Le livre déchiré, nouveau miracle pédagogique

Arpentage

Pour leur redonner le goût de lire, pourquoi, devant les élèves sidérés, ne pas déchirer un livre et le partager avec eux ? Bousculons l’enseignement poussiéreux de la littérature avec des innovations disruptives et iconoclastes comme celle de “l’arpentage” !

"L’arpentage” serait « issue de la culture ouvrière » au XIXe siècle et vient de faire une entrée en fanfare dans le petit monde de la pédagogie des lettres : il s’agit de déchirer un livre en plusieurs parties correspondant au nombre de lecteurs.

« Cette pratique de la lecture, fort surprenante parce qu’elle désacralise le livre, a le mérite de permettre une lecture effective d’une œuvre et un échange fécond en un temps limité» (Éduscol1)

Elle été importée à l’école en 2019 à l’initiative de deux professeurs de français d'une académie apprenante2, avec le soutien du tout jeune collectif « Lettres vives »3.

À nous donc de mettre en lumière – au-delà du seul geste de déchirer – toutes les aberrations d’une telle pratique et les ressorts profonds de ce nouveau miracle pédagogique.

Une miraculeuse « lecture intégrale »

Limite extrême des pédagogies collaboratives, cette « modalité de lecture différente »4 consiste à « lire collectivement un livre qui nous semble trop difficile à lire seul »5, en un temps limité et pendant la classe : cette pratique « a l’avantage, en un temps restreint [...] de proposer une lecture d’œuvre intégrale », par exemple Alice au pays des merveilles en une heure seulement. De fait, chaque élève ne lit qu’une petite fraction de l’œuvre mais la brève mise en commun vaut ensuite lecture collective du reste de l’œuvre !

La perte de temps est beaucoup plus importante au lycée quand il s’agit de lire collectivement des œuvres au programme : « il faut bien 3 à 6h pour un arpentage. C'est une expérience collective intense qui demande du temps »6 et ce, même si chaque élève ne lit en classe qu’un fragment de l’œuvre !

arpentage1

On peut, bien sûr, commencer par s’interroger sur ce premier miracle : une « lecture effective » (sic) qui n’en est pas une.

Conscients de la contradiction, ses promoteurs présentent également cette lecture en classe comme une simple entrée dans la lecture, les collégiens ayant, s’ils le souhaitent, la possibilité de lire l’œuvre intégrale en dehors de la classe, les lycéens ayant, eux, l’obligation de lire le reste de l’œuvre intégrale à la maison7 (même si une telle obligation fait horreur au collectif « Lettres vives »8).

Parler de lecture collective d’œuvre intégrale est donc dépourvu de sens.

Une lecture fragmentaire sans queue ni tête

S’efforçant de dépasser ces menues contradictions, le collectif « Lettres vives » a courageusement pris la défense de cette pratique en soutenant la supériorité des fragments déchirés sur les extraits traditionnels9.

La comparaison est étonnante à plusieurs titres : les extraits traditionnels, si insuffisants soient-ils, sont brefs, délimités soigneusement pour former une unité de sens, contextualisés avec précision (personnages, situation dans l’intrigue), présentés selon une progression permettant une approche certes insuffisante et partielle mais du moins intelligente de l’œuvre (c’est d’ailleurs tout le rôle du professeur que de choisir ces extraits permettant aux élèves de comprendre l’œuvre et d’y trouver un intérêt).

Les extraits traditionnels n'entendent jamais, bien sûr, se substituer à la lecture de l’œuvre intégrale mais du moins sont-ils tous lus par chaque élève (en classe ou avant la classe), ce qui n’est pas le cas dans “l’arpentage”, chaque élève ne lisant à proprement parler qu’un seul fragment : le sien.

Mais il y a plus aberrant encore : ce seul fragment surgit du néant. Dans “l’arpentage”, l’œuvre littéraire est déchirée et distribuée au hasard, chaque élève recevant en partage un lot de pages, fragment brut et aléatoire, non pensé, non choisi, ne respectant aucun chapitrage, ne formant aucune unité qu’arbitraire10 et d’autant plus incompréhensible pour l’élève que l’œuvre littéraire est narrative et obéit à une composition structurée.

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Les élèves sont ainsi délibérément placés dans l’incapacité d’appréhender l’intrigue ou d’identifier les personnages et leur évolution, qu’ils doivent s’efforcer de reconstituer après coup, dans un jeu d’énigmes aussi vain que superficiel11. Pour le dire autrement, à la complexité naturelle des œuvres littéraires, cette « modalité de lecture » ajoute une complication inutile et même anti-pédagogique.

