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L'"absentéisme" des enseignants
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Plusieurs décrets publiés les 9 et 12 août organisent la mise en place de la « continuité pédagogique » dans les établissements publics et privés à la rentrée. Alors que les chefs d’établissement sont en vacances, ils deviennent responsables de l’organisation des remplacements de courte durée dès la rentrée. Pour se faire, ils pourront s’appuyer sur les enseignants volontaires du Pacte qui devront accepter des créneaux d’astreinte. Mais aussi sur les assistants d’éducation (AED) chargés de « séquences pédagogiques numériques ». Le nouveau Pacte remplacement va t-il ressembler aux bonnes vieilles « heures de perm » ?
Une mise en place pilotée par les recteurs
Dans le public, le chef d’établissement « élabore, en concertation avec les équipes pédagogiques et éducatives, un plan annuel visant à assurer effectivement les heures prévues par l’emploi du temps des élèves en cas d’absences de courte durée des personnels enseignants », annonce le décret 2023-732. Ce plan doit recueillir l’avis du conseil pédagogique et surtout être présenté au conseil d’administration de l’établissement.
Le décret mobilise aussi les recteurs pour la mise en place de la pièce maitresse du Pacte imaginé par Emmanuel Macron. Les chefs d’établissement doivent transmettre le plan au recteur et rendre compte pas moins de deux fois par an de son application. Un référent académique suit tous les plans de remplacement de courte durée (dorénavant RCD).
Heures d’enseignement ou heures de perm ?
On est beaucoup moins regardant sur le contenu de ces RCD. « Les remplacements de courte durée sont prioritairement assurés sous la forme d’heures d’enseignement », dit l’article 5. « Toutefois, pour assurer effectivement les heures prévues à l’emploi du temps des élèves, des séquences pédagogiques peuvent être organisées au moyen d’outils numériques. Ces séquences pédagogiques peuvent être encadrées par des assistants d’éducation ». Le décret ne reprend pas les termes « temps d’étude accompagnée » que proposait le projet de décret, que le Café pédagogique a présenté le 14 juin. Mais ces « séquences pédagogiques numériques » encadrées par les AED y ressemblent fortement.
Les remplacements de courte durée seront des cours faits par n’importe quel enseignant (pas forcément dans la discipline du professeur non remplacé) ou ce qui ressemble à des heures de surveillance avec des assistants d’éducation. Avec le Pacte, on abandonne définitivement l’idée que l’on doit aux élèves un véritable remplacement effectué par un professeur de la discipline.
Des enseignants sous astreinte
Le décret précise aussi l’organisation des remplacements pour les volontaires du Pacte. « Ces enseignants communiquent au chef d’établissement des créneaux fixes d’au moins une heure dans la semaine, durant lesquels ils peuvent être appelés afin d’assurer un remplacement. Le plan détermine le nombre de créneaux ainsi que le délai dans lequel une heure de remplacement peut être confiée à ces enseignants », définit l’article 6. « Le chef d’établissement fait prioritairement appel à ces enseignants pour assurer des heures d’enseignement en tenant compte des créneaux communiqués. Les enseignants concernés ne peuvent refuser d’assurer un remplacement sur l’un de ces créneaux qu’avec un motif légitime d’absence en application des règles régissant les autorisations d’absence ».
Le texte rend donc très difficile de refuser un remplacement. Il définit des créneaux horaires où les volontaires du Pacte seront sous astreinte toute l’année en attente d’un remplacement. On est loin des organisations souples qui existent dans de nombreux établissements où les professeurs et la direction font au mieux pour arranger les choses.
Le remplacement étendu au privé
Un autre décret (2023-764) publié le 12 août organise la mise en place de « la continuité pédagogique » dans les établissements privés. Ce texte signe donc la mise en place du Pacte dans le privé.
