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L’orthographe à l'école
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Visioconférence de coordination pour la correction de l'épreuve de HGGSP du bac :
"Nous sommes dans l'école inclusive et en effet nous ne sommes pas professeurs de français aussi il ne nous appartient pas de sanctionner une orthographe hasardeuse même si toutefois il faut valoriser une copie à la très bonne expression".
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« Il y a que la France qui fait des dictées ! C’est une sorte de délire national » ✍️ @neveux_julie , membre du collectif « Les Linguistes atterrées », remet les points sur les i chez #Quotidien
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Le ministre de l'Éducation nationale souhaite que les fautes de français soient notées plus sévèrement lors de l'examen du baccalauréat. Selon lui, les copies des lycéens sont aujourd'hui truffées d'erreurs d'orthographe.
Le ministre de l'Éducation nationale part à la chasse aux fautes d'orthographe. Pap Ndiaye s'est dit favorable ce dimanche à une prise en compte des fautes de français dans la notation des copies du bac dans les années à venir.
Évoquant des copies du baccalauréat souvent truffées de fautes, il souhaite « l'introduction de critères formels dans les épreuves à propos du niveau de français », lors d'une interview sur Radio J. « A partir d'un certain niveau de langue trop problématique », quelle que soit la qualité de la copie, celle-ci ne pourrait ainsi ne pas dépasser une certaine note.
Concrètement, il s'agirait de « points en moins si on fait des fautes de français ». « Mais ça n'est possible que si on a travaillé à ce que les élèves ne fassent plus de fautes », a dit Pap Ndiaye, annonçant un « immense chantier qui va de l'école primaire jusqu'au bac pour qu'ils écrivent correctement ».
Mais éternel relativisme orthographique des commentateurs, universitaires compris :
Christian Delporte écrit: J’ai connu des étudiants maîtrisant l’orthographe mais incapables de raisonner et des étudiants multipliant les fautes mais se distinguant par la puissance de leur raisonnement.
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Commençons par rappeler que M. Benzitoun, maitre de conférences en linguistique française, ne corrige pas de copies de baccalauréat et n'enseigne pas dans le secondaire.
Commentons donc sa réflexion idéologique, bien éloignée de toute connaissance du niveau de nos élèves.
Le niveau en langue française ne se résume pas à l'orthographe, mais difficile de nier que l'orthographe lexicale et grammaticale en constitue la plus grande part...Sanctionner les fautes au bac : «Le niveau en langue française ne se résume pas à l’orthographe»
On voit bien le sophisme tendu ici : personne ne propose, en effet, de "résumer" l'évaluation au baccalauréat à l'orthographe, ni même d'évaluer le niveau de langue française au baccalauréat : il s'agit de les prendre en compte puisqu'ils ne le sont pas. On se souvient des consignes en spécialité HGGSP 2023 (cf supra dans ce fil) : "Nous sommes dans l'école inclusive et en effet nous ne sommes pas professeurs de français aussi il ne nous appartient pas de sanctionner une orthographe hasardeuse").
Le niveau de langue ou l'orthographe ne sont pas même pris en compte au bac de français qui, selon les consignes 2022, doit pénaliser la logique défaillante plutôt que l'orthographe défaillante et s'attacher finalement à "l'intelligibilité" des copies (sic) !
Bref, affirmer que le niveau en langue française "ne se résume pas à l'orthographe"... c'est donc refuser que l'orthographe soit prise en compte dans l'évaluation au baccalauréat.
Souvenons-nous également que M. Benzitoun plaide pour que les erreurs orthographiques soient considérées comme des "variations" (cf sa première tribune).
Il ne s'agit donc pas d'améliorer l'enseignement de la langue, mais de le refondre !Pour Christophe Benzitoun, spécialiste de la langue française et membre de l’association Tract des linguistes, sanctionner les copies des élèves qui commettent des fautes, comme a dit le vouloir le ministre de l’Education nationale dimanche, n’est pas la solution. Il appelle à une refonte de l’enseignement de la langue.
Pour Christophe Benzitoun, maître de conférences en linguistique française à l’université de Lorraine et représentant de l’association Tract des linguistes – qui regroupe plusieurs spécialistes de la langue française –, opter pour la répression plutôt que pour la prévention n’est pas la solution.
Considérer que l'évaluation relève de la "répression", c'est déjà revendiquer une forme d'idéologie scolaire.
Dans un communiqué, le collectif juge illusoire de penser que «les causes multiples de la baisse des performances en orthographe pourraient trouver une solution facile et rapide».
Personne ne l'a pensé. Le ministre a d'ailleurs évoqué un travail depuis l'école primaire...
Les "causes multiples" ne sont pas indiquées.
Il s'agit donc bien de renoncer à enseigner la langue.«Il est inutile de faire croire qu’on peut revenir au temps où on consacrait une large part du temps scolaire uniquement à l’orthographe», pointent les signataires.
Sanctionner les fautes d’orthographe dans les copies du baccalauréat est-elle une bonne solution ?
C’est contre-productif et inutile. Ce type de mesures ne permettent en aucun cas de résoudre la baisse de niveau en orthographe. On ne sanctionne pas un jeune pour le pousser à apprendre.
Un examen ne vise pas à apprendre mais à évaluer ce qui a été appris. Dans toutes les disciplines, d'ailleurs, les erreurs sont sanctionnées, pardon : réprimées...
Au reste, annoncer explicitement les attendus permettrait aux élèves d'être davantage attentifs à leur orthographe. Le renoncement institutionnel, dans toutes les disciplines au bac (cf supra) ou au brevet, y compris en français, a joué le rôle exactement contraire.
On lui donne d’abord les bons outils afin de pouvoir maîtriser l’orthographe, ce que les élèves n’ont pas aujourd’hui pour des raisons structurelles.
L'analyse est toujours aussi évasive.
"des heures à l'histoire du français" ? Les enseignants expliquent régulièrement tel ou tel point utile de l'histoire de la langue (par l'étymologie, par exemple) mais faire d'une spécialité universitaire une discipline scolaire à part entière ne pouvait naître que dans un esprit hors sol. Au reste, on verra par la suite combien cette curieuse proposition est contradictoire.Si l’objectif est d’améliorer ce point, le ministre de l’Education doit d’abord repenser en profondeur la manière dont la langue française est enseignée en accordant par exemple des heures à l’histoire du français, plutôt que de vouloir réinstaurer les dictées, qui ne présentent aucune utilité et qui n’ont jamais disparu.
Les dictées sont accusées d'exister encore mais, fustigeant sans argument leur absence d'utilité, M. Benzitoun oublie qu'elles étaient très pratiquées quand l'orthographe était mieux maîtrisée...
Le constat est réel, la maîtrise de l’orthographe s’est dégradée ces dernières années…
C'est ce qu'affirme "Libération" mais, dans sa première tribune de 2022, M. Benzitoun dénonçait "un des épouvantails des débats sur l’école" et affirmait à propos de l'orthographe : "aucune recherche n’a jamais démontré l’existence d’une époque où une majorité de Français en faisait un usage virtuose, ce qui n’est guère étonnant eu égard à son extrême difficulté." Bref, que, par conséquent, la baisse était imaginaire.
Depuis, il semble avoir viré sa cuti :
C'est l'un des éléments explicatifs, mais pas seulement, hélas.Le niveau des élèves est conforme aux heures qui peuvent être consacrées à l’enseignement de l’orthographe.
A noter que M. Benzitoun dénonce le faible nombre d'heures mais propose... de le réduire !
