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Le "profbashing" au jour le jour
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www.franceinter.fr/emissions/l-invite-du...nche-10-octobre-2021
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Au CNAM, devant un parterre de formateurs : www.bfmtv.com/politique/transmettre-les-...AD-202110190279.html
Lorsqu'on devient professeur, on devient fonctionnaire. Lorsqu'on est fonctionnaire de la République, on connaît les valeurs de la République et on les transmet. Si quelqu'un a un problème avec les valeurs de la République, ça peut être possible sur le plan démocratique, en tant que citoyen français, par contre ce n'est pas possible en tant que fonctionnaire de la République [...] Si vous voulez devenir plombier et que vous avez un problème avec les tuyaux, vous choisissez un autre métier. Il faut en faire un autre. Si vous devenez professeur, vous transmettez les valeurs de la République. Et si vous ne les transmettez pas et si même vous militez contre les valeurs de la République, éventuellement sortez de ce métier, parce que vous vous êtes trompés à un moment donné. Ça n'a peut-être pas été assez clair dans le passé, ça va être désormais très clair dans le présent et dans le futur, au travers de la formation comme de la gestion de la carrière des personnes.
Le lendemain, devant la commission culture de l'Assemblée :
Rien de scandaleux quelque chose de banal... sur 850 000 fonctionnaires il est possible que quelques-uns aient un problème avec les valeurs de la République
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Thomas Messias — 3 janvier 2022 à 8h27
Certaines remarques assassines peuvent avoir de lourdes conséquences.
Dans L'ennemi de la classe, film slovène datant de 2013, des élèves s'opposent à un remplaçant tyrannique. | Capture d'écran CG Entertainment via YouTube
Dans L'ennemi de la classe, film slovène datant de 2013, des élèves s'opposent à un remplaçant tyrannique. | Capture d'écran CG Entertainment via YouTube
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Temps de lecture: 7 min
«Paille, vous êtes bête à manger du foin. Et je ne dis pas ça juste pour faire un jeu de mots.» Élodie Paille se souvient au mot près de cette remarque prononcée avec jubilation par son professeur de mathématiques de troisième. «C'était au début de l'année scolaire 1995-1996. Il m'avait fait venir au tableau pour corriger un exercice que je n'avais pas su faire. Il semblait exaspéré par le niveau général de la classe, et c'est moi qu'il a utilisé pour se défouler.»
Élodie se souvient avoir tout fait pour ne pas pleurer devant l'enseignant et ses camarades. «Une fois revenue à ma place, je me suis mordue l'intérieur des joues jusqu'à la sonnerie. Ensuite, j'ai détalé et je suis allé chialer dans les toilettes.» À l'époque, l'adolescente préfère garder pour elle les mots de son prof: «Mes parents m'auraient sans doute dit de relativiser, que j'en verrais d'autres. Alors j'ai préféré me taire.» Seules ses amies les plus proches lui affirment leur soutien, lui conseillant d'aller se confier à la CPE du collège. «J'avais l'impression, plus ou moins juste, qu'on donnait toujours raison aux profs et jamais aux élèves. Alors j'ai refusé.»
Dans l'ensemble, Élodie a de bons résultats, mais les maths sont son talon d'Achille. Elle parvient néanmoins à obtenir des résultats convenables... en tout cas, jusqu'au jour de son humiliation par l'enseignant. «Ensuite j'ai complètement lâché. Je lui ai donné ce qu'il voulait, en fait. Pourquoi faire des efforts, puisque selon lui, j'étais idiote et inapte.» Ses notes en mathématiques dégringolent, ce que tout le monde attribue à un manque de travail et de prédispositions. «Alors qu'en fait, c'était du sabordage volontaire.» Pendant la suite de l'année, le prof continue à ironiser sur son niveau. «Mais je n'allais plus au tableau. Il disait que c'était du temps perdu.»
En classe de seconde, Élodie Paille tombe sur un prof de maths moins malveillant, mais c'est trop tard: elle a accumulé du retard dans la discipline, ainsi qu'une aversion tenace pour le calcul et la géométrie. «Depuis des années, je répétais que je voulais bosser dans le secteur médical, comme ma mère et ma tante. J'ai fini en 1ère L, parce que mes notes dans les matières littéraires étaient excellentes alors que j'avais 6 en maths. Fin du rêve.»
