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"Une réforme de gauche ?"
- Loys
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Devant les cadres de l'éducation nationale le 25/08/17 :Loys écrit: Vous pouvez commenter ici l'article "La réforme du collège n'est pas “de gauche”" du 16 octobre 2016.
Jean-Michel Blanquer écrit: L'esprit de la réforme du collège est bon, il doit être continué et approfondi.
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Quelques commentaire s'imposent.
Pour le formuler autrement, défendre Najat Vallaud-Belkacem, c'est être "réformiste" et la critiquer au même titre que son successeur, c'est être "radical". Voilà qui n'est pas manichéen.Tracer un signe égal entre NVB et JMB est en effet un des clivages majeurs entre ce qu'on va appeler rapidement les "réformistes" et les "radicaux".
Mais pas l'école.Il y a plusieurs dimensions à ce postulat que pour ma part je conteste. La première est d'englober la politique éducative dans une critique globale du quinquennat Hollande avec la déchéance de nationalité, la loi travail et bien d'autres renoncements (pour lesquels je suis moi aussi très critique).
Il est vrai que la politique de recrutement de François Hollande se distingue nettement de la politique de redistribution des postes d'Emmanuel Macron, mais l'effort reste néanmoins à relativiser. Si l'on consulte RERS 2013 et 2018, il y a bien augmentation nette du nombre d'enseignants mais dans cette augmentation il faut compter 30.105 contractuels supplémentaires (+72%) et inclure plus de 27.000 enseignants stagiaires, qui correspondent à des postes supplémentaires fictifs.Tout cela serait à mettre dans le même sac "néo-libéral" (qualificatif passe partout et bien commode). Or, pour ma part, je postule qu'il peut y avoir une autonomie des politiques menées. Et que la politique éducative menée par Peillon, Hamon (!) et Vallaud-Belkacem avait une cohérence et ne peut être réduite à une logique d'économies comme on peut encore le lire quelquefois (certains continuent à nier l'existence des 60 000 postes).
Le même renoncement que les gouvernements de droite précédent et suivant, mais c'est un détail.Évidemment, il y a eu là aussi des renoncements découlant de la politique globale qui concernent les enseignants comme le maintien du gel du point d'indice (sauf deux ans).
Au passage, le point d'indice n'a pas été dégelé deux ans, mais un an (six mois en 2016 et six mois en 2017, à l'approche des élections).
Il s'agit à chaque fois, pour Philippe Watrelot, de dédouaner Najat Vallaud-Belkacem, qui n'était pas responsable d'une politique plus générale... mais qui n'a pourtant pas démissionné. Quant à accuser "l'autoritarisme" du premier ministre, c'est laisser penser que l'opposition générale des enseignants était sur la forme, et pas sur la fond de la réforme du collège.Il y a eu aussi l'autoritarisme de Valls qui a abouti à la publication du décret sur le collège le soir d'une manifestation. On ne peut le nier.
Il est vrai que Najat Vallaud-Belkacem a eu l'heur de savoir reconnaître et distinguer les mérites de Philippe Watrelot...
Pas seulement : les absurdes rythmes scolaires imposés par Vincent Peillon expliquent également la défiance des enseignants à l'égard du parti socialiste. Pour le reste, les enseignants se souviennent avec amertume du mépris témoigné par Najat Vallaud-Belkacem à l'égard des opposants à sa réforme.La cristallisation autour de la réforme du collège est la deuxième dimension. Depuis cet épisode, NVB est accusée de mépris, d'autoritarisme, etc.
On note avec amusement l'imprécision de Philippe Watrelot : "par plusieurs syndicats". Car, de fait, si la réforme a été approuvée par le CSE, elle a été rejeté massivement par les syndicats enseignants majoritaires et approuvée par deux syndicats minoritaires seulement, le Sgen-CFDT et le SE-UNSA. La réforme des programmes, l'année suivante, a été rejetée par le CSE.Or, il faut rappeler que cette réforme a été votée au CSE et approuvée par plusieurs syndicats après toute une phase de négociations.
On voit bien où se situe la "réécriture de l'histoire", en effet : un soutien massif des enseignants à la réforme du collège !Il y a donc une tentative de réécriture de l'histoire qui est à l’œuvre chez ceux qui y voient une atteinte à la position supposément majoritaire.
