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Les "humanités numériques"
- Loys
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- PNF Lettres : A la recherche des humanités nouvelles (20/11/12)
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- "PNF Lettres : 2 - Le jour où la littérature numérique s'incarna" (21/11/12)
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Et sur le site "Le rendez-vous des lettres" du PNF :
En 2012, il s’est agi de faire percevoir le devenir de l’œuvre au fil de l’écriture numérique. Entre mobilité et fragmentation, l’œuvre ne risque-t-elle pas de se perdre sur le web ? Assiste-t-on au contraire à l’émergence de nouvelles « humanités numériques » ? En effet, si les compétences requises pour ces nouvelles « littératies » supposent des apprentissages d’un type inédit, la culture numérique s’ancre aussi dans notre patrimoine humaniste. Les débats ont porté sur les défis posés à la création littéraire et aux arts numériques, qui oscillent entre héritage, contraintes et renouvellement des formes. « Écrire web », c’est en quelque sorte réinventer la littérature d’aujourd’hui.
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A méditer, cette phrase de M. Le Baut :
La projection du film « Nous, princesses de Clèves » vient clore la journée comme une proclamation de foi en la démocratisation de la littérature et en l'élévation du lecteur.
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Les digital studies sont quand même une tarte à la crème. En tout cas on notera que cet article postule tout simplement "l'humanisme numérique" même si l'expression en elle-même paraît quelque oxymorique.Sur l’humanisme numérique. Une analyse de Milad Doueihi, université de Laval au Canada.
Bien que le terme d’humanisme ne soit pas à la mode, j’ai décidé de l’associer au numérique pour trois raisons.
Dans le sens le plus pauvre du mot "culture", sans doute.Premièrement, je m’intéresse surtout à la dimension culturelle du numérique. Il existe un flou entre les mots informatique et numérique : on passe souvent de l’un à l’autre comme s’ils étaient des paroles équivalentes. L’informatique a une histoire particulière : branche des mathématiques au départ, elle s’est rapidement imposée comme une science autonome avant de devenir une industrie, puis une industrie culturelle, et enfin une culture.
"modifier", c'est un terme bien vague : s'agit-il d'un rapprochement avec ce patrimoine hérité ?Nietzsche définit la culture par le fait qu’elle modifie notre regard sur nous-mêmes, sur les objets que l’on produit et surtout sur les objets hérités. Ainsi, les effets de la numérisation sur nos rapports avec le patrimoine, les archives, les livres modifient notre regard de manière significative.
Des exemples ?En même temps, le numérique produit de nouveaux objets culturels.
Cette récupération pascalienne me semble pour le moins hasardeuse.Le passage de l’informatique au numérique constitue donc une étape importante, un dépassement de la technicité informatique vers les pratiques et usages culturels inscrits dans le numérique. Pour reprendre l’expression de Pascal, l’informatique est l’esprit de la géométrie. Le numérique au contraire est l’esprit de la finesse.
Ou venons-y, plutôt.Revenons à la définition de l’humanisme numérique.
Avec le virtuel on se dirige à grand pas vers l'humanisme.Pendant quelques années, des discours pertinents, parfois exagérés, ont insisté sur la dimension temporelle des effets de la culture numérique sur nos pratiques et usages (vitesse, flux, rapport au temps).
Si notre vie quotidienne montre la véracité partielle de ces analyses, le numérique modifie de façon plus radicale encore notre rapport à la spatialité, dont on peut imaginer toutes les modulations possibles. L’être humain ne se caractérise pas seulement par le langage, mais aussi par la manière dont il façonne et habite l’espace. Or le numérique modifie – de manière importante et visible – notre habitus (la construction de la sociabilité au sens large) et les espaces que nous habitons (professionnel et privé, public et institutionnel ). Cette dimension spatiale me semble essentielle, car elle est associée à la nature hybride des objets culturels produits par la culture numérique : un va-et-vient permanent entre deux modalités, le réel et le virtuel.
Aucun risque puisque le numérique, c'est l'esprit de finesse.Deuxièmement, il faut prendre un peu de distance avec certains discours sur les humanités numériques. On a d’abord eu tendance à imposer aux sciences humaines et sociales une forme de maîtrise des outils, d’utilisation des données et modèles quantitatifs qui accompagnent le numérique. Et réellement, celui-ci crée des traces qui ont pour effet la mesurabilité. Tout devient – ou peut sembler – mesurable (intentions, comportements...). La séduction du quantitatif fait partie des promesses de certaines approches des humanités numériques. J’encourage une réflexion sur l’histoire de nos disciplines : en quoi est-elle fragilisée par le numérique ?
Le structuralisme est un humanisme ? Voilà une évidence qui mérite discussion.Troisièmement, prenons un cadre plus large, plus pertinent et plus éloquent. Étudiant les liens entre la culture technique et les sciences humaines et sociales, Lévi-Strauss identifie, dans l’histoire de l’Occident, trois moments humanistes déterminants : l’humanisme aristocratique de la Renaissance, l’humanisme exotique du XIXe siècle (découverte des cultures de l’Orient) et l’humanisme démocratique du XXe siècle (celui de l’ethnologue).