Certes, la baisse en orthographe est communément admise : si l’on parle seulement de dictées, le niveau d’un élève aujourd’hui en CM2 correspond au niveau d’un élève en CE2 en 1987.
Communément admise... non sans réticence, comme on l'a vu dans les tribunes précédentes.
L'apprentissage de l'anglais en primaire serait aussi important que celui du français ? Où conduit le relativisme...Mais il faut considérer les choses dans leur ensemble : en 2023, un élève a davantage de matières à travailler qui sont tout aussi importantes que l’orthographe, par exemple les langues étrangères, et moins d’heures consacrées à la langue française. Ainsi, il faut assumer ses choix politiques et ne pas blâmer les élèves.
C'est d'autant plus amusant que l'orthographe lexicale anglaise est beaucoup plus complexe que l'orthographe lexicale française mais ce détail ne semble pas préoccuper M. Benzitoun, qui n'appelle pas à la simplification de la langue anglaise.
Par ailleurs, le niveau en langue française ne se résume pas qu’à l’orthographe, contrairement aux idées reçues. On constate par exemple une nette progression des élèves en rédaction.
L'opposition sophistique entre orthographe et rédaction - encore une fois relativiste - laisse particulièrement perplexe. La rédaction implique de savoir rédiger, et l'orthographe lexicale... en fait partie ! La syntaxe en fait également partie, mais elle suppose également la maîtrise de l'orthographe grammaticale (les accords dans la phrase, par exemple, ou ne pas confondre l'imparfait, l'infinitif et le participe passé, ou ne pas confondre les homophones etc.).
Ainsi dans les attendus de fin de cycle en français : "En rédaction de textes dans des contextes variés, maitriser les accords dans le groupe nominal (déterminant, nom, adjectif), entre le verbe et son sujet dans des cas simples (sujet placé avant le verbe et proche de lui, sujet composé d’un groupe nominal comportant au plus un adjectif ou un complément du nom ou sujet composé de deux noms, sujet inversé suivant le verbe) ainsi que l’accord de l’attribut avec le sujet" (cycle 2) ; "Mobiliser les connaissances orthographiques, syntaxiques et lexicales en rédaction de texte dans des contextes variés" (cycle 4)
Au reste, non seulement une compétence de rédaction n'impliquant pas la maîtrise de la langue n'a aucun sens, mais l'affirmation "On constate par exemple une nette progression des élèves en rédaction" n'est étayée par rien.
Comme on vient de le voir, savoir rédiger sans savoir orthographier (orthographe lexicale et grammaticale) n'a aucun sens...Or, savoir rédiger est une chose bien plus essentielle à mon sens que la maîtrise de l’orthographe bête et méchante.
Comment expliquez-vous cette obsession pour l’orthographe ?
C’est un fait de société. Depuis les dernières réformes de l’orthographe en 1878, l’Education nationale lui accorde une grande importance.
M. Benzitoun n'a pas connaissance des évolutions récentes...
Curieux de transformer, par ailleurs, une exigence somme toute banale en "obsession" comme le fait "Libération" : c'est d'emblée discréditer cette exigence.
Depuis un certain temps, quand même...Historiquement, cet apprentissage ne profitait qu’à un petit groupe de personnes très aisées. Depuis, l’école s’est démocratisée...
Encore un sophisme : personne n'évalue l'intelligence d'un élève à partir de son orthographe, mais l'orthographe fait - assez logiquement - partie de ce qui permet d'évaluer le niveau scolaire (et dans certains cas l'intelligence : les accords dans la phrase, par exemple). Dans le supérieur ou le monde du travail, les compétences de rédaction sont évidemment importantes......mais l’exigence envers l’orthographe est restée identique. Résultat : les entreprises, les grandes écoles, les concours académiques… évaluent encore l’intelligence d’un élève à partir de son orthographe, ce qui est un contre-sens absolu.
Ce qui est vrai pour l'orthographe est vrai pour tout : l'anglais, les mathématiques, l'histoire, etc.Au lieu de changer cette vision, le ministère préfère continuer de mettre le paquet, à coups de sanctions, sur l’orthographe, espérant ainsi que le jeune puisse s’insérer professionnellement et sans difficulté. Une politique injuste puisque les jeunes n’ont pas tous les mêmes chances pour s’approprier les règles d’orthographe.
Au nom de bons sentiments, M. Benzitoun théorise ici le renoncement, qui d'ailleurs est déjà à l’œuvre depuis longtemps dans l'Éducation nationale, avec, pour ce faux progressisme scolaire, des résultats particulièrement injustes.
Il faut aussi renoncer à faire lire les enfants ?De nombreux travaux montrent qu’il existe de grandes inégalités culturelles concernant l’orthographe. Dans un cadre familial où le livre a une place importante, l’apprentissage de l’orthographe posera moins de problèmes que pour un enfant où le seul lien avec l’écrit surveillé se fait à l’école.
Pour réduire ces inégalités, quelles sont les solutions ?
Il faut apporter une nouvelle vision à la fois plus juste et plus proche de la réalité des élèves, en faisant le choix de rationaliser l’orthographe.
M. Benzitoun, par son discours universitaire et surtout idéologique hors sol, est très éloigné de la réalité des élèves. Les difficultés des élèves sont tout aussi grandes en orthographe lexicale qu'en orthographe grammaticale, les élèves confondant 'son' et 'sont' par exemple.
Mais surtout il ne s'agit donc plus - en contradiction avec ce qui avait été affirmé plus haut - de refondre l'enseignement, mais de refondre la langue elle-même, désignée comme le problème des élèves. C'est l'objet des toutes les tribunes de M. Benzitoun depuis 2022. Imaginons le même raisonnement appliqué à d'autres disciplines...
Aucune explication sur le fait que la même langue faisait l'objet d'une acquisition beaucoup plus réussie et démocratique, dès l'école primaire, il y a encore quelques décennies. L'analyse des causes n'étant pas faite, la solution est donc absurde.
A noter que ce qui est présenté comme une "rationalisation" (quasi scientifique) de la langue ne relève en réalité que de choix arbitraires (ci-dessous ceux d'une association, alors qu'il en existe bien d'autres militant pour la simplification du français avec des choix différents) et souvent absurdes quand on s'y penche un tant soit peu.
C’est-à-dire : rendre l’orthographe plus intelligible, appropriable, ludique et accessible à tous, comme le propose le dictionnaire de l’association Erofa.
EROFA = Études pour une Rationalisation de l’Ortografe Française d’Aujourd’hui
erofa.free.fr/
Prenons un exemple : 'ortografe'. On ne voit pas pourquoi la disparition des racines grecques orthos (droit) et graphè (écriture) rendraient l'orthographe "plus intelligible". C'est même créer une confusion avec 'horticulture' (de hortus le jardin) logiquement simplifié en 'orticulture', tout en perdant le réseau lexical avec tous les composés de ortho- ou de -graphe.
Avec une telle disparition des racines grecques par exemple, quel sens aurait de consacrer "des heures à l'histoire du français" ?
On ne voit pas non plus pourquoi "ortografe" serait plus "ludique". On voit bien qu'il ne s'agit ici que d'éléments de langage.
Et pourquoi garder le -e muet final ? Ce serait pourtant rendre la graphie "plus accessible" à tous, et d'autres réformateurs proposent d'écrire 'ortograf'. La "rationalisation" est toujours un choix arbitraire, en plus d'être discutable.
L’orthographe doit être décomplexée et non une marque de réussite. D’autant plus qu’avec le développement des correcteurs automatiques, elle ne présente plus les mêmes enjeux. Il faut apprendre à vivre avec son temps et tenir compte des outils technologiques dans l’apprentissage de l’orthographe, et ainsi dégager du temps pour réfléchir véritablement au fonctionnement de la langue française.
