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Michel Guillou - "Éduquer aux médias numériques… Mais qui va s’en occuper ?" (26/03/12)
- Loys
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Mon expérience est éducative... n'en déplaise à M. Guillou.Éduquer aux médias numériques… Mais qui va s’en occuper ?
Trois invectives dans la première phrase, voilà qui augure d'une réflexion posée et sereine. Mais pourquoi tant de fébrilité ?Le buzz incroyable né de cette lamentable affaire de professeur imposteur cynique...
C'est stupéfiant en effet : des personnes avec un sens critique et une pertinence d'analyse qui ne sont pas d'accord avec M. Guillou. Comment donc est-ce possible ?... — je ne vous mets pas les liens, vous chercherez tout seuls… — a eu au moins une conséquence heureuse, au-delà du très fort et étonnant clivage qui a séparé ceux qui trouvaient ça bien (dont, à ma grande stupéfaction, certains de ceux dont j’avais pris l’habitude d’apprécier le sens critique et la pertinence d’analyse, comme quoi…) et ceux qui, à raison, me semble-t-il, trouvaient ça consternant.
L'enseignement des lettres est une mission déjà bien ardue pour qu'on ne lui ajoute pas des missions superflues : de toute façon, qui sait lire Voltaire, Zola et d'autres auteurs peut sans difficulté affronter les médias numériques avec tout l'esprit critique nécessaire. Il est même curieux d'imaginer une "éducation" à l'esprit critique compartimentée, tournée seulement vers les "médias numériques".En effet, il y a, à l’évidence, comme un frémissement consensuel, d’un côté et de l’autre, pour réclamer que le système éducatif se préoccupe enfin d’éduquer aux médias et, en l’occurrence, car l’enjeu est de taille, aux médias numériques.
Chacun son militantisme. Le mien est tourné vers une culture, le vôtre vers un médium.Je ne m’y attendais pas. Ceux qui, comme moi, sont depuis très longtemps des militants acharnés de l’éducation aux médias numériques en sont fort heureusement surpris.
Vous vous trompez : www.missionfourgous-tice.fr/Il ne faut pas non plus montrer trop d’enthousiasme. En effet
- nous sommes sur ces médias entre nous et la gent politique, toute accaparée par le débat électoral, ne se préoccupe pas plus que ça, voire pas du tout, de ces enjeux-là ;
L'entrée du numérique à l'école en tant que telle n'est jamais questionnée. La seule question qui vaille est : quand le numérique va-t-il enfin prendre toute sa place (toute la place ?) à l'école ?- l’actualité n’effleure que de manière furtive l’interrogation et la réflexion des aréopages du système éducatif, préoccupés par d’autres contingences matérielles ou corporatistes ;
- les parents, avec qui l’on devrait partager ce chantier, ont aussi curieusement d’autres priorités — la suppression des devoirs à la maison est leur nouveau, mais pas très récent, combat ;
- le développement du numérique a pris, en France, un tel retard — se reporter, par exemple, à « Le numérique, ça devrait être obligatoire ! » — que l’éducation aux médias semble passer au second plan des préoccupations des acteurs, dont les élus des collectivités ;
Il y a pourtant quelques penseurs qui interrogent les dangers de la révolution numérique.
Heureusement qu'il y a M. Guillou. Et quand il y a un professeur qui se préoccupe de ces questions et les porte sur la place publique, il devient un "imposteur cynique".- les professeurs eux-mêmes, à de très rares exceptions près, ne se préoccupent que pas ou peu de ces problèmes-là, soit par paresse ou désintérêt, soit parce qu’ils ont décidé que ça ne les concernait pas ou que c’était l’affaire des parents, soit enfin, le plus souvent, parce qu’ils ont « le nez dans le guidon » avec les contingences quotidiennes de l’enseignement de leur discipline…
C'est évidemment une priorité pour l’Éducation nationale. La lecture ou l'écriture ne sont que secondaires (cf Copies non conformes ).Alors, à supposer que l’éducation aux médias numériques apparaisse, par miracle, comme un chantier prioritaire, qui va s’en occuper ?
Ou pour simplifier entre ceux qui savent lire et ceux qui ne savent pas...Il existe, dans le second degré, des professeurs dont c’est justement une des préoccupations, au cœur même de la mission qu’on leur a confiée. La Fédération des enseignants documentalistes de l’Éducation nationale ou FADBEN vient de tenir congrès. Dans une lettre aux candidats à la présidence de la République, ces professeurs réclament que « la mission enseignante des certifiés de documentation [soit] suffisamment définie à l’aune des besoins reconnus [et soit] mise à contribution à la hauteur de leur expertise et de leur ambition » :
« Si des politiques soutenues du développement des réseaux numériques, cette dernière décennie, ont concouru à démocratiser les accès aux ressources et les connexions en réduisant la fracture numérique, elles laissent cependant le fossé continuer à se creuser entre ceux qui savent tirer parti de ces outils et de ces ressources et ceux qui ne possèdent pas les rudiments de cette nouvelle culture de l’information et des médias.