Aujourd'hui employée de mairie, Élodie, 39 ans, continue à s'interroger: «Est-ce que ma trajectoire aurait été différente sans cette simple phrase? Est-ce que j'y ai accordé trop d'importance? Est-ce que j'ai été trop faible, ou est-ce lui qui a vraiment abusé? Je me pose souvent la question, et ça me réveille parfois la nuit.»
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Élodie est loin d'être un cas isolé. Même à l'âge adulte, nous restons parfois marqués par les remarques cinglantes et dégradantes prononcées par certains membres du corps professoral. Les témoignages affluent: «Ma prof de sciences naturelles m'avait traité de bon à rien avant d'ajouter que je pouvais aller m'inscrire directement dans une agence d'intérim au lieu d'essayer de faire des études», explique Élie, 46 ans.
Du côté de Marouane, 24 ans, c'est une comparaison avec son frère aîné, élève brillant, qui a eu raison de sa confiance en lui: «Durant un conseil de classe, où j'étais présent en tant que délégué, mon prof principal a dit devant tout le monde que dans la fratrie, c'est mon frère qui avait eu le cerveau. Ça a fait rire l'assemblée, et la réunion s'est poursuivie comme si de rien n'était.»
Violences éducatives
Pour Agnès Florin, professeure émérite en psychologie de l'enfant et de l'éducation à l'université de Nantes, il est primordial de souligner le caractère inacceptable de ce genre de remarques. «Je tiens à rappeler que ces phrases constituent des violences éducatives. Dans le code civil, on trouve depuis 2019 un article à propos de l'autorité parentale, “un ensemble de droits et de devoirs ayant pour finalité l'intérêt de l'enfant”, qui “s'exerce sans violences physiques ou psychologiques”. Cela doit valoir aussi pour les enseignants.»
Si ce genre de remarque semble aussi communément accepté, c'est parce que la communauté éducative ne prend pas toujours le temps de poser des limites entre ce qui peut être dit et ce qui ne doit pas l'être. «Ces remarques sont souvent perçues comme des gestes éducatifs ordinaires, poursuit Agnès Florin, qui travaille sur le bien-être des enfants. Il est vraiment temps qu'en France, on sache reconnaître qu'il s'agit de violences éducatives, comme cela a déjà été fait dans d'autres pays.»
«Les relations à l'avenir et à la société sont développées au sein
des institutions éducatives,
et notamment à l'école.»
Agnès Florin, professeure émérite en psychologie de l'enfant et de l'éducation
La violence de telles remarques est décuplée par le fait qu'elles sont effectuées face à un public, généralement constitué des camarades de classe, explique Agnès Florin: «Cela contribue à endommager encore plus profondément l'estime de soi de l'enfant visé. En plus, c'est inefficace et contre-productif. La violence entraînant la violence, l'enfant finira par se rebeller d'une manière ou d'une autre, contre ses parents ou contre le système scolaire.»
En 2022, avec huit confrères et consœurs, Agnès Florin publiera dans la revue Éducation & Formations un article consacré aux relations entre l'estime de soi et les performances scolaires. Les résultats des travaux réalisés est sans appel: «La confiance en soi est une condition nécessaire aux apprentissages.» Piétiner cela lorsqu'on est censé être un adulte de référence, c'est priver les élèves de l'impulsion nécessaire pour apprendre convenablement. Et c'est briser le lien de confiance déjà fragile qui les unit au système éducatif.
En septembre 2021, l'UNICEF publiait les conclusions d'une consultation menée auprès de 25.300 jeunes de 6 à 18 ans, dans laquelle on apprend qu'«une majorité d'enfants, plus de 5 enfants sur 10 (55,3%), est angoissée à la fois de ne pas réussir à l'école et dans la vie». «Les relations à l'avenir et à la société sont développées au sein des institutions éducatives, et notamment à l'école, analyse Agnès Florin. Par conséquent, les politiques publiques devraient être beaucoup plus attentives à ces éléments.»
L'humiliation comme tremplin?
Certains affirment avoir été boostés par les remarques déplacées de membres de la communauté éducative. «Si je pouvais retrouver le prof de lycée qui m'a dit devant tout le monde que je ne gagnerais jamais ma vie avec mon cerveau, raconte Nadia* avec émotion, je lui expliquerais volontiers que j'ai intégré Centrale et que suis désormais à la tête d'une vaste équipe d'ingénieurs. Rien que mon bulletin de salaire le ferait blêmir.»
