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Écrans et "addiction"
- Loys
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Article repris sur "EducaVox" , évidemment...
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L'émission de "France Inter" (16/08/13) à l'origine de ce billet est accessible ici : www.franceinter.fr/emission-le-telephone...nouvelles-addictions
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A lire aussi de Yann Leroux sur LVM :
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De fait le terme "addiction", qui renvoie à une pathologie grave, n'est peut-être pas adapté, même s'il peut concerner une fractions de joueurs.Il n’y a pas d’addiction aux objets numeriques. C’est aussi simple que cela.
La consommation de sucre est addictive et les effets de sa consommation ressemblent à ceux des drogues dures : mais elle ne conduit pas nécessairement à une "addiction" au sens pathologique du terme. En revanche elle n'est pas sans poser de nombreux problèmes, faciles à constater : déséquilibres alimentaires, caries, obésité, diabète etc.
"Culpabilisant" ou "pathologisant", il faut choisir.J’ai participé a l’émission Le téléphone sonne : “Smartphones et réseaux sociaux: les nouvelles addictions” et j’ai été assez surpris de constater qu’il y avait encore un discour culpabilisant et pathologisant sur les objets numériques.
En même temps difficile d'attendre une autre réaction de la part d'un psychologue clinicien et psychanalyste qui a écrit un ouvrage intitulé Les Jeux vidéos, ça rend pas idiot.
Il s'agit de William Lowenstein mais passons...J’ai pu entendre du docteur Willam Olivenstein que l’effet de ces objets était comme la cocaïne. Que les mondes numériques étaient des mondes de la stimulation perpétuelle et de la vitesse. Que 5% des jeunes joueurs de jeux vidéo développaient une addiction.
S'il s'agit de 5% de joueurs, ce n'est donc pas que le confrère considère le jeu comme une addiction par elle-même. Le titre de ce billet perd un peu de son sens, en ce cas, d'autant qu'il élargit son sujet aux "objets numériques"...
Voilà un jugement nuancé envers un confrère. Dommage que Yann Leroux n'ait pas eu le temps de mettre en cause son professionnalisme en direct sur "France Inter"...Si j’étais américain, je dirais que c’est de la “bullshit psychiatry”. En français, on pourrait dire “psychiatrie de bazar”
Avec Yann Leroux on passe en toute simplicité et en toute scientificité de l'absence de consensus... à l'absence d'addiction !Il n’y a pas d’addiction aux objets numériques. C’est aussi simple que cela. Des années de recherche sur l’addiction aux jeux vidéo n’ont pas permis de former un consensus sur cette pathologie annoncée comme “une nouvelle maladie” depuis maintenant 17 ans (Young, 1996)
Confusion entre les jeux-vidéos et Internet ici.La première clinique pour “dépendance aux jeux video” a été ouverte en Hollande en 2006 par le Smith and Jones Centre, un centre de traitement pour les toxicomanes. La section pour les gamers a fermé en 2008 avec le constat que les jeux vidéo n’étaient pas une addiction. En Grande Bretagne, le centre Broadway Lodge qui traite des personnes présentant des addictions a ouvert une section pour les gamers en 2009. La même année, aux USA, ReStart devient le premier centre de traitement pour les “dépendants à l’Internet”. En Chine et en Corée du Sud, ces cliniques sont des camps d’entrainement paramilitaires dans lesquels les participants sont humiliés. Les traitements sont si rudes qu’il y a même eu un mort ! Mis à part ces deux pays, et l’établissement américain, il n’y a pas de centre de traitement “d’addiction aux jeux vidéo”
Cette petite synthèse, très professionnelle, évoque furieusement la page de la Wikipédia anglophone consacrée à la "video game addiction" , avec quelques oublis ou raccourcis (la banqueroute du Smith and Jones Center par exemple).
Un jeu vidéo est un objet numérique parmi bien d'autres.Il n’y a pas d’addiction aux objets numériques. C’est aussi simple que cela. Un jeu vidéo n’est pas une drogue
Parce que la relation aux écrans (selon sa fréquence, sa durée, son caractère exclusif, ses conséquences physiques ou sociales) peut évoquer le jeu pathologique par exemple, même s'il ne s'agit pas d'une addiction au sens médical du terme.Faut il rappeler les effets de la cocaïne, puisque c’est elle qui a été donnée en exemple dans l’émission ? Comment peut-on comparer les effets d’un psychostimulant aussi puissant que la cocaïne avec ce qui est vécu dans un jeu vidéo ? Comment peut-on comparer cela à du temps passé devant son écran qu’il s’agisse d’un écran de jeu ou d’un réseau social.
Le caractère de plus en plus exclusif tient tout simplement au fait que les jeunes sont de plus en plus exposés à une multitude d'écrans (console, télévision, téléphone portable, tablette, ordinateur fixe, télévision) et en permanence (désormais dans la chambre ou à l'extérieur avec des consoles ou des téléphones portables et/ou le réseau mobile) de plus en plus jeunes : un tiers de CE1 aux États-Unis disposent déjà d'un téléphone portable et plus de la moitié des CM2.Il n’y a pas d’addiction aux objets numériques, c’est aussi simple que cela. Comment expliquer une addiction qui ne serait réservée qu’au enfants, aux adolescents et aux jeunes adultes ?
La notion même de temps d'écran devient insuffisante puisque plusieurs écrans peuvent solliciter l'attention de l'enfant simultanément.
Ce caractère exclusif des "objets numériques" peut se retrouver chez des personnes moins jeunes. L'âge moyen du joueur est en France est 35 ans (voir les statistiques du CNC plus bas).Quelle barrière invisible empêcherait l’addiction de se développer chez les adultes et les vieux ?
On parle des "objets numériques" ou des jeux vidéos ? Cette confusion permanente ne permet aucune réflexion sérieuse.Pourquoi l’addiction aux jeux vidéo s’arrêterait elle comme par magie au seuil de la maturité ?
