Twitter : modération ou liberté d'expression ?
En décembre 2010, votre hébergeur, OVH, se mit à héberger Wikileaks. Rappelons que le site Wikileaks et ses dirigeants font l'objet de procédures judiciaires aux États-Unis, qu'on les accuse notamment d'intelligence avec l'ennemi et d'aider les terroristes, que certains politiciens américains se sont prononcés pour les mesures les plus énergiques à son égard.
Le ministre Éric Besson demanda alors que la société OVH cessât cet hébergement (on peut soupçonner qu'il agissait sous la pression du gouvernement américain). Ladite société rappela alors qu'elle n'était qu'un prestataire technique exécutant un contrat et qu'elle appliquerait les décisions de la justice française.
Auriez-vous trouvé normal que la société OVH déférât à la demande américaine ?
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Cher Loys, il me semble, encore une fois (j'éprouve ce sentiment depuis vos premières interventions au sujet de Wikipédia) que vous voyez l'ensemble de la situation en la subordonnant à vos préoccupations professionnelles. À l'appui de vos analyses juridiques, vous citez un document prodiguant des recommandations aux établissements scolaires (du secondaire) qui voudraient mettre en place des forums. Pour justifier qu'il faille mettre en place une modération généralisée de Twitter, vous citez quelques exemples de propos immatures provenant visiblement de lycéens. Pour réclamer une réforme générale du fonctionnement de Wikipédia, site qui répond aux besoins de millions d'adultes (y compris à certains des miens), vous citez des problèmes de rédaction de commentaires de texte.
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- Loys
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Nous ne sommes pas d'accord sur ce point, comme je l'ai expliqué plus haut en distinguant OVH et Twitter. Vous n'avez pas répondu à ce sujet.DM écrit: Stocker des informations pour les retransmettre, sans réaliser soi-même de contenu ni procéder à un choix éditorial, voilà ce que fait Twitter.
Quand même... Vous affirmez : "un gestionnaire de forum n'a pas actuellement d'obligation de surveillance générale". Le document qui résume la LCEN de 2004 conclut lui : "le modérateur du forum de discussion peut dans tous les cas être considéré comme complice, voire comme coauteur de l’infraction, suivant son degré d’implication dans la diffusion du message".2) Sur le sujet de la responsabilité de celui qui met en place un forum. Nulle contradiction entre ce que je dis et ce que dit le document que vous citez au sujet du droit.
Ce n'est pas ce que dit le document : "l’éditeur du site exploitant un forum de discussion s’expose à des poursuites pour les contenus illicites ou préjudiciables aux tiers, soit en qualité d’auteur principal pour les infractions de presse, soit, dans tous les cas, en qualité de complice ou de coauteur". Nulle distinction entre forum modéré ou non modéré.Je n'ai plus en tête la référence, mais, sauf erreur de ma part, la jurisprudence considère que celui qui met en place un forum non modéré est un hébergeur (car il ne fait pas de choix éditoriaux) mais peut considérer le modérateur d'un forum comme un éditeur (car, justement, il fait des choix éditoriaux), selon son degré d'implication dans la publication ou la republication du contenu incriminé.
Cela peut vous apparaître paradoxal, mais il y a justement avantage à ne pas opérer de contrôle a priori, car on est alors considéré comme un hébergeur, alors que si l'on contrôle a priori on est un éditeur (car ce qui est publié découle d'un choix conscient).
Dans les deux cas (a priori ou a posteriori), il y a responsabilité, principale ou pas.Notez comme le document que vous citez distingue bien le cas de la "modération a priori" pour l'attribution des responsabilités.
Je vous promet de relire à tête reposée, dans ce cas.Si je suis d'accord avec les éléments factuels du document que vous citez, je ne suis pas forcément d'accord avec la conclusion, qui me semble plutôt s'adresser à des établissements scolaires qu'à des entreprises ou organismes privés proposant des services destinés prioritairement aux adultes.
C'est effectivement une aporie juridique, variation sur le problème de l'imposition des grands groupes numériques.Comme vous le soulevez, le vrai problème avec Twitter est que c'est une entreprise américaine sans présence en France (il me semble cependant qu'ils vont ouvrir un bureau à Paris?) et qui donc rejette la compétence des tribunaux français. Vous pouvez bien sûr argumenter que leur service est disponible en langue française depuis la France.
Cependant, il vous faut alors vous poser d'autres questions: trouveriez-vous normal qu'un hébergeur français (OVH, Free, que sais-je) soit obligé d'appliquer toute décision d'un tribunal quelconque de tout pays du monde, y compris de pays ne partageant pas nos valeurs de liberté d'expression?
Non, mais Twitter n'est pas comparable à OVH.Auriez-vous trouvé normal que la société OVH déférât à la demande américaine ?
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- Loys
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- Messages : 18149
Mon billet d'origine se limitait à la pertinence des usages "pédagogiques" de Twitter. Quoi qu'en dise Typhon qui me croit mûr pour une carrière de journaliste, je n'aurais pas le toupet d'écrire un billet sur une question qui échappe à ma toute petite compétence (vérifiez en observant les sujets traités sur La Vie moderne), d'où ces discussions (très intéressantes de mon point de vue) sur le forum uniquement.DM écrit: Cher Loys, il me semble, encore une fois (j'éprouve ce sentiment depuis vos premières interventions au sujet de Wikipédia) que vous voyez l'ensemble de la situation en la subordonnant à vos préoccupations professionnelles.
