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"Bug dans la feuille de route numérique" (Lois des réseaux)
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Posée ainsi, la question ne souffre pas de débat...Un débat sur la refondation de l'école de la République commence lundi 11 mars à l'Assemblée nationale. Une phrase du volet éducatif de la feuille de route numérique met en émoi le milieu enseignant. La France va-t-elle hésiter à doter ses enfants d'un bagage culturel et scientifique digne du XXIe siècle ?
Dans les deux cas, aux yeux de Dominique Lacroix, les commentateurs sont des promoteurs du numérique à l'école.Volet éducatif de la feuille de route : la phrase disparue
Une phrase inquiète les promoteurs de l'enseignement de l'informatique à l'école en France :
« Une réflexion sur la place que doit prendre la science informatique, à tous les niveaux d’enseignement, sera prochainement engagée. »
Cette phrase est extraite du volet éducatif de la feuille de route numérique du gouvernement tel que présenté par le ministre Vincent Peillon sur le site du Ministère de l'éducation nationale au point 3 de la « Mesure n° 1 : l’entrée du numérique dans les enseignements scolaires. » Vient ensuite l'annonce de l'extension, dès la rentrée 2014, à toutes les sections de classe terminale de l'option informatique actuellement réservée aux terminales scientifiques.
Le 28 février 2013, le Premier ministre Jean-Marc Ayrault a présenté la feuille de route numérique du gouvernement. L'option informatique pour toutes les terminales est bien mentionnée. Mais exit la phrase clé sur l'introduction de l'informatique à tous les niveaux.
Débat classique entre commentateurs : les confiants pensent que le texte du gouvernement est « plus résumé ». Les grincheux pensent que le texte du Ministère procède à « un enfumage ».
Que l'expression "réflexion sur la place que doit prendre la science informatique" soit supprimée me semble aller de pair avec la précipitation habituelle en ce qui concerne le numérique.
Euh... d'un certain milieu, très mobilisé.En tous cas, cet écart entre les deux textes sur un point aussi sensible témoigne bien d'une maladresse à l'égard d'un milieu très mobilisé.
Bon, puisque le législateur l'a dit, c'est bien que l'informatique n'est pas une technique mais une science...La solution pour clarifier les choses et continuer la refonte nécessaire de notre système éducatif dans le sens de la modernité serait que les députés eux-mêmes adoptent des amendements législatifs sur le sujet. En effet, lundi 11 mars à 16 h, l'Assemblée nationale entamera l'examen du projet de loi d'orientation et de programmation pour la refondation de l'école de la République.
* Mise à jour 10/3/13, Proposition d'amendement communiquée par l'association EPI
Un enseignement de la science informatique pour tous doit être progressivement introduit dès l'enseignement secondaire, ainsi qu'une sensibilisation à l'école primaire.
Cet amendement constitue, s'il est retenu, une petite révolution.
C'est donc bien une technique...Lire, écrire, compter, coder
Effectivement, c'est simple... Mais pourquoi en Logo ?
Coder, un jeu d'enfant !
Le langage logo permet de faire dessiner des figures par une tortue
Avant de l'enrichir, il faudrait déjà assurer les trois autres apprentissages.La question n'est pas mince. Il s'agit d'ajouter un quatrième terme aux apprentissages fondamentaux qui constituent la mission fondamentale de l'école et d'enrichir le socle de notre culture générale commune transmise par le collège et le lycée.
Nous y voilà... Il s'agit en fait d'adapter la main d'oeuvre au marché. Avec cette fascination pour la réussite commerciale.Le hasard fait que j'en parlais justement hier avec un jeune créateur d'entreprise, Tracy Loisel, fondateur de Verseau Paris, étoile montante du commerce en ligne.
Et une "mission fondamentale de l'école" ?Un million d'euros de chiffre d'affaire atteint dès le 7e mois, embauche de deux salariés chaque semaine et prochaine installation dans 600 mètres carrés dans le Sentier. C'est ça, le potentiel du numérique.
Pourquoi l'enseigner, dès lors ?C'est ça, l'enjeu industriel de la connaissance à introduire à l'école. Tracy n'a pas appris l'informatique à l'Université ni dans une école d'ingénieurs, seuls lieux où l'on pouvait l'apprendre jusqu'à présent, hors filières techniques. Il a appris par le jeu, dès l'âge de 8 ans.
Nous voilà bien dans une forme de pédagogisme : celle du ludisme et de la nécessité de l'immédiateté. Pas d'effort pour apprendre à coder : voilà qui est amusant.« L'informatique est la seule science qui permet de réaliser des choses tout de suite, et en s'amusant.