De fait, affirmer que le sens émerge au moment de la reconstitution collective12, n’est-ce pas reconnaître que la lecture individuelle qui la précède en est dépourvue ?

Un nouveau renoncement à faire lire

Du moins les promoteurs de “l’arpentage” font-ils le constat des difficultés de lecture des élèves actuels13 nous savons combien l’intérêt de nos apprenants s’émousse rapidement ») quand d’autres pratiquent encore le déni sous toutes ses formes14.

Mais pour le collectif « Lettres vives » le constat va plus loin encore : on ne peut plus attendre (et encore moins exiger) d’élèves entrant au lycée général, par exemple, de pouvoir lire par eux-mêmes une œuvre littéraire : la lecture individuelle n’est-elle pas une « souffrance »15 ?

L’exemple est donné d’œuvres trop difficiles ou trop longues : mais est-ce bien le cas, en première des Choses de Perec (142 pages) ou, en classe de 5e, d’Alice au pays des merveilles, préconisée dans les listes de référence des œuvres à lire... en primaire16 ?

Comment en est-on arrivé là ?

Le collectif « Lettres vives », qui fustige tous les déclinismes, ne s’interroge guère à ce sujet. Or, à force de considérer les élèves – dans un renoncement désolant pour tout enseignant – comme de moins en moins capables de lire à des niveaux de plus en plus avancés de la scolarité... on contribue à les rendre tels (un même renoncement, avec les mêmes effets, s'observe d'ailleurs dans de nombreux autres champs scolaires). Pratiquer (ponctuellement ou régulièrement) “l’arpentage”, c'est renoncer autant de fois à faire lire les élèves.

La « différenciation pédagogique » possiblement revendiquée (certains élèves pouvant être appelés à lire moins que d’autres pendant le même temps de classe17) ajoute à l’absurdité puisque la lecture est par excellence une activité s’adaptant naturellement au rythme de chaque élève... quand son rythme n’est pas imposé en classe !

Une historicité suspecte

Les promoteurs scolaires de “l’arpentage” affirment que cette « vieille pratique de l’éducation populaire » trouve son origine dans les milieux ouvriers à la fin du XIXe siècle. Mais, interrogés à ce sujet, ils se révèlent bien incapables d’en apporter la preuve historique18.

Les pratiques de lectures collectives dans les milieux ouvriers sont, bien sûr, attestées dès le début du XIXe siècle mais sous une forme distincte de celle de “l’arpentage” et que les historiens spécialistes des mondes ouvriers ont pu étudier avec intérêt : un lecteur unique (volontaire ou rémunéré) ou bien une lecture à tour de rôle – Il s’agit dans tous les cas d’une lecture à voix haute, dans un atelier par exemple et à la lueur de la chandelle. Les ouvrages lus ? Des brochures politiques (radicales, socialistes ou même communistes), des journaux achetés collectivement ou des livres empruntés à une bibliothèque.

Bref, nulle trace d’ouvrages déchirés (et même plutôt un respect du livre) ni de lecture collective silencieuse.

On peut donc se demander si cette origine populaire, revendiquée avec tant d’insistance, ne vise pas à légitimer idéologiquement et historiquement – ce qui constitue donc un paradoxe – une innovation qui, en vertu de son absurdité pédagogique en contexte scolaire, en a bien besoin.

Une transposition didactique absurde

Une mode récente de l’arpentage existe bien dans les milieux associatifs depuis quelques années : qu’importe que la pratique de “l’arpentage” remonte ou non au XIXe siècle, on peut facilement constater combien sa transposition scolaire en est éloignée. Il suffit pour cela de jouer au jeu des sept différences.

1. Cette pratique concerne des adultes et non des élèves du second degré.

2. Il s'agit de volontaires dans le cadre de l'éducation populaire et non d'élèves dans le cadre de l'instruction obligatoire et de l'éducation nationale.

3. Elle se pratique entre un petit nombre de lecteurs, et non dans des classes entières.

4. Elle ne concerne jamais des œuvres littéraires.

5. Son but est de mener une réflexion collective à partir d'un ouvrage, et non de faire entrer dans la lecture.

6. Rien n’exige que l’ouvrage, qui peut être lu à partir de plusieurs exemplaires, soit déchiré.

7. La répartition suit logiquement les chapitres du livre arpenté.

On le voit : les différences sont si nombreuses et si grandes qu’on peut se demander comment l’idée a pu germer d’une telle transposition pour l’enseignement du français. Alors pourquoi une telle insistance ?

