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"Uchronie" (Laurent Fillion)
- Loys
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Bon, techniquement, ce billet dresse un parallèle historique : une uchronie, c'est tout à fait autre chose. Passons.Uchronie
A la différence que les enseignants pouvaient choisir leur manuel librement...1880 …
Cette semaine, le président Jules Grévy a annoncé dans un entretien accordé au journal Le Temps que tous les élèves de France seront dotés à la rentrée prochaine de manuels de classe.
Rappelons également que les manuels, s'ils étaient confiés à des éditeurs privés, correspondaient à un cahier des charges défini par l’inspection générale.
Notons que l'ensemble de l'article repose sur une ambiguïté assez problématique dans le parallèle historique qui nous occupe : s'agit-il de simplement doter les élèves de manuels, d'imposer l'utilisation du manuel en général ou d'imposer l'utilisation d'un manuel ? Les termes du débat sont quelque peu différents dans chaque cas...
Car le produit de la société de consommation qu'est la tablette tactile, avec accès à Internet offrant toutes sortes de distractions, de "ressources" non validées voire inappropriées pour des mineurs, est un "outil" scolaire au même titre qu'un manuel scolaire conçu spécifiquement pour des élèves.La rubrique « Courrier des lecteurs » du journal a depuis été submergée de messages laissés par nos hussards noirs de la République.
Certains ont accueilli avec bienveillance cette décision mais ont aussi alerté le président Grévy sur la nécessité de former les instituteurs de France à ce nouvel outil...
Curieuse position, car si le choix du manuel est imposé, "l'acte pédagogique" en prend un coup....rappelant que l’essentiel résidait dans l’acte pédagogique.
On parle ici du manuel en général, et non d'un manuel imposé.Pour ces derniers, en effet, pas question de se contenter d’être dotés de manuels mais l’essentiel est bien de savoir comment on utilisera ce nouvel instrument.
Un "manuel manuscrit" en autant d'exemplaires que d'élèves ?Parmi les enseignants à faire cette mise en garde, nombreux sont ceux qui utilisent déjà avec leurs élèves un manuel manuscrit élaboré par leurs soins.
Surtout si le choix des manuels est imposé...D’autres rejettent purement et simplement la proposition du Président et ce, pour diverses raisons.
Pour les uns, c’est « vendre l’école de la République aux maisons d’édition », allant pour certains à regretter le coût de l’opération alors que les salaires des instituteurs n’augmentent pas assez.
Oublions également le fait que les tablettes ne sont que des contenants et qu'il faut également investir dans des contenus, des infrastructures (électricité, haut-débit, wifi, entretien, maintenance)
S'agissant du salaire des enseignants, il est vrai que les "Cahiers pédagogiques" ne s'abaissent pas à de si viles considérations matérielles.
De fait les manuels scolaires ont constitué pour plusieurs éditeurs une forme de rente (rente qui s'efforce de s'adapter désormais à la forme numérique avec la licence pour les manuels numériques).D’autres encore n’hésitent pas à y voir « une manœuvre pour renflouer l’industrie du bois et de la pâte à papier, durement touchée par la perte de l’Alsace et de la Lorraine et de leurs forêts« .
Quant aux tablettes actuelles, nul n'est besoin de chercher bien loin pour découvrir, en plus du lobbying des éditeurs, l'activisme de certains groupes technologiques : Laurent Fillion, qui recommande le "Café pédagogique", faux-nez de Microsoft en France, devrait s'en informer.
Le manuel scolaire, un "progrès technique" ?D’autres encore réfutent l’idée même de progrès avec ce nouvel outil et critiquent cette course permanente aux progrès techniques : « déjà que certains veulent nous changer la couleur du tableau noir pour du vert » / « et pourquoi pas nous inventer un outil autre que la plume pour écrire tant qu’on y est ! »
Pour le reste, reductio ad absurdum.
Laurent Fillion ne connaît visiblement pas le dispositif D'Col.Enfin, pour beaucoup, c’est la fonction même de l’instituteur qui est mis en cause avec cette décision...
Le savoir ne sort de nul part : il procède de l'acquisition des connaissances. Et cette acquisition nécessite un acte pédagogique. Un enseignant peut parfaitement faire cours... sans aucun manuel.« A quoi servira désormais l’instituteur si le savoir sort d’un manuel et non plus de sa bouche ? »
Dommage que Laurent Fillion n'ait pas trouvé de véritables sources d'époque pour attester d'un obscurantisme fantasmé des enseignants contre les manuels scolaires.« Doit-on se cantonner à un rôle d’accompagnant ? » / « Si on continue ainsi, en 1920 le métier d’enseignant aura disparu, c’est sûr ! »
Compte tenu du fait que cette "uchronie" relève plutôt de la déformation historique, on sait déjà qui a tort.L’avenir dira qui avait vu juste…
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