En quoi l'apprentissage de l'orthographe ne permettrait-il pas de "réfléchir véritablement au fonctionnement de la langue française" ? Nous en avons vu l'exemple avec le mot "orthographe". Mépris ici pour les enseignants qui seraient incapables d'enseigner l'orthographe, s'ajoutant au mépris des élèves actuels qui - pour on ne sait quelle raison - ne seraient plus capables de l'apprendre.
Ce dernier argument relativiste du correcteur automatique, en plus d'être faible, est un dernier renoncement qui contredit de façon amusante toute l'argumentation de M. Benzitoun sur la difficulté de la langue française : pourquoi rationaliser la langue si la machine peut suppléer à nos difficultés ?
Bref, bien des sophismes et des incohérences mais tous au service du relativisme, et du renoncement.
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- Loys
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Cette tribune est présentée comme rassemblant, entre autres, "plusieurs dizaine d'enseignants". L'étude de la liste des signataires (21 linguistes, 9 écrivains, 5 historiens, 4 philosophes, 3 journalistes etc.) contredit quelque peu cette affirmation : on n'en trouve aucun, sauf les présidents de trois associations, belge, québécoise et française.
Difficile de se prononcer pour les deux autres mais l'Association française pour l'enseignement du français (AFEF) ne représente absolument pas les enseignants : l'AFEF regroupe essentiellement des IEN, des IPR et des formateurs en INSPE ; sa présidente, Viviane Youx, n'enseigne pas à des publics scolaires. Les prises de position de cette association (qui entendait pendant longtemps représenter les "enseignants de français" (sic)) sont vivement critiquées par les enseignants de français, comme on a pu le constater à l'occasion des deux dernières réformes, du collège 2016 et du lycée 2019.
Plus généralement, on peut s'interroger sur la légitimité de linguistes, descripteurs scientifiques de la langue et de ses usages, à vouloir se faire prescripteurs et même militants pour en modifier la graphie. Il y a même une contradiction amusante dans le nom que se donnent ces scientifiques : imagine-t-on des ethnologues "atterrés" par les modes de vie qu'ils observent et en proposant d'autres, plus conformes à leurs souhaits ? des historiens "atterrés" par les faits qu'ils étudient et proposant de les modifier ?
Nous ne sommes pas linguistes mais comprenons bien que ce titre exprime une injonction pour faire cesser un usage et le remplacer par un autre.« Pourquoi il est urgent de mettre à jour notre orthographe »
Au reste, de quelle "urgence" s'agit-il ? Parce que l'orthographe française serait brutalement devenue problématique, ou parce que l'urgence vise à empêcher tout débat ?
Enfin, l'expression "mettre à jour" suppose une obsolescence des usages actuels, ce qui, pour des linguistes, constitue une forme de paradoxe qui ne laisse pas d'étonner.
Une vision, au reste, calquée sur l'informatique : comme les logiciels ou ses applications, la langue devrait recevoir ses correctifs. C'est supposer que ces corrections apporteraient sans cesse des améliorations à la langue dans une vision de progrès linéaire vers une langue parfaite et achevée, puisée dans un imaginaire technologique, ce qui est étrange lorsque l'on affirme - à juste titre - que la langue est un objet vivant.
Ces améliorations sont, au reste, parfaitement discutables, tout comme l'expression "rectification" orthographique implique l'idée de faute : il serait fautif d'écrire "goût" ou "maître" avec un accent circonflexe.
Nous n'apprendrons rien à des linguistes : dans tout débat, le choix des mots recouvre des choix idéologiques.
Curieuse formulation, en forme d'injonction euphémisée : "proposent une application beaucoup plus large". La dernière partie constitue - de fait - un cuisant aveu d'échec de ces "rectifications", proposées par des linguistes en 1989 et, pour les plus discutables, appliquées par un nombre de personnes très réduit. De fait, l'application des rectifications orthographiques a été "proposée" à tous depuis 1990. Mais l'usage n'a pas suivi depuis plus de trente ans, d'où cet appel, cette injonction à suivre les rectifications (et plus), et donc... à aller contre l'usage.A l’initiative du collectif Les linguistes atterré(e)s, plusieurs dizaines de linguistes, enseignants, universitaires et personnalités de la culture [...] proposent, dans une tribune au « Monde », une application beaucoup plus large des rectifications orthographiques de 1990.
Le choix des mots ("sommes-nous forcés", "on nous impose") est intéressant en ce qu'il déplace l'injonction : les linguistes-prescripteurs ne voudraient pas donner l'impression de l'être.Sommes-nous forcés d’écrire à la plume, de lire à la bougie ? Et pourtant, partout, on nous impose de lire et d’écrire avec une orthographe de 1878, oui, 1878. Alors que l’orthographe rectifiée de 1990 figure dans tous les dictionnaires, dont celui de l’Académie française.
Comprenons bien. Les usages actuels ne seraient pas de vrais usages, mais le produit d'une coercition... contrairement aux nouveaux usages "proposés" par le collectif et qu'il serait "urgent" d'"appliquer" de façon "beaucoup plus large" et sans laisser de choix.
Or, précisément, personne (pas même l'Académie) n'impose l'application des usages actuels, que déplorent le collectif de signataires.
Le collectif oppose de façon très rhétorique - et très vide de sens - un "on" (vraisemblablement un ennemi commun mais de qui s'agit-il ?) et un "nous" (les linguistes atterrés, ou bien tous les francophones auxquels ils s'associent... sauf, semble-t-il, pour leurs libres usages orthographiques). Le reste de la tribune laisse penser que ce "on" évasif et prudent désigne... les enseignants.
En réalité, il faudrait opposer avec plus de pertinence le "on" de l'immense majorité des francophones (dont les Français) qui suivent de façon vivante les usages orthographiques actuels et le "nous" des linguistes atterrés... et surtout isolés.
Mais revenons sur la grossièreté du sophisme de l'obsolescence : l'orthographe que veut imposer ce collectif incarnerait la modernité face à l'archaïsme ("la plume" et "la bougie"). Pourtant les usages orthographiques actuels sont bel et bien vivants : c'est même la définition d'un usage existant que d'être vivant. Écrire "île" avec un circonflexe, comme on peut le lire écrit partout dans les livres, dans la presse ou sur Internet, serait obsolète parce que des linguistes en décideraient ainsi ?
La date - censée indigner le lecteur - de 1878 participe du même sophisme grossier de l'obsolescence : l'Académie (qui, au demeurant, ne fait pas les usages) a certes publié son septième dictionnaire en 1878, mais elle a également publié son huitième en 1932 et son neuvième est en cours de publication depuis 1992 (premier tome). Les rectifications de 1990 ont d'ailleurs été proposées par l'Académie... en 1990.
Nous verrons par la suite que le collectif, qui n'est pas - comme nous le verrons - à une contradiction près, suggère de revenir... à des graphies médiévales.
On peut, au reste, reconnaître que les évolutions sont finalement marginales dans l'orthographe française depuis 1878, et même depuis bien avant, la fixation de l'orthographe ayant commencé avec la création de l'Académie.
Mais, même si cette fixation peut faire l'objet de critiques, en quoi serait-elle un problème ? N'est-ce pas plutôt une vertu que l'orthographe, à quelques évolutions près, reste partagée par des générations qui se suivent à travers les siècles ? Dans combien de pays a-t-on la chance de pouvoir lire en toute transparence et avec une saisissante familiarité des textes écrits avec quasi la même orthographe en 2023 et en 1823 ?