Quel bel exemple, plein de morale et de matérialisme pour la jeunesse !Mon père me donnait à faire des exercices de calcul mental programmés par lui sur son ordinateur. Il me laissait seul et revenait voir les résultats enregistrés par la machine. Moi, j'avais repéré un jeu qui m'attirait davantage, on actionnait un gorille qui lançait des bananes sur des obstacles. J'ai trouvé le fichier qui stockait mes notes de calcul. Je le remplissais de bons scores. Et là, je pouvais jouer tranquillement au gorille jusqu'au retour de mon père. »
L'informatique n'a plus quitté Tracy, qui y a trouvé une passion et un métier.
Je ne vois pas en quoi cetet histoire montre que l'informatique est une science.L'informatique, science et technique
Tout le monde ne peut pas commencer par hacker son père, ici volontiers complice. Mais l'histoire de Tracy illustre bien la dualité de l'informatique, à la fois science et technique.
Nous revoilà en plein utilitarisme. Et si le tourisme, grande source d'emplois en France, c'est aussi une science ?Difficile d'enseigner un algorithme sans écrire un programme, même si coder n'est pas obligatoirement l'objectif de cet enseignement. Cette dualité nous obligera d'ailleurs sans doute à réviser notre vision des relations entre sciences et techniques.
Cette prétendue "dualité" n'est guère expliquée ici.C'est également cette dualité, pas forcément aisée à bien comprendre, qui favorise les désaccords pédagogiques, voire philosophiques.
Sous-entendu : l'informatisation est nécessaire pour rester dans la compétition mondiale. J'en suis bien convaincu, mais elle reste une spécialisation qui n'a pas à être généralisée pour des raisons économiques au primaire ou au secondaire, où l'école a d'autres missions. Par ailleurs apprendre à coder exige une rigueur intellectuelle et une capacité d'abstraction, qui sont ce qu'on doit apprendre au préalable.Plusieurs pays ont déjà opéré leur révolution éducative, notamment des pays en développement qui y voient une chance de gravir plus vite que les autres les échelons de la promotion économique et culturelle : Inde, Tunisie, Maroc, Cameroun etc.
Susciter des vocations, très bien.Aux États-Unis, la situation est compliquée parce que chaque État mène sa politique d'enseignement public et que le secteur privé occupe une large place. Mais une campagne grand public a été lancée. Si l'on suit les tendances actuelles, les entreprises manqueront de compétences informatiques : dans ce secteur, aux U.S.A., les besoins croissent deux fois plus vite que le nombre d'étudiants selon la fondation code.org, créée par des chefs d'entreprises et des universitaires. La Présidence a exhorté la Nation, comme le rapporte le site Hastac.org : « Une éducation de classe mondiale est le facteur le plus déterminant non seulement pour que nos enfants puissent prétendre aux meilleurs emplois mais aussi pour que l'Amérique puisse remporter la compétition mondiale sur les autres pays. » a déclaré le Président Barack Obama* en juillet 2011. « Mais l'idée de compétition pour les meilleurs emplois ou pour la compétitivité constante dans l'économie globale ne peut pas motiver un enfant de 13 ans à apprendre. » Pour répondre à ces deux dimensions, compétitive et pédagogique, l'agence de recherche militaire DARPA, Defense Advanced Research Projects Agency, a lancé deux programmes, l'un à destination des étudiants pour susciter des vocations d'études et de carrières en informatique, l'autre pour les jeunes de 13-18 ans, pédagogique et ludique, le site NoNameSite.com.
Effectivement, et on attend toujours la démonstration...Un processus de modernisation par vagues
En France, on a vu se succéder plusieurs vagues d'informatisation dans l'éducation depuis 1970. La dernière en date, le Plan informatique pour tous, en 1985 sous le gouvernement de Laurent Fabius, a généré de vifs affrontements, pendant sa mise en œuvre et surtout ensuite, dans l'analyse de son bilan.
Outre ce souvenir, stigmates chez certains, le milieu enseignant, l'un des piliers électoraux des socialistes en France, est traversé de débats. Une frange, maintenant minoritaire, défend une vision prétendue « humaniste » où seules les disciplines dites nobles trouvent leur place. Ils n'ont pas perçu l'émergence de la science informatique depuis le milieu du 20e siècle ou bien contestent le caractère scientifique des activités liées au code.
Lire, écrire, compter ne sont pas des disciplines et servent dans tous les domaines de la pensée.Mais le clivage le plus important se situe entre les défenseurs de l'apprentissage par les usages et les promoteurs de l'enseignement de l'informatique en tant que discipline.