Les jeux vidéos sont une pratique popularisée dans les années 80 et surtout 90 : il n'est pas étonnant qu'ils touchent naturellement une génération plus jeune. Malgré tout, selon le SNJV :
Source : www.snjv.org/fr/industrie-francaise-jeu-...iologie-joueurs.htmlSNJV écrit: Le jeu vidéo rassemble toute catégorie de la population : 83% des joueurs ont plus de 18 ans, et l'âge moyen du joueur est aujourd'hui de 35 ans. 55% des Français pratiquent donc les jeux vidéo, avec une progression notable pour les 35-49 ans et un doublement pour les plus de 50 ans. Les femmes sont de plus en plus friandes puisque près de 50% des joueurs sont des joueuses.
Toujours la même confusion pénible.Il n’y a pas d’addiction aux objets numériques, c’est aussi simple que cela. Si l’on prend le chiffre de 5% qui est avancé généralement, cela ferait plus d’un million (1,25, exactement) de personnes qui souffriraient de cette affection uniquement aux USA. . Pour donner un ordre d’idée, la grippe qui touche chaque année entre 5 et 20% d’américains est suive avec attention par les services de santé du pays. Comment l’addiction aux jeux vidéo pourrait elle ne pas être repérée massivement par les professionnels de la santé ?
Remettant en cause ce chiffre de 5%, M. Leroux remet en cause la possibilité même d'une addiction aux jeux vidéos, ce qui paraît difficilement contestable. La logique est imparable.
Pas des experts comme Yann Leroux !Il n’y a pas d’addiction aux objets numériques. C’est aussi simple que cela. La “stimulation perpétuelle” n’existe que dans l’esprit de ceux qui découvrent les mondes numériques.
On peut même dire qu'il leur est consubstantiel.L’ennui existe même sur Twitter, même sur Facebook, même sur Call of Duty.
Je croyais qu'il n'y avait pas de "stimulation perpétuelle"...Si Internet va trop vite, c’est sans doute que vous êtes trop vieux pour cela ou trop fatigué. Mettez vous sur le coté, prenez la voie lente, utilisez le mail, et laissez Twitter à ceux qui sont plus agiles.
En tout cas la réflexion théorique de Yann Leroux touche ici ses limites pour céder à l'invective, jeuniste qui plus est.
Le mépris du mail et la célébration d'un réseau commercial instantané est assez intéressante.
En l'occurrence l'American Academy of pediatrics recommande de ne pas jouer plus de deux heures par jour, mais sans doute sans aucune raison valable.Il n’y a pas d’addiction aux objets numériques. C’est aussi simple que cela. Il est du devoir éthique de tout psychothérapeute de se tenir informé de l’état de la science et des recommandation des sociétés savantes.
Il a surtout été dit que la recherche était insuffisante à ce sujet, ce qui change quelque peu la perspective. En revanche le jeu pathologique est classifié comme maladie mentale.En ce qui concerne l’addiction à l’Internet et aux jeux vidéo, la question a été tranchée. “L’addiction à l’Internet et aux jeux vidéo” n’est à ce jour dans aucune classification des maladies mentales.
.Par ailleurs, l’académie de médecine a recommande depuis mars 2012 “pratiques excessives” et l’abandon de l’expression “addiction aux jeux vidéo”
Mais, voyons, comment le jeu vidéo pourrait-il conduire à une "pratique excessive" ?
Voilà une très bonne nouvelle. Et tout cela sans aucune conséquence négative, comme la consommation de sucre, bien entendu.Dans l’article ou Kimberley Young invente l’addiction à l’Internet, les personnes dépendantes passaient 8 heures par semaine devant un écran. On estime aujourd’hui qu’un enfant entre 8 et 18 ans passe en moyenne 7 heures et demi par jour devant un écran. (Source : Kaiser Family Foundation).
Visiblement, pour Yann Leroux, psychologue de son métier, qu'un enfant passe 7 heures et demi par jour en moyenne devant un écran ne pose aucun problème et c'est même une utilisation devenue selon lui "une utilisation normale". Voilà qui est dit.Un enfant qui aujourd’hui une utilisation normale des écrans serait donc considéré en 1996 comme un cas gravissime d’addiction nécessitant la mise en place de soins et d’une éducation spécialisée.
Au passage Yann Leroux ne donne aucune explication de cette progression spectaculaire, qui n'a rien à voir avec une addiction.
Après le jeunisme, l'anarchisme.Il y a sans doute un enseignement à tirer de cela. Sans doute pouvons nous nous rappeler que les maladies, et particulièrement les maladies psychiatriques, sont en grande partie des constructions sociales. Le problème de la psychiatrie et de la psychologie est qu’elles sont ce que Foucault appelait des disciplines. Elles sont promptes à se mettre au service du pouvoir pour renfermer, ordonner, classer et normaliser.
Heureusement qu'il y a des visionnaires pour faire taire les contradictions des confrères rétrogrades et manquant de professionnalisme !Il n’est donc pas étonnant qu’elles aient été appelés pour scruter ce qui semblait si nouveau : des personnes jouent en interagissant avec des images sur des écrans. Peut-être que “l’addiction aux jeux vidéo” rejoindra la drapétomanie, cette folie qui conduisait les esclaves noirs à fuir leur condition, ou les “sauteurs du Maine” dans le cabinet de curiosité de l’histoire de la psychiatrie.
Après tout il suffit de le dire (et surtout de le répéter).Peut-être que la prochaine version du DSM comportera une nouvelle maladie que l’on appellera “l’addiction à l’Internet”. Mais nous vivons aujourd’hui, et aujourd’hui, il n’est pas de telle maladie.
Depuis les années 50 la consommation de sucre a doublé dans les pays développés : si l'on suit l'argument de la modernité scandé par Yann Leroux, il faut s'en féliciter.
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- Loys
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On en s'étonnera pas du rapprochement avec Serge Tisseron, qui a dirigé la thèse de Yann Leroux (voir le rapport de l'Académie des sciences ).
On comprend mieux son succès auprès d'une certain public "connecté" .Yann Leroux : "Il n'y a pas d'addiction aux jeux vidéo"
On ne présente plus vraiment Yann Leroux sur internet, parce qu'il est l'un des rares psychanalystes à twitter et à avoir un blog.
Commentons.
Personne n'en doute.Membre de l'Observatoire des mondes numériques en sciences humaines, joueur invétéré, Yann Leroux s'intéresse au virtuel depuis qu'il est tombé dedans. C'est assurément son expérience de joueur qui l'a amené à porter un autre regard sur le jeu.
