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La réforme des programmes et du socle
- Loys
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Bien sûr dans le détail l'article a quelques passages scabreux, mais l'idée est là.
Cette fonction d'exécutant qu'ont les enseignants n'est-il pas lié à leur faible rémunération ?
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Deuxième point, cette obsession de l’ « innovation », considérée comme le critère ultime de la compétence professionnelle. Cette sidération méconnaît le fait que les fondamentaux de la pédagogie sont pourtant connus depuis l’antiquité (maïeutique, imitation, répétition, progressivité du simple vers le complexe, du général vers le particulier, de la théorie vers la pratique, de la règle vers son application, etc.) et que toutes les « innovations » en la matière que sont que la résurgence cyclique des mêmes vieilles lunes, qui ne consistent souvent qu’à inverser les termes de ces mêmes fondamentaux : étude de cas particulière précédant l’étude générale (qui oblige pourtant le prof à la « contextualiser » de manière redondante si l’on veut que les élèves en comprennent la portée ), exercices d’application pratiques donnés préalablement à l’enseignement de la règle théorique pour obliger l’élève à la retrouver tout seul dans la douleur, quand il y parvient… Bref, à mettre la charrue avant les bœufs, en espérant que ça marche. Ce qui peut être le cas pour une élite, mais qui désoriente et désespère souvent la masse, quand elle ne finit pas par prendre la partie pour le tout, où l’exception pour la règle. Ce qu’on présente comme une « innovation » contemporaine a en fait presque toujours été expérimenté dans le passé sans résultats nécessairement probants, comme la fameuse pédagogie par objectifs qui remonte aux années cinquante, voire encore plus loin, et qu’on nous ressort actuellement sous le vocable de « contrat de confiance ». Sans parler de la démagogie qui consiste à dire que l’élève est tout aussi compétent pour « construire son savoir » que l’enseignant, dont on finit par se demander à quoi il sert.
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Pour une fois, l'objectif est transparent et on n'y va pas par quatre chemins : le Saint Socle.des programmes infaisables, dépassés, aux vertus formatrices douteuses et en complète contradiction avec le socle commun de connaissances et de compétences qu'est censé maîtriser chaque élève en fin de scolarité.
Et après, on se demande pourquoi le Ministère est à ce point déconnecté de la réalité...Si la France ne compte qu'un passionné de ce sujet, c'est bien cet énarque atterri un jour au bureau des lycées de la Direction générale de l'enseignement scolaire, rue de Grenelle.
Les programmes sont souvent mal faits et élaborés dans l'opacité ; pour autant, la notion de programme elle-même serait-elle obsolète ? rien ne le prouve jusqu'à présent. De l'art de jeter le bébé avec l'eau du bain...Imaginez un inspecteur général qui frappe à votre porte pour vous présenter, clés en main, les futurs programmes de telle ou telle discipline... J'étais un des rares à m'étonner de ce processus secret, de ces programmes qui arrivent ficelés, sans que l'on ne sache rien du processus qui a permis d'en arriver là, sans consultation.
Les compétences, vous dit-on !A y regarder de près, c'est le concept même de programme scolaire qui mérite aujourd'hui d'être interrogé. "La plupart des pays ont abandonné les programmes au profit des curricula", souligne Roger-François Gauthier. Difficile de traduire ce terme latin qui n'a pas droit de cité dans notre école. En fait, "c'est un ensemble plus large qu'un programme, poursuit M. Gauthier. Il inclut tous les objectifs d'un enseignement, son contenu global, mais aussi quelques indications pour guider sa mise en oeuvre, et les modalités nécessaires à son évaluation".
En tout cas, voilà des perspectives susceptibles de maintenir un système éducatif public de qualité. Une pensée authentiquement républicaine et soucieuse d'égalité !
A part cela, ce sont trois systèmes éducatifs parfaitement comparables..."En Italie, en Finlande ou au Royaume-Uni, à partir d'une trame nationale, par établissement ou par bassin d'éducation, les enseignants construisent ensemble les contenus qui, à leurs yeux, vont le mieux permettre de parvenir aux objectifs nationaux, explique M. Gauthier.
On se demande bien par ailleurs pourquoi l'argument du nombre, servi ad nauseam par nos gestionnaires, l'emporte systématiquement sur celui de la raison...
Voilà qui devient tout de suite plus clair : l'encyclopédisme, voilà l'ennemi de nos managers !C'est le seul moyen dont nous disposons pour sortir des programmes encyclopédiques que nous faisons subir à nos enfants.