Dans les établissements privés, l’Etat entend contrôler la mise en place comme dans le public avec deux comptes-rendus annuels. Par contre la mise en place dans l’établissement est plus simple. « Le chef d’établissement organise une consultation auprès de l’ensemble des maîtres sur les missions complémentaires qu’il prévoit de confier ainsi que leurs modalités de mise en œuvre au sein de l’établissement dans le respect de l’enveloppe notifiée par le recteur d’académie et en fonction des besoins du service », dit l’article 3. « Les enseignants sont informés par le chef d’établissement des suites de la consultation ».
Rappelons que la note de service publiée le 27 juillet au B.O. de l’Education nationale a précisé toutes les missions du Pacte dans l’enseignement public. Faut-il comprendre que le Pacte dans le privé se limitera au remplacement de courte durée ? A suivre…
François Jarraud
Des "séquences pédagogiques numériques" encadrées par les AED : le numérique fait décidément des merveilles !
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Rappelons que, selon la Cour des comptes ( "La gestion des absences des enseignants" , 2021), dans le secondaire respectivement 19.4% et 1,8% des types d'absences (et non des jours d'absence : la différence est importante, comme on le voit sur le graphique ci-dessous) sont liées à un stage de formation continue (au demeurant d'une faiblesse insigne, avec en moyenne deux jours par enseignant et par an, dont une partie a bien lieu hors du temps d'enseignement) ou à des réunions pédagogiques, donc une minorité des absences.Gabriel écrit: Il n'est pas concevable que des millions d'heures de formations ou de réunions pédagogiques soient proposées aux enseignants sur leur temps de cours. J'ai demandé aux recteurs et CDE de remédier à cette situation.
Ce temps de travail devrait donc être pris sur les congés scolaires : dans quel autre secteur d'activité une telle proposition pourrait-elle être faite ?
Le même rapport indique que les titulaires sur zone de remplacement étant affectés sur des postes vacants - pour cause de crise de recrutement), les remplacements ne peuvent plus être effectués (mais il en s'agit plus d'absences mais de cours non assurés). Ou que le calendrier du nouveau bac est responsable de nouvelles absences. Autant de problèmes que le ministère n'aborde pas.
Bref, désigner implicitement un bouc émissaire pour éviter de traiter les vrais problèmes que le ministre crée lui-même.
www.lemonde.fr/societe/article/2023/08/1...as_6185767_3224.html
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Comme quoi "l'absentéisme" qui accuse les enseignants permet d'éluder la responsabilité de l’État qui ne recrute plus assez d'enseignants...Vous avancez souvent le pacte enseignant comme une solution aux difficultés de remplacement. Or, il ne couvre que des absences de courte durée, là où les parents s’inquiètent surtout de celles de longue durée. Comment répondez-vous à cet enjeu ?
Cette question est centrale dans les doutes et les inquiétudes des familles quant à l’élévation du niveau de leurs enfants. Nous avons augmenté le nombre de postes de remplaçants depuis 2017, mais nous sommes dans une situation où des remplaçants sont positionnés sur des postes vacants dès la rentrée, et nous avons donc ensuite plus de mal à couvrir les remplacements. La réponse à cet enjeu, c’est l’attractivité, il faut que l’on arrive à recruter davantage. Je suis convaincu que nous pouvons y arriver.
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"l'école craque à cause [des absences]"
"Zone Interdite" du 12/11/23 avec toute une première partie importante (plus de 6') sur "l'absentéisme" des enseignants : www.6play.fr/zone-interdite-p_845/profes...-naufrage-c_13037859
Extrait entier ici : www.laviemoderne.net/images/forum_pics/2...dite_absenteisme.m4v
Après avoir donné la parole à la CPE d'un lycée accusant des enseignants d'absentéisme (et d'autres joyeusetés poujadistes puisque assurer 18 heures d'enseignement lui semble déjà honteux), la journaliste précise bien :
Après avoir donné deux exemples calamiteux, un lycée et un collège où les absences sont effectivement nombreuses (11 absents au collège, le cumul d'absences simultanées caractérisant, semble-t-il, l'absentéisme) au moment du reportage (sans contextualiser ces absences et sans chiffrer l'absentéisme sur une année), la journaliste conclut en reprenant les éléments de communication du ministère :En réalité, les profs sont un peu moins absents que la moyenne des salariés en France, mais ça, c'est une moyenne car de nombreux établissements font face à un absentéisme continu.