Jouer à un jeu vidéo n'est pas une pathologie, c'est une évidence. En revanche le jeu vidéo est addictif, comme l'est le sucre, et sa consommation excessive par des enfants incapables de s'autoréguler n'est pas sans poser de nombreux problèmes.A son exemple, des psychanalystes, et non des moindres, comme Serge Tisseron, sont de plus en plus nombreux à dénoncer l'utilisation de la notion d'addiction appliquée aux jeux vidéos.
Non en général, mais si le terme de "passion" renvoie à la notion d'excès, c'est de toute façon problématique.Cette position, forcément iconoclaste, nous intéresse. Et va nous permettre de mettre enfin les points sur les I. Non, les jeux, comme les passions, ne rendent pas malades.
Une opposition n'a pas grand chose à voir avec un "double discours".C'est plutôt le fonctionnement de notre société qu'il faut interroger...
InternetActu.net : "Il n'y a pas d'addiction aux jeux vidéos !", clamez-vous. On a l'impression que vous prenez à contre-courant tous les propos qu'on a pu lire sur le sujet. La première page des 200 000 résultats que renvoie Google sur le sujet fait peur à voir ! On aimerait vous croire, mais le peut-on vraiment ?
Yann Leroux : L'addiction aux jeux vidéo se construit sur un double discours chez les psychanalystes et les psychologues : les jeux vidéo sont un médiateur intéressant dans le cadre du travail psychothérapeutique. Mais ils sont addictogènes, c'est-à-dire qu'ils favoriseraient des comportements au caractère répétitif, compulsif, comme lorsqu'on s'adonne à la consommation de substances psychoactives. C'est une opposition intéressante.
Nul doute que les jeux vidéos sont une excellente façon de "prendre conscience des relations que l'on a avec soi-même et avec les autres".Grâce au jeu vidéo, on peut prendre conscience des relations que l'on a avec soi-même et avec les autres, et, dans le même mouvement, on risque de développer des comportements compulsifs addictifs.
Des relations "sociales" tout à fait remarquables, en effet, mais à distance et anonymes.Et ceux qui dénoncent l'addiction aux jeux vidéo de dénoncer d'un même mouvement les rushs d'adrénaline que provoquent des jeux comme Counter Strike, ou la force des relations sociales de jeux comme World of Warcraft.
Voilà qui nous rassure. Définition du hardcore gamer ?Or il y aurait là deux types d'addiction de nature très différente l'une de l'autre, car les expériences de jeu sont très différentes d'un jeu à l'autre. Ces descriptions étaient loin des pratiques que j'observais ou de mes propres pratiques. Si le joueur débutant est excité, le hard core gamer joue de façon apaisée.
On la trouve sous sa plume sur ce blog : "Psychologie et numérique" (article non daté)
Le terme Hardcore Gamer, traduit habituellement en français par celui de « Joueur passionné », désigne un joueur de Jeu vidéo qui s’implique énormément dans un Jeu et qui recherche la compétition et la performance à travers le Jeu vidéo. Cependant, ce terme peut être plutôt traduit, à la lumière du terme « hard-core », par celui de joueur extrême. En effet, le hardcore gamer, est un expert, un dur dans son domaine, qui joue le Jeu à fond et au fond (core=noyau). Le hardcore gamer est généralement un habitué des salles de réseaux, des parties Lan (Local Arena Network), ou des compétitions sur Internet.
Ce terme renvoie à une dimension sportive et perfectionniste qui est à l’origine du développement du pro-gaming, c’est-à-dire aux compétitions de Jeu vidéo dont les « matchs » et les résultats ont été retransmis sur les chaînes de télévision.
Résumons : le joueur débutant est "excité" mais quand sa pratique devient excessive, elle est sereine. C'est très logique : il faut donc un usage excessif pour qu'il devienne vertueux.
Alors que les justifications de Yann Leroux sont de nature à convaincre du contraire.Ceux qui disaient que les jeux étaient vecteur d'addiction regardaient le phénomène en y important leurs propres modèles de l'addiction, c'est-à-dire l'étude des pratiques addictives liées à la consommation de drogue. Ils dénonçaient les jeux massivement multijoueurs comme étant les plus dangereux. Souvent sans justification...
Enfin pour Yann Leroux, il n'y a pas de de "phénomène".InternetActu.net : Justement, souvent dans les dénonciations du phénomène addictif - comme dans la dernière en date, celle du député UMP de Maine et Loire Paul Jeanneteau, évoqué par Playtime -, on entend toujours tourner les mêmes chiffres, qui sont tout le temps des estimations et qui demeurent toujours vagues (1 à 3 % des joueurs). Des chiffres qui s'excusent toujours de ne pas s'appuyer sur des études grandeur nature...
Yann Leroux : Oui, le "phénomène" ne repose sur aucun chiffre objectif.
Les études de Yann Leroux en revanche ne sont pas biaisées. Reste à en communiquer les références...Pour comprendre pourquoi nous avons des chiffres lancés à la louche, il faut revenir à l'histoire de l'invention de l'internet addiction disorder, lancé comme une blague dans un forum par un psychiatre américain, Ivan Goldberg en 1995. Le message se répand, car des gens se retrouvent dans la description de ce syndrome... C'est un phénomène bien connu : quand on ouvre un manuel de pathologie, on en trouve toujours une qui nous correspond. L'année suivante, Kimberly Young, une psychologue américaine, reprend le terme pour une conférence et une publication (.pdf) faite devant l'Association de psychologie américaine, et affirme, en s'appuyant sur un sondage biaisé (car établi sur un forum de gens qui se disent atteint par des troubles liés à l'usage des jeux), qu'il y a une addiction aux jeux vidéo.
Il faudrait savoir : il y avait addiction ou pas ?Le concept rebondit dans l'espace public suite à quelques affaires retentissantes, qui vont répandre l'idée que les jeux vidéos puissent être des objets d'addiction, comme le suicide de Shawn Woolley en 2001, un jeune Américain qui met fin à ses jours avec une arme à feu devant son écran connecté à Everquest. Sa mère, éplorée, a été à l'origine du groupe de soutien des "veuves d'Everquest". Elle était convaincue qu'il s'était passé quelque chose dans le jeu, conduisant son fils au suicide. Pourtant, quand on regarde en détail l'histoire du jeune homme, on constate qu'il avait des antécédents et des difficultés psychologiques profondes qui l'avaient poussé notamment à quitter son travail... [NDE : Pour ceux qui souhaitent en savoir plus sur l'histoire, Yann Leroux l'a raconté et distingué dans un billet sur les 10 évènements les plus mémorables des mondes numériques]. Bref, son histoire montre qu'il y avait matière à bien d'autres hypothèses explicatives que la simple addiction.
