"Jeu-vidéo : entrons dans une nouvelle ère culturelle"

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17 Sep 2023 08:27 - 17 Sep 2023 08:28 #24689 par Loys
Après avoir mis en cause les jeux vidéo à la suite des émeutes 2023, le président se défend le 16/09/23 :

Les jeux vidéo sont une culture, un divertissement, un spectacle !  Ils sont un terrain d’expérimentation artistique, un espace d’apprentissage fascinant, mêlant tous les arts. Jouer, c’est écouter de la musique, plonger dans des récits, ressentir des émotions, voyager dans le temps. C’est explorer des univers visuels qui écrivent un nouveau chapitre dans l’histoire de l’art.
[...]
Les jeux vidéo font partie intégrante de la France. Assassin’s Creed ou encore Dofus sont des créations de talents français. Nous en sommes fiers et nous en facilitons l’accès avec le Pass Culture.


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Dernière édition: 17 Sep 2023 08:28 par Loys.

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17 Oct 2024 10:56 - 17 Oct 2024 14:43 #25256 par Loys
Bonne nouvelle : Les joueurs de jeu vidéo français lisent plus que la moyenne !

Les médias raffolent des paradoxes et l'information est rapportée le 16/10/24 sur "France Inter" : "Les joueurs de jeu vidéo français sortent plus, lisent plus, et font plus de sport que la moyenne"

Attention : Spoiler !


Pour remonter à la source : l'étude du SELL "L'essentiel du jeu vidéo - Les Français et le jeu vidéo" (octobre 2024)

Commençons par rappeler - ce que ne fait pas "France Inter" - que le SELL est le syndicat des éditeurs de logiciels de loisirs. Cette étude promouvant les vertus du jeu vidéo émane donc de l'industrie du jeu vidéo, "une industrie responsable", titre le rapport. On y apprend que ce secteur est un loisir numérique populaire et social, qu'il est considéré par une grande ou très grande majorité de Français comme "innovant", que "les jeux vidéos sont créés par de vrais artistes", que c'est "un loisir pour toute la famille", que c'est "une activité positive", qu'il "permet de développer des compétences ou savoir-faire" : n'en jetez plus !

Dommage que certaines questions n'aient pas été posées autrement, ou n'aient simplement pas été posées.

Le sondage - en ligne - porte sur un échantillon en apparence conséquent de 4 005 individus âgés de 10 à 80 ans, représentatif de la population française âgée de 10 à 80 ans. Mais chaque part des sondés concerne beaucoup moins d'individus, ce qui permet de relativiser la valeur des questions relatives à chaque part spécifique : les 15-24 ans par exemple, environ 13% de la population, sont représentés par environ 500 sondés seulement dans le sondage, ce qui occasionnent pour chaque question les concernant spécifiquement un intervalle de confiance d'environ +/-4%.

Le secteur revendique 38,3 millions de joueurs de 10 ans et plus (soit environ 61% de l'échantillon représentatif). Mais est considéré comme "joueur" toute personne qui déclare jouer une fois dans l'année aux jeux vidéo. Les joueurs qui jouent au moins une fois par semaine sont dix millions de moins, et ceux qui jouent une fois par jour sont 19 millions (soit environ 30% de l'échantillon représentatif). 60% des 6,2 millions d'enfants joueurs (10-17 ans) jouent tous les jours ou presque (35%) ou plusieurs fois par jour (25%).

Le rapport indique le temps hebdomadaire moyen (5h52), mais pas le temps hebdomadaire moyen des enfants (10-17 ans) et à plus forte raison de ceux qui jouent plusieurs fois par jours, et sont - n'en doutons pas - de grands lecteurs ! L'étude ne se penche pas non plus sur des pratiques culturelles qui sont socialement différenciées, au désavantage des plus défavorisés.

L'enquête cherche à démontrer que tous les âges sont concernés, mais seulement 43% des seniors (65 ans et plus) jouent aux jeu vidéo, et en réalité 28% seulement y jouent à un rythme hebdomadaire ou plus.

Passons sur le jeu vidéo "vecteur de sociabilité" et permettant de créer "du lien social" quand ce lien ne se traduit que par des rencontres ponctuelles ou le plus souvent en ligne uniquement. Que dit en effet cette "sociabilité" sur les relations des individus avec leur environnement familial ou amical immédiat ?

Le point le plus important arrive ensuite : l'étude compare les pratiques des joueurs réguliers et des Français en général.

Il est notamment indiqué que les joueurs réguliers (au moins une fois par semaine) lisent une fois par mois à 71% (contre 66% pour les Français en général).

Citons l'éditorial de James Rebours, président du SELL :

Notre étude permet de déconstruire parfois certaines idées fausses. Elle révèle par exemple que ces joueurs engagés ne sont pas plus sédentaires mais au contraire plus ouverts que la moyenne des Français aux activités culturelles et sportives.

On pourrait commencer par dire qu'un joueur jouant une fois par semaine (sans considération de durée par ailleurs) peut difficilement être considéré comme l'image du joueur que souhaite déconstruire l'étude. A ce compte, quasiment tous les enfants, par exemple, peuvent être considérés comme des joueurs.

Plus intéressant aurait été de comparer les pratiques culturelles de ceux qui jouent tous les jours ou plusieurs fois par jour...

Ajoutons que, d'après l'étude elle-même, les plus jeunes sont plus nombreux à pratiquer les jeux vidéo : seulement 28% des 65 ans et plus sont des joueurs réguliers contre 77% des 15-24 ans. Faut-il s'étonner dès lors d'écarts de pratiques imputables moins au régime de vie de "joueurs" (qui peuvent être occasionnels) qu'à leur âge, tout simplement ?

S'agissant spécifiquement de la lecture, il n'est pas impossible qu'une part de l'écart s'explique par une grande part de publics... scolaires ou étudiants, et à qui la lecture est imposée.

Mais surtout il n'est pas dit ce qui est lu. Être "lecteur", tout comme être "joueur", reste donc très évasif, d'autant que le temps hebdomadaire consacré à la lecture n'est pas renseigné et que la fréquence de lecture est... "au moins une fois par mois". Les plus jeunes, qui jouent davantage aux jeux vidéo, lisent essentiellement des bandes-dessinées ou des mangas.

L'étude évoque, dans la seconde partie, l'existence des contrôles parentaux ou de "Pédagojeux" pour transmettre "les clefs d'une pratique sereine" et "aborder les points e vigilance", ce qui semble étonnant pour une pratique culturelle si parée de toutes les vertus.

Il est facile de voir comment, avec son choix de questions orientées et ses indicateurs brouillés, cette étude entre dans une logique de légitimation du jeu vidéo pour servir au mieux le développement commercial du secteur.

Rien sur des pratiques socialement différenciées et/ou sur des pratiques excessives : la notion floue de "joueur" associée à des pratiques plus vertueuses se veut très rassurante.
Dernière édition: 17 Oct 2024 14:43 par Loys.

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