Nadia dit avoir conscience qu'une telle remarque aurait pu la faire sombrer, mais que son entourage l'a bien aidée à ne pas s'arrêter là. «Mes parents ont pris rendez-vous avec le prof, et ils lui ont demandé de s'excuser devant moi. Il ne l'a pas fait, mais mes parents lui ont dit qu'à la moindre récidive, ils contacteraient le rectorat. Il ne m'a plus jamais attaquée de la sorte. Et je me suis sentie si soutenue que ça m'a donné des ailes pour la suite.»
S'il peut arriver qu'une remarque humiliante ait finalement des conséquences positives sur la trajectoire de l'élève, il ne faut pas tirer de conclusions hâtives, tempère Agnès Florin: «Cela ne concerne que des enfants ayant une bonne dose de confiance en eux, et qui sont sans doute encouragés dans leur vie quotidienne, souvent par leur famille. C'est loin d'être la majorité.»
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D'autant que les réactions d'orgueil ne donnent pas que des bonnes choses: Dimitri, 44 ans, raconte que ce sont les brimades d'un prof d'EPS qui lui ont donné envie de se mettre au sport. «J'étais en surpoids, je galérais dans tous les sports, et il m'a fait beaucoup de mal avec ses remarques répétées. J'ai décidé de me mettre à faire de l'exercice physique, mais c'est vite devenu obsessionnel. L'année suivante, il ne m'a pas reconnu tellement j'avais changé. Il était tout fier de lui, comme s'il attendait que je le remercie. Près de trente ans après, je me dis qu'il faudrait surtout que je lui présente la facture pour toutes les séances de psy que j'ai dû suivre à cause de lui, et pour le suivi médical lié à mes importantes variations de poids.»
Finie l'impunité
«Ce qui est dégueulasse, confie Nadia, c'est que les profs qui parlent mal aux élèves choisissent souvent leurs cibles en sachant très bien ce qu'ils font. En ce qui me concerne, le prof ne se doutait visiblement pas que mes parents allaient débarquer le couteau entre les dents, parce que j'étais discrète et malingre et qu'il devait imaginer qu'ils étaient comme moi.»
La jeune femme poursuit: «On sait bien que ces remarques tombent plus souvent sur des filles ou des personnes racisées, parce qu'ils pensent qu'on a tellement l'habitude d'en prendre plein la tronche, qu'on ne ripostera pas. D'ailleurs, à l'époque, je n'avais pas saisi le caractère sexiste de la remarque du prof... Quand on dit à une fille qu'elle ne réussira pas avec son cerveau, ce n'est pas innocent.»
Prendre rendez-vous avec l'enseignant concerné, contacter les CPE ou la direction, voire le rectorat en cas d'immobilisme: les solutions sont parfois compliquées à mettre en place, mais elles existent. «Il faut que les parents se disent que même si leur plainte n'aboutit pas, leur enfant se sentira soutenu, dans son bon droit, et qu'il se dira juste “je suis tombé sur un sale type raciste ou sexiste” et pas “je dois quitter le système scolaire au plus vite”. Moi, c'est vraiment ce qui m'a sauvée. Et puis ça contribue peu à peu à changer le rapport de force.» Et à faire comprendre aux profs que l'époque à laquelle ils se pensaient intouchables est finie.
*Le prénom a été changé.
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On voit rarement des reportages sur le travail et le salaire comparés des ingénieurs, des commerciaux ou des agents immobiliers en France et dans d'autres pays.
Face au tollé légitime, la réponse du médiateur :
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Dans "L'Obs" du 2/02/22 :
"Ma relation avec l'école a toujours été compliquée et aujourd'hui encore je reste aussi critique envers l'Education nationale qu'envers l'institution policière." Dans son livre Voyage d'un homme libre au pays de l'absolutisme (Seuil), le député du Val-d'Oise Aurélien Taché, ex-LREM devenu soutien de Yannick Jadot à la présidentielle, raconte son parcours scolaire chahuté et ses anciennes mauvaise fréquentations : lors de son année de redoublement de 3e dans un collège privé, "je me suis mis à fumer du cannabis quotidiennement et à en vendre un peu", confesse-t-il. Fils d'une famille modeste, il se retrouve inscrit en apprentissage de plomberie, puis déscolarisé avant de passer un diplôme de capacité en droit, l'équivalent du baccalauréat, et de finalement rejoindre l'université de Limoges. "Plutôt que de vous aider à vous révéler, l'école française agit comme un moule dans lequel vous devez rentrer, regrette-t-il.