Il ne fait aucun doute que l'addiction au jeu vidéo peut recouvrir des pathologies sous-jacentes, mais ça n'empêche pas qu'elle existe.
Tout excès est problématique, sans nécessairement être pathologique. La question est de savoir si la pratique des jeux vidéos induit à une pratique excessive ou pas.L'idée d'addiction sans drogue s'est développée dans la "psychosphère" si vous me permettez l'expression. Mais l'idée que l'addiction puisse s'appliquer à l'usage d'objets qui ne sont pas des drogues (comme le travail ou le jogging...) pose un lourd problème, car toute passion peut alors être pathologisée, que vous fassiez du radiomodélisme ou que vous passiez votre temps à jouer aux échecs ou à lire...
La notion d'addiction sans drogue est assez convaincante s'agissant du jeu pathologique.
L'analogie des jeux vidéos avec le travail est assez curieuse, le travail étant une contrainte et le jeu vidéo, une pratique volontaire.On débouche très vite sur des positions paradoxales, voir intenables, comme celles de Marc Valleur et Jean-Claude Matysiak auteurs des Nouvelles formes d'addiction. Une femme battue pourrait avoir une addiction à la violence ! On voit qu'on dépasse là des limites que notre profession ne devrait pas franchir. Une femme battue est victime de la violence de son conjoint, point ! Quelqu'un qui passe 12 heures à travailler n'est pas dépendant de son travail, mais d'un système qui le maltraite. S'il travaille plus qu'il ne le souhaiterait, ce n'est pas la faute de son travail, mais du fait qu'une partie de sa vie (sa place dans l'entreprise par exemple) est en jeu.
Je croyais justement que les jeux vidéos permettaient de "prendre conscience des relations que l'on a avec soi-même et avec les autres".J'ai rencontré quelques personnes qui se présentaient comme dépendantes des jeux vidéos. Mais on a vite parlé de bien autre chose. Comme souvent, ce qui était en fait difficile pour eux, c'était leurs relations avec leur entourage proche dans la réalité et dans leur imaginaire.
C'est sans doute vrai. Il n'empêche que la pratique du jeu vidéo est addictive au sens où elle se caractérise par son caractère répétitif, sans fin et surtout exclusif.Le problème de la notion d'addiction appliquée aux jeux vidéo est qu'on cristallise un trouble de la dépendance et qu'on apporte, sur un plateau, une explication facile, liée à un objet externe, séducteur et terrible, qui plongerait la personne dans des difficultés sociales et personnelles.
D'une richesse sidérante, effectivement.Mais il en va des jeux comme des autres objets. Quelqu'un loggué jusqu'à trois heures du matin sur un jeu massivement multijoueurs peut utiliser le jeu pour éviter d'avoir des relations sexuelles avec son conjoint ou penser à ses devoirs du lendemain, ou encore pour avoir des relations sociales riches avec d'autres joueurs.
Ben voyons. Donc finalement c'est aussi une bonne chose d'être "loggué jusqu'à trois heures du matin sur un jeu massivement multijoueurs".D'un côté, l'objet sert un enfermement, un refus, permettant de délaisser son environnement proche, de l'autre, il créé une ouverture.
Sans rire ?Les conjoints voient bien que le temps passé sur les jeux est un investissement qui se fait à leur détriment...
Il est donc facile de mettre un terme à cette addiction qui n'en est pas une.Quand on passe du temps avec une machine, le plus souvent, ce n'est pas la machine qui est en cause.
Voilà des réponses qui montrent bien qu'il n'y a aucune addiction.Mais l'idée qu'il n'y ait pas d'addiction aux jeux vidéos est devenue difficile à faire passer. Sur un forum de joueur, j'ai essayé d'ouvrir la question ! En guise de réponse, j'ai reçu une volée de bois vert ! Le jeu comme addiction permet à certains joueurs de s'offrir des gratifications narcissiques : ils maîtrisent leur accoutumance, ils sont plus forts que la drogue la plus high-tech qui soit. Pour d'autres, c'est le contraire, ils se gratifient d'une satisfaction passive : la drogue est trop forte, ils sont joueurs et n'y peuvent rien.
Pour la majorité des cas . Il ne faut pas oublier cette petite précision.Heureusement, de plus en plus de personnes commencent à répéter que cette histoire d'addiction n'est pas convaincante. Celui qui avait ouvert l'une des premières cybercliniques pour personnes dépendantes aux jeux vidéos en Hollande a reconnu l'année dernière que les problèmes que rencontraient les joueurs qui y passaient ne tenaient pas du jeu, mais exprimaient des difficultés relationnelles.
Bien sûr que les jeux vidéos n'induisent pas un usage pathologique : en revanche leurs caractéristiques propres induisent un usage excessif qui, dans le cas de pathologies subséquentes, entretient et même aggravent ces difficultés relationnelles.
Le jeunisme universel et le règne de l'enfant-roi laissent plutôt penser le contraire.Les jeunes sont maltraités par nos sociétés.
Et avant l'avènement des jeux vidéos, quelle activité conduisaient les jeunes à une pratique nocturne ?A la sortie de leurs études, ils se projettent dans le jeu. Les très gros joueurs qui jouent jusqu'à quatre heures par soir, dès qu'ils trouvent un boulot, passent jour et nuit à travailler... L'écran n'est pas la drogue, puisqu'on peut lui substituer autre chose.
Alors qu'un joueur qui prend un avatar et mène une vie virtuelle, c'est très différent, effectivement.InternetActu.net : Vous faites pourtant une différence entre le gamer et le gambler, entre le joueur et le parieur, entre le plaisir et la pathologie ? Il y a donc des gamblers, c'est-à-dire des joueurs pathologiques ?
