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Le "profbashing" au jour le jour
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Est-ce qu'on peut restructurer pour muscler à effectif constant la production ?
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Comment faire pour que les enfants et les préados en décrochage scolaire ne s'installent pas dans "un sentiment de nullité" ? Selon l'écrivaine Marie Desplechin, "tout est fait pour qu'ils s'y installent [...] le système scolaire est conçu pour casser".
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Pap Ndiaye écrit: On entre plus dans le métier enseignant pour que ça se termine par un pot de retraite 40 ans plus tard. Mais on veut pouvoir être enseignant 10 ans, et puis faire autre chose.
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Et le même jour :
Brigitte Hazard (IG) écrit: Les profs de lycée ont une sale habitude : préparer les élèves au certificatif, au bac. Ils ont des pratiques évaluatives très influencées par des pratiques certificatives.
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Et, face aux réactions, il y a une suite : Romain Filstroff se présente comme une victime de classe de l'école
Pour autant, pour bien comprendre, tout mon parcours scolaire et étudiant a été profondément marqué par deux choses : 1. un mépris de classe 2. une voie vers l'illettrisme évitée de peu 3. aucun soutien scolaire ni familial ni local
1. sur le mépris de classe, le meilleur exemple est l'orientation : j'ai dû lutter pour la moindre orientation, que ce soit aller au lycée général ou à l'université. Les profs voulaient à tout prix m'envoyer en BEP elec, puis ensuite en BTS ou DUT. Ce n'était pas explicable par mes résultats seuls : un bon ami de mon village, même âge même moyenne, mais fils d'un grand notable, avait la voie royale malgré le fait d'être à deux doigts du décrochage scolaire. Mais si cette orientation était conseillée, c'était soi disant pour me rendre service : dép rural, collège où l'écrasante majorité étaient enfants de cheminots, petits artisans, d'employés non-qualifiés ou d'agriculteurs. BEP elec, c'était la voie pour les fils de cheminot. Nous sommes que deux de ma classe de 3e à avoir été au lycée général, non sans mal. Un ami, qui n'a pas lutté et a fait le fameux BEP elec, a eu une de mes tantes comme prof d'anglais : elle disait qu'il n'avait vraiment rien à faire là, mais bon, elle avait l'habitude. Ce mépris était aussi évidemment quand tout simplement j'avais le droit à des remarques sur mon origine sociale, ma façon de parler, mes régionalismes etc. Un mépris normal pour bcp : on était vraiment le rebus de la société, le bas de l'échelle, l'école c'était pas pour nous.
2. la voie de l'illettrisme. J'étais incapable d'écrire correctement avant mes 14 ans, et j'avais des strats bien rôdées pour éviter d'écrire ou de lire à l'école. Pas par feignantise : par honte, une honte que ne comprendront jamais ceux qui ne l'ont jamais vécue. Pas surprenant, en réalité, dans un pays qui bat des records en Europe sur l'illettrisme (1 jeune de 15 ans sur 5 en France concerné, mais attendons que le pb se règle tout seul). Ce qui m'a sauvé, c'est l'apprentissage de langues étrangères en autodidacte, la lecture de grammaires et des quelques trop rares livres de linguistique auxquels j'ai eu accès, par passion et parce que je cherchais désespéramment leur contact. Mais cette passion, elle était personnelle et longtemps même un peu cachée : incomprise dans mon milieu social, tout d'abord (créer des langues plutôt que les courses de mobs, chelou le gars) et déconsidérée par mes profs ("apprends plutôt à écrire correctement") J'évitais donc d'écrire à l'école, ne rendait plus de rédactions ni ne lisaient les livres donnés. En même temps, c'était s'exposer à un risque d'humiliation ou de moquerie. Après les dictées négatives qui ont ponctué mon histoire scolaire, il y a eu en 3e le premier point de rupture : lecture d'une redac à moi dans toutes les autres classes que la mienne. La prof voulait me protéger, pas que je me reconnaisse, et a donc épargner la lecture dans ma propre classe. Bon, ça a mi une demi-journée avant que tout le monde sache que c'était moi et plusieurs semaines avant qu'on arrête de se foutre de ma gueule. Au lycée, et @gravecoeur qui était présent d'ailleurs (on était dans la même classe), en 2nde, rebelote : lecture d'une de mes redacs car super mal rédigée. Très humiliant. Lecture commentée, évidemment. J'ai fini à 4,6 de moyenne. Je passe sur les surnoms que cette prof me donnait ni l'avenir qu'elle m'imaginait (balayeur, notamment) car je ne comprendrais jamais Flaubert.