D’une caricature à une autre

« Désacraliser le livre » : regardant les élèves et la société actuels, une telle injonction semble émerger d’un autre temps sociologique. Mais peu importe : pour le collectif « Lettres vives », certes jeune mais attaché à de bien vieilles lunes, il importe que les enseignants de français s’affranchissent d’une « conception quasi religieuse » de la littérature ou de la culture comme « instrument de domination » :

« Certain·es profs de lettres craindraient-ils/elles de perdre ce qu’ils/elles considèrent comme leur mission (répandre, en chaire, la foi en la littérature auprès d’élèves non-croyant·es) et le statut (de prélat) qui va avec ? »

L’arrière-plan idéologique d’une telle caricature, accompagnée de sa réduction psychologique habituelle (l’incompréhension et la peur face à l’inconnu et à la nouveauté), est bien celui d’un progressisme pédagogique révolutionnaire. Cet arrière-plan devient explicite quand les critiques d’une « pratique qui dérange » sont comparées « aux violentes résistances du pouvoir religieux » rencontrées par la dissection anatomique et que “l’arpentage” est présenté comme un « acte sacrilège ».

Pour trois raisons, l’analogie avec la dissection peut paraître absurde : d’abord parce qu’elle n’a historiquement jamais rencontré une telle opposition (encore une leçon de l’Histoire un peu trop rapidement assenée), ensuite parce que la pratique de “l’arpentage” est d’ores et déjà encouragée par l’institution scolaire (au plan académique et national), enfin parce l’analogie entre livre dépecé et corps mort disséqué n’est peut-être pas la plus heureuse.

Mais à quelque chose malheur est bon : une telle caricature dit bien des choses de nos débats scolaires actuels. Et pour le comprendre, rien de mieux que d’observer à quel point cette disqualification religieuse est parfaitement réversible.

La mise en scène d'une eucharistie pédagogique

Il s’agit en effet, en opposant science et ignorance, d’inscrire l’enseignement innovant dans une nouvelle mystique : celle du progrès pédagogique contre l’obscurantisme scolastique. À ce titre, il ne souffre bien sûr aucune critique.

Cette mystique trouve dans “l’arpentage” son incarnation parfaite avec le geste rituel qui l’inaugure : le déchirement cérémonieux du livre par le professeur de français face à des élèves sidérés, témoins muets d’un miracle en classe19.

Le sacré se trouve ainsi déplacé : non plus dans l’œuvre littéraire, mais dans l’acte pédagogique lui-même.

La mystique va même plus loin. Le motif du « partage » dans un groupe communiant en silence, la présence réelle de l’œuvre dans chacun de ses fragments, sa transmission collective par innutrition ne sont pas sans rappeler le « hoc est corpus meum » chrétien : dans une audacieuse mise en cène didactique consacrant, en même temps que celle du livre, la mort du professeur – sacrifié pour la lecture de tous20 – “l’arpentage” à l’école constitue bien une étonnante eucharistie pédagogique.

Comme les premiers chrétiens accusés de manger leur dieu, les apôtres de ce nouveau rite s’efforcent, par la parole, d’atténuer la brutalité du geste : non, non, il ne s’agit pas de déchirer le livre, mais plutôt de le « séparer », de le « partager », de l’« arpenter » !

Et, pour répandre la bonne nouvelle urbi et orbi, l'image pieuse de la sainte relique est ensuite portée – dans une seconde mise en cène, tout aussi importante que la première – partout sur les sites académiques et les réseaux sociaux (l'apothéose de la béatification étant atteinte dans le « Café pédagogique »), en même temps qu’est donné à voir, grâce au smartphone du professeur, le miracle de l’entrée en lecture des élèves pendant la classe. « Mais le témoignage ne suffira sans doute pas, d’autant que nous ne sommes pas à l’abri de la mauvaise foi qui refuserait de nous croire. »

Face au mal de la fin des temps – la déshérence de la lecture – la bonne nouvelle de “l’arpentage” donne espoir et suscite d’ores et déjà des conversions de professeurs enthousiastes. Et, en réponse aux incroyants hostiles, toute une martyrologie de l’enseignant innovant peut d’ores et déjà s’inventer.

