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Inégalités... et discriminations "scolaires"
- Loys
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- considérer comme "bons" les 25% qui ont eu les meilleures notes laissent penser que les autres sont "mauvais", même si une grande majorité a obtenu son brevet. C'est en outre faire l'impasse sur un phénomène que bon nombres de collègues de 3e décrivent : les élèves qui ayant obtenu leur brevet par le seul contrôle continu ne se foulent pas pour réussir des épreuves finales qu'ils estiment sans enjeu.
Les meilleures notes au brevet mesurent alors moins un niveau scolaire qu'une stratégie sociale : par exemple la pression des parents qui veulent que leur enfant réussissent au brevet par principe, par émulation, pour montrer de quoi ils sont capables, etc. Dans ce sens, il y aura sans nul doute corrélation avec la répartition par CSP+, ce qui fait que la mesure des ségrégations scolaires et sociales n'est pas indépendante l'une de l'autre.
De ce fait, il aurait été beaucoup plus intéressant d'étudier la répartition des élèves n'ayant pas obtenu leur brevet et voir s'ils se concentrent ou non dans les mêmes établissements et les mêmes classes..
- l'autre point - d'ailleurs soulevé dans l'étude - est de mesurer un parcours (l'étude a suivi la cohorte entrée en 6e en 2007) à partir d'une mesure fixe. Pour être plus clair, il faut bien comprendre (c'est pas forcément évident si on n'y fait pas attention) que la ségrégation dans les classes de 6e a été mesurée par leur réussite au brevet 4 ans plus tard. Cela postule une fixité des niveaux scolaires qui devrait être démontrée et qui surtout, si elle existe, n'est pas non plus indépendante des situations sociales.
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- Loys
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Dans le "Café pédagogique" du 25/08/15 : "Des charters schools à la française ?"
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- Loys
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Le truc a été fait à la va-vite et n'est pas du tout fouillé. On y trouve les poncifs habituels et notamment les attaques récurrentes et insidieuses sur les enseignants eux-mêmes...
"les deux tiers des enfants d'enseignants ou de cadres obtiennent un diplôme supérieur contre seulement 12% d'enfants d'ouvriers non qualifiés" (je reviens plus bas sur ce point).
"à commencer par les enseignants, deux fois plus nombreux à scolariser leurs enfants dans un collège public autre que celui de leur secteur"
""les bonnes raisons" qu'ont les familles de fuir certains établissements, ceux ou pas un enseignant n'imaginerait scolariser son enfant".
J'aimerai bien savoir d'où viennent les chiffres sur la scolarisation des enfants d'enseignant. Je ne conteste pas la réalité de la pratique mais je pense que les raisons sont bien plus équivoques que l'évitement social. Ainsi la volonté de mettre son enfant dans un collège non-sectorisé peut aussi relever de raisons pratiques. Ensuite si des enseignants "fuient" leur collège de secteur, c'est au moins qu'ils vivent dans ce secteur... voire y travaillent.
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Une note de la DEPP (n°25, août 2015) : "Acquis des élèves au collège : les écarts se renforcent entre la sixième et la troisième en fonction de l'origine sociale et culturelle"
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Dans "Le Figaro" : www.lefigaro.fr/actualite-france/2015/08...ecarts-scolaires.php
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On peut conclure, comme fait le ministère, qu'il faut réformer le collège... ou au contraire que c'est déjà trop tard. Si la réforme n'est pas efficace (comme on peut le craindre) pour les élèves les plus en difficultés, les écarts se creuseront encore davantage....le niveau de l’élève à l’entrée au collège reste un élément décisif, ce qui signifie que l’avenir scolaire de l’enfant est fortement déterminé dès la sixième.
C'est-à-dire qu'il n'y a pas UN collège, mais deux types de collèges : le public et le privé (plus d'un élève sur cinq), qui recrute sur dossier scolaire. Mais curieusement la note n'en parle pas. Pourtant la ségrégation est encore plus marquée au collège qu'en primaire....le collège ne parvient pas à atténuer les inégalités sociales
Rien d'étonnant sur l'importance déterminante des habitudes de lecture : www.laviemoderne.net/veille/les-nouveaux...nesse?start=60#14478
Mais fournir des produits de divertissement comme les tablettes ne produira pas les mêmes résultats.À l’inverse, le temps passé devant la télévision est lié négativement à la réussite, les perfor- mances des élèves déclinant à mesure que la fréquence d’écoute augmente.