3. l'absence de soutien familial pour les devoirs. Non pas par flemme des parents, mais parce qu'ils ne pouvaient pas. Mon père a arrêté l'école assez jeune pour rentrer à la SNCF, ma mère m'a eu très jeune et n'a pas fait d'études. Mes parents détesteraient savoir que je dise ça en public d'ailleurs, ils se sentiraient coupable, mais bon en réalité ils ont fait ce qu'ils ont pu. Comme la plupart des parents. Les devoirs, donc, c'était un temps énormissime dédié à ne jamais rien comprendre et les lendemains se faire engueuler. Bon bah j'ai vite compris hein : skip les devoirs, copie sur les voisins, ou alors dans le bus le matin vite fait pour faire genre on a essayé. Donc oui, j'ai dû guérir de l'école pour bosser aujourd'hui dans le milieu de l'écriture, de l'expression, du savoir, de la vulgarisation. Le chemin a été très long, très seul, et la plupart qui ont mon histoire n'ont pas le même itinéraire. L'illettrisme les guette. L'illettrisme, un fléau invisible qui touche entre 5,5 et 7% de la population française. Et c'est un chiffre distinct de l'analphabétisme, qui est encore autre chose, et qui s'y rajoute. L'une des raisons pour laquelle j'ai fait de la vulga et de la sociolinguistique, c'est précisément aussi pour aborder toutes ces choses, la glottophobie, le décrochage, la distinction, etc : bref, CQFD. Donc à chaque fois qu'un prof de français se moque de ses élèves ici, sur twitter, désolé mais je le prends personnellement. Je suis cet élève, qui a dû tellement nager à contrecourant et qui a dû se débattre pour ne pas couler. J'ai une relation donc d'amour/haine avec l'école, car je préférais y être plutôt que d'être chez moi, mais en même temps, avec mon faible capital social et culturel, j'étais jamais vraiment à ma place. Les "remet toi en cause" ou "la faute des profs??" fasse à ce discours, je comprends pas : est-ce vraiment la faute de l'élève aussi? Est-il coupable de son milieu et son origine? Ne peut-on pas remettre ce système en cause, tout simplement, donc les profs ne sont qu'un rouage? Un rouage qui, désolé, est aussi un vecteur de norme et de structure. Par la force des choses. C'est leur métier, après tout. Ça, c'est un truc assez basique en sociolinguistique. PS : j'ai pas corrigé mes fautes, ça permettra aux grammarnazis de se rassurer sur leur place et sur la mienne.
Une école harcelante, pas de soutien familial. Romain Filstroff se présente donc comme une victime de son milieu et de l’école du fait de son "illettrisme" (lequel n’empêche visiblement pas d’entrer au collège, ni même ensuite au lycée général), sauvé par "l'apprentissage de langues étrangères en autodidacte" ("passion incomprise dans mon milieu social" "sans capital scolaire et culturel" mais, curieusement, il avait accès à des "grammaires et de quelques trop rares livres de linguistique"). L’école lui aurait imposé la voie des enfants de cheminots (son père ayant arrêté l’école et sa mère l’ayant eu très jeune et n’ayant pas fait d’études). "Coupable de son milieu et son origine" ? S’il ne faisait pas ses devoirs, c’est donc la faute de l’école, après celle de son milieu.
Voir aussi : www.laviemoderne.net/veille/etre-enseign...plus?start=100#25040
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Et tant pis si le harcèlement vient des camarades et a lieu hors de l'école...
www.laviemoderne.net/veille/reseautage/9...ement-en-ligne/24324
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