Yann Leroux : Les modèles d'addiction utilisés dans le cadre du jeu vidéo sont issus de ceux établis autour des profils des gamblers, des parieurs, c'est-à-dire le joueur pathologique. On sait que des gens se ruinent dans les casinos et qu'ils y vont pour cela. Ils espèrent sans cesse "se refaire", ce qui évoque un imaginaire lié à l'origine, à la façon, peu satisfaisante, dont on est jeté dans le monde, et dont on souhaite sortir, voire "ressortir différent".
Vive la psychanalyse !Le gambler est là pour perdre sa chemise, comme l'expliquait Freud dans Dostoïevski et le parricide. Le joueur pathologique a des désirs meurtriers, mais sa culpabilité est si intense, qu'il se punit de ce désir meurtrier en perdant sa chemise plutôt que sa vie : le hasard représentant l'instance paternelle punitive.
Mais on est très loin de l'expérience que ressent un joueur de jeux massivement multijoueurs. Dans un jeu vidéo, il n'y a pas cet imaginaire de la culpabilité. Ce n'est qu'une question de temps : les objets que vous désirez, vous les obtiendrez.
Donc la différence repose sur le fait de gagner ou pas : le jeu pathologique se caractérise par le fait de perdre.
Yann Leroux en parle asse peu, de ces "désagréments" (doux euphémisme)...Il faut comparer les expériences de jeu... Bien sûr, si au lieu d'aller travailler vous passez vos journées à rester à jouer devant votre écran, cela ne manquera pas de susciter des désagréments.
C'est vrai, ça ! Avec un tel relativisme, on avance à grand pas.Il y a des pathologies d'usages. Il y a des gens qui perdent leur temps à jouer. Mais perdent-ils leur temps ?
La question que Yann Leroux ne pose pas, c'est de comprendre pourquoi le jeu vidéo, qui rencontre un tel succès, est davantage choisi parmi d'autres objets. Parce que le jeu vidéo a les caractéristiques propices à un usage excessif (facilité d'accès, autonomie, interactivité artificielle, caractère répétitif, gratification etc.) sans parler du matraquage publicitaire dont les enfants font l'objet (comme les produits sucrés).Quelqu'un qui joue à tel point qu'il n'a pas suffisamment de temps pour travailler se met dans des difficultés évidentes. Mais que cherche-t-il à faire en passant autant de temps avec la machine ? C'est seulement en comprenant cela qu'on peut l'aider à élargir son horizon. Si quelqu'un passe autant de temps à faire quelque chose, c'est assurément qu'il creuse une question non éclaircie.
C'est beau.Les raisons qui poussent quelqu'un à avoir un investissement si aigu sont multiples : position masochiste (les engueulades que je reçois de mes excès me procurent du plaisir...), marque d'une entrée possible en dépression (j'anime l'écran pour m'animer à l'intérieur...). Comme le disait Michael Stora, on allume parfois les écrans pour allumer un feu interne qu'on peut avoir perdu.
C'est plutôt inquiétant en ce cas, compte tenu du nombre de jeux vidéos à caractère violent.Dans l'expérience du jeu, on peut aussi vouloir mettre en jeu des mouvements agressifs ou des désirs de soins (en rapport avec les avatars qui nous incarnent), c'est-à-dire mettre en jeu des relations insuffisamment éprouvées dans l'espace hors jeu. Ce sont ces motivations-là qu'il faut démêler petit à petit, pour aller au-delà des énoncés de départ.
L'"expérience groupale" est très positive !Qu'est-ce qu'on aime dans le jeu pour y passer autant de temps ?
Un jeu massivement multijoueur est plus riche qu'un bandit manchot en terme d'expérience de jeu. On fait une expérience groupale riche, qui assigne à chacun des rôles, des places, des fonctions, que les joueurs investissent selon leur fonctionnement du moment.
On s'ouvre au monde, même.Dans un jeu massivement multijoueur, on ne tourne pas en rond autour de soi.
C'est vrai que l'épreuve de la réalité dans les mondes virtuelles est assez saisissante.Les fantasmes de toute-puissance vont vite être mis à mal par les demandes du groupe, par le travail en commun à réaliser. On prend des places en fonction de ses fantasmes, mais il y a une épreuve de réalité dans le jeu qui nous en fait prendre conscience.
Et, s'il n'ont pas envie d'explorer autre chose que les jeux vidéos, cela n'a rien à voir avec un quelconque caractère addictif.Sans compter qu'à force de jouer un rôle, on en épuise toutes les facettes. Le désir de jouer telle race de personnage, telle classe de personnage, de récupérer tel objet se consume... tant et si bien que les joueurs finissent par vouloir explorer d'autres rôles, d'autres jeux... Le jeu vidéo permet d'explorer différents registres, différentes positions...
Vivement qu'ils entrent à l'école !Les jeux nécessitent de développer des compétences.
Voir sur le forum : www.laviemoderne.net/veille/le-ludo-educatif
Voilà une vision enchanteresse !Il faut pouvoir différencier, hiérarchiser, savoir ce que l'on doit faire. Il faut organiser le chaos du jeu. C'est un travail intéressant pour tout un chacun, car il nous aider à hiérarchiser l'information, à organiser notre propre chaos interne. D'autant qu'ici, il faut le faire collectivement. Je suis persuadé que cette façon de faire du collectif comme on n'en a jamais vu auparavant va transformer de manière profonde la société. Il est certain que les Orcs de World of Warcraft vont faire la société de demain...
C'est quoi, un livre ?Les jeux vidéos fonctionnent finalement de la même façon que les objets réels. Ils ne sont pas aussi réels qu'un livre, mais comptent autant.
La possession d'un stylo ou d'un vêtement ne constitue pas une activité à proprement parler...On utilise les objets que l'on croise tous les jours comme support à notre travail psychique, explique le psychiatre et psychanalyste Serge Tisseron. Si on est attaché à tel stylo, c'est parce qu'il nous permet de penser à des choses qui lui sont liées et auxquelles on n'a pas suffisamment pensé. Le vêtement est idéal pour cela, parce qu'il se tourne aussi vers les autres. Porter un jean ou un costume ne dit pas la même chose de vous. Mais pour soi également. On se sent différent selon le pantalon qu'on porte parce qu'il représente des choses pour nous, parce qu'on s'y sent bien ou pas...