On a bien compris que le lien logique "C'est pourquoi" ne repose sur rien.C’est pourquoi, nous, francophones de différents pays, demandons à nos institutions, mais aussi aux médias, aux maisons d’édition, aux entreprises du numérique, de nous offrir des textes, des messages, en nouvelle orthographe, et d’aller plus loin dans cette voie.
Révulsé par des usages dominants qui seraient imposés, le collectif veut, en bonne logique, imposer - pardon : "demander" l'application ou "offrir" - de nouveaux usages. Pas seulement des usages proposés depuis 1990 par l'institution dont c'est le rôle, l'Académie. Des usages que ce collectif informel des linguistes atterrés propose de sa propre autorité. Mais qu'est-ce que "le public" face à eux ?
On voit, par ailleurs, que ce collectif cherche, non sans cynisme, à influer sur les usages non pas des francophones en cherchant à les convaincre, mais de tous ceux qui peuvent influer sur eux. Curieuse façon de laisser le choix du libre usage aux francophones, contraints de lire des usages qui ne correspondraient pas à leurs écrits.
Tout ceci n'est pas sans rappeler, à l'occasion de la réforme du collège (soutenue par l'AFEF contre les enseignants), la réécriture (laborieuse dans les trois versions successives de brouillon - c'est dire le succès des rectifications) des manuels scolaires en 2016 avec l'orthographe rectifiée, à la demande expresse du Conseil supérieur des programmes, provoquant l'incompréhension des parents d'élèves.
Nous touchons ici une partie du problème : pour ces linguistes, la langue écrite ne fait pas partie de la langue. Elle peut donc être modifiée arbitrairement. Et tant pis si des siècles d'écrits transparents nous précèdent !Réformer l’orthographe ne veut pas dire réformer la langue.
Nous y voilà : le relativisme, à travers un nouveau sophisme qui se veut iconoclaste, à l'image des linguistes atterrés : on peut être bon en français et mauvais en orthographe. Le débat se rapproche ici du champ scolaire.On peut être bon en français, par la richesse de son vocabulaire, sa créativité et son argumentation, et mauvais en orthographe. Et c’est de plus en plus le cas aujourd’hui.
Il faut ici s'attarder plus longuement.
Ce sophisme pose d'abord que l'orthographe serait secondaire, voire ne ferait pas partie des compétences nécessaires en français.
C'est évidemment ahurissant : l'orthographe n'est pas une convention arbitraire et dispensable. Elle est essentielle pour rédiger et exprimer sa pensée à l'écrit, et donc la communiquer. Elle peut même être importante pour lire et comprendre un texte, un accord non identifié pouvant occasionner des incompréhensions ou des contresens.
Au demeurant, les linguistes semblent ne voir dans l'orthographe qu'une collection d'anomalies lexicales ou de règles grammaticales irrationnelles, quand précisément toute une partie de l'orthographe, l'orthographe grammaticale, et même l'orthographe lexicale que mettent en lumière les réseaux lexicaux (chocolat, chocolatier, et notamment le passage du masculin au féminin vert, verte / ouvrier, ouvrière), mettent en œuvre une certaine logique, à commencer, pour la première, par les accords ou la maîtrise de la syntaxe (ne pas confondre ou et où, à et a, et et est etc.).
Mais observons donc les compétences davantage attendues par le collectif
"La richesse en vocabulaire" : en vérité, elle est d'autant plus grande que l'élève connaît l'orthographe des mots, son histoire et sait établir de réseaux lexicaux, en français ou même avec d'autres langues : le circonflexe de tâter fait écho à taste en anglais, tasten en allemand, tasto ou tastiera en italien. Opposer la richesse du vocabulaire et la connaissance de l'orthographe n'a donc aucun sens, d'autant qu'en général - ce que sait n'importe quel enseignant - une bonne connaissance de l'orthographe va de pair avec la richesse du vocabulaire : un élève qui connaît les mots de la même famille que "dent" (dentier, dentition, dentiste, édenté etc.) a plus de chance de savoir écrire "dent" correctement.
Pour "l'argumentation", elle semble ne relever ici que la recherche des idées, laquelle n'est pas spécifiquement une compétence liée à la langue française : elle peut se pratiquer dans tous les cours de langues, en philosophie, en histoire et dans presque toutes les disciplines scolaires, à la vérité. Mais c'est oublier que l'argumentation relève également - et même avant tout - de la communication, et notamment de l'expression des idées (et de leur rédaction à l'écrit). D'ailleurs, l'exercice de l'argumentation n'est souvent qu'un prétexte pour travailler la langue, en français comme en langues. Opposer l'argumentation et la connaissance de l'orthographe n'a donc aucun sens.
Il en est de même de "la créativité" (s'il faut comprendre la capacité à raconter, décrire ou expliquer)... à moins qu'il ne s'agisse de la créativité verbale : en ce cas, plus l'élève multiplie les erreurs orthographiques, les barbarismes ou les solécisme, et meilleur il est en français, en effet ! C'est d'ailleurs exactement ce que défendent certains des signataires. Souvenons-nous de la linguiste Aurore Vincenti dans "Elle" en 2019 : "s'affranchir de l'orthographe, c'est sortir du domaine de la "loi", c'est une transgression, un espace de création".
Résumons donc : le collectif s'efforce ici, avec des sophismes d'une grande faiblesse, de relativiser l'importance de l'orthographe.
Le champ scolaire est donc bien ciblé par le collectif sans le dire, et tant pis si les manuels scolaires appliquent les rectifications de 1990 depuis 2016 et tant pis si les enseignants ont l'obligation de les appliquer depuis 1990.Les enquêtes PISA et PIRLS (Programme international pour le suivi des acquis des élèves et Programme international de recherche en lecture scolaire) indiquent que les pays francophones consacrent plus d’heures à l’enseignement de la langue maternelle que les autres pour des résultats plus faibles, et que les élèves français s’abstiennent plus souvent de répondre, probablement par peur de la faute.
Au reste, c'est ici que le collectif des signataires montre sa méconnaissance criante de la question scolaire. Les enquêtes PISA ou PIRLS n'ont rien à voir avec l'écrit des élèves ou leur orthographe. Elles n'évaluent que la compréhension de l'écrit (PISA) ou la lecture (PIRLS) et les absences de réponse n'ont rien à voir avec la peur de mal écrire. Se fonder sur elles et leurs "résultats plus faibles" pour comparer l'enseignement de l'orthographe dans le monde n'a aucun sens.
De fait, quel sens de comparer le programme et la durée de l'enseignement de l'orthographe entre des langues qui sont phonétiquement transparentes (comme le finnois) et des langues qui ne le sont pas ? L'anglais est bien moins transparent que le français, son enseignement est d'ailleurs très long mais le collectif ne remet pas en cause... son enseignement en France dès le primaire depuis le début des années 2000 !
Le collectif préfère les comparaisons internationales dépourvues de sens aux comparaisons platement nationales : la baisse dramatique des horaires d'enseignement du français depuis un siècle, que nous avons mise en évidence dans notre petit musée des horaires (2014) ou les difficultés grandissantes des élèves en orthographe (et dans bien d'autres champs scolaires). D'ailleurs, l'AFEF, dont nous parlions plus haut, milite encore aujourd'hui pour que les horaires de français ne soit pas renforcés (citons Dominique Bucheton en 2023 : "Ajouter encore une heure d’exercices de révision de maths ou de français à des élèves en décrochage, en désamour, en indigestion d’école, qui s’y ennuient, n’est pas la solution")....