Au-delà de l’évolution politique (de l’aristocratie à la bourgeoisie et à la démocratie), on peut observer dans ces trois mouvements une évolution de nos rapports avec le document culturel : à la Renaissance, découverte des textes de l’Antiquité classique ; au XIXe siècle, découverte de la temporalité imposée par les cultures venues d’ailleurs ; au XXe siècle, méthode de l’anthropologue et du structuraliste.
Encore et toujours "modifier" pour éviter toute axiologie compromettante.Cette schématisation exprime un mouvement culturel puissant. Il me semble que le numérique est également un humanisme dans le sens où il modifie nos rapports avec les textes, les supports institutionnels édifiés au XIXe siècle (disciplines universitaires, droit d’auteur, propriété intellectuelle...) et le politique dans sa dimension démocratique (aspects collaboratifs, participatifs...).
C'est dommage.Je ne prétends pas en donner une définition précise...
On voit que la culture - dans certaines acceptions - peut se réduire à peu de choses......mais plutôt suggérer une mutation profonde que l’on peut regarder et illustrer de différentes manières.
Commençons par les effets de la mobilité. Au début, la culture numérique était une culture de la chaise : on était obligé de travailler devant son ordinateur, sans pouvoir se déplacer.
Tout ceci me semble bien fumeux.Depuis quelques années, la convergence technique entre le réseau internet et le réseau cellulaire (téléphone intelligent) permet une mobilité croissante.
Comment interpréter l’émergence de cette mobilité ? Dans son texte « Les techniques du corps », Marcel Mauss observe que la manière de marcher dans la rue à Paris a été modifiée par le cinéma américain. Il en déduit qu’il existe un rapport déterminant, dans une civilisation donnée, entre la posture du corps et la nature des objets culturels produits par cette civilisation. Pour illustrer son propos, il prend deux cas extrêmes : une culture avec la chaise (la Chine) et une culture sans la chaise (l’Inde). On comprend immédiatement la nature différente des objets, qu’elle soit textuelle ou autre. Il me semble que notre civilisation est en train de vivre une mutation de cet ordre dans l’hybridisation à la fois spatiale et sociale
Voilà qui n'engage à rien.c’est là que surgissent des formes de fragilité, parfois de malaise, mais aussi des promesses de nouveauté.
J'ai beau chercher, je ne vois pas le rapport entre "position du corps" et humanisme.Cette première dimension de l’humanisme numérique touche à la fois à la position du corps et au statut de l’espace et de l’habitus.
Car auparavant on frappait sur les touches d'un clavier et on déplaçait une souris par la simple puissance de notre esprit.La mobilité a également pour conséquence le retour en puissance du corps à travers le numérique (le tactile, la voix...).
Encore "modifier"...Il faut étudier cette nouvelle configuration dans toutes ses dimensions, dans la manière dont elle modifie nos rapports avec notre héritage culturel.
Quelle perspective réjouissante !En second lieu, considérons notre rapport à la mémoire, surtout collective. Avec le numérique se met en place une inversion essentielle de notre relation avec ce qui est numérisé et archivé : tandis que les interfaces numériques (comme le distributeur de billets) nous donnaient accès à des fonctionnalités bien spécifiques, le monde devient – avec l’émergence de la mobilité et de la réalité augmentée – une interface vers le numérique.
J'aurais dit exactement l'inverse : le numérique offre l'absence de tri, l'accumulation d'une totalité rendue sans limites et accessibles à tous.Cette modification de notre rapport à la mémoire se retrouve dans la construction des archives numérisées : depuis longtemps, le patrimoine se constitue plutôt par défaut ; avec le numérique, il se construit par un tri, par un choix à la fois éthique et politique. Ce sont des questions importantes auxquelles nous devons réfléchir.
En effet, la technique ne peut pas concevoir la mémoire avec des trous, des failles ou des absences – d’où cette utopie, véhiculée par Google et d’autres, d’un accès universel. Néanmoins, les archives ont toujours été des lieux d’oubli puissants et productifs. Il faut également associer à la mémoire collective le statut des traces et de la traçabilité.
Dans l’environnement numérique, la nature même de la technique nous impose la création de traces, que les analyses algorithmiques associent à des intentions. Or le fait de visiter un site ne traduit pas forcément une intention… Le danger ne réside pas seulement dans cette confusion, mais dans une tendance à transformer peu à peu les expectations et les comportements en fonction de ces analyses. Il faut savoir contourner, résister, interpréter autrement. Il me semble que les disciplines classiques (histoire, linguistique, littérature...) ont beaucoup à nous dire à ce sujet.