Chiffre dont nous avons déjà montré qu'il semble démesuré mais qui est en réalité dérisoire compte tenu du volume d'heures assurées : plus d'un demi-milliard, soit un taux d'absence de l'ordre de... 3%. Non seulement ce taux n'a rien de nouveau mais il ne peut expliquer les difficultés générales de l'école (pour la journaliste, "l'école craque à cause [des absences]").Il ne s'agit pas de cas isolés : chaque année en France, quinze millions d'heures de cours ne seraient pas assurés au collège et au lycée.
Au reste, les cours peuvent être non assurés pour de nombreuses raisons, ici mentionnées ni en général (maladie, congé de longue durée, grève, réunion, formation, sortie ou voyage scolaire : à noter qu'une partie des absences est tout simplement professionnelle) ni en particulier. Le reportage mentionne bien la crise de recrutement mais n'explique pas clairement que les postes non pourvus deviennent des postes vacants à chaque rentrée, et qu'en ce cas, les cours non assurés n'ont rien à voir avec des "absences" quelconques.
"L'absentéisme", sans doute très local et marginal, n'est jamais chiffré précisément mais le lien est explicitement fait avec le volume global des absences en France. Imaginons les ravages que ce lien produit sur l'opinion publique.
Le reportage aurait pu chiffrer cet absentéisme marginal et expliquer, quand il existe (en zone sensible), pourquoi il existe (la zone sensible). Un AED le fait d'ailleurs dans un collège, et on comprend vite en voyant les problèmes de discipline éprouvants affrontés par le malheureux AED infiltré. Le lycée du début du reportage est également de faible niveau scolaire, avec un pourcentage important d'élèves n'obtenant pas leur bac. Et les absences ne concerne pas que les titulaires dans ces établissements où les contractuels sont souvent très nombreux (ce que le reportage aurait pu étudier...) : l'affectation de contractuels dans les établissements difficiles, souvent dans des conditions hasardeuses, explique aussi une partie des absences et des cours non assurés.
Par la suite, une longue partie du reportage ( voir ici ) s'attarde d'ailleurs sur la faiblesse extrême parfois du niveau scolaire, les problèmes de discipline parfois très graves et le manque de soutien hiérarchique. Précisément : le reportage aurait pu montrer que l'absentéisme (marginal) est peut-être moins une cause de la dégradation (générale) du niveau scolaire et de la discipline en milieu scolaire qu'un simple symptôme de cette dégradation, extrême en zone sensible.
Dommage, d'une manière générale, d'accuser les enseignants en s'appuyant sur d'éventuels abus marginaux au lieu de mettre en évidence une évolution systémique : la pénibilité extrême du métier dans certains établissements ou la difficulté toujours plus grande à pourvoir les postes vacants en général, pourtant simple à chiffrer.
Confondre les effets et les causes ("l'école craque à cause [des absences]"), c'est non seulement analyser de travers mais ici - malheureusement - contribuer aux causes en mettant en cause publiquement le professionnalisme de toute une profession, et en donnant l'occasion au ministre, après le reportage, de proposer sa solution au faux problème des absences non remplacées : dégrader encore un peu plus, avec le pacte enseignant (travail supplémentaire) ou les réunions ou la formation hors du temps scolaire, les conditions de travail des enseignants.
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Dans "Le Parisien" du 21/11/23 : www.leparisien.fr/societe/bac-faute-de-p...F5TPE2ZPMHUKX3QY.php
Bac : faute de prof, ces élèves de première n’ont pas eu cours de français depuis la rentrée
Dans un lycée du Val-de-Marne, des élèves qui passent le bac français en fin d’année n’ont toujours pas eu la moindre heure d’enseignement dans cette matière. Une situation loin d’être isolée.
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