Difficultés grandissantes des élèves : faut-il en conclure que le problème est dans la langue... ou dans son enseignement devenu bien moins efficace ?
A noter de façon amusante que le collectif des signataires évoque des "résultats plus faibles" (en réalité catastrophiques depuis trois décennies) : pourtant certains de ses membres, comme Laélia Véron, Viviane Youx ("L'idée selon laquelle il existerait un déclin orthographique me semble très exagérée"), Médéric Gasquet-Cyrus ("Le discours catastrophiste sur le français est insupportable") ou Christophe Benzitoun ("La faible maîtrise de l’orthographe est l’un des épouvantails des débats sur l’école"), aiment à fustiger le déclinisme de ceux qui constatent la dégradation des compétences orthographiques et syntaxiques des élèves. Rappelons le leimotiv des linguistes atterrés : "Le français va très bien, merci".
La réalité est pourtant criante :
En bonne logique, "l'opacité" de l'orthographe de la langue française aurait donc augmenté depuis trente ans...L’opacité de notre orthographe en est en partie responsable. Et le temps passé à enseigner ses bizarreries et incohérences l’est au détriment de l’écriture créative et de la compréhension.
Encore une fois, l'orthographe est principalement réduite à des détails d'orthographe lexicale, cette caricature utile.
Jusqu'à aujourd'hui, en fait. Mais, au fil des siècles, de plus en plus à la marge.L’orthographe, née avec l’imprimerie, n’a cessé, au fil du temps, d’être retravaillée par les grammairiens, les imprimeurs, et par l’Académie française jusqu’à la fin du XIXe siècle.
Dommage que la source de cette affirmation ne puisse pas être vérifiée. Sachant qu'au XVIIe siècle l'orthographe n'était pas fixée, la comparaison laissant croire à une évolution perpétuelle de la langue écrite n'a de toute façon guère de sens. Ce chiffre ("la moitié") devient parfaitement marginal lorsqu'on compare par exemple l'orthographe du XVIIIe siècle et d'aujourd'hui.On estime qu’entre les XVIIe et XIXe siècles, la moitié des mots ont vu leur graphie changer au fil des réformes.
"plus rien" : c'est donc une chance pour la langue française de voir son orthographe presque transparente depuis le début du XIXe siècle. Sous couvert de "mise à jour", il s'agit donc de l'opacifier.Depuis, plus rien, alors que la plupart des langues européennes mettent à jour leur orthographe régulièrement, pour accompagner leur évolution.
Quand il s'agit d'aligner la graphie sur la prononciation ("oignon" ne se prononce pas comme il s'écrit), l'évolution de la graphie peut s'entendre (pourvu que le choix en soit laissé aux usagers). Mais en réalité de telles évolutions sont parfaitement marginales (quelques mots). Et surtout n'ont pas grand chose à voir avec les difficultés de nos élèves, qui confondent par exemple l'imparfait, le participe passé et l'infinitif...
Au reste, quel choix arbitraire justifie de simplifier "oignon" en "ognon" plutôt qu'"onion" (comme en anglais) ? Quelle "évolution" de la langue justifie que le mot "maître" s'écrive "maitre" (rectifications de 1990) ?
Quoi ? On ne nous impose pas "de lire et d’écrire avec une orthographe de 1878, oui, 1878" ?L’usage pourra trancher
Est-ce parce qu’il n’y avait plus rien à améliorer ? Nullement. Des linguistes, comme Ferdinand Brunot, des écrivains, comme Anatole France, se sont mobilisés dès 1900, en France, en Suisse et en Belgique. Pour aboutir en 1990, à une avancée : des rectifications validées par l’Académie française et publiées au Journal officiel, sans caractère contraignant.
Sur le caractère prétendument non contraignant des rectifications de 1990, l'affirmation est, comme nous le disions, très inexacte. Citons la présentation du rapport du Conseil supérieur de la langue française par Maurice Druon, ainsi que la réponse du Premier ministre en 1990 :
C'est d'ailleurs en s'appuyant sur ce caractère contraignant que le Conseil supérieur des programmes a rédigé les programmes et demandé aux éditeurs de manuels scolaires d'appliquer les rectifications en 2016.Il a été entendu que les propositions des experts devraient être à la fois fermes et souples : fermes, afin que les rectifications constituent une nouvelle norme et que les enseignants puissent être informés précisément de ce qu’ils auront à enseigner aux nouvelles générations d’élèves ; souples, car il ne peut être évidemment demandé aux générations antérieures de désapprendre ce qu’elles ont appris, et donc l’orthographe actuelle doit rester admise.
[...]
Je demande donc à Monsieur le ministre de l’éducation nationale de prendre toutes les dispositions nécessaires pour que ces rectifications soient désormais enseignées, étant clairement posé que les formes actuellement en usage resteront évidemment admises.
On voit, au reste, qu'en dehors du champ scolaire, "on" n'impose rien aux francophones, bien au contraire.
Les rectifications de 1990 sont, par ailleurs, assez marginales (des "scories"), sauf les accents circonflexes.
La suppression arbitraire de certains circonflexes fait exception et nous y avions consacré un billet en 2016 car nous ne croyons pas qu'ils ne jouent "aucun rôle").Elles régularisent le pluriel de certains noms composés, suppriment l’accent circonflexe sur le i et le u quand il ne joue aucun rôle, simplifient certaines doubles consonnes, et éliminent quelques scories (« ognon » et « nénufar »).
Décidément "on" est partout. Mais pas à l'école, pas dans les manuels scolaires, pas dans les traitements de texte etc.Elles sont intégrées aux traitements de texte, enseignées au primaire en France depuis 2008, mais aussi en Belgique, au Canada, en Suisse. Cependant, elles sont méconnues du public, qui s’en méfie, car on ne leur a jamais donné leur chance.
On l'a compris : "le public" (difficile de ne pas voir dans cette expression une forme de mépris) ne saurait choisir librement son usage. "le public" aurait de mauvais usages, le public n'est pas très éclairé, quand nos linguistes le sont évidemment (mais assez mal, comme on a pu le constater déjà au cours de cette analyse).
Encore une affirmation erronée. Il suffit pourtant de lire les programmes depuis 2015, jusqu'au cycle 4 : "L’enseignement de l’orthographe a pour référence les rectifications orthographiques publiées par le Journal officiel de la République française le 6 décembre 1990".Pire, après avoir appris la nouvelle orthographe en primaire, les élèves sont forcés de revenir à l’ancienne au collège et au lycée, faute d’ouvrages disponibles.
Mais il est vrai que les manuels scolaires, comme les programmes, ne parviennent à intégrer que laborieusement des rectifications marginales et décidées arbitrairement.
Quant aux éditeurs de livres, ils font leur libre choix. Sans doute à rebours des usages des lecteurs, n'en doutons pas !
C'est en partie vrai pour le XVIIe siècle (même si les difficultés graphiques sont davantage liées à des conventions typographiques) mais c'est faux depuis le XIXe siècle. Vérifions avec la première édition de Han d'Islande (source : Gallica) il y a exactement deux cents ans :Il est urgent de mettre à jour notre orthographe. Affichons des textes conformes aux rectifications de 1990, et republions les classiques : il y a longtemps qu’on ne les lit plus dans leur graphie d’origine.
On le voit : ce qui a été écrit en 1823 pourrait être réécrit en 2023 avec exactement la même orthographe. Un scandale d'"opacité" !
Ne doutons pas que la coexistence de plusieurs orthographes simplifiera la tâche des élèves !L’école en a besoin. Plusieurs éditions pourront coexister, avec une pastille explicite ; nous retrouverons une liberté de choix, et l’usage pourra trancher.
