Adam Sofineti - "Loys Bonod, the teacher that vandalized Wikipedia" (17/12/12)
En fait, j'ai beau être à peu près convaincu qu'Apollinaire savait ce qu'était une trompette marine, je ne lui ai jamais posé la question, faute d'amis avec qui faire du spiritisme, et en tout état de cause, il n'y a évidemment rien d'impossible à ce qu'il ait voulu jouer sur l'ambiguïté du terme, qui commençait probablement déjà à tomber en désuétude.
Si des éléments extérieurs sont nécessaires à la compréhension, le sujet fournit un paratexte et des notes.
Justement, il n'y a pas de note dans mon édition.
Le piège de ce poème, comme vous le dites, c'est que non seulement on ne sait pas, mais contrairement à Socrate, on ne sait même pas qu'on ne sait pas.
Je pense que c'est une belle incitation à la prudence, tant vis-à-vis des textes que des explications de textes.
Je suis d'accord pour dire que le sonnet que vous aviez donné à vos élèves est infiniment plus simple que ce monostiche, qui pourtant ne paie pas énormément de mine.
Mais si on met des élèves face à du Rimbaud, voire, ce qui doit être plus rare, à du Mallarmé ou à du Huysmans, combien d'entre eux risquent de faire ce genre de contresens ?
Le paratexte ne peut pas tout, parce qu'on risque toujours de ne pas penser à tout déminer.
Ce n'est pas du tout évident de savoir quel mot sera compris sans explication supplémentaire, et lequel mérite un petit paragraphe. A fortiori si on fait soi-même un contresens sur le texte. Et puis évidemment, on ne peut pas non plus tout expliquer.
Je me souviens que pour un oral blanc en première, j'ai complètement séché parce que j'ignorais le sens du mot "velléitaire", et que je n'ai pas eu la présence d'esprit de le signaler tout de suite à mon examinatrice. J'avais affreusement honte, n'ayant pas l'habitude d'ignorer le sens des mots dans les énoncés, et ma vanité mal placée m'a totalement fait perdre pied.
Enfin, j'avais oublié de répondre là-dessus :
Comme le pseudonyme choisi par ce descendant d'Apollon, dieu de la musique et de la poésie ?
Je ne crois pas que ce soit un pseudonyme. Il me semble qu'il s'appelait bien Apolinary, d'abord italianisé en Apollinare, puis francisé.
Typhon
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Ce que vous faites dès lors est un travail d'universitaire, pas d'élève du secondaire.Typhon écrit: Justement, il n'y a pas de note dans mon édition.
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Si "Chantre" est dans un manuel scolaire sans la note sur les "trompettes marines", c'est effectivement problématique.
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Je pense qu'il n'y a pas de manuel scolaire qui reproduise "Chantre". J'ai bien peur que ce ne soit considéré comme trop court et énigmatique pour des élèves de lycée.
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L'exemple de la trompette marine est emblématique de ce clivage. Selon les époques, le terme recouvre différents sens. Au XVIIe siècle, c'était simplement un instrument parmi d'autres. A l'époque d'Apollinaire, c'est une allusion à un objet du passé, désormais périmé. Aujourd'hui, alors que la trompette marine ne veut plus rien dire du tout en tant que tel, on ne pense qu'à l'accolement entre trompette et maritime. Sans contextualisation, on s'éloigne de l'intention initiale de l'auteur.
Tout ça pour dire que les nouvelles technologies de l'information ne font qu'encourager une métamorphose du commentaire de texte, déjà en cours depuis plusieurs dizaines d'années. Aujourd'hui, il est impensable de donner à lire un texte sans fournir des éléments de contexte : il y a encore peu, cette évidence n'allait pas de soi.
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C'est là où vous faites erreur : il s'agit d'une approche historiquement très récente, l'approche structuraliste.Alexander Doria écrit: Traditionnellement, ce qui prime c'est l'approche heuristique : le lecteur est confronté à un texte conçu comme une réalité autonome.
D'aussi longtemps qu'ils existent, les manuels scolaires ont toujours apporté les éléments de contextualisation nécessaires à la compréhension des textes.Aujourd'hui, il est impensable de donner à lire un texte sans fournir des éléments de contexte : il y a encore peu, cette évidence n'allait pas de soi.
Les cours de français apportent souvent un "ancrage" aux textes, ne serait-ce que pour éviter les contresens comme celui des trompettes marines. Mais au demeurant cet ancrage est parfois très limité quand l'histoire qui entoure les textes est plus brumeuse que les textes eux-mêmes : les épopées homériques en sont un bon exemple, et pourtant rien n'empêche de les commenter. La littérature, d'une manière générale, est capable d'échapper - dans une certaine mesure - à l'historicité à laquelle on voudrait la réduire, sinon la littérature antique n'intéresserait que les historiens.
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