L'oubli n'a malheureusement pas besoin d'être programmé. M. Doueihi pense la machine comme un substitut de l'intellect humain., ce qui nous conduit effectivement à grand pas vers une forme d'humanisme moderne.Troisièmement, le statut de l’oubli – très puissant dans nos cultures – est gommé ou voilé dans la culture numérique. Je ne parle pas du droit à l’oubli de l’individu qui doit pouvoir éliminer ses traces, mais du fait que la technique ne peut pas concevoir l’oubli – si ce n’est pas comme une faille –, car c’est la nature de la machine, de la technique et du numérique. Il ne faut pourtant pas confondre les deux formes d’oubli. Notre manière d’oublier est constitutive de la manière dont nous apprenons et évoluons. Comme le dit Nietzsche, nous sommes des monstres d’oubli dans le sens où l’on deviendrait des monstres si l’on n’oubliait pas. Dans la machine algorithmique, il est presque impossible de programmer et de coder l’oubli tel que l’homme le pratique consciemment ou inconsciemment. Notre rapport avec la mémoire constitue un enjeu considérable, car il peut façonner nos rapports avec la culture.
Perspective naïve et tout sauf humaniste.Quatrièmement, la construction imaginaire de l’intelligence est inhérente à la culture numérique et à la technique informatique. Il y a plusieurs écoles, qui sont liées à l’intelligence artificielle, aux formes d’aide à la décision, aux reproductions de l’intelligence humaine… Pour en savoir plus, il faut s’intéresser aux discours transhumanistes sur les modifications de l’humain et du vivant par la technique. Selon la thèse de la singularité, il existe un moment où il y a convergence entre la technique et le vivant et, à partir de ce moment, c’est la technique qui dépasse l’humain dans son intelligence et ses capacités.
La figure de l'auteur n'est pas une invention des Lumières : c'est une des caractéristiques de l'humanisme au sens le plus ancien et elle est en voie de disparition.Du coup, il faut faire converger les deux : à la fois la transformation du vivant et de l’humain, et une période transitoire de l’humain. Cette évolution importante renvoie aux trois humanismes de Lévi-Strauss, où le Siècle des Lumières ne figure pas. Pourquoi est-il le grand absent de cette périodisation ? Avec la culture numérique, on est en train de vivre les héritages conflictuels du Siècle des Lumières. La culture du livre et de l’imprimé s’est solidifiée à la fin du XVIIIe siècle avec la mise en place juridique et économique de la figure de l’auteur, ce qui a donné lieu à toute une industrie, notamment du livre. En même temps, la tendance du bien commun – héritée du droit romain – insistait sur la libre circulation du savoir pour assurer le progrès et l’avancement des sciences. Cette contradiction entre les deux tendances existe toujours aujourd’hui.
La question de l'auteur réduite à des préoccupations économiques, voilà le nouvel humanisme qu'on nous propose.C’est une question difficile à résoudre, car elle touche à des modèles économiques puissants et établis. On est obligé de réfléchir à un nouveau modèle intellectuel, social et économique pour essayer d’accommoder les pratiques qui mettent en difficulté l’économie classique héritée de la culture du livre et de l’imprimé.
D'où sortent ces "illustrations" ?Revenons à l’imaginaire de l’intelligence, pour nous intéresser à la manière dont la science-fiction génère des modèles actifs dans la culture technique et informatique. Je propose deux illustrations de thématiques tout à fait révélatrices. La première concerne le statut de l’enfance. Une série de romans liés aux jeux vidéo racontent des histoires où des enfants prodiges sont sollicités pour jouer à de faux jeux vidéo.
Beau modèle de sagesse et de maturité.Dans cette projection vers l’enfance, il y a une projection de la technique sur elle-même : la technique se pense comme une enfance perpétuelle. Elle est toujours en train de s’inventer, de se renouveler et d’innover.
C’est le discours du progrès technique. Cette dimension importée de l’enfance donne un cadre intellectuel qui permet de faire avancer la production technique, surtout dans ses insertions culturelles. Deuxièmement, on constate l’impossibilité de penser un récit sur la fin de l’espèce humaine. Dans tous les discours de la science-fiction, on retrouve la thèse manichéenne d’un robot qui se cherche une identité et qui, dans cette quête, découvre son créateur et se retourne contre lui.
C’est le schéma le plus classique. Or on a incorporé un récit de la genèse et de l’identité qui reproduit ces schémas familiers et ne cesse de revenir vers des histoires de généalogie. On retrouve dans cette généalogie de la technique les problèmes évoqués précédemment, c’est-à-dire la recherche des origines pour légitimer l’émergence de nouveaux repères et critères de pertinence.
Bon, je renonce à essayer de suivre le fil de cette pensée nébuleuse.
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Plutôt une branche de l'électronique au départ !
"Des exemples ?"
Les jeux vidéo.
"Pour reprendre l’expression de Pascal, l’informatique est l’esprit de la géométrie. Le numérique au contraire est l’esprit de la finesse."
Il utilise un générateur de phrases vaseuses, c'est à parier.
Enfin : comment faites-vous pour lire un truc pareil aussi loin sans craquer ?
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- Loys
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Et en parallèle cette journée des cadres de l'académie de Créteil intitulée : "Le numérique, de nouvelles humanités pour une École connectée". Voir sur ce fil.
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