Du miracle... au mirage

Il y a hélas, dans cette petite parabole amusante, une part de triste vérité. “L’arpentage” n’est, en effet, que le dernier exemple en date de ces pédagogies dispersives, d’inspiration socio-constructiviste, qui ont plus que jamais le vent en poupe dans l’école.

On retrouve, parfaitement incarnées dans le geste sacré de “l’arpentage”, les grandes caractéristiques de ces pédagogies : la recherche de la transgression (et en même temps du soutien institutionnel), l’abolition de la raison pédagogique, la foi dans les principes (généreux et justifiant tous les procès en excommunication) plus que dans les effets, l’insistante mise en scène de soi et enfin le prosélytisme : le collectif « Lettres vives » ne milite-t-il pas « pour un autre enseignement du français » ?

C’est toute la tristesse de l’école actuelle : nous avons à ce point perdu tous nos repères qu’une pratique anti-pédagogique puisse nous être présentée comme le nec plus ultra de la pédagogie.

Que la mode de “l’arpentage” ait vocation à essaimer ou à disparaître aussi vite qu’elle est apparue (comme bien d’autres modes avant elle), il est du devoir des pédagogues critiques d’en dénoncer l’absurdité au nom de la pédagogie.

Au lieu de faire disparaître le professeur, coupable inavoué du crime de non-lecture des élèves, redonnons-lui au contraire toute sa place de guide et d’amoureux de la lecture.

@loysbonod


Notes

[1] Éduscol Lettres, actualités du 6 mai 2019 : « Le livre déchiré... un déchirement ? »

[2] Hélène Paumier, du Lycée pilote innovant international (LP2I) de Poitiers, a pratiqué “l’arpentage” avec Les Choses de Georges Perec en 2016 et avec Les Mémoires d’Hadrien de Marguerite Yourcenar en 2019. Elle a présenté cette pratique sur le site du collectif « Lettres vives » du 14 septembre 2019 : « Arpenter un livre »

Aurore Delubriac, professeur au collège, de 5e avec Alice au pays des merveilles en 2018 et a présenté cette pratique sur le site de l’académie de Poitiers le 29 mars 2019 ( « Le livre déchiré… un déchirement ? » ) puis dans « Le Café pédagogique » du 16 septembre 2019 ( « Arpenter les livres en les déchirant ? » )

[3] Le collectif « Lettres vives pour un autre enseignement du français », créé en 2018, « se présente comme un espace souple, réactif et horizontal. Non corporatiste, il est ouvert à tous ceux et toutes celles qui « travaillent les lettres » (professeurs des écoles, professeurs de lettres, professeurs documentalistes, universitaires, auteur.e.s, etc.) ». La naissance de ce collectif a été applaudie par des membres de l’AFEF (Association française des enseignants de français), dont le bureau est essentiellement constitué de cadres de l’Éducation nationale.

A la suite du début de polémique suscité par cette pratique, le collectif « Lettres vives » a publié une longue apologie collective le 22 septembre 2019 : « La culture en partage » .

[4] Aurore Delubriac, cf 2.

[5]

[6]

[7] Aurore Delubriac, « Café pédagogique » cf supra.

« Par ailleurs, à l’issue de la séance, certains élèves ont eu envie de lire l’intégralité du texte et ont emprunté Alice au pays des merveilles ou son adaptation en manga ».

Voir aussi :

[8] « Lettres vives » du 22 septembre 2019 : « La culture en partage »

« Il faut bien faire le constat suivant : dire à des élèves de 2nde, de 1ère, de n’importe quel âge : « Vous lirez (au choix) Phèdre, Le Rouge et le noir, etc. pour dans trois semaines et il y aura un test de lecture », nous n’y arrivons plus. Laisser certain·es élèves dans cette souffrance et cette solitude face à l’acte de lecture n’est pas envisageable pour nous. C’est pourquoi nous accompagnons l’entrée dans la lecture de multiples façons, en essayant, en tâtonnant, en adaptant des méthodes, etc., ce qui constitue aussi une grande partie de notre métier, tel que nous le concevons. Plus jamais cette injonction : « Lisez ! », sans accompagner, sans créer d’appétence pour les textes, sans recontextualiser, sans donner sens et vie à ces textes du passé pour qu’ils trouvent une nouvelle réalisation dans l’esprit des élèves. »

[9] « Lettres vives » du 22 septembre 2019 : « La culture en partage »