Sur la mémoire encyclopédique, cette remarque frappante :
Des écarts faciles à rattraper !Le recouvrement partiel des deux distributions de scores indique que plus d’un quart des élèves de sixième maîtrise déjà le vocabulaire scolaire qu'un tiers des élèves de troisième est seulement en voie d'acquérir.
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www.cnesco.fr/rentree-2015-comment-les-c...les-ete-constituees/84 % des chefs d’établissement jugent que les classes de niveau ne sont pas pertinentes.
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- Dans "L'Humanité" du 27/08/15 : "Les enseignants sont comme écrasés par l'imaginaire d'un âge d'or"
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- Dans "Libération" du 30/08/15 : "François Dubet «Ce sont ceux qui tirent parti des inégalités qui résistent au changement»" (abonnés)
- Sur "France Inter" dans "Le Téléphone sonne" du 31/08/15 : "Doit-on changer l'école ?"
- Dans "Telerama" du 31/08/15 : "Ecole : ma mixité va craquer"
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- Dans "Les Echos" du 1/09/15 par Daniel Fortin : "Mais non, mais non, l'école n'est pas finie"
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- Sur "France Culture" du 6/09/15 : débat "La politique peut-elle changer l'école?"
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La ségrégation résidentielle et le financement de l’enseignement privé ségrégatif ?Sinon, comment expliquer les records d'injustice que bat la France ? Notre système éducatif est l'un des plus inégalitaires de l'OCDE. Rares sont les pays développés où les résultats scolaires des élèves sont aussi fortement déterminés par leur origine sociale. Oui, cette prouesse froisse sévèrement notre ego républicain. Elle laisse pantois, aussi : qu'a-t-on fait pour produire cela ?
Pas dans un collège sur quatre.Non seulement notre école est largement gratuite...
Parce que les enseignants savent ce qu'il faut faire et qu'on devrait précisément les écouter davantage au lieu de les accuser ?...mais depuis trente ans, la politique d'éducation prioritaire est censée redoubler d'efforts dans les territoires où se concentrent les difficultés. Pourtant les faits sont là : les deux tiers des enfants d'enseignants ou de cadres obtiennent un diplôme supérieur, contre seulement 12 % d'enfants d'ouvriers non qualifiés.
Non, moins de 60.000...Et chaque année cent quarante mille élèves, très majoritairement de milieu modeste, sortent du système sans diplôme du tout.
Un système à plusieurs vitesses
Or si les dés sont pipés, les perdants le savent. « Rien ne serait pire pour l'unité d'une classe d'âge et sa capacité à vivre ensemble qu'une dérive irrépressible et irréversible des exigences et des contenus scolaires », mettent en garde les sociologues François Dubet et Marie Duru-Bellat dans un petit livre percutant (1).
Curieuse nécessité qui s’accommode d'une ségrégation institutionnelle.Cela reviendrait à entériner, de façon plus ou moins tacite, un système à plusieurs vitesses selon les populations, principe difficilement défendable et par conséquent choquant. La mixité sociale ne constitue donc pas un choix parmi d'autres mais une nécessité. C'est la condition sine qua non d'une école plus juste, mais aussi plus performante.
Pas d'enseignement privé en Finlande. La Norvège et la Suède ne sont pas des modèles, si l'on en croit PISA.Le meilleur moyen de relever le niveau général ? Toutes les études sont formelles, il faut mélanger les élèves, comme le font les Scandinaves...
Il n'y a pas de "compétition" au collège......ou les Canadiens : les plus faibles éléments d'une classe sont bien davantage tirés vers le haut que les plus forts ne le sont vers le bas. Il s'agit également de former les enseignants à l'art délicat d'œuvrer dans des salles disparates, en favorisant la collaboration plutôt que la compétition.
Et où les trouve-t-on majoritairement ?“Chacun de nous préfère l'inégalité dès qu'il s'agit de ses propres enfants”
Si tout est si clair, où est le problème ? Il y a que les parents sont des animaux un rien ambivalents. « Même si nous sommes collectivement très attachés à l'égalité scolaire, chacun de nous préfère l'inégalité dès qu'il s'agit de ses propres enfants », expliquent Dubet et Duru-Bellat. Parce que nous « stressons » terriblement. C'est la crise, bon sang ! Les cancres d'aujourd'hui pourraient bien faire les chômeurs de demain, pas question de risquer l'avenir du rejeton au nom de la cohésion nationale. Résultat, une proportion toujours plus importante de parents remuent ciel et terre pour inscrire leur progéniture dans la « bonne » école. Pas forcément celle flambant neuve ou dotée d'une cantine quatre étoiles, mais assurément celle qui accueille le « bon » type d'élèves, c'est-à-dire des enfants irradiés à la maison d'ondes culturellement positives, jugées propices à l'apprentissage.