Le concept de "culture informationnelle" est passionnant en soi, puisque, abusivement employé, il ne désigne pas une culture à proprement parler, mais un ensemble de techniques pour appréhender une culture qui est externe à nous.[…] Le développement d’une culture informationnelle à l’école représente donc un défi pour la formation de la jeunesse du XXIe siècle. Connaître le fonctionnement des médias, savoir estimer la valeur de l’information sur l’Internet, avoir une vision claire des intérêts économiques qui animent des ténors du web tels que Google, Facebook ou Amazon, s’intéresser à l’histoire des technologies qui accompagnent aujourd’hui tous nos actes dans les sphères privée, sociale et professionnelle, savoir maîtriser son identité numérique en étant conscient des traces laissées sur le web, pouvoir analyser et comprendre un monde complexe où le numérique a brouillé les repères dans l’usage et l’appréhension de l’environnement socio-technique, tout cela participe à ce que l’on appelle la culture informationnelle, ce qui représente un formidable et nouvel enjeu de société pour le monde de l’Éducation. »
N'oublions pas, pour rendre justice aux professeurs-documentalistes, que l'idée de ma supercherie m'a été soufflée par l'une d'entre elles.
C'est grave, en effet.Je suis pourtant d’avis, une fois ces principes réaffirmés, que l’avenir n’est pas rose. En effet seuls les jeunes professeurs documentalistes ont été formés à la littératie médiatique et à la culture informationnelle.
En faisant davantage de numérique à l'école, pardi !Par ailleurs, à supposer que tous ou presque soient formés, compétents et enthousiastes, le chantier est d’une telle importance qu’il sera nécessaire de partager ce travail en direction des élèves avec les autres enseignants et avec les parents. Comment faire ? Comment organiser les enseignements ?
Car j'ai "dérouté" mes élèves en mettant en doute ce qu'on peut trouver sur le web...Enfin, comment faire pour former les cadres administratifs, les inspecteurs, les chefs d’établissement, les professeurs eux-mêmes ? Comment leur faire acquérir le socle culturel numérique suffisant pour qu’ils puissent aider — et non dérouter — leurs élèves ?
Où l'on retrouve une vieille lune des nouvelles pédagogies, l'interdisciplinarité. Encore une fois ce débat sur le numérique que j'appelle institutionnel est hors sujet, du moins tant qu'il ignore la question du numérique sauvage.La FADBEN pose les bonnes questions aux hommes politiques : « Seriez-vous favorable à l’intégration de l’éducation aux médias, de l’enseignement info-documentaire et de la maîtrise des TIC dans le cadre d’une culture informationnelle globale ? Comment envisagez-vous la place de la culture informationnelle dans l’Éducation ? Seriez-vous favorable à la mise en place de ce nouvel enseignement à la culture de l’information et des médias (culture informationnelle) en interdisciplinarité, s’appuyant sur un curriculum et permettant au professeur documentaliste, dans le cadre d’un enseignement modulaire, de représenter les sciences de l’information communication ?
Allons plus loin : et si une grande partie de l'enseignement n'avait aucunement besoin de cette prétendue "culture informationnelle" ? Mes élèves, pour lire et comprendre un texte, n'avaient pas besoin de médias. Le média, comme son nom l'indique, vient même s'interposer entre l'élève et le texte à étudier. En l’occurrence, c'est le média, qui en se substituant à leur réflexion, les a empêchés de réfléchir et de comprendre le texte.
La littérature, les mathématiques, la philosophie et bien d'autres disciplines passionnantes ne font pas partie du "tout numérique", seul horizon d'attente de M. Guillou. Et c'est tant mieux.Comment pensez-vous maintenir l’accès égalitaire pour tous à la culture et au savoir au regard de nouveaux modèles économiques du tout numérique ? »
J'ai répondu à Yann Houry. Et je remercie M. Guillou pour son amabilité finale.Je vous renvoie pour terminer à cet article tout récemment paru de Yann Houry qui clôt, et de belle manière, le débat à propos du « pourrisseur du web ».
Voilà qui me fait penser à ses tweets sympathiques. C'est pas toujours joli joli le numérique :
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- Loys
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M. Guillou vient de publier aujourd'hui cet article qui en dit long sur sa pensée de l'école : "Numérique : ce qu’il va falloir casser pour que ça avance…"
Et pour casser, il faut casser : les murs et les meubles, les temps scolaires, les disciplines et les modes d’enseignement, l’évaluation et les examens, les postures et les discours, les missions, les relations avec les élèves, les parents…
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- Loys
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Je cite cette phrase qui me laisse rêveur :
Michel Guillou écrit: est-il possible en 2012, d’enseigner les lettres, et, par exemple, la pratique de l’oral sans un engagement numérique ? Est-il possible, aujourd’hui, d’enseigner la géométrie sans utiliser les excellents logiciels qui permettent de le faire ? Est-il possible d’enseigner quelque matière que ce soit sans qu’à aucun moment, on ne se préoccupe de ce que le numérique peut apporter à l’enseignement soi-même et à la réussite des apprentissages ? Pour ma part, je ne le crois pas.