"Faire évoluer les pratiques" dans le sens d'un abandon d'exigences disciplinaires nationales, de l'éclatement des disciplines et du pilotage local des moyens par la hiérarchie visant à opposer les disciplines entre elles (la gestion de la marge, chaque année plus réduite) : une "autonomie des établissements" rêvée par la droite, la Cour des comptes, le MEDEF (qui a approuvé la réforme au CSE).Elle tente de faire passer pour une réforme "néo-libérale" (encore ce qualificatif bien commode) qui n'était rien d'autre qu'une réforme visant à faire évoluer les pratiques pédagogiques et le mésusage des classes à projet pour contourner la mixité.
Au passage, s'il y a bien un domaine dans lequel on peut "tracer un signe égal entre NVB et JMB", c'est dans la suppression des options de langues anciennes.
Les options de langues anciennes étant purement et simplement supprimées dans la réforme initialement présentée à la presse le 9 mars 2015, on pouvait en effet y voir une attaque de leur discipline ("identitaire" dit Philippe Watrelot, le mot désignant l'extrême-droite actuelle). Mais surtout l'application d'un programme économique : les professeurs de lettres classiques devenant de facto des professeurs de lettres modernes, ce qui faisait d'une pierre deux coups : ne plus financer des centaines de milliers d'heures d'options, ne pas recruter des milliers de professeurs de lettres modernes supplémentaires.Mais elle s'est heurtée à plusieurs écueils et notamment le fait que des enseignants ont pris pour eux-mêmes et comme une attaque personnelle "identitaire" (les profs de LCA) ou en termes de postes (les profs d'allemand) une critique qui s'adressait au système.
La réduction de la critique la plus factuelle et la plus rationnelle à un problème psychologique est un classique de l'incapacité à argumenter. Et si la "dissonance cognitive" était chez celui qui a soutenu une politique libérale continuée dans les grandes lignes malgré le changement de majorité ?Le contentieux reste très fort aujourd'hui. La troisième et dernière dimension découle de ce qui précède. Diaboliser NVB et l'accuser du même projet politique de destruction de l'école est un moyen pour ceux qui procèdent ainsi de gérer leur "dissonance cognitive".
"L'esprit de la réforme du collège est bon, il doit être continué et approfondi" a déclaré Jean-Michel Blanquer en 2017.
Il est confortable de se positionner en faveur des politiques menées : la critique du ministère de Jean-Michel Blanquer par Philippe Watrelot est simplement pour la forme. L'ex-président des "Cahiers pédagogiques" en est parfois l'inspirateur sur le fond, comme on a pu le voir pour la réforme du lycée ou la réforme des concours de l'enseignement.Il est toujours plus confortable de se positionner toujours en "contre" et on retrouve là le vieux clivage entre réformistes et radicaux.
Il est d'ailleurs amusant que Philippe Watrelot critique le refus du réformisme à l'heure des réformes actuelles...
Le réformisme n'est hélas pas toujours le progressisme que laisse croire Philippe Watrelot.Mais derrière ce qui relève de la posture, il y a aussi un fond de conservatisme. Le maximalisme et l'accumulation des préalables (moyens, effectifs) est aussi une formidable justification de l'immobilisme.
Conserver une école publique efficace, ce serait pourtant une bonne chose.Toute la rhétorique autour de la "destruction de l'école" et donc de l'impératif de la "préserver" est aussi une manière de ne pas poser la question de sa nécessaire évolution. Au risque de me répéter, il y a donc un habillage avec un lexique très radical voire révolutionnaire d'une position qui au final est très conservatrice (j'ai parlé à plusieurs reprises de "gaucho-conservatisme").
Le malaise est surtout celui de Philippe Watrelot.On ne pourra pas avancer dans le domaine de l'éducation et accessoirement de l'unité à gauche tant qu'on continuera à "rejouer le match"et qu'on n'aura pas fait un aggiornamento sur cette question. Ce signe "égal" peut être lu au mieux comme le signe d'un profond malaise au sein de l'éducation nationale..
L'échec politique du PS en 2017 a été historique mais on n'a guère observé d'aggiornamento scolaire au PS.
Il ne peut y avoir qu'une gauche "réformiste" en somme : celle qui approuve les réformes scolaires du quinquennat précédent et les réformes scolaires du quinquennat actuel.Il est aussi et surtout injuste au regard de l'histoire de l'éducation. Que des partis politiques ou des syndicats continuent à perpétuer cette opinion et à surfer sur un malaise et du ressenti au lieu de construire des propositions rationnelles relève de la démagogie. Cela rend, en tout cas pour moi, problématique un vote en faveur d'une organisation qui continuerait à développer un tel discours.
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