Qu'a donc fait l'Etat pour lutter contre la ségrégation résidentielle, qui n'est pas du ressort de l'Ecole ?Rectifions : toute la France n'est pas engagée dans une quête effrénée de l'établissement socialement compatible. Dans les beaux quartiers, où l'on vit en vase clos, la carte scolaire — qui contraint les élèves à intégrer l'école de leur secteur — préserve de toute « invasion barbare ». A l'autre bout du spectre, dans les « ghettos », cet « apartheid territorial, social, ethnique », selon les mots de Manuel Valls — lors des vœux à la presse en janvier dernier —, on croit encore au mythe républicain d'une même école pour tous, vouée à élever les plus « méritants ».
Avec plus d'un élève sur cinq, la ségrégation de l'enseignement privé est d'autant plus intolérable qu'elle est financée par l'EtatMais surtout on maîtrise mal les combines qui permettent de contourner les règles.
Des stratégies d'évitement diverses : mais il serait facile de contrer l'une d'entre elle.En milieu rural, enfin, lorsqu'un seul établissement se profile à trente kilomètres à la ronde, on fait avec.
Tiraillés par un dilemme
C'est dans les territoires où se côtoient ouvriers, profs et cadres que la question de la mixité sociale se pose le plus. Les classes moyennes supérieures sont passées maîtres en stratégies d'évitement : déclaration d'une fausse adresse ou achat d'un studio près de l'école convoitée, inscription dans le privé ou, plus radical, déménagement de toute la famille.
Il faut dire qu'inscrire son enfant dans l'établissement où l'on enseigne... Et par quel passe-droit ?« Près d'un enfant sur trois échappe au collège public de son quartier, constate Arnaud Parienty, professeur et auteur d'un ouvrage sur les dérives de notre système éducatif (2) . Et ces moyennes sont largement dépassées dans certains endroits. La ville de Montreuil, qui jouxte Paris à l'est, ne compte par exemple que vingt-deux classes de seconde, alors que cette commune de cent mille habitants en recenserait le double si tous les jeunes y étaient scolarisés. Où sont passés les élèves manquants ? » Dans la capitale, sans doute, qui offre une palette de collèges et de lycées autrement fréquentés.
Mais comment en vouloir à ces parents « resquilleurs » ? Comme l'explique la sociologue Agnès Van Zanten, nombreux sont ceux tiraillés par ce dilemme : « soit je suis un bon parent, je privilégie la réussite individuelle de mon enfant en le plaçant dans le meilleur établissement possible ; soit je suis un bon citoyen, je le mets dans l'école du quartier quitte à sacrifier sa scolarité ». Dramatisent-ils quelque peu la situation ? Reste que leur choix est vite fait — à commencer par les enseignants, deux fois plus nombreux à scolariser leurs enfants dans un collège public autre que celui de leur secteur.
Le lycée n'est pas le collège...« Ils sont aidés par le palmarès des lycées, publié chaque année par le ministère en mars, note Arnaud Parienty. Que Le Figaro traduit de manière limpide par ce titre : "Où faut-il habiter pour réussir à l'école ?" »
Un peu quand même puisque l'exigence est l'ennemi.Qu'il est ambigu, ce système éducatif qui d'un côté classe les établissements, provoquant la fuite des meilleurs éléments des zones où ils sont précieux ; et qui de l'autre appelle de ses vœux la mixité sociale. Comme s'il n'avait jamais vraiment tranché entre ses deux vocations : développer les talents des plus doués et offrir un bon niveau d'éducation à toutes ses ouailles. « Le problème n'est pas que l'école ait le souci, légitime, de former une élite, affirment Dubet et Duru-Bellat...
En quoi "disqualifie"-t-elle plus que les parents ou la société ? Au contraire, de nombreux enseignants sont attentifs à valoriser des compétences qui ne sont pas nécessairement académiques....mais qu'elle oriente tout son fonctionnement en ce sens, en disqualifiant ceux qui n'excellent pas dans les disciplines qu'elle privilégie. »
Bel aveu !Apprentissage au rabais ?
