous devriez écouter les conférences de Bernard Stiegler. En tout cas cet article s'attache davantage aux réactions à mon article qu'à mon article lui-même.Je voudrais toutefois commenter certaines réactions lues ici ou là, ou plutôt l'état d'esprit qui, il me semble, les sous-tend. On a l'impression, à écouter certains, que les adolescents devraient « apprécier » les textes qu'on leur impose de lire, les disciplines qu'on leur impose d'étudier, et que ce sont les distractions du Web (de la télévision, des consoles de jeu, je ne sais quoi encore) qui les en empêcheraient.
Personnellement je n'ai jamais prétendu une chose pareille. Les élèves sont libres d'aimer ou pas ce que je leur demande de lire, je leur rappelle régulièrement : mais cela ne les dispense pas de l'effort de lire. La sensibilité, le goût littéraire sont des choses subtiles, qui s'élaborent avec le temps, les lectures et la vie, et qui n'ont rien à voir avec le commentaire ou la dissertation, où l'on ne demande pas aux élèves d'exprimer leur subjectivité. Enfin, qui s'élaborent pour peu qu'on lise.Il y a sans doute du vrai à cette théorie selon laquelle la consultation du Web favorise le papillonnage : on abandonne un article à demi-lu pour consulter son courriel, etc. Ce n'est pas là le point qui me dérange ; c'est plutôt cette croyance, sous-jacente, que la matière enseignée est naturellement intéressante et que les élèves devraient l'aimer.
Nous sommes d'accord.On peut imposer un sujet d'étude ; mais ne demandez en plus pas aux élèves qui l'aiment.
Je ne sais pas si c'est du fascisme, mais nous sommes encore d'accord.Qu'on attribue les goûts et les dégoûts au libre-arbitre, à des déterminismes sociaux, ou à l'histoire de la personne, il n'en reste pas moins que les gens ont le droit d'aimer telle chose, d'en détester telle autre, sans devoir s'en excuser ou se justifier. Si j'osais, je dirais même que l'on est quelque peu fasciste quand l'on prétend dicter aux gens non seulement comment ils doivent se comporter, mais ce qui doit leur faire plaisir.
Décidément, je souscris à tout ce que dit M. Monniaux dans cet article, ou presque.Ce droit à la personnalité ne s'étend évidemment pas au droit de refuser une matière, un sujet, un examen, au motif que celui-ci est ennuyeux, du moins de le refuser sans sanction : la vie est remplie de choses que l'on doit faire alors qu'on les trouve ennuyeuses au possible, et on ne voit pas en quoi l'enseignement devrait échapper à cette règle. Cessons toutefois l'hypocrisie de croire que les élèves doivent « apprécier » ce qu'on leur a imposé.
J'ai trop de respect pour mes élèves pour leur imposer d'aimer ce que j'aime. Mais, comme tous les professeurs de lettres, j'espère - très modestement - que mes élèves considèrent après une année de cours avec moi, qu'il y a peut-être des choses intéressantes en littérature.Autrement dit, un enseignant de lettres a le droit d'exiger un commentaire de texte de qualité sur un texte que l'élève trouve ennuyeux et inintéressant, de la même façon qu'un enseignant de mathématiques a le droit d'exiger d'un préparationnaire la connaissance de myriades de résultats sur les séries de Fourier ; mais il ne peut exiger d'eux qu'ils aiment cela.
(*) Vient ici à l'esprit l'image de Roger Waters, dans son rôle onirique de dictateur, ordonnant au public « Enjoy yourselves » !
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