Curieusement, je parie le contraire. Pour une raison simple : ce n'est pas l'enseignant qui élaborerait le programme, mais "l'équipe" des enseignants, dûment encadrée ! D'ailleurs, la confirmation ne tarde pas à venir :Ce nouveau processus d'élaboration des contenus d'enseignement éloignerait le métier d'enseignant de sa part d'"exécution" pour le faire basculer du côté des activités à haute valeur intellectuelle ajoutée.
Cette autre façon de travailler, en vigueur sur une bonne partie de la planète (...) légitime le travail en commun au sein d'un établissement ou d'un bassin d'éducation et contribue, de fait, à créer une équipe pédagogique, si difficile à faire exister en France
Autrement dit, baissons le niveau en mettant le programme à la hauteur de l'élève et non plus l'inverse. C'est tellement plus porteur politiquement, et surtout tellement moins onéreux...elle donne un coup de jeune aux enseignements - les enseignants qui pensent chaque chapitre en détail connaissent leurs élèves, pressentent ce qui va accrocher leur attention et ce qui risque de ne pas les captiver.
Pourtant, le journaliste connaît bien l'adage : pour vivre heureux, vivons cachés !Ce n'est pas toujours le cas des anonymes qui préparent aujourd'hui les enseignements au fond de leur bureau.
Ah, on y vient enfin !Aucune refondation de l'école ne pourra faire l'économie d'une refonte des savoirs enseignés. Dans une société de la connaissance, leur redonner un statut permet de relégitimer l'école par son contenu.
Reste à déterminer si le chef d'oeuvre bureaucratique que constitue la Stratégie de Lisbonne (d'où est tiré ce slogan soviétoïde) amène bien à une société de la connaissance, ou bien à un mariage mortifère entre la concurrence entre tous et l'ignorance pour chacun...
Je croyais pourtant que les notes étaient stigmatisantes et traumatisantes...Avec notre notion de moyenne à atteindre, le fameux 10 sur 20, où toutes les disciplines se compensent, on n'instille pas le goût de la connaissance en soi : on encourage les petits arrangements afin d'avoir assez de points pour passer dans la classe supérieure." Cet inspecteur rêve d'un système où un 2 sur 20 en maths ne serait pas rattrapé par un 18 en français : les disciplines seraient enfin considérées comme également formatrices et essentielles à la construction du citoyen en herbe.
Normal : il est français...Inutile de préciser que le baccalauréat à la française est aux antipodes d'une telle réforme.
Sans oublier ceux opérés par le Ministère lui-même... mais chuuuut !Bien que le brevet valide désormais les sept "piliers du socle commun de connaissances, de compétences et de culture", il ne fonctionne guère mieux : on observe tous les ans des "ajustages maison" dans les établissements pour afficher un bon taux de réussite.
C'est pourquoi on l'accordera aussi à celui qui ne sait ni lire ni compter. Au nom du droit à la réussite pour tous, dixit l'expert François Dubet !Si bien que l'on accorde l'examen à un enfant qui ne sait pas compter si sa maîtrise de la langue est correcte.
On le constate tous les jours à la vue de l'enseignement de l'histoire par "thèmes transversaux" déconnectés de la progression chronologique en lycée. Entre autres exemples...Sans présager des discussions à venir, le moment est essentiel. Comme le remarque avec une pointe d'humour l'historien de l'éducation Antoine Prost, "il reste des disciplines dans lesquelles nous jouons au porteur d'eau qui continue à aller remplir ses seaux alors qu'on lui a branché l'eau courante". L'anachronisme de certains enseignements étonne parfois le parent qui, en ouvrant un manuel, se retrouve propulsé vingt ou trente ans en arrière.
Les politiques et autres gestionnaires à la culture proverbiale ? Leurs "relais" journalistiques ?Internet devrait pourtant obliger à repenser de fond en comble quelques leçons. Que faut-il apprendre par coeur ? Que signifie "savoir compter" au XXIe siècle, à l'heure où les ordinateurs sont accessibles ? Faut-il considérer cet apprentissage comme structurant pour le cerveau, ce qu'estiment les neurosciences, ou superflu, comme la pratique de bien des classes semble le laisser entendre ? La question est essentielle, mais qui osera la poser ? Ni les parents ni les enseignants. La communauté scientifique ?
