L'intelligence artificielle et l'école

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21 Nov 2024 17:44 - 22 Nov 2024 00:14 #25304 par Loys
Sur le site de l'académie de Lyon du 20/11/24 : "Expérimentation de la correction de copies du DNB par l’intelligence artificielle" par Thibaud Hayette ( sauvegarde ).

Thibaud Hayette est professeur de lettres depuis 2022, Interlocuteur Académique pour le Numérique (IAN) pour l'Académie de Lyon, formateur académique et webmestre du site académique de Lettres et LCA de Lyon. Il est aussi expert CRCN-Edu.

Extraits :

Attention : Spoiler !

Une "expérimentation" à partir de sept copies, donc.

De façon amusante, l'auteur considère que les systèmes de correction automatiques déjà existants sont "prometteurs" tout en faisant la promotion d'un nouveau système qui les rendrait à l'évidence...  obsolètes. Telle est la dure loi du progrès : elle annule toujours ce qui l'a précédé, relégué aux oubliettes.

L'auteur propose donc un match : "En somme qui remporte le "combat" entre l’homme et la machine ?". La tension est à son comble, même si le match semble déjà plié :

[L'IA] pourra notamment traiter de plus grandes quantités de textes, comme pour une rédaction, par exemple. En outre, l’IA ne se fatigue pas, peut répéter à l’envi une même demande, reste objective et peut surtout traiter en un temps record une grande quantité de texte.

Dés lors pourquoi les deux premières questions semblent quelque peu artificielles :

Qui est le plus rapide ? Qui est le plus objectif ? Qui est le plus efficace ? Et pour terminer, la technologie est-elle suffisamment élaborée pour s’y fier ?

En réalité, la dernière question annule toutes les autres. Si on ne peut pas se fier à ces algorithmes, leur efficacité, leur objectivité supposée ou leur rapidité n'ont aucun intérêt...

Reste, de toute façon, que l'efficacité est bien vite arrêtée par un premier obstacle : la reconnaissance de l'écriture manuscrite. Il apparaît en effet qu'en plus d'imposer des étapes supplémentaires au travail de correction (scan des copies, insertion dans un logiciel de reconnaissance, transformation en texte numérique - et encore : M. Hayette n'évoque pas le temps de classement des fichiers numériques quand un professeur a plusieurs classes), l'algorithme ne parvient pas à conserver le texte de la copie (de la correction automatique de l'orthographe à l'incapacité à lire la graphie de l'élève et à l'invention pure et simple de portions de texte alternatif). L'auteur reconnaît qu'il a dû "vérifier et remettre à l’identique, pour chaque copie, ce que l’élève avait écrit".

A noter que la graphie donnée en exemple, qui a causé tant de difficulté à la reconnaissance, est loin d'être la plus calamiteuse que l'on puisse rencontrer.

Ces étapes supplémentaires semblent donc parfaitement rédhibitoires : M. Hayette, lui, en déduit que le travail de l'IA sur ce point est "perfectible" : "on peut espérer que dans un avenir prochain cela ne posera plus de difficultés".

On pourra aussi utilement renoncer à l'écriture manuscrite car, comme le note ensuite l'auteur, " l’écriture manuscrite reste encore la norme, notamment pour les examens".

Forte de cet espoir sur les progrès à venir de l'IA, l'expérimentation continue donc.

Au passage, on note - ce que le brevet de français est devenu - que les deux premières questions du DNB ne portent pas sur le texte mais sur le paratexte explicatif...

Le compte-rendu ne permet pas d'étudier les copies dont la correction est comparée, ce qui permettrait de juger... le jugement de l'auteur.

A noter que, quand l'écart était trop élevé (quasiment +50% de points en plus), l'auteur a demandé à l'IA... de réévaluer la copie.

Dans sa conclusion, M. Hayette cède à un étonnant anthropomorphisme. Il note en effet "une certaine fébrilité de l’IA lorsque l’on pointe des dissonances avec un correcteur humain. Est-ce une marque d’humilité qui reconnaîtrait encore la suprématie humaine ?" M. Hayette cite d'ailleurs les justifications de l'IA comme preuve d'une intelligence de l'évaluation alors que les éléments sont de pur remplissage.

La conclusion de M. Hayette se veut équilibrée mais en réalité le surclassement de l'IA n'est à ses yeux qu'une question de temps.

Plus fondamentalement, la réflexion de M. Hayette sur la correction des copies par l'intelligence artificielle comporte un angle mort sévère. Cette "expérimentation" se justifie par cet objectif : alléger le travail des professeurs en les délestant de la correction des copies.

C'est évidemment un postulat parfaitement inepte puisque, en supposant que l'intelligence artificielle - qui n'est pas une intelligence, mais un algorithme prédictif - en soit capable, il est évident qu'il sera en contrepartie demandé aux enseignants d'assurer d'autres tâches ou davantage de présence face aux élèves. L'appel en ligne effectué par les enseignants n'a pas déchargé la vie scolaire mais a permis de réduire le nombre d'assistants d'éducation dans les établissements.
 
Dernière édition: 22 Nov 2024 00:14 par Loys.

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