Ce document me semble recevable. Si vous le contestez, il vous faut étayer.À l'appui de vos analyses juridiques, vous citez un document prodiguant des recommandations aux établissements scolaires (du secondaire) qui voudraient mettre en place des forums.
Le problème s'est posé - à plusieurs reprises déjà - quand il s'est agi de dizaines de milliers de tweets haineux.Pour justifier qu'il faille mettre en place une modération généralisée de Twitter, vous citez quelques exemples de propos immatures provenant visiblement de lycéens.
Ici vous vous trompez encore du tout au tout. Le commentaire de texte n'a pas grand chose à voir avec une recherche documentaire et dans mon billet j'ai pratiquement pardonné aux élèves qui avait reproduit des éléments erronés de Wikipédia en parlant d'erreur vénielle.Pour réclamer une réforme générale du fonctionnement de Wikipédia, site qui répond aux besoins de millions d'adultes (y compris à certains des miens), vous citez des problèmes de rédaction de commentaires de texte.
Ma réflexion sur Wikipédia est davantage issu des critiques dont moi (mais à la rigueur on s'en moque) mais surtout une certaine conception de l'école avons pu faire l'objet de la part des wikipédiens (entre autres).
Je l'avais bien compris.Afin de ne pas être mal compris: mon paragraphe précédent n'est absolument pas une attaque personnelle.
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www.gazette-sante-social.fr/juri ... -7117.html
qui est il me semble plus complet et précis que votre guide, et cite la jurisprudence.
Je vous rappelle également qu'en Novembre 2007, la qualité d'hébergeur avait été reconnue à Wikimedia Foundation par le Tribunal de grande instance de Paris statuant en référé. On ne lui a imputé aucune obligation de surveillance générale des articles qu'elle héberge.
Votre guide est évidemment recevable, mais convenez que sur les points juridiques, il est bien moins précis que le document cité ci-dessus. Surtout, les recommandations qu'il formule à destination d'établissements scolaires publics accueillant des mineurs ne sont pas forcément pertinentes à l'égard d'entreprises privées proposant un service destiné en premier lieu aux adultes. Un établissement scolaire a des obligations supplémentaires qui ne découlent pas du droit civil ou pénal. Par exemple, un parent peut attendre d'un lycée qu'il propose un enseignement de qualité, mais ne peut pas pour autant poursuivre le lycée s'il estime qu'un cours est mauvais. Un parent peut raisonnablement s'attendre à ce qu'un forum mis en place à destination de mineurs par un établissement scolaire soit modéré.
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- Loys
- Auteur du sujet
- Messages : 18149
Je vais lire ça.DM écrit: Au sujet de la qualité d'hébergeur ou d'éditeur et des forums, je vous renvoie à ce document:
www.gazette-sante-social.fr/juri ... -7117.html
qui est il me semble plus complet et précis que votre guide, et cite la jurisprudence.
J'en parlais dans mon dossier sur Wikipédia.Je vous rappelle également qu'en Novembre 2007, la qualité d'hébergeur avait été reconnue à Wikimedia Foundation par le Tribunal de grande instance de Paris statuant en référé. On ne lui a imputé aucune obligation de surveillance générale des articles qu'elle héberge.
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La loi n° 2004-575 organise un système de responsabilité bicéphale des sites Internet, qui est fonction de la qualification attribuée. Si le site est à l’origine du contenu litigieux, il est considéré comme un « éditeur » et se trouve responsable de plein droit des propos mis en ligne. Dans le cas contraire, il est considéré comme un « hébergeur » et sa responsabilité n’est engagée qu’à défaut d’avoir retiré le contenu litigieux, après la mise en demeure de l’intéressé.
Actuellement, de nombreux sites hébergeurs (notamment des blogs ou des forums) vérifient leurs contenus, alors qu’ils ne sont débiteurs d’aucune obligation légale de surveillance, comme l’a confirmé le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris, notamment dans l’ordonnance du 29 octobre 2007 (n° RG 07 / 58288), ou la cour d’appel de Versailles, dans un arrêt du 12 décembre 2007 (n° RG 07 / 01120). Mais ce contrôle risque de disparaître.
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Considérés ainsi comme hébergeurs par les juges, les sites participatifs, les blogs et les sites relayant des flux RSS, sur lesquels sont très souvent tenus des propos racistes, ne souffriront aucune action mettant en jeu leur responsabilité pénale. Ils ont tout intérêt à ne plus exercer aucun contrôle sur le contenu diffusé, afin de profiter de cette responsabilité allégée, au détriment de la répression des propos racistes.[/quote]
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Twitter, c'est un peu comme le système Presstalis + kiosquiers. Les kiosquiers choisissent de mettre tel ou tel magazine en devanture et d'attirer ainsi le chaland, y compris par des titres racoleurs (j'aimerais toutefois savoir qui décide et fournit les affiches publicitaires — est-ce Presstalis ?). Ils gagnent de l'argent sur les ventes. Ils ne sont pourtant pas responsables des propos tenus dans les titres qu'ils vendent.
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