« Les méthodes didactiques, même les plus classiques, ont toujours découpé des œuvres pour des besoins pédagogiques, tout simplement parce qu’il est impossible de faire lire trop d’œuvres en entier à des élèves et qu’il faut parfois se contenter de leur faire lire des extraits, pour leur en donner un aperçu. Cela ne choque personne qu’on fasse lire en classe le même extrait à tout le monde alors que bien souvent, cela assèche une œuvre littéraire, vue à travers trois textes, et souvent les mêmes à travers la France. Avec l’arpentage, ce sont des extraits multiples qui sont lus, consignés, restitués et discutés par l’ensemble de la classe. »

[10] « Il s’agit de déchirer un livre en plusieurs parties correspondant au nombre de lecteurs ». Ainsi, les douze chapitres d’Alice au pays des merveilles ou les six grandes parties des Mémoires d’Hadrien se trouvent répartis aléatoirement entre trente élèves.

[11] Aurore Delubriac, « Café pédagogique » cf supra 2.

« Pendant ce temps je note trois mots au tableau : personnages, lieux, thèmes. »

[12] Aurore Delubriac, « Café pédagogique » cf supra 2.

« Interroger les participants dans l’ordre du texte s’avère plus aisé pour faire émerger rapidement le sens du texte »

[13] Sur la déshérence des pratiques de lecture dans la jeunesse, voir, par exemple, la vaste étude américaine s’étendant sur quarante ans et concernant un million d'enfants et adolescents, relayée par l'American Psychological Association (APA) : « Trends in U.S. Adolescents’ Media Use, 1976–2016: The Rise of Digital Media, the Decline of TV, and the (Near) Demise of Print » par Jean M. Twenge, Gabrielle N. Martin et Brian H. Spitzberg.

[14] Sur la déshérence des pratiques de lecture dans la jeunesse (cf supra), les trois variante de déni (souvent fondées sur l'ambiguïté des termes lire ou lecture) :

1) Les jeunes ne lisent pas moins. Par exemple, dans « Le Monde » du 24 septembre 2014 (« Les jeunes lisent toujours, mais pas des livres ») ou dans les « Cahiers pédagogiques » du 17 février 2018 (« On dit que les jeunes lisent moins : ils n’arrêtent pas de lire ! »)

« Les 15-29 ans lisent des textos, Wikipédia, des blogs… Il y a bien des façons de lire. En réalité, on n'a jamais tant lu : des textes, des publicités, des articles, etc. Mais le goût pour la lecture de littérature baisse. Ces deux types de lectures sont différents. »

2) Les jeunes ne lisent pas... mais pas plus qu’avant ! Exemple (de façon contradictoire donc) dans un « antidote » des « Cahiers pédagogiques » du 7 février 2017, par Florence Castincaud : « On peut enseigner Corneille et Harry Potter »

« Les «  jeunes d’aujourd’hui  » ne lisent pas spontanément Flaubert et Hugo, c’est entendu. Les jeunes d’hier le faisaient-ils ? »

3) Lire n'a plus grand grande importance dans le monde d'aujourd'hui/de demain. On se souvient de l'Avis de l'Académie des sciences en 2013 opposant la « culture des écrans » à la « culture du livre ». Cette troisième variante rejoint d'ailleurs souvent la première.

[15] « Lettres vives » cf supra 8.

« Il faut bien faire le constat suivant : dire à des élèves de 2nde, de 1ère, de n’importe quel âge : « Vous lirez (au choix) Phèdre, Le Rouge et le noir , etc. pour dans trois semaines et il y aura un test de lecture », nous n’y arrivons plus. Laisser certain·es élèves dans cette souffrance et cette solitude face à l’acte de lecture n’est pas envisageable pour nous. »

[16] Éduscol, La littérature à l’école, listes de référence cycle 3 (2013) . Voir également les listes de référence cycle 3 (2019).

[17] Aurore Delubriac, « Café pédagogique » cf supra 2.

« Cette méthode permet de pallier des rythmes de lecture différents. »

[18] Même ses promoteurs s'interrogent sur l'historicité de cette pratique... ce qui n'empêche pas les certitudes !

Et s'il n'y a pas de littérature sur la question, qu'importe : il suffira d'en créer !

[19]

[20] Curieuse mise en abîme : Hélène Paumier, professeur au lycée pilote innovant international (LP2i) de Poitiers, a découvert cette pratique au congrès du Cemea de 2015 avec d’autres adultes autour... du Maître ignorant de Jacques Rancière.

Bonus :