Au reste, l'usage a déjà pu trancher depuis 1990. Et c'est précisément ce que n'accepte pas le collectif des signataires.
Il ne s'agit donc pas de suivre l'usage, mais de le créer (au prétexte, bien sûr, de l'améliorer).Il est grand temps aussi d’aller plus loin. L’idée n’est pas de tout simplifier ni d’écrire en phonétique, mais d’améliorer le système graphique pour mieux l’enseigner. Aujourd’hui, la réflexion est très avancée, on sait ce qu’on peut modifier sans dommage pour le sens ou la prononciation, et sans ralentir la lecture.
Créer des usages qui n'existent pas : comme nous allons le voir plus bas, nos linguistes-prescripteurs-progressistes vont donc beaucoup plus loin que l'Académie dont le rôle se borne à trancher entre des usages concurrents ou à corriger des écarts entre l'écrit et l'oral.
De façon amusante, le progrès linguistique consisterait même à créer des usages concurrents (l'ancienne et la nouvelle graphie) !
Cette difficulté est, pour les enseignants chargés de l'enseignement du français du primaire au lycée, assez ridicule vis à vis des difficultés immenses des élèves face à des difficultés beaucoup plus graves.Le premier pas serait d’acter la réforme de l’accord du participe passé, et d’accepter de le laisser invariable lorsqu’il est conjugué avec « avoir », comme le prévoyait déjà l’arrêté du ministre de l’instruction publique, Georges Leygues, en 1900, comme le demandent aujourd’hui la Fédération internationale des professeurs de français et le Conseil international de la langue française. L’accord avec l’objet avant l’auxiliaire (« l’histoire que j’ai lue ») avait été proposé à partir du XVIe siècle, mais accompagné ensuite de tant d’exceptions qu’il ne s’est jamais vraiment imposé.
On note avec amusement que, quand l'usage s'impose conformément à leurs souhaits, les linguistes atterrés applaudissent. Ou qu'écrire comme en 1900 pourrait finalement être vertueux !
Les verbes qui le permettent sont peu nombreux mais courants (faire, dire, mettre, prendre etc.) et si des personnalités publiques "se surprennent" à faire l'erreur, c'est précisément qu'elles ne la font pas le plus souvent. Le président de la République s'est surpris récemment à parler de "bagnole" à la télévision : faut-il encourager les élèves à l'imiter et renoncer à leur faire employer le registre de langue courant ?La plupart du temps, on ne peut pas l’entendre à l’oral, et pour les quelques verbes qui le permettraient, les bouches les plus autorisées (ministres et présidents compris) se surprennent à dire « la chose que j’ai fait », « la décision que j’ai pris ».
A bien y regarder, la difficulté orthographique n'est pas, pour nos élèves, dans l'accord avec le COD placé avant mais dans l'identification même de la fonction COD (que la réforme des programmes de 2015 - il est vrai - voulait faire disparaître avec le prédicat) ou pire encore : dans la graphie même du participe en tout contexte (au passé composé, employé comme adjectif), nombre d'élèves écrivant "j'ai pri" ou "ils ont dis".
Ce n'est donc pas la réforme de l'accord du participe passé qui résoudra les difficultés des élèves : au contraire, même, puisque l'accord rend audible la terminaison des participes courants dit(e), mis(e), fait(e), pris(e). Mais cela, il faut être enseignant dans le primaire ou le secondaire pour le savoir. Cette erreur cache, en réalité, des lacunes beaucoup plus graves que nos linguistes ne peuvent ou ne veulent pas voir.
Cette affirmation de "environ quatre-vingts heures" (plus de la moitié d'une année scolaire en français au collège...) est totalement fantaisiste, aucun horaire n'étant jamais assigné à un enseignement spécifique en français. D'ailleurs l'accord avec le COD est mentionné uniquement en cycle 4 (5e-3e) dans les programmes de 2015.Les rarissimes cas où l’accord aurait du sens à l’écrit, de type « la part du gâteau que j’ai mangé(e) », sont presque du folklore, surtout que la distinction n’existe ni au masculin (« le morceau du gâteau que j’ai mangé ») ni aux temps simples (« la part du gâteau que je mange »). Or, aujourd’hui, environ quatre-vingts heures sont consacrées par l’école à ce seul point, au détriment du reste.
On en revient à des difficultés lexicales de niche, bien éloignées des difficultés générales de nos élèves...Insécurité linguistique
Le pas suivant serait de régulariser les pluriels en « -s », en renonçant au « -x » final qui résulte d’une erreur de copiste (« -us » abrégé au Moyen Age par un signe confondu avec un « x », auquel on a ajouté un « u ») : autorisons à nouveau « pous » comme « sous », et « pieus » comme « pneus ». Certes, on ne distinguera plus « lieux » et « lieus », ni « feux » et « feus », mais le contexte suffira à trancher : les avocats ou les cadres ne réclament pas une graphie différente de peur d’être pris pour des fruits ou des tableaus.
Il s'agirait donc de revenir à une graphie médiévale (quelque peu antérieure à 1878...), à une époque où tout était "autorisé" puisque n'existait... aucune norme, et tant pis si, depuis près de quatre siècles, l'usage du pluriel "poux" n'a jamais été concurrencé par celui de "pous". De même, l'usage du pluriel "lieus" concurrent de "lieux" n'a jamais existé (la seule forme existante concerne les poissons). Il ne s'agit donc même plus de revenir à une forme médiévale, mais de faire usage d'une forme purement et simplement inventée.
Les linguistes, ennemis de "l'insécurité linguistique", créent donc des doublons avec des formes qui n'ont jamais existé. Pire : ils assument, avec les nouvelles formes créées de toutes pièces, de nouvelles confusions à venir...
Tout est question de point de vue : les graphies "lieus", "feus" ou "poux" paraissent bien étranges... pour n'avoir jamais existé.La nomination d’une commission internationale, un Collège des francophones, permettrait d’aller plus loin, dans un avenir que nous espérons très proche. Si vous trouvez que ces accords byzantins et ces exceptions étranges font tout le charme de notre orthographe, c’est parce que c’est la seule version qui vous a été enseignée dès l’enfance, et que vous y accordez une charge affective particulière.
On remarque que le "nous" du début de la tribune se réduit enfin aux linguistes s'adressant au "public" ("vous"), dont les usages relèvent de l'ignorance et, par leur "charge affective", échappent à la rationalité.
Rationalité au demeurant discutable. Pourquoi une marque du pluriel qui ne s'entend pas d'ailleurs (comme le participe passé de la plupart des verbes lorsqu'il s'accorde avec le COD) ? Autant écrire "les lieu, les feu, les pou". On le voit, toute "rationalisation" peut se trouver concurrencée par une rationalisation plus plus haute.
Pour "loix" comme pour "poëte", "nos ancêtres" ont connu deux graphies concurrentes, qui avaient donc le mérite d'exister.Nos ancêtres trouvaient surement « poëte » et « loix » plus jolis que « poète » et « lois ».
La comparaison avec une graphie ancienne et une graphie nouvelle et arbitraire est donc inepte.
Les graphies rectifiées ou non rectifiées étant acceptées à l'école, on comprend mal d'où pourrait venir cette "insécurité"...On peut éprouver une certaine fierté de sa maitrise de l’orthographe, mais même les plus aguerris souffrent d’insécurité linguistique.