En effet, on le sait... mais pourquoi donc subitement ce ton sybillin ?Un principe pourtant entaché d'exceptions puisque, à la fin des années 1950, la conception du programme d'histoire de terminale avait été confiée à l'historien Fernand Braudel. De 1966 à 1973, l'introduction des mathématiques modernes s'était, elle, faite sous la houlette du mathématicien André Lichnerowicz. On sait ce qu'il advint de cette révolution qui pariait sur un lien direct entre apprentissages savants et apprentissages scolaires.
A supposer que ce soit la vraie raison - on tait soigneusement le rôle capital de Condorcet, mais aussi de la IIIe République, de Ferry et de Buisson, mais passons... - peut-on vraiment parler là d'un malentendu ?Cette emprise de l'éphémère sur les enseignements qui formeront les intelligences de demain s'explique par l'absence, en France, de chercheurs spécialistes de ce terrain autant que par un péché originel : les tout premiers programmes sont nés d'un malentendu.
"Au lycée, nous devons leur instauration à Napoléon Ier, dont le souci majeur était que l'Etat fasse nation, rappelle Claude Lelièvre. Par son côté national, le programme d'enseignement servait ce but essentiel.
A constater la maîtrise de la langue d'un bon tiers des élèves, il faudrait peut-être remettre au goût du jour cet objectif suranné, non ?Il fallait à l'époque diffuser (...) le français comme langue nationale.
Ben voyons. La suppression à venir de ces mêmes programmes ne s'expliquerait-elle pas par des raisons tout aussi politiques ?Pas besoin d'en dire plus pour comprendre qu'en France les programmes scolaires ont été mis en place pour servir une politique.
Après Jean Zay, Jaurès et Blum à la rescousse ?Jean Zay, ministre de l'éducation et des beaux-arts sous le Front populaire, en 1936, disait déjà qu'il fallait les considérer comme des maximums
Z'auraient pu remonter à Montaigne et sa tête bien pleine..."Pour la bonne formation de l'esprit, il n'est pas besoin de connaissances encyclopédiques, mais de connaissances en profondeur"
Bien entendu ! Même qu'on les accompagnera comme il se doit en leur concoctant tout plein de réunions. Et on finira immanquablement par les exclure du débat en faisant pondre aux mêmes experts qui assurent le pilotage du système éducatif depuis 30-40 ans un énième rapport, puis une énième "réforme" ...Sa stratégie passera évidemment par une ouverture maximale du cénacle.
Les enseignants auront leur mot à dire et bénéficieront même de temps d'enseignement banalisé pour travailler le sujet.
Conclusion : Le Monde, égal à lui-même...
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- Loys
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J'avoue que la lecture de cet article du "Monde" m'a laissé perplexe, parce que je n'en ai guère compris la direction, notamment en ce qui concerne le Bac ou Internet.
On voit en tout cas que les programmes (maximalistes) doivent s'adapter au socle (minimaliste), et non plus l'inverse. Évolution à laquelle on pouvait s'attendre : c'est le même phénomène avec les "outils" numériques dont on considère qu'ils doivent transformer l'enseignement et même ses contenus ou ses objectifs.
La distinction entre "programmes" et "curricula", mal présentée, me semble moins fondée sur la nature de l'un et l'autre que sur l'abandon du caractère national des premiers, assimilés avec une extraordinaire facilité historique à une survivance impériale. De même, le reproche adressé aux programmes (supposés "encyclopédiques") pourrait parfaitement être adressé aux curricula. En réalité, ce que propose M. Gonthier, ce sont des programmes non encyclopédiques pour les plus faibles, c'est-à-dire le plus souvent les plus défavorisés, bref des exigences au rabais. Voilà la plus belle des manières pour instituer dès le départ l'égalité des chances ! Quant à l'obsolescence supposée de "certains programmes" (dont il n'est pas donné d'exemples, ce qui est bien dommage), elle suppose une vision techno-commerciale de l'enseignement, sur le modèle des iPads annuels, amené à évoluer en permanence dans sa forme comme dans ses contenus.
Encore une fois l'adaptation de l'école à son public sonne comme un renoncement à sa mission.