C'est pourtant pour favoriser la réussite du plus grand nombre que dans le cadre de la réforme du collège (appliquée à la rentrée 2016) Najat Vallaud-Belkacem, la ministre de l'Education, a souhaité supprimer les sections bilangues, européennes, et les options latin et grec.
Ces chiffres sont totalement faux. Le latin n'a rien d'une "filière" : 81% des latinites ne sont pas regroupés dans une classe de latinistes, avec le grec ancien, le latin est proposé à tous les élèves dans 93% des établissements défavorisés. Il exige du travail supplémentaire et des heures de cours en plus : en quoi cette exigence est-elle cachée ?Près de la moitié des collèges de France proposent l'une ou l'autre de ces « filières cachées », comme disent les chercheurs.
Parler de "classes" de latinistes, c'est déjà se tromper. Et elles sont "répandues" partout.« Ces classes porteuses de ségrégation sont particulièrement répandues parmi les écoles publiques ayant un établissement privé parmi leurs deux plus proches concurrents », souligne un rapport (3) de l'Institut des politiques publiques sur la mixité en Ile-de-France.
On note que le problème est bien la présence du privé : mais on en propose de traiter que la question des options...
Le CNESCO l'a dit lui-même : la ségrégation intra-établissement est "faible au collège". Parler de classes de niveaux et les associer de plus aux options de langues anciennes est une aberration.Alors que faire : conserver ces classes de niveau...
Dans l'esprit de "Télérama", la mixité doit se régler sans tenir compte du privé... Au moins, il y a un peu de réalisme dans les conséquences envisagées.... une école à l'intérieur de l'école certes, mais qui a l'avantage de retenir les meilleurs éléments ? Ou jouer la carte de la mixité, avec le risque de provoquer un exode massif vers le privé ?
Mais non : un enseignement de "langues et cultures de l'antiquité" sur un mini-horaire, pendant une seule année, avec un projet pratique, sans langue et dispensé par n'importe quele professeur est une bonne nouvelle pour les langues anciennes !Le choix est d'autant plus cornélien qu'il est explosif. La suppression des options latin et grec, en particulier, échauffe furieusement les esprits, et bien au-delà des cercles conservateurs. Pourquoi diable, s'écrie-t-on, amputer la jeunesse de cette part de nous-même, de cet héritage antique qui fonde la langue française, notre identité européenne, et nous forme à l'exercice de la critique et à la relativité des moeurs ? La ministre a beau assurer que, avantage de sa réforme, les langues et les cultures de l'Antiquité seront désormais enseignées à tous les élèves, nombreux sont ceux qui n'y voient qu'un apprentissage au rabais.
Incitons, incitons...Convaincre plutôt que de contraindre
Quoi qu'il en soit, il faut agir, et avec force, avertit un rapport (4) du Conseil national d'évaluation du système scolaire (Cnesco) publié en juin dernier. Dénonçant « un quasi-immobilisme des politiques publiques sur la mixité sociale à l'école en France depuis quarante ans », il préconise en particulier : de réajuster la carte scolaire dans certains territoires, de former les enseignants aux classes hétérogènes, d'inciter le privé sous contrat à accueillir un public plus divers...
Le problème date de 1959 et de la loi Debré.
Voilà. Un beau renoncement sociologique : ne rouvrons pas la guerre scolaire !Il assure par ailleurs : « une politique de mixité sociale ne fonctionne que si les parents y adhèrent ».
De fait, n'est-il pas vain de vouloir contraindre le choix de ceux qui vivent comme une injustice cette injonction de scolariser leurs enfants dans une école qu'ils jugent n'être « pas à la hauteur » ? Dubet et Duru-Bellat suggèrent de concentrer les efforts sur l'offre scolaire.
Et "les efforts sur l'offre scolaire", c'est donc de la mutiler.
C'est exactement l'inverse qui va se produire.« Assurer une égalité de la qualité de la scolarisation et des chances de réussir dans tous les établissements est la meilleure manière de tuer dans l'œuf les "bonnes raisons" qu'ont les familles de fuir certains établissements, ceux où pas un enseignant n'imaginerait scolariser son enfant. »
Là aussi il y aurait beaucoup à dire, notamment sur l'expérience Clisthène.Facile à dire ? Des établissements expérimentaux (lire notre reportage) montrent peut-être le chemin à suivre.
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