Vive la psychanalyse (bis) !On a le même mode de fonctionnement avec les matières numériques, avec lesquelles on a un rapport très affectif, très profond, où les limites de notre identité peuvent se fondre, comme le montre le grand désarroi qu'éprouvent certaines personnes quand leur ordinateur ne marche pas, quand leur connexion rame ou que le jeu auquel ils jouent n'est pas fluide. Ces expériences nous font revivre des déchirements, des délais, des attentes de réponses qu'on a pu expérimenter dans notre enfance, comme quand le biberon n'était pas prêt à temps.
Mais comme de toute façon il n'y a pas d'addiction, on s'en passe très facilement en fait.
Les ordinateurs peuvent ramener à nos surfaces des détresses profondément enfouies en nous. Les jeux vidéos lancent des ponts vers les premiers moments de notre vie psychique, tant et si bien qu'on les ostracise. Il faut dire qu'on gère notre capital de vie infantile comme le bourgeois gère sa richesse.
Heureusement que la réciproque n'est pas vraie.Dans les jeux vidéos, tout n'est pas aussi bien rangé qu'on le souhaiterait. C'est pour cela également que les jeux sont violents ! Les jeux sont violents, car nos sociétés sont pleines d'armes, de fureur et de guerre.
C'est ridicule, en effet.InternetActu.net : Vous voulez dire que les jeux vidéos nous apportent des satisfactions, des sensations, des stimulations... et qu'il est normal d'en avoir ?
Yann Leroux : Oui. Une des critiques récurrentes des jeux qui a donné naissance à la notion d'addiction est le temps qu'on y passe.
Oui mais curieusement toute une génération préfère plutôt les jeux vidéos.A croire que les éditeurs font exprès de faire de bons jeux, avec lesquels on veut passer du temps pour s'amuser. Mais il n'y a pas que les jeux vidéos qui procurent des plaisirs. On peut passer des heures à jouer aux échecs ou à un jeu de plateau et à ne pas être content quand il faut s'arrêter.
Je saurai m'en souvenir.Les stimulations qu'apportent les jeux vidéo sont des aides à penser.
Il ne reste plus qu'à attendre ce moment de grâce.Ce ne sont pas des excitations vaines, dont on ne sait rien. Mais des matières à penser. Je fais le pari qu'à force de rejouer le débarquement de Normandie, on se pose des questions sur la guerre, à force de devenir expert en arme, on va se demander ce qui nous fascine chez elle.
Pour un scientifique, faire des "paris" est assez innovant comme démarche.
Enfin à quitter son écran. Mais ce n'est pas une addiction !Chaque type de jeu, FPS (First Personal Shooter) ou MMO (Jeu massivement multijoueur) nous prédispose différemment. Dans les jeux massivement multijoueurs, il faut apprendre la multitude et le groupe, apprendre à s'intégrer, à tenir sa place... La récompense étant l'illusion groupale, cette impression que chacun vit le groupe, tant et si bien qu'on peut avoir de la peine à le quitter.
C'est une leçon de vie en somme.Dans un jeu de stratégie temps réel, le joueur doit gérer plusieurs unités en même temps, la récompense étant le fantasme de toute-puissance et d'omniscience. Dans un FPS, incarner un snipper permet de travailler sa toute-puissance à l'état brut, avec son revers, c'est-à-dire la grande vulnérabilité de son personnage.
Vive la psychanalyse (ter) !Incarner un dynamiteur qui créé des explosions et abat les murs qui l'entourent, renvoi aux murs internes qu'on se battit et aux brèches que l'on souhaite créer en soit.
Si les jeux vidéos sont le reflet du psychisme, c'est inquiétant vu ce qu'on y trouve...Ce que l'on voit dans l'écran est un reflet de ce qu'il y a dans notre psychisme. Mais sur un même écran, chacun ne voit pas la même chose ! On ne retire pas la même information d'une même image, disait Barthes, car ce qui dans une image est important pour une personne ne l'est pas forcément pour une autre. Dans les jeux vidéos, c'est la même chose.
Comme c'est dommage.InternetActu.net : Ni drogue, ni médicament. Si les jeux ne rendent pas malades, peuvent-ils soigner ?
Yann Leroux : Les jeux ne soignent pas en soi. Ce ne sont pas des drogues, mais ce ne sont pas non plus des médicaments miracles qui vont nous soigner de la dépression.
Le jeu vidéo procure pourtant des relations sociales, non ?Ce qui soigne, c'est de pouvoir parler à quelqu'un d'autre.
Problème : les parents se félicitent de procurer à leurs enfants des jeux vidéos qui vont les occuper à la maison. C'est même souvent le but de tous les écrans auxquels les enfants sont exposés (télévision, ordinateur, console, console portable, smartphone ou tablette etc.).
Si c'est début, il faut que tout le monde s'y mette !Ce que le jeu vidéo procure, c'est un soulagement. C'est un début sur le chemin du soin, mais ce n'est pas un soin.
Le jeu vidéo permet donc de "vivre" de façon prolongée sans régler le problème sous-jacent et même en l'approfondissant : c'est effectivement une pratique encourageante.Quelqu'un de très énervé peut décharger son énergie sur sa console de jeu pour diminuer les tensions sur le moment, mais cela ne règle pas les problèmes de fond. S'il fabrique de la colère, il faut qu'il parle de la situation qui lui a fait problème et qu'il traduit sous cette forme.
Alors que le jeu vidéo permet au contraire se s'abstenir de toute présence tierce.Certains dispositifs proposés par des psychologues peuvent soigner. On peut soigner des phobies par exemple via des expériences immersives, mais ces phases de soins médiatés font partie d'un processus thérapeutique plus large, construit autour de situations et de discussion avec le comportementaliste. Le but est de réduire les réactions anxieuses en présentant le stimulus de façon répétitive, puis en déconstruisant les processus cognitifs mis en place pour maintenir l'anxiété. Le thérapeute est donc toujours là.
Il faut dire que les jeux vidéos violents, les plus vendus, ne sont pas du plus bel effet éducatif.InternetActu.net : On a un peu l'impression que l'on vit dans une société qui diabolise les jeux, les écrans, l'internet.
La "haine", en toute simplicité. Critiquer les jeux vidéos ou s'intéresser plutôt au destin scolaire d'un enfant, c'est donc le détester.Voyez-vous une raison psychologique ou culturelle à cette diabolisation ou plutôt à cette incompréhension de l'internet par nos élites culturelles ?