La réduction psychologique de l'argumentation évolue encore ici : la culpabilisation d'une "fierté mal placée" (?) et la menace - assez peu pertinente pour "les plus aguerris". Il suffit de déplacer cette argumentation dans n'importe quel champ de connaissance scolaire (de l'anglais aux mathématiques) pour en mesurer l'ineptie. Faut-il simplifier les tables de multiplication ou les verbes irréguliers anglais ?
Le concept d'"insécurité linguistique", ressassé par les linguistes atterrés dans toutes leurs interventions désormais (et qui semblent enfermer les élèves dans un déterminisme de l'échec), laisse songeur quand on voit que leurs propositions rendent la graphie de la langue plus flottante qu'elle n'est, avec de nouvelles graphies en partie arbitraires et coupées de l'étymologie ou des réseaux lexicaux (mots de même famille).
Il serait amusant de s'interroger sur la recrudescence actuelle de l'"insécurité linguistique". L'orthographe de la langue serait donc brutalement devenue difficile et aurait brutalement plongé les élèves dans l'"insécurité linguistique". Ou explication plus simple : l'école serait devenue moins efficace (et pas seulement pour l'orthographe, hélas). Il faut dire que, s'agissant de la seule orthographe, les discours relativistes des linguistes-prescripteurs-progressistes y ont bien contribué depuis quarante ans, comme on le verra plus loin.
"rien", en toute simplicité. Le travail de centaines de milliers d'enseignants est décidément bien ingrat.Que gagne-t-on à apprendre des règles qui n’ont rien de logique, ni même d’étymologique ?
L'accord avec le COD placé avant ne suivrait aucune logique ? Les accords en général dans la phrase non plus ? Quant à l'orthographe lexicale, elle ne prétend suivre aucune "règle" mais a bien une histoire, foisonnante et passionnante.
On peut entendre que des ajustements puissent se faire (une partie des rectifications de 1990 est d'ailleurs bienvenue) mais qu'y peut-on si les usages sont devenus si ancrés et depuis si longtemps que ces ajustements ne parviennent pas à les changer ?Rationaliser ne signifie pas effacer l’orthographe, mais la rendre un peu plus maitrisable ; et le chemin est vraiment très long, pour le français.
La question n'est de toute façon pas dans le champ de connaissances (une orthographe qui serait devenue difficilement maîtrisable) mais dans son enseignement permettant de moins en moins de la maîtriser.
Autre relativisme qui ne se fonde sur aucune référence précise de cet "imaginaire" ni aucune démonstration de son ineptie (plus difficile à concevoir pour le français puisque premier pays a avoir cherché à ordonner la langue). Peu importe : cette réflexion est, au fond, sans rapport avec la question qui nous occupe sauf à justifier que la langue écrite puisse être élaguée en tout arbitraire. Mais réflexion quelque peu contradictoire avec la volonté de défendre la francophonie : à quoi bon si le français n'a aucune vertu particulière ?Depuis au moins trois siècles, on a investi dans la langue française un imaginaire qui lui suppose des qualités (clarté, brièveté, élégance…) qu’elle n’a ni plus ni moins qu’une autre.
A défaut d'un "imaginaire", ne peut-on concevoir un attachement fondé à la langue française, à sa richesse et à son histoire ? Sont-ce des choses qu'on peut rayer d'un trait de plume ? Les usages conservés par tous et qui contrarient tant nos linguistes témoignent que non.
Le "coût économique exorbitant" de cet enseignement ne s'appuie ici sur aucune donnée objective mais participe d'une vision assez désolante de l'école.Le cout social et économique de notre orthographe archaïque est devenu exorbitant.
Au reste, avec le verbe "est devenu", le collectif reconnaît benoîtement que le problème n'est pas l'orthographe, qui n'est pas devenue plus difficile.
Après l'absence de logique de l'orthographe, son "archaïsme", toujours avec la mesure rhétorique qui convient à un discours militant, et non scientifique : on a pourtant vu que la vigueur de notre orthographe malgré son ancienneté en constitue une vertu.
Pour faire bonne mesure, c'est la dimension sociale qui est enfin évoquée de façon vibrante dans la péroraison de cette tribune : les linguistes atterrés sont partisans du progrès social. Malgré lui, ils défendent "le public", ne l'oublions pas.
Mais l'argument peut aussi bien être retourné contre eux : l'influence délétère des discours relativistes et militants contre l'orthographe a pénétré profondément l'école, ses cadres, ses formateurs et même une partie des enseignants gagnés à un faux "progressisme", et explique une bonne part des échecs scolaires actuels, lesquels touchent d'abord les élèves les plus éloignés de l'écrit et les moins favorisés.
Enchaînant avec une diminution formidable de l'horaire d'enseignement, une saisissante dégradation des conditions d'enseignement (nombre de classes par professeur, suppression des demi-groupes) pendant un siècle et une suppression du travail à la maison (en primaire) et une diffusion des pédagogies dispersives dans les dernières décennies, on a pu entendre dans les formations - récentes - que Louis XIV faisait des fautes d'orthographe et qu'il ne fallait donc pas accorder une importance démesurée à l'orthographe. Stagiaire en 1999 en IUFM, je me suis vu déconseiller fortement un mémoire de stage sur l'orthographe. L'inspection générale a pu proposer en 2014 un modèle de dictée positive dans laquelle les difficultés orthographiques pèsent beaucoup moins ( voir notre billet détaillé à ce sujet ). L'évaluation par compétences permet de minorer l'importance de l'orthographe (voir notre billet "Il a apris alire et a écrire" en 2014) : avec le socle de compétences, les professeurs de français ont d'ailleurs été en partie dépossédés de l'évaluation des compétences d'expression et de rédaction en français, que tout professeur peut désormais évaluer à leur place.
On en est aujourd'hui à entendre des inspecteurs relativiser une "orthographe défaillante" au bac... de français, avec les mêmes arguments que le collectif. Comment s'en étonner puisqu'on retrouve ces mêmes inspecteurs dans l'AFEF ?
D'une manière générale - et tout ce long fil ouvert en 2012, avec une lettre de Poilu montrant que ce n'était pas mieux avant (malgré les données objectives de la DEPP depuis 1987), en témoigne -, une formidable culpabilisation des enseignants à enseigner l'orthographe, magistralement développée dans cette tribune. Et dans le même temps, un déni - pétri de contradictions - de la dégradation des compétences des élèves.
Bon exemple de culpabilisation, avec une glissement malheureux de la langue "sans vertus" à son orthographe qui le serait tout autant (toujours en toute mesure scientifique). Les vertus de l'othographe sont pourtant évidentes, comme nous l'avons rappelé. Nous, enseignants, pouvons le mesurer à chaque instant dans les difficultés de nos élèves pour s'exprimer ou rédiger.C’est aujourd’hui un outil de sélection inadapté, car on lui prête des vertus qu’elle n’a pas.
Au reste, il ne vient pas à l'esprit de ces linguistes que l'enseignement de l'orthographe puisse relever de la mission d'émancipation première qui est celle de l'école.
"ouvrir les yeus" avec un s. Mais dans la même tribune "aux" ou "mieux" avec un x : allez comprendre ! Pour le reste, on a vu que ces linguistes sont moins lucides que pourvus d’œillères.Plutôt que se lamenter sur la baisse du niveau, le moment est venu d’ouvrir les yeus et d’agir enfin !
Aveu, en tout cas, que leur "action" a sans doute précisément à voir avec "la baisse de niveau", dont on ne sait - dans cette phrase équivoque - si elle est avérée ou pas.