C'est lamentable : Mme Lacroix a bien compris qu'il fallait tout révolutionner.Les premiers s'accommodent souvent d'une vision où l'on enseignerait l'informatique dans chaque matière, à l'occasion de la mobilisation des machines informatiques — ordinateur, tablette, etc. — pour apprendre l'histoire, la géographie, la littérature, les mathématiques etc. Dans cette configuration, les documentalistes et quelques professeurs volontaires conserveraient la place prééminente que le numérique leur a conférée dans l'institution.
Quel drame... Preuve au passage qu'on peut devenir "expert" sans enseignement.Les conséquences sont importantes en termes de formation des enseignants. Dans l'enseignement par les usages, ce sont tous les enseignants qui doivent être formés, avec un risque de les voir souvent confrontés à quelques jeunes élèves, experts, eux, en mécanismes sous-jacents aux usages...
Un cursus, un concours etc. Voilà qui peut être fait en quelques mois.Dans la vision de la discipline informatique, il faut former des enseignants spécialisés et, à terme, créer pour eux des concours de recrutement.
Encore un peu de pédagogisme consensuel.Espérons que le corps enseignant saura faire démonstration de maturité et reconnaître que les deux approches sont complémentaires et nécessaires, l'une comme l'autre. La collaboration dans le travail d'équipe est par ailleurs une compétence numérique de base.
Je doute des interactions possibles, pour ma part.On ne peut douter qu'elle présidera aux relations entre documentalistes et futurs professeurs d'informatique.
Si ce n'est pas du terrorisme intellectuel, ça.L'heure n'est plus au Si, mais au Comment
On voit mal, en effet, comment l'école pourrait ignorer cette science qui bouleverse toutes les autres et exposer les jeunes Français à être pénalisés dans la compétition mondiale de l'intelligence.
Mme Lacroix, journaliste, a bien enquêté sur la question, on dirait, puisque la spécialité a été organisée à la va-vite avec des professeurs non formés.Le principe semblait acquis. Le Ministère de l'éducation a largement mobilisé des informaticiens et des enseignants pour définir la charpente pédagogique de la discipline introduite en terminale S en 2012. Des professeurs ont été formés sur tout le territoire, dans des universités.
Tout va bien, alors.Un manuel leur a été consacré, coordonné par Gilles Dowek, directeur scientifique adjoint de l'Inria. La discipline a été organisée autour de quatre concepts fondamentaux indissociables : algorithme, machine, langage, information.
Les informaticiens les plus éminents de la Nation se sont mobilisés, comme le chercheur Maurice Nivat, membre correspondant de l'Académie des sciences, ou Gérard Berry, membre de l'Académie des Sciences et de l'Académie des technologies, qui a inauguré la chaire annuelle d'informatique et sciences du numérique au Collège de France.
Plus il faut se dépêcher et moins on a le temps de la "réflexion"...Deux associations coordonnent leurs efforts pour apporter leur appui au processus, l'EPI, Enseignement public et informatique, et la SIF, Société informatique de France.
Restait à mener la « réflexion » comme l'écrit le ministre Vincent Peillon, et la concertation sur les modalités, sans tarder, car le temps presse.
Allez, on écorche encore un peu le corporatisme enseignant.Espérons que le gouvernement socialiste saura mener avec clairvoyance et détermination cette révolution culturelle dans le bastion des enseignants.
Bref un article écrit par un journaliste qui ne connaît visiblement pas plus les enjeux de l'enseignement (et la crise de l'école) que ceux de l'informatique.
[/quote]En savoir plus
Pourquoi l'informatique doit-elle devenir une composante de base de tout enseignement ? par Maurice Nivat, sur le site de l'EPI
Pourquoi et comment le monde devient numérique, par Gérard Berry, Leçon inaugurale de la Chaire d'Innovation technologique Liliane Bettencourt, Collège de France, 17 janvier 2008, en ligne sur le site du Collège de France
Introduction à la science informatique, pour les enseignants de la discipline en lycée, dirigé par Gilles Dowek, préface de Gérard Berry, Éd. Scérén, 2011
Licence Creative Commons, disponible sur papier en librairie ou sous forme numérique librement téléchargeable sur SILO, Science Info Lycée, Oui
Comparaisons internationales, Simon Peyton Jones, novembre 2011, sur le site britannique Computing at school, en anglais, 12 pages, pdf, 769 Ko
Le plan Informatique pour tous, 1985, vingt ans après, Jean-Pierre Archambault, Medialogn° 54, juin 2005, 4 pages, pdf, 37 Ko
* "A world-class education is the single most important factor in determining not just whether our kids can compete for the best jobs but whether America can outcompete countries around the world. But the idea of competing for the best jobs or continued global economic competitiveness does not inspire a 13 year old to study."
Barack Obama
En voilà des références contradictoires.
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