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Vous croyez vraiment que les chercheurs sont stupides au point de vouloir absolument caser les derniers progrès de la recherche dans des cours de 5éme ? La plupart de ces enseignants chercheurs enseignent eux aussi, certes à des étudiants plus âgés. Ils ont une idée de "de ce qu'est une pédagogie efficace à destination de vrais élèves", et sont au courant qu'il ne faut pas mettre la charrue avant les boeufs. Vous croyez vraiment qu'ils ne savent pas ce qu'est un pré-requis ?mihailovich écrit: J'ajoute très rapidement une chose : "mieux prendre en compte la recherche" au niveau des programmes (comme le préconise l'auteur de l'article ) est l'exemple même de l'enfoncement de porte ouverte ou de la fausse bonne idée. Cela revient en effet à mettre de côté l'enseignement progressif (des notions élémentaires aux plus complexes) et à légitimer la mise en place systématique de la "charrue avant les bœufs"
Le propos de l'article était que les chercheurs ont une meilleure idée des notions qui seront utiles plus tard dans le cursus scolaire (à l'université par exemple), ce qui est utile pour structurer les programmes des années antérieures, en éliminant les reliquats inutiles du programme et en ajoutant les bases nécessaires. C'était ce qui était fait avec le conseil national des programmes : certains chercheurs avaient droit de cité.
Je me souviens de la lecture d'un livre de Sebastien Dallibard, physicien spécialiste en physique quantique, qui avait participé à ce conseil et qui est à l'origine de l'instauration de cours sur la radioactivité dans les programmes de physique au lycée. Il disait clairement que les programmes comprenaient beaucoup de choses inutiles, qui prennent la place de concepts plus formateurs. A ce titre, l'exemple de l'article sur l'étude de l’agrafeuse est particulièrement éclairant, tandis que Mr Dallibard évoquait notamment la loi d'Ohm et certains savoirs relatifs à l'électricité, qui sont justement les pires exemples de charrue placée avant les bœufs...
Mine de rien, lorsque je suis arrivé à l'université, j'ai bien vu ce que donnait la cassure des programmes entre université et secondaire. Quand je suis entré en licence Math-physique-informatique-chimie pour mes études d'informatique, les professeurs nous avaient prévenus : "Oubliez votre scolarité antérieure : vous n'avez jamais fait de mathématiques".
D'une approche basée sur la mémorisation de formules et l'automatisation de leur application à des exercices types, on passait aux exercices de démonstration et à une approche vraiment structurante, basée sur la compréhension conceptuelle et le raisonnement. Et pour utiliser cette approche, les enseignants ont passé les 6 premiers mois à reprendre l'intégralité des concepts vu en TS, pour corriger certains manques et aberrations des programmes de TS. Nombre de mes professeurs de fac se plaignaient justement du fait que les programmes de mathématiques au lycée ne suivent pas une progression convenable.
Donner la parole à ces professeurs d'université aurait justement permis de supprimer nombre de situations actuelles dans lesquelles la charrue était placée avant les bœufs ! Par exemple, en TS et en STI, on voyait la dérivée sans voir ses pré-requis, à savoir : la notion de continuité (qui n'était pas au programme). La notion de limite était abordée avec les mains d'une manière pitoyable, les programmes refusant d'aborder celle-ci de manière formelle. Et j'en passe...
Mine de rien, les fautifs de cette situation sont bien les programmes construits sans idée du contenu des formations ultérieures, sans avis des universitaires.
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- Loys
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S'agissant d'impliquer les universitaires dans la conception des programmes, l'article est prudent :
Si on admet néanmoins votre raisonnement, mewtow, vous pensez que la conception des programmes, pardon des curricula, par les professeurs du secondaire eux-mêmes, comme le suggère l'article, constituera une solution ?Un principe pourtant entaché d'exceptions puisque, à la fin des années 1950, la conception du programme d'histoire de terminale avait été confiée à l'historien Fernand Braudel. De 1966 à 1973, l'introduction des mathématiques modernes s'était, elle, faite sous la houlette du mathématicien André Lichnerowicz. On sait ce qu'il advint de cette révolution qui pariait sur un lien direct entre apprentissages savants et apprentissages scolaires.
Par ailleurs votre réflexion ne me semble pas remettre en cause le concept même de "programmes", non ?
A y regarder de près, c'est le concept même de programme scolaire qui mérite aujourd'hui d'être interrogé.
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Et je ne pense pas du tout que les curriculums résoudront quoique ce soit : les programmes ne sont pas en cause, ce sont les conditions de leur création qui sont fautives. Certes les programmes ne sont pas parfaits, mais cela n'est pas une raison pour jeter le bébé (leur caractére national) avec l'eau du bain (quelques défauts de progression). Que quelques professeurs et enseignants-chercheurs participent à la création des programmes et aient droit de cité serait une meilleure solution.
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- Loys
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Une dernière chose : votre raisonnement présuppose que tous les élèves embrassent des études universitaires. N'est-ce pas problématique en soi ?
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