Cette tribune s'inscrit en effet dans une tradition de linguistes-prescripteurs-militants, dont on se souvient avec la tribune retentissante à la Une du même quotidien de référence en 1989, le fameux "Manifeste des dix" (linguistes : Nina Catach, Bernard Cerquiglini, Jean-Claude Chevalier, Pierre Encrevé, Maurice Gross, Claude Hagège, Robert Martin, Michel Masson, Jean-Claude Milner et Bernard Quémada) pour "moderniser lʼécriture du français".
Cette date correspond à la création des IUFM mais également à la dégradation des compétences observées en primaire depuis 1987 (ce qui ne constitue qu'une corrélation !).
Très rhétorique, l'inversion des charges : renoncer à enseigner l'orthographe actuelle parce que trop difficile serait une preuve d'exigence.En l’espèce, la paresse et le moindre effort seraient de ne rien changer ; l’exigence et la rigueur consistent à appliquer la réforme de 1990 et à la poursuivre, à l’instar des siècles passés...
Amusant également que la tribune se revendique ici d'une longue tradition de réforme... tout en rejetant la tradition de la langue elle-même.
Curieux de supposer que les usages actuels de l'orthographe (écrire "goût" avec le cironflexe) ne pourraient pas donner de plaisir. Mais des formes créées ex nihilo, elles, en donneraient.Comme on l'a vu plus haut, les linguistes atterrés ne font pas partie des enseignants, loin de là, mais on voit bien dans cette conclusion que c'est aux enseignants qu'ils s'adressent. En réalité, en insultant le travail des enseignants et en les culpabilisant, ils ne redonnent aucunement le plaisir d'enseigner et de transmettre....pour que chacune et chacun retrouve le plaisir d’apprendre et d’enseigner, de lire et d’écrire en français.
Comprendre : imposons-les.Offrons-nous plus d’ognons et de nénufars, moins de poux et de cailloux !
Le choix de ces exemples parfaitement anecdotiques, bien éloignés des difficultés de nos élèves (dont certains confondent encore au collège ou au lycée les verbes être et avoir), montre le degré de déconnexion de nos linguistes avec le monde qu'ils entendent régenter.
Ces exemples anecdotiques sont de plus trompeurs, le collectif souhaitant, sans le dire, "aller plus loin" en modifiant l'ensemble du système de la langue. Sur le site des "linguistes atterrés" , la tribune est accompagnée de liens vers les sites de deux associations.
Si la seconde promeut l'application des rectifications de 1990, la première milite activement pour modifier radicalement l'écriture du français (nous appliquons ses préconisations) :
Pour l'EROFA, la langue est vivante et le "sistème" de sa "grafie" doit donc évoluer sans qu'on comprenne bien le rapport : ces deux mots dans leur graphie actuelle, "système" et "graphie", ne correspondraient pas à des usages vivants ? Il s'agit en vérité pour l'Erofa de mettre à mort ces usages, le seul système vivant étant celui qu'elle propose (14.739 mots à modifier, rien moins) et que personne n'utilise.L’association EROFA (Études pour une Rationalisation de l’Ortografe Française d’Aujourd’hui) qui travaille depuis de nombreuses anées sur l’élaboration d’une ortografe rationèle. Elle donne accès librement à leur résultats sous la forme du DOR (Dictionaire d’Ortografe Rationèle).
Les signataires promeuvent déjà des "grafies érofiènes" dans leur tribune, comme x réécrit s (mais que les linguistes-prescripteurs-progressistes n'appliquent pas à leurs propres écrits). Les autres modifications de l'Erofa vont beaucoup plus loin : "éfacement des lètres grèques", simplication des "consones" doubles.
Nous voilà prévenus !
Sur un sujet voisin, relire notre billet : "Demin dè l'obe" (2012)
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- Loys
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Sur le site, le titre est plus édulcoré : www.radiofrance.fr/franceculture/podcast...e-aux-eleves-1260540
Mardi 17 octobre 2023
Participe passé et autres choux, genoux, cailloux : autant de règles qui viennent, selon certains avis, encombrer les heures de cours avec des résultats discutables. Faut-il simplifier l'enseignement de l'orthographe pour la rendre plus accessible ?
Avec
Anne Abeillé Linguiste, professeure à l'université de Paris
Simplifier des règles orthographiques
"Dans l'orthographe française, il y a la partie lexicale, donc transcrire les sons. Il y a des règles, des correspondances entre lettres et sons. On apprend par exemple qu' 'ami' est un mot transparent, mais 'oiseau' beaucoup moins parce qu'il faut apprendre que 'oi' fait 'oie' et 'eau' fait 'eau'. Ces règles, l'enfant les apprend, mais dès qu'il y a des exceptions, il y a un cout", avance Anne Abeillé.
La linguiste rappelle qu'au fil de l'histoire, les orthographes ont évolué comme les règles grammaticales. Selon elle, certaines règles posent un problème, car elles comprennent trop d'exceptions. Elle prend l'exemple du participe passé avec le verbe avoir, qui s'accorde avec l'objet : "au départ, c'est un italianisme au XVIe siècle. Même les Italiens l'ont plus ou moins abandonné, car c'est trop compliqué. C'est devenu pour les enseignants quelque chose de difficile à transmettre et les élèves ne le maitrisent pas quand ils arrivent en sixième. C'est une perte de temps pour les professeurs qu'ils pourraient consacrer à la distinction du participe passif et infinitif."
Des règles pas toujours cohérentes ?
Anne Abeillé cite quelques règles orthographiques qui ne sont pas conformes à leur étymologie : "la réforme de 1990 a rectifié certaines choses. Par exemple, Nénuphar avec P-H est une erreur, ce mot ne vient pas du grec, mais du persan, donc étymologiquement Nénuphar porte un F."
Elle appelle alors à une réforme de plus grande ampleur qui devrait être confiée à un collège francophone, regroupant toutes les communautés francophones, telles que l'association du Québec ou de la Belgique.
www.dailymotion.com/video/x8ow0vo
Anne écrit: Dès qu'il y a une exception, il y a un coût.
Mme Abeillé fait référence à l'AFEF qui ne représente absolument pas les enseignants, comme nous l'avons dit plus haut. Les propositions, au reste, viennent bien des linguistes, mais ce besoin de légitimité est instructif.Anne écrit: Dans la tribune que vous avez citée, nous relayons des propositions d'enseignants.
Elle précise que les 80h pour l'enseignement de l'accord du participe passé avec le COD seraient prises en primaire.
Donc prononcer aujourd'hui "chevaux" comme en 1878 serait la preuve d'une langue vivante mais l'écrire "chevaux" comme en 1878 serait la preuve d'une orthographe morte...On a une langue vivante et une orthographe morte.
"on les a réintroduites" : Anne Abeillé oublie de ne pas suivre la règle "illogique" de l'accord du participe passé !Ces lettres grecques, on les a réintroduites, elles étaient pas là en moyen français.
L'affirmation est très péremptoire. L'ancien français ne connaissait pas d'orthographe au sens moderne mais pouvait garder la mémoire du grec ancien. On peut relire le prologue des Lais de Marie de France au XIIe siècle pour s'en convaincre : "Li philesophe le saveient". On trouve dans le même prologue des graphies héritées du latin ("escïence" ou "eloquence"). On trouve également en ancien français des graphies dont notre circonflexe garde la jolie mémoire
Bref se réclamer du Moyen Âge pour "mettre à jour" notre orthographe était déjà hasardeux, mais de surcroît assez peu pertinent...
Mme Abeillé donne ensuite des exemples d'étymologie erronée (nénufar, poids) pour invalider tout dimension étymologique de l'orthographe, ce qui ne peut que laisser pantois.
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