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Ou bien ce monsieur pratique l'injure publique ? Et dans ce cas, une plainte de votre part est-elle en cours ?
A.
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- Loys
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Twitter brouille encore un peu plus les frontières entre vie privée et vie publique. C'est un réseau social public. Tout le monde à ce jour, à commencer par ses abonnés, a accès aux tweets de M. Guillou , au même titre qu'un blog : il ne tient qu'à lui d'assurer la confidentialité de ses tweets dans les paramètres de son profil Twitter : les insultes deviendront alors semi-publiques puisqu'elles ne seront diffusées qu'à ceux qu'il approuve pour les recevoir.archeboc écrit: Je ne comprends pas bien, les tweet de Mr Guillou, ils sont privés et vous vous êtes introduits dans son système ?
Pour l'injure publique, je ne suis pas juriste et je ne suis pas sûr qu'il s'agisse d'un délit dans ce cas précis.
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J'aimerais dire à ce monsieur que, pour avoir été obligée d'avoir un ordinateur en cours depuis le collège, j'ai toujours préféré à cet outil l'odeur et le toucher des livres de la bibliothèque, heureusement bien fournie, de mes parents. Aucun logiciel ni aucun forum axé sur la littérature, ni encore moins les articles à propos d'un ouvrage, ne sont nécessaires à la compréhension des textes. Cela peut s'avérer un utile complément parfois, tout comme un danger, si utilisé sans discernement.
Loys, pour être très franche, je ne suis pas sûre d'approuver à 100% votre jolie farce. J'aurais été très tentée de faire la même, mais quelque chose me chiffonne dans le procédé. Il faudra en rediscuter à l'occasion. En revanche, je suis persuadée que si Internet est un réel atout pour enrichir une culture et un épanouissement intellectuel pour peu que ces derniers aient une bonne base solide en dehors de cet outil, il peut devenir un piège redoutable pour qui a un cerveau un poil paresseux.
Euh, j'ai la vague impression de débiter un tas d'évidences, là, non ?
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- Loys
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Le reste de l'année s'est passé de manière assez complice : et, maintenant qu'ils sont en Terminale, ils en reparlent toujours quand je les croise.
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- Loys
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- Loys
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On a ici une belle communication numérique entre l'apprenant et son appreneur, dans un registre soutenu et exemplaire, et une belle exploitations de ressources numériques valides.
Une seule réponse pour un poème si connu : c'est vraiment un manque de chance !...c’est pour vous demander si je peux en toute liberté reprendre le plan du site xxxxxxxxxxx.fr que vous nous avez donné car je ne réussis pas à en trouver un autre.
Curieux si le professeur a étudié le texte en cours ("les éléments que vous nous avez donnés en plus en cours", "Ce plan n’a rien de particulier, j’aurais pu vous le donner"). Nous somme donc face à un cas assez absurde.
Donc, pour résumer, pour sa dernière année de français, l'élève ne sait pas distinguer un bon plan trouvé sur Internet d'un mauvais plan, et n'a donc pas d'autonomie de pensée. Une belle réussite, en effet !Oui O., pas de problème, j’ai vérifié, tu peux reprendre l’intégralité de ce plan pour tes révisions.
Un peu comme si les élèves m'avaient demandé de valider le faux commentaire que j'avais posté sur des sites de corrigés... en début d'année de première.
Même si c'est le cas.Une dernière question si vous le voulez bien… Si je tombe sur ce texte, que la question correspond à ce plan et que j’utilise donc ce plan, est-ce qu’on ne me dira pas : « Vous avez été le chercher sur internet ? ».
Le problème n'est pas tant que l'élève soit allé le chercher sur Internet (ou qu'il l'ait recopié sur un livre de corrigés ou qu'un ami le lui ait soufflé). Le problème est que l'élève ne sait pas faire de plan par lui-même, ni même évaluer le plan d'un autre.
Visiblement non...Ce plan n’a rien de particulier, j’aurais pu vous le donner, tu aurais pu le trouver...
Mais ce qui compte ici, c'est de faire illusion ("tu aurais pu"... même si tu n'as pas pu) : une belle parabole de certains usages numériques.
A lire sur le sujet : "Eloge du copier-coller"
C'est vrai que c'est pénible d'être soupçonné quand on n'a rien à se reprocher....tu n’as rien à craindre.
Bref à faire le plan soi-même... Je crois qu'il vaut mieux ne pas chercher à comprendre la logique de Michel Guillou.Veille simplement à l’adapter à la question posée.
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