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J'assume totalement qu'il y aura plusieurs systèmes de rémunération entre les enseignants parce qu'il se trouve que les enseignants ne font pas partout la même chose sur le territoire. Et nous le savons. Vous avez des enseignants qui pendant le Covid ont été là, se sont occupé de vos enfants, ont envoyer des devoirs, les corrigeaient, appelaient pour savoir. Il y a des enseignants qui ont fait le travail comme il se devait. Et puis il y a des enseignants - ça a existé aussi - qui ont disparu. Il sont tous payés aujourd'hui de la même manière. Parce que le système est un peu hypocrite, il se réfugie derrière un égalitarisme. On sait très bien que dans une école, vous allez avoir un professeur dans une langue, dans une discipline, qui par son travail va complètement changer une classe des élèves et leurs résultats ne seront pas les mêmes, et un autre ne le fera pas. On doit pouvoir donner les moyens aux directeurs d'école, à l'équipe pédagogique, à sa hiérarchie, de le mesurer. Et c'est cette transparence que je veux généraliser. Et comme ça on pourra aussi comparer les méthodes pédagogiques. Quand, sur une classe comparable, vous avez un professeur qui réussit à changer complètement les résultats en français de CM1 et que l'autre ne les a pas changés, vous pouvez légitimement vous dire en tant que directeur d'école ou parent d'élève : "Il y a un professeur dont les méthodes me semblent plus adaptées." Et c'est pas ce qu'on fait parce que le système est cadenassé. Il est cadenassé. Beaucoup trop. Et donc, quand je vous dis on rentre dans le modèle, pour la santé et pour l'école, c'est ça qu'on va faire. Donc, oui, il va y avoir beaucoup de changements. Vous avez raison, si on prend ça avec les lunettes habituelles, ça va pas plaire à tout le monde.
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Relayé quelques jours plus tard par cette chronique de l'éditorialiste Philippe Bernard dans "Le Monde" (abonnés) du 27/03/22 : "Election présidentielle 2022 : « Macron et les profs, un débat escamoté »"
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Quelques jours plus tard dans la campagne :
Révélations sur la vision de l'école de Macron: Alexis Kohler propose "d'indexer la rémunération des professeurs sur l'obtention par leurs élèves de bons résultats" et instaurer un "système de notation des établissements façon palmarès des meilleures écoles", révèle L'Express. La réunion, qui a lieu en présence de Bayrou, fait bondir l'ex-ministre de l'Education nationale: "Je ne pense pas qu'on puisse faire progresser le monde enseignant par des menaces". Grand silence autour de la table, rapporte l'Express. Le monde enseignant "est ombrageux", poursuit Bayrou, qui critique un gouvernement qui "veut toujours lui donner des critères libéraux, des critères de gestionnaires de McKinsey (sic), alors que la classe c'est un rapport humain !". La phrase fait mouche... Autre idée: mettre fin au collège unique. Les garants du macronisme originel recommandent d'instaurer "l'orientation précoce" et plaident pour "un collège à la carte", selon un participant. "C'est l'orientation selon le choix de la famille", répond Bayrou.
Edit du 4/04/22 sur "France Inter" :
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Et donc... "nouvelles missions".mieux reconnaître tous nos enseignants qui déjà font beaucoup plus et ne sont pas mieux rémunérés pour cela.
Edit du 6/04/22 dans "Le Figaro" : www.lefigaro.fr/elections/presidentielle...est-intacte-20220406
Emmanuel Macron écrit: "Je veux répondre au syndrome de la salle des profs où celui qui se démène est parfois moqué par celui qui fait le minimum syndical. Les devoirs faits à la maison, l’engagement avec le périscolaire, l’accompagnement plus individualisé au collège, le remplacement des collègues absents… Tout ça doit faire l’objet d’une rémunération"
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Trente minutes montre en main pour devenir professeur !
J'ai atteint la cinquantaine, je me dis qu'il faut peut-être changer un petit peu de vie, faire un autre rythme
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