Yann Leroux : La diabolisation dit la haine que l'on a des jeunes dans notre société.
Tant qu'ils ne jouent pas jusqu'à trois heures du matin et que la pratique n'est pas excessive, il n'y a rien à y voir de mal.L'âge moyen du joueur est de plus de 30 ans. Nous en sommes à la deuxième génération de joueurs, avec désormais des pères qui jouent avec leurs enfants.
Alors que la violence dans les jeux vidéos est aussi une culture !Or, la diabolisation est toujours associée à la jeunesse. Il faut reconnaitre que nos sociétés vieillissantes maltraitent les plus jeunes, les considérant comme des hordes de barbares incultes...
Certains jeux font d'ailleurs l'objet de classification, voire d'interdiction.Le concept de natifs du numérique de Mark Prensky ne dit finalement pas autre chose, en faisant croire qu'il n'y a pas de travail d'apprentissage nécessaire pour comprendre les fonctionnements de ces machines. On sait que ce n'est pas vrai. C'est oublier qu'on a servi aux plus jeunes des matières numériques en leur faisant croire que c'était des mondes pour enfants, alors que les jeux sont fabriqués par des vieux pour des aussi vieux qu'eux !
La critique des jeux vidéos, c'est du trolling.Il y a une seconde raison à cette diabolisation, celle de la "panique morale". On agite dans l'espace social des rumeurs qui n'ont d'autres buts que de provoquer des excitations et de l'angoisse... comme si on avait en permanence, dans les médias, des trolls de l'espace public.
Un "ostracisme" qui fait d'ailleurs que les jeux vidéos constituent désormais l'activité commerciale la plus lucrative sur le marché des "biens culturels", devant le cinéma depuis plusieurs années. Le marché des jeux vidéos en France, c'est plus d'un milliard d'euros en 2012.On sait enfin que les mondes numériques sont profondément infiltrés par la contre-culture américaine, comme l'a montré Rémi Sussan dans Les utopies post-humaines. L'ostracisme que subit le jeu vidéo est certainement lié à une méfiance vis-à-vis de la remise en cause que porte cette contre-culture-là.
Il faudrait aussi interroger l'image de la femme dans cette enthousiasmante "contre-culture".
Yann Leroux devrait ouvrir les yeux sur la citoyenneté vertueuse des réseaux numériques : déchaînement d'homophobie, de racisme, insultes et invectives anonymes sont désormais le lot des réseaux sociaux ...L'internet et les réseaux sociaux augmentent la notion de citoyenneté, permettent de mettre en place des libertés et de nouvelles façons d'être ensemble qui peuvent également être lourdes de menaces.
Les réseaux sociaux, force politique vertueuse et démocratique ! Un exemple dans l'actualité récente : www.hoaxbuster.com/forum/lettre-d-une-mereD'où la grande méfiance des appareils politiques.
Un bon vieux discours anti-élite, en somme.Toute la twitterosphère francophone est en émoi devant Hadopi, alors qu'il n'y a certainement aucun député pour le constater. Il y a un écart entre ceux qui ont pour fonction d'organiser l'espace public, et ceux qui sont dans l'espace public et ne trouvent pas d'échos pour en discuter.
On devrait mettre la classe politique aux jeux vidéos !Il y a un malaise qu'il faudrait mieux combler ou soigner pour éviter des situations catastrophiques.
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- Loys
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1) L'étude américaine, réalisée en 2007, "Pathological Video-Game Use Among Youth Ages 8 to 18 : A National Study" (2009) portant sur 1.178 personnes de 8 à 18 ans de tous les états américains.
- 88% sont des joueurs au moins occasionnels
- Temps de jeu moyen : 13,2 heures par semaine (16,4 heures pour les garçons)
- 33% des garçons jouent au moins une fois par jour
- 61% des joueurs ont obtenu un jeu classé adulte par don, avec leur argent ou celui de leurs parents consentants.
- 46% des joueurs ont des règles à respecter pour la durée de jeu et 56% pour le type de jeu
- 23% déclarent avoir négligé leurs devoirs scolaires pour jouer et 20% avoir eu des résultats scolaires faibles à cause du temps passé sur les jeux vidéos (et 12% en plus parfois)
- 11.9% des garçons peuvent être considérés comme ayant une pratique pathologique (2,9% des filles)
- 58,3 % de Français ont déjà joué à un jeu vidéo au cours des 6 derniers mois : l'âge moyen du joueur est 34,7 ans et les plus de 50 ans représentent 22,8% des joueurs. Les 35-49 constituent toujours la principale population de joueurs.
- 65% des joueurs jouent le plus souvent seuls, avec des disparités importantes selon les jeux ; 39% jouent toujours seuls et 26,9% seuls la plupart du temps
- 98,6 % des 10-14 ans ont déjà joué (92,4% pour les 15-17 ans, 78,1% pour les 18-24 ans).
- 31,7 % des joueurs jouent une ou plusieurs fois par jour
- 50,4% des joueurs jouent entre 1 et 3 heures par session ; 4,7% entre 3 et 8 heures et 2% plus de 8 heures
3) Sur les plus jeunes, ce dossier de presse de l'enquête "Moi et les jeux vidéos" (mars 2013) du "Comité d'éducation au et par le média" (sic) :
- 796 adolescents de 11 à 20 ans résidant en haute-Garonne ont répondu à l'enquête (mars 2012 à mars 2013).
- Une grande majorité de joueurs sont occasionnels (moins de 5h)
- La pratique du jeu vidéo est une pratique solitaire : 73% des jeunes interrogés déclarent jouer seuls, 36% avec leurs amis et 30% avec leurs frères et sœurs. 4% déclarent jouer avec leurs parents.
- 73% des jeunes interrogés déclarent ne pas trop jouer aux jeux vidéos et 52% moins de deux heures en semaine (56% avec des limitations de leur temps de pratique)
- Les jeunes de 11 à 16 ans sont 65% à jouer à des jeux vidéos classés violents
- 21% des garçons citent le jeu vidéo comme activité préférée et 14% le considèrent comme un besoin
Dans les préconisations, il est recommandé de rendre la violence citoyenne en quelque sorte (p. 74) en permettant de "tuer des méchants"...A l'inverse des autres supports médiatiques comme la radio, la presse, les livres, la télévision, il semble difficile pour les parents de contrôler les contenus visibles et invisibles du jeu vidéo. La seule action mise en place par les parents est le "contrôle de la limite du temps" et au regard du nombre de possibilités de supports de jeu (console, ordinateur, téléphone...) beaucoup sont contraints à la relation de confiance.
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La comparaison avec le sucre me paraît pertinente (beaucoup plus, en tout cas, que la comparaison avec la cocaïne !). Pour le reste, je ne crois pas que Yann Leroux soit le seul responsable de la confusion entre "addiction aux jeux vidéo", "addiction aux objets numériques" et "addiction à internet". Il est vrai qu'on a commencé à se poser la question de "l'addiction aux jeux vidéo" dès le début des années 80 à propos des salles d'arcade, mais de nos jours, on se réfère exclusivement aux jeux en ligne (MMORPG, jeux Facebook...). Et il semblerait que ce soit l'exemple le plus "spectaculaire" d'addiction à internet, donc pas étonnant qu'on amalgame les deux.
Pour finir, j'ai moi aussi noté la faiblesse principale du raisonnement de Yann Leroux : "l'addiction" à toutes ces choses-là a beau ne pas être reconnue par les autorités médicales, le terme a beau être galvaudé et utilisé n'importe comment pour n'importe quoi (sans parler des déclarations putassières de certains "addictologues" qui n'aident vraiment pas), ça ne veut pas dire qu'elle n'existe pas.
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Extrait :
A Daily Yomiuri report Tuesday said that around 518,000 students in Japan are addicted to the Web. The discovery was first reported earlier this month after the publication of research results by the Health Ministry.
The ministry said there was evidence that the addiction was having a negative impact on not only their performance at school but also their health, with sleep and nutritional disorders, as well as depression, reported. Even deep vein thrombosis gets a mention.
While centers for Internet addiction already exist in many countries, Japan, one of the most connected nations on the planet, currently has few places specializing in treatment for those considered to be Web addicts.
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- Loys
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Seule réaction de Yann Leroux pour l'instant : il a enfin corrigé la grossière erreur sur le nom du contradicteur... dont il remet en cause le professionnalisme.Bonjour Yann,
je suis docteur en psychologie et psychologue clinicien et ai déjà eu l’occasion de t’entendre (avec A Lazartigues à Rennes) et de te lire (“En métapsychologie” in Adolescence N°79.)
Quelques remarques : ce n’est pas le Dr Olievenstein avec lequel tu as discuté mais sauf erreur de ma part, le Dr Lowenstein. J’ai écouté l’émission et je trouve qu’il a dit beaucoup de choses censées. Je trouve tes propos excessifs sur sa “bullshit psychiatry”. Je travaille en addictologie depuis de nombreuses années et, de même que certains collègues, nous recevons des personnes en grande souffrance dans leur usage de l’internet, qui y consacrent la plupart de leur énergie et qui aimeraient que cela change et sollicitent de l’aide pour cela. Ces cas ne sont statistiquement pas très nombreux mais ils existent et la comparaison avec les autres formes d’addiction tient à mon avis parfaitement la route. J’ai travaillé longtemps aussi en « toxicomanie ». No life, NERD ou Hikikomori sont souvent dans une démarche mortifère et nous accompagnons ceux qui sollicitent une reprise en main de leur vie. Pour la plupart cet usage tente vainement de masquer ou anesthésier des souffrances plus anciennes dans des parcours de vie difficiles, comme pour les autres addictions.
Ce problème n’est cependant à mes yeux pas le problème majeur concernant les usages d’internet. Beaucoup sont en effet dans un usage soit excessif soit nocif tout en ayant une vie bien remplie qui n’a rien à voir avec celle d’un no-life. Où commencent l’excès et le nocif ? C’est une question difficile qu’il ne faut pas éluder cher confrère ! Je n’y répondrai pas ici mais suis prêt à en discuter. Tu cites l’enquête de 2010 de la Kaiser Family Foundation où effectivement il est constaté qu’en moyenne un jeune entre 8 et 18 ans passe 7H38 par jour devant des écrans, aujourd’hui, en 2013, on doit avoir passé les 8h00 par jour. Tu appelles cela une utilisation normale (en insistant sur normale) : oui, c’est devenu la norme états unienne et nous ne sommes pas loin derrière. Mais un jour étant composé de 24h00, cela fait un tiers du temps : sur quoi sont prises ces huit heures par rapport à ce qui se faisait il y a à peine vingt ans? Et quels effets sur le fonctionnement psychologique et social? Je ne sais si cela est bien ou mal mais je crois que ces questions méritent pour le moins une réflexion approfondie pour savoir si ce qui est devenu la norme est un progrès ou non et s’il conviendrait de qualifier cela d’excès…
En résumé je trouve que contrairement à ce que tu dis ce n’est pas “aussi simple”. Ceci juste pour alimenter le débat s’il peut rester serein. Même si je ne partage pas ton avis sur certaines questions, j’apprécie tes interventions vivifiantes, qui passent très bien auprès des jeunes (je conseille d’ailleurs parfois ton blog depuis que je l’ai découvert) et dédramatisent l’essentiel auprès des moins jeunes et c’est pour cela que je me permets ces commentaires que tu sauras, je l’espère, apprécier à leur juste valeur…
Philippe Decan
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Erreur d'autant plus dommage que William Lowenstein n'est pas un inconnu... y compris pour Yann Leroux, qui avait déjà parlé de lui sur son blog 4 ans plus tôt (à l'occasion d'un débat similaire) : www.psyetgeek.com/les-jeux-video-manquen...es-sciences-socialesLoys écrit: Seule réaction de Yann Leroux pour l'instant : il a enfin corrigé la grossière erreur sur le nom du contradicteur... dont il remet en cause le professionnalisme.
De mon côté, j'ai un moyen mnémotechnique pour ne pas me tromper : il se trouve que le Dr. Lowenstein est l'homonyme de Douglas Lowenstein, l'ex-président de l'Entertainment Software Association (le syndicat américain des éditeurs de jeux). Il se trouve également que le fils